T 0176/84 (Taille-crayon) of 22.11.1985

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1985:T017684.19851122
Date de la décision : 22 Novembre 1985
Numéro de l'affaire : T 0176/84
Numéro de la demande : 80107426.1
Classe de la CIB : B43L 23/08
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Möbius
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.2.01
Sommaire : Lorsqu'on examine l'activité inventive, il convient de consulter, le cas échéant, non seulement l'état de la technique dans le domaine sur lequel porte la demande, mais également l'état de la technique dans des domaines voisins et/ou dans le domaine technique général plus large les englobant, autrement dit l'état de la technique dans un domaine où se posent des problèmes identiques ou analogues à ceux rencontrés dans le domaine particulier sur lequel porte dans ce cas le demande et qui devrait normalement être connu d'un homme du métier exerçant ses activités dans ce domaine particulier.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive
Etat de la technique pertinent
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0078/87
T 0158/87
T 0373/87
T 0440/88
T 0578/88
T 0579/88
T 0645/88
T 0316/89
T 0706/89
T 0225/90
T 0277/90
T 0358/90
T 0424/90
T 0438/90
T 0684/90
T 0705/90
T 0847/90
T 0039/91
T 0047/91
T 0491/91
T 0524/91
T 0712/91
T 0767/91
T 0469/92
T 0549/92
T 0675/92
T 0726/92
T 0732/92
T 1037/92
T 0005/93
T 0110/93
T 0121/93
T 0722/93
T 0897/93
T 0023/94
T 0069/94
T 0250/94
T 0514/94
T 0544/94
T 0605/94
T 0635/94
T 1008/95
T 0339/96
T 0986/96
T 0318/97
T 0707/97
T 0884/97
T 0900/97
T 0026/98
T 0150/98
T 0589/98
T 0744/98
T 0860/98
T 1088/98
T 0127/99
T 0965/99
T 0145/00
T 0445/00
T 0467/00
T 0797/00
T 0460/03
T 0520/03
T 0329/04
T 0394/04
T 0574/04
T 0009/05
T 0170/06
T 0742/07
T 1944/07
T 0167/08
T 0516/08
T 0828/08
T 1479/08
T 1814/08
T 2356/09
T 0146/10
T 1117/10
T 2250/10
T 1134/11
T 1561/11
T 1838/11
T 1910/11
T 1068/12
T 1225/12
T 1921/12
T 0841/13
T 1484/14
T 0904/15
T 0764/16
T 1076/16
T 0361/17
T 1731/20

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 80 107 426.1, déposée le 27 novembre 1980 et publiée sous le n° 0 031 470, pour laquelle est revendiquée la priorité d'une demande antérieure déposée le 29 novembre 1979, a été rejetée le 14 mars 1984 par décision de la Division d'examen.

Cette décision a été rendue sur la base des revendications déposées le 4 octobre 1983.

II. La Division d'examen a fait valoir dans sa décision que l'objet de la revendication 1 n'impliquait pas d'activité inventive, et a cité à l'appui de cette affirmation les demandes de brevet allemand publiées sans examen sous les n°s 2 819 134 et 1 960 978.

III. Le 10 mai 1984, la demanderesse a formé un recours contre cette décision et acquitté la taxe correspondante, en demandant l'annulation de la décision attaquée ; elle a motivé son recours dans un mémoire déposé le 13 juillet 1984.

IV. Lors de la procédure orale du 18 décembre 1984, la demanderesse a conclu à la délivrance du brevet sur la base de la revendication 1 dans le texte produit ce même jour, dont la copie au net a été déposée le 21 décembre 1984, des revendications 2 à 13 déposées le 4 octobre 1983, des pages 1, 2, 2bis et 2ter de la description produites lors de cette même procédure orale, dont la copie au net a également été déposée le 21 décembre 1984, des pages 3 à 8 de la description initiale, ainsi que des dessins initiaux, planches 1 à 4.

Invoquant l'article 112 de la CBE, elle a demandé en outre à titre subsidiaire de soumettre à la Grande Chambre de recours la question de droit suivante :

"Pour l'appréciation de l'activité inventive, est-il permis, compte tenu des articles 54 et 56, des Directives relatives à l'examen, partie C-IV, points 9.6 et 9.7, ainsi que des décisions T 11/81 et T 09/82, d'exiger ou d'attendre de l'homme du métier normalement qualifié qu'il s'intéresse également, lors de la recherche des caractéristiques faisant obstacle à la brevetabilité de son invention, à des domaines de l'état de la technique éloignés du domaine de ladite invention ?"

Le texte actuel de la revendication 1 est le suivant :

"1. Taille-crayon actionné à la main, avec boîtier recueillant les déchets de taillage, fermé pour empêcher la sortie desdits déchets, dont l'ouverture pour l'introduction du crayon à tailler, lorsque le taille-crayon n'est pas utilisé, est obturable par un coulisseau pour empêcher toute sortie des déchets de taillage, le boîtier consistant en un élément support (2, 2') pour l'élément de taillage (3) et le coulisseau (1, 1'), en un élément supérieur (5) enfoncé sur l'élément support et fixé à celui-ci, ainsi qu'en un élément collecteur de copeaux (6), dans lequel l'élément support peut être encastré par coulissement, caractérisé en ce que le coulisseau (1, 1') présente une surface de butée (15, 15', 15") pour la pointe du crayon à introduire, qui a une forme telle ou présente avec la direction de glissement (B, C, B', C') du coulisseau un angle tel que la pression (a) de la pointe du crayon provoque un déplacement du coulisseau l'amenant en position d'ouverture, des ressorts de rappel (16, 16') étant prévus pour la mise automatique du coulisseau en position d'obturation de l'intérieur du boîtier, afin d'empêcher la sortie des déchets de taillage, et en ce que la surface de butée dirige la pointe du crayon vers l'orifice d'entrée (10, 11)".

La demanderesse estime que les documents cités par la Division d'examen ne rendent pas évident l'objet de la revendication 1. La demande allemande n° 1 960 978 porte sur un domaine qui n'a rien de commun avec le domaine du taille-crayon. De plus, la cons truction d'une protection pour fente de tirelire divulguée dans ce document ne permet pas de résoudre le problème sur lequel porte la demande.

La Chambre en ayant délibéré, le président a fait savoir que la décision serait rendue par écrit.

V. Ayant reçu une notification l'informant que la composition de la Chambre avait été modifiée après la procédure orale, la deman deresse a déclaré dans sa communication du 10 octobre 1985, reçue le 12 octobre 1985, qu'elle ne demanderait une nouvelle procédure orale en application de l'article 7, paragraphe 1 du règlement de procédure des chambres de recours que pour le cas où la Chambre s'opposerait à la délivrance du brevet sur la base des pièces visées par la requête du 18 décembre 1984 et de la nouvelle page 2bis bis proposée maintenant en remplacement des pages 2bis et 2ter des pièces en question.

VI. Pour la teneur des revendications et de la description initiales, il y a lieu de se référer au texte de la demande publié sous le n° 0 031 470.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108, ainsi qu'à la règle 64 de la CBE ; il est donc recevable.

2. Dans le texte actuel de la revendication 1 sont regroupées les caractéristiques mentionnées dans les revendications 1 et 8 reçues par l'Office à la date du dépôt de la demande. L'objet de cette revendication ne s'étend donc pas au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée (article 123(2) de la CBE).

Le préambule de ladite revendication part d'un taille-crayon du type divulgué dans la demande allemande n° 1 003 093, ce qui n'appelle aucune objection. Les recherches n'ont pas permis de découvrir de taille-crayon se rapprochant davantage de l'objet de la revendication 1.

La répartition des caractéristiques entre préambule d'une part et partie caractérisante de la revendication d'autre part n'appelle elle non plus aucune objection. Les caractéristiques que présentait déja le taille-crayon selon la demande allemande susmentionnée sont toutes mentionnées dans le préambule.

La revendication 1 satisfait par conséquent sur ce point aux exigences de forme posées par la Convention.

3. Il ressort de ce qui précède que l'objet de la revendication 1 diffère du taille-crayon selon la demande allemande n° 1 003 093 par les caractéristiques indiquées dans la partie caractérisante de la revendication. Il diffère déjà des taille-crayons divulgués dans les autres documents cités par la construction, spécifiée dans le préambule, de son boîtier comportant un élément support, un élément supérieur, ainsi qu'un élément de collecte des copeaux.

Le taille-crayon selon la revendication 1 est donc nouveau par rapport à l'état de la technique entrant en ligne de compte.

4. Dans le cas du taille-crayon selon la demande allemande n° 1 003 093, le coulisseau disposé dans l'élément support pour pouvoir obturer l'orifice d'entrée, doit être poussé à la main pour être mis aussi bien en position d'ouverture que de fermeture.

Dans la description, la demanderesse juge cette manipulation fastidieuse. De plus, le coulisseau maintenu dans la position concernée grâce à un élément faisant ressort risque de ne pas être remis en position de fermeture après l'utilisation du taille-crayon, ce qui permettrait à des déchets de taillage de s'échapper du réceptacle.

5. Quant à la question de savoir s'il était évident de remédier à ces inconvénients en imaginant la construction du taille-crayon indiquée dans la revendication 1, il y a lieu d'apporter les précisions suivantes :

5.1. Les spécialistes se sont déjà intéressés à la résolution d'une partie du problème sur lequel porte la demande, à savoir comment éviter automatiquement que des déchets de taillage ne s'échappent par l'orifice d'entrée après utilisation du taille-crayon.

5.1.1. C'est ainsi que, selon l'enseignement de la demande allemande n° 2 513 051, le boîtier supportant l'élément de taillage est muni d'un couvercle avec ressort, ce ressort servant à maintenir le couvercle en position d'obturation de l'orifice d'entrée lorsque le taille-crayon n'est pas utilisé. Avec ce taille-crayon il faut donc, avant d'introduire le crayon, pousser le couvercle à la main, en s'opposant à l'action du ressort, pour l'amener dans la position où il libère l'orifice, et il faut maintenir le couvercle dans cette position au moins tant que le crayon reste dans le taille-crayon.

5.1.2. La demande allemande n° 2 819 134 prévoit elle aussi un taille-crayon équipé d'un ressort de charge agissant dans le sens de la fermeture et donc provoquant la fermeture automatique de l'orifice d'entrée. L'élément de fermeture dudit taille-crayon consiste, comme dans le taille-crayon constituant l'objet de la revendication 1, en un coulisseau se déplaçant longitudinalement. Il faut, toutefois, comme pour le couvercle du taille-crayon selon la demande allemande n° 2 513 051, pousser ce dernier à la main avant d'introduire le crayon dans l'orifice mis en position d'ouverture. A cet effet, ce coulisseau est muni d'une tirette faisant saillie à l'extérieur.

5.2. L'inventeur du taille-crayon selon la revendication 1 a pensé lui aussi à empêcher que l'orifice d'entrée ne reste ouvert après que le taille-crayon a servi, en prévoyant un ressort de rappel amenant le coulisseau en position de fermeture. Mais il a de plus eu l'idée d'utiliser le crayon à tailler pour actionner le coulisseau. Dans ce cas le coulisseau n'est amené en position d'ouverture que lorsqu'on introduit le crayon.

Les demandes qui viennent d'être citées, qu'elles soient considérées individuellement, combinées entre elles, ou mises en relation avec le brevet US 2 169 908 ayant pour objet un taille-crayon, ne pouvaient suggérer le recours aux différents moyens indiqués dans la revendication 1 pour la réalisation de l'idée d'ensemble. Il ressort en effet de l'enseignement du document américain que les déchets sont retenus grâce à la mise en place d'un couvercle muni d'un orifice d'entrée pouvant pivoter de 180°.

5.3. Peu importe de savoir si le taille-crayon selon la revendication 1 constitue une variante de la réalisation, connue de l'homme du métier, de la protection pour fente de tirelire selon la demande allemande n° 1 960 978, comme l'estime la Division d'examen, mais comme le conteste la demanderesse. Si la Division d'examen est parvenue à cette conclusion, c'est parce qu'elle considère que l'on peut attendre d'un homme du métier qui chercherait à améliorer le taille-crayon selon la demande allemande n° 1 003 093 qu'il s'intéresse également le cas échéant au domaine des protections pour fente de tirelire. Selon elle, ces protections appartiennent à un domaine voisin de la technique, les taille-crayons et les tirelires pouvant être regroupés dans le "domaine plus large de la fermeture de réceptacles". Or la Chambre ne peut suivre la Division d'examen sur ce terrain.

5.3.1. Il est certes exact que l'on est parfaitement en droit d'exiger d'un homme du métier qu'en cas de besoin, c'est-à-dire lorsqu'il ne trouve pas d'idées utilisables dans le domaine en cause pour la résolution du problème posé, il recherche également des modèles appropriés dans des domaines voisins. La question de la détermination des domaines devant être considérés comme voisins est une question de fait : pour la trancher, la Chambre juge important de savoir si les domaines sont proches au point que l'homme du métier qui recherche une solution au problème considéré tient également compte des réalisations obtenues dans le domaine voisin. De plus, on est parfaitement en droit d'attendre d'un homme du métier qu'il consulte l'état de la technique dans le domaine technique général où se posent dans une large mesure des problèmes identiques ou semblables à ceux rencontrés dans le domaine particulier concerné par la demande, et qui devrait normalement être familier à l'homme du métier.

5.3.2. Toutefois, même si l'on estime en l'occurrence avec la Division d'examen que l'homme du métier qui cherche des idées pour résoudre le problème sur lequel porte la demande est amené, lorsqu'il généralise les termes dudit problème, à s'intéresser au domaine plus large (c'est-à-dire au domaine général) de la fermeture des réceptacles, ceci signifie seulement qu'il est amené à s'intéresser au domaine général qui pour la Division d'examen englobe le domaine particulier sur lequel porte sa demande, mais non pour autant au domaine particulier des protections pour fente de tirelire. Il n'y avait aucune raison, du fait des différences technologiques entre les deux domaines - conservation de pièces de monnaie dans un réceptacle pour l'un, taillage de crayons avec collecte des déchets de taillage pour l'autre - de rechercher des modèles de solutions dans le domaine particulier des protections pour fente de tirelire qui pour la Division d'examen relève également de ce domaine plus large.

5.3.3. Par ailleurs, à la lecture de la classification internationale des brevets, l'homme du métier n'aurait pas non plus été amené à s'intéresser à ce domaine particulier des protections pour fente de tirelire, car ni le groupe principal 23/00, ni les sous-groupes correspondants à l'intérieur de la sous-classe B 43 L ne comportent de renvoi à la sous-classe A 45 C, et encore moins au sous-groupe des tirelires.

5.3.4. Le domaine de ces protections pour fente de tirelire ne peut par conséquent être considéré comme l'un des domaines voisins dans lesquels l'homme du métier qui s'efforce de mettre au point des taille-crayons cherche au besoin également des idées pour trouver une solution appropriée à son problème.

5.4. Par rapport à l'état de la technique dans le domaine des taille-crayons, qui est donc le seul pertinent en l'occurrence, l'objet de la revendication 1 implique, comme on l'a exposé, une activité inventive au sens de l'article 56 de la CBE.

6. La revendication 1 est donc admissible (article 52 de la CBE).

7. Les revendications 2 à 13 qui s'y rattachent portent sur des modes de réalisation particuliers du taille-crayon selon la revendication 1. Elles peuvent donc elles aussi être admises.

8. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'examiner la conclusion présentée à titre subsidiaire par la demanderesse.

9. La description a été modifiée pour tenir compte des modifications apportées au texte des revendications, et elle a été complétée par un paragraphe dans lequel il est également question d'un autre taille-crayon cité lors de la recherche. Elle n'appelle donc aucune objection.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée devant la première instance pour délivrance d'un brevet européen sur la base des pièces suivantes ...

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