European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1984:T018182.19840228 | ||||||||
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Date de la décision : | 28 Fevrier 1984 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0181/82 | ||||||||
Numéro de la demande : | 80810093.7 | ||||||||
Classe de la CIB : | - | ||||||||
Langue de la procédure : | DE | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | CIBA GEIGY | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.3.01 | ||||||||
Sommaire : | 1. Un effet à considérer comme inattendu peut recéler une activité inventive; si l'on propose, comme preuve à l'appui, des essais comparatifs, ceux-ci doivent se rapporter - dans un domaine d'utilisation comparable - à des composés de comparaison ayant une structure la plus proche possible de celle de l'objet de l'invention. 2. Peuvent être acceptés, comme composés de comparaison, non pas des produits fictifs, mais seulement ceux qu'il y a lieu de considérer comme compris dans l'état de la technique. Parmi ceux-ci, il faut également compter des produits de procédé qui découlent nécessairement d'une description antérieure de produits de départ et du mode opératoire correspondant, même lorsque l'un des deux participants à la réaction apparaît comme individu chimique (en l'occurrence le bromure d'alkyle en C1) faisant partie d'un ensemble de composés définis sous la forme d'un domaine (bromures d'alkyle en C1 - C4) (cf. décision T 12/81 "Diastéréoisomères", Journal officiel de l'OEB No. 8/1982,p.296). |
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Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive Essais comparatifs, conditions les régissant Non-saisine de la Grande Chambre de recours |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 80 810 093.7 déposée le 21 mars 1980 et publiée le 15 octobre 1980 sous le numéro 0 017 617, pour laquelle est revendiquée la priorité de la demande antérieure suisse du 27 mars 1979, a été rejetée par décision de la Division d'examen de l'Office européen des brevets du 8 juillet 1982 sur la base des neuf revendications déposées le 23 février 1982. La revendication 1 s'énonce comme suit:
"1. Composés répondant à la formule
(FORMULA)
et leurs sels d'addition avec un acide, formule dans laquelle n est un entier de 1 à 4, R1 est de l'hydrogène ou du CH3, R2 et R3 sont, indépendamment l'un de l'autre, de l'hydrogène, un groupe alkyle en C1-C18, un groupe aryle en C6-C10 ou aralkyle en C7-C9 non substitué ou substitué par du chlore ou par un groupe alkyle en C1-C4 ou forment, conjointement avec l'atome de carbone auquel ils sont liés, un reste cycloalcane ou alkylcycloalcane ayant 5 à 20 atomes de carbone ou un reste polyalkylpipéridine, R4, lorsque n=1, est un groupe alcényle en C3-C8, un groupe alcynyle en C3-C5, un groupe aralkyle en C7-C9 non substitué ou substitué par un groupe alkyle en C1-C4 ou un reste
-CH2-CH(R5)-OR6,
dans lequel R5 représente H, CH3, C2H5 ou un groupe phényle et R6 est de l'hydrogène ou le reste d'un acide monocarboxylique aliphatique, cycloaliphatique ou aromatique ayant jusqu'à 18 atomes de carbone, et, lorsque n=2, représente un groupe 1,4-butène-2-ylène, un groupe m- ou p-xylylène ou un reste de formule
-CH2-CH(R5)-O-R7-O-CH(R5)-CH2-
dans laquelle R5 a la signification indiquée plus haut et R7 est le reste divalent d'un acide dicarboxylique aliphatique, cycloaliphatique ou aromatique ayant 3 à 14 atomes de carbone, et, lorsque n=3, représente un reste de formule
(FORMULA)
dans laquelle R5 a la signification indiquée plus haut et R8 représente le reste trivalent d'un acide tricarboxylique aliphatique ou aromatique ayant 4 à 18 atomes de carbone, et, lorsque n=4, représente un reste de formule
(FORMULA)
dans laquelle R5 a la signification indiquée plus haut et R9 représente le reste tétravalent d'un acide tétracarboxylique aliphatique ou aromatique ayant 6 à 20 atomes de carbone."
II. La demande a été rejetée pour défaut d'activité inventive. L'état de la technique le plus comparable est constitué par le document DE-A-2 606 026 (document A), où sont déjà décrits des stabilisants aux UV, très semblables du point de vue de la structure à l'objet de la demande. Si la demanderesse a montré, à l'aide d'un essai comparatif, la résistance à l'extraction plus élevée d'un composé selon la demande, elle a cependant négligé le fait que l'essai comparatif doit être effectué avec le composé N-propylé ou N-butylé le plus comparable du point de vue structural, divulgué dans le document A. Ces composés ne sont certes pas décrits au moyen d'un exemple de préparation, mais la revendication de procédé 9 donne, en liaison avec la liste figurant aux pages 8, 9 et 10 de la description, un enseignement concret, pour le moins en ce qui concerne la préparation des composés butylés.
La question de savoir avec quel état de la technique doivent être effectués des essais comparatifs ne peut être considérée indépendamment du problème technique dont la solution doit être examinée du point de vue de l'activité inventive. En l'espèce, le problème consiste à améliorer la résistance à l'extraction de composés connus d'après le document A. Cependant, le fait que la lipophilie d'une molécule est accrue par l'introduction de groupes hydrocarbonés entre dans les connaissances fondamentales du chimiste. Il s'ensuit que l'extractibilité par l'eau à partir d'un environnement lipophile (polypropylène) diminue automatiquement. L'essai comparatif présenté par la demanderesse ne fait donc qu'apporter une preuve supplémentaire d'un fait connu de l'homme du métier.
D'ailleurs, rien ne prouve que les propriétés établies pour le composé allylé devraient également s'appliquer au composé benzylé ou hydroxyéthylé. Ce dernier reste est en général considéré comme hydrophile et devrait par conséquent plutôt améliorer l'extractibilité par l'eau. En ce qui concerne les composés revendiqués pour n>1, il n'est pas donné de réponse à la question de savoir pourquoi l'abaissement de l'extractibilité par l'eau par extension de la dimension moléculaire ne doit pas être évident, d'autant que l'état de la technique correspondant donne déjà des indications pertinentes [cf. par exemple le document DE-A-2 500 314 (document B)].
Enfin, la désignation R4=alcényle en C3-C8 et alcynyle en C3-C5 dans la revendication 1 englobe des composés dont l'existence est douteuse et qui ne sont donc pas suffisamment exposés (article 83 CBE). La question de savoir si cette circonstance doit entraîner un éclaircissement correspondant de l'énoncé de la revendication (article 84 CBE) peut être ici laissée en suspens.
III. C'est contre cette décision qu'est dirigé le recours formé le 25 août 1982 simultanément au paiement de la taxe correspondante. La teneur du mémoire exposant les motifs du recours, déposé le 19 novembre 1982, est la suivante: il n'est pas admissible d'imposer au demandeur, comme substance de comparaison, un composé qui n'est pas spécifiquement décrit dans l'état de la technique.
Au demeurant, le document A ne montre pas comment des pipéridine-spirooxazolidones peuvent être modifiées tout en ne perdant pas leur action stabilisante à la lumière et que se manifeste de surcroît un effet utile (résistance à l'extraction), auquel il n'est absolument pas fait allusion. En tout état de cause, on ne trouve dans le document A aucune motivation pour la préparation des composés revendiqués.
L'essai a montré qu'on ne peut déduire du composé NH connu aucune indication évidente concernant le choix du composé N-allylé selon la demande. Si déjà, en ce qui concerne le composé N-allylé, il n'est pas possible de prévoir l'effet de substitution sur l'atome d'azote, il en va de même, en toute logique, pour un composé N-aralkylé ou N-hydroxyalkylé ou un autre composé désigné par R4.
Pour ce qui est des doutes émis quant à l'existence des composés alcénylés ou alcynylés et à la possibilité de les préparer, il faut considérer que la demande s'adresse à l'homme du métier; or, il est clair pour celui-ci qu'il ne peut s'agir là que de restes dans lesquels l'atome de carbone lié à l'azote est primaire.
IV. La Chambre a fait observer qu'il y aurait éventuellement possibilité d'annuler la décision contestée, à condition qu'il soit montré, au moyen d'un essai comparatif, que l'amélioration visée est inattendue par rapport à l'état de la technique qui est le plus proche objectivement, c'est-à-dire ayant la structure la plus proche. Le composé choisi jusqu'ici par la requérante ne convient pas pour cela; en effet, il faut aussi considérer comme compris dans l'état de la technique les composés N-méthylés en position 3, plus proches du point de vue structural de l'objet de la demande, qui résultent de la réaction des produits de départ selon les revendications 3 à 7 du document A avec du bromure de méthyle (=bromure d'alkyle en C1) selon la revendication 9 et font partie de l'état de la technique conformément à la décision "Diastéréoisomères" (Journal officiel de l'OEB n° 8/1982, p. 296).
Par ailleurs, on ne peut revendiquer des composés dont on sait pertinemment qu'ils ne conviennent pas pour la résolution du problème (R4-alcényle en C3-C8 et alcynyle en C3-C5).
V. La requérante ne partage pas le point de vue de la Chambre et a demandé de recourir à la procédure orale. Celle-ci a eu lieu le 14 février 1984. La requérante y a mis l'accent sur le fait que les termes d'alkyle en C1 et d'alkyle en C4 dans la revendication 9 du document A étaient un moyen de définir le domaine et ne servaient pas à l'individualisation des représentants spécifiques de ces limites du domaine. Une autre façon de voir conduirait obligatoirement à ce que tous les membres intermédiaires du domaine soient aussi considérés comme individualisés. Mais cela ne peut pas être le cas. Le propre d'un domaine est qu'il permet des inventions de sélection, et ce, sur l'ensemble du domaine. Le bromure d'alkyle en C1 n'est donc pas décrit de manière à le distinguer particulièrement, mais ne représente que le membre initial du domaine indiqué, qui comporte encore sept autres bromures d'alkyle. La définition selon la revendication 9 du document A constitue alors une liste de 8 produits de départ, dont aucun n'est particulièrement mis en relief.
La question de savoir si les membres de début et de fin d'un domaine sont individualisés ne peut dépendre de la manière dont il est défini, d'autant plus qu'il est connu qu'il existe plusieurs possibilités de définition pour une teneur en information technique identique.
Les autres produits de départ, pour l'obtention des produits finals alkylés en N8 selon le procédé de la revendication 9, sont énumérés dans les revendications 3 à 7 et représentent encore une liste de 30 produits possibles. Chaque produit final apparaît ainsi être le résultat de deux paramètres variables. Pour la préparation des produits finals, il faut par conséquent deux classes différentes de produits de départ, dont l'une comprend au moins 30 et l'autre 8 produits possibles. Un produit qui s'obtient par réaction d'une paire spéciale provenant de deux classes de produits de départ représente, comme l'admet la décision rendue par la Chambre (T 12/81, Journal officiel de l'OEB n° 8/1982, p. 296), une sélection au sens du droit des brevets et est par conséquent nouveau. On ne peut exiger une comparaison avec un nouveau composé, qui lui-même représente à son tour une sélection et donc une invention potentiellement brevetable.
On ne peut du reste contester que, conformément au document A, sont sélectionnés de préférence des composés dans lesquels R5 est de l'hydrogène. Si, par conséquent, comme cela a été suggéré dans une autre décision de la Chambre (T 24/81, Journal officiel de l'OEB n° 4/1983, p. 133), on fait appel à toutes les formes de réalisation publiées dans l'unique document pertinent de l'état de la technique, seul apparaît évident à l'homme du métier, pour ce groupe structural, le choix d'un composé dans lequel R5 représente de l'hydrogène. On ne peut par contre dire que le document A, lors d'un examen objectif de toutes les formes de réalisation, rende évident le choix d'un composé dans lequel R5 est un groupe alkyle en C1 à C4.
Enfin, il a à ce propos été également fait allusion à la décision de la Chambre (T 01/80, Journal officiel de l'OEB n° 7/1981, p. 206). Conformément à cette décision, un document ne suggère nullement l'utilisation d'une classe spéciale de composés lorsque celle-ci n'est mentionnée qu'incidemment et n'est pas mise en relief par un exemple. Pour apprécier l'activité inventive, il faut alors prendre en compte ce que l'homme du métier déduit de l'état de la technique comme particulièrement approprié pour la résolution d'un problème déterminé. Pour l'amélioration recherchée des stabilisants à la lumière connus, ce spécialiste aurait en tous cas choisi un composé où R5 représente de l'hydrogène et non un groupe alkyle. La requérante avance en outre qu'il a été démontré qu'un dérivé conforme à la demande, dans lequel R5 est un allyle, constitue de façon inattendue un stabilisant à la lumière meilleur que le produit non substitué sur l'atome d'azote qui est mis au premier plan dans l'état de la technique.
La requérante demande l'annulation de la décision attaquée et la délivrance du brevet sur la base de la revendication 1 s'énonçant comme suit:
"Composés répondant à la formule
(FORMULA)
et leurs sels d'addition avec un acide, formule dans laquelle n est un entier de1 à 4, R1 est de l'hydrogène ou du CH3, R2 et R3 sont, indépendamment l'un de l'autre, de l'hydrogène, un groupe alkyle en C1-C18, un groupe aryle en C6-C10 ou aralkyle en C7-C9 non substitué ou substitué par du chlore ou par un groupe alkyle en C1-C4 ou forment, conjointement avec l'atome de carbone auquel ils sont liés, un reste cycloalcane ou alkylcycloalcane ayant 5 à 20 atomes de carbone ou un reste polyalkylpipéridine, R4, lorsque n=1, est un groupe allyle, un groupe méthallyle, un groupe aralkyle en C7-C9 non substitué ou substitué par un groupe alkyle en C1-C4 ou un reste
-CH2-CH(R5)-OR6,
dans laquelle R5 représente H, CH3, C2H5 ou un groupe phényle et R6 est de l'hydrogène ou le reste d'un acide monocarboxylique aliphatique, cycloaliphatique ou aromatique ayant jusqu'à 18 atomes de carbone, et, lorsque n=2, représente un groupe 1 ,4-butène-2-ylène, un groupe m- ou p-xylylène ou un reste de formule
-CH2-CH(R5)-O-R7-O-CH(R5)-CH2-,
dans lequel R5 a la signification indiquée plus haut et R7 est le reste divalent d'un acide dicarboxylique aliphatique, cycloaliphatique ou aromatique ayant 3 à 14 atomes de carbone, et, lorsque n=3, représente un reste de formule
(FORMULA)
dans laquelle R5 a la signification indiquée plus haut et R8 représente le reste trivalent d'un acide tricarboxylique aliphatique ou aromatique ayant 4 à 18 atomes de carbone, et, lorsque n=4, représente un reste de formule
(FORMULA)
dans laquelle R5 a la signification indiquée plus haut et R9 représente le reste tétravalent d'un acide tétracarboxylique aliphatique ou aromatique ayant 6 à 20 atomes de carbone."
La requérante n'estime pas nécessaire l'essai comparatif proposé par la Chambre (voir IV supra).
Elle demande à titre subsidiaire que la Grande Chambre de recours soit saisie des questions suivantes:
a) Du fait de la description antérieure d'un procédé pour la préparation d'un ensemble de composés qui est simplement désigné en ce qu'on fait réagir un ensemble de composés constituant des produits de départ avec un ensemble de composés constituant des réactifs, la nouveauté d'un représentant concret particulier de l'ensemble synthétisable est-elle détruite ou bien seulement celle de l'ensemble des composés qui en résulte, en tant que concept générique ou que domaine?
b) La simple description d'un domaine, qui doit certes nécessairement être défini par des points limites, constitue-t-elle un exposé (ne serait-ce que) d'un membre individuel de ce domaine?
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 et à la règle 64 CBE; il est donc recevable.
2. Il est incontestable que le document A cité dans la partie introductive de la description représente l'état de la technique le plus proche de l'objet de la demande. On y décrit déjà des stabilisants à la lumière pour polymères, ayant le squelette de base du 1-oxa-3,8-diazaspiro-[4,5]-décane (cf. revendications 1 et 11 à 14) et parmi lesquels sont préférés ceux qui sont tétraméthylés en position 7 et 9 et alkylés en position 2 par les restes plus précisément définis dans les revendications 3 à 7. En outre, y est également décrite la réaction de ces dérivés préférés avec un bromure d'alkyle en C1-C4 pour former les composés alkylés en 8 correspondants (cf. revendication 9 et le renvoie qu'elle comporte).
En ce qui concerne la nomenclature des composés spiro en question, il faut observer que lorsqu'on passa des composés spiro aux composés dispiro (composé de comparaison selon la demande) la numérotation du squelette de base hétérocyclique change et de ce fait aussi le numéro de l'atome d'azote - de 8 à 3 - qui est important ici. Néanmoins, pour des raisons de clarté, on désignera ci-après par composés spiro substitués en 8 les deux classes de composés dont l'atome d'azote du cycle pipéridine est substitué.
D'après les indications figurant dans la description de la présente demande, de tels composés ont une volatilité et une tendance à la migration trop élevées (cf. page 1). Le fait que ces inconvénients soient surmontés par les composés selon la demande n'est ni vraisemblable a priori, étant donné la grande similitude de structure entre les composés connus et ceux qui sont revendiqués en l'espèce, ni rendu vraisemblable. Afin qu'ils puissent être significatifs pour la définition du problème qui est à la base de l'invention, et par suite pour l'appréciation de l'activité inventive, les avantages prétendus doivent être appuyés par des preuves suffisantes lorsque la comparaison est faite avec un état de la technique très pertinent (cf. T 20/81 "Shell/aryloxybenzaldéhydes", Journal officiel de l'OEB n° 6/1982, p. 217).
3. D'après la description de l'essai comparatif déposée le 24 septembre 1981, l'amélioration obtenue selon la demande doit résider dans une résistance accrue à l'extraction à l'eau des stabilisants à la lumière (à 90°C). Le composé n° 31 du tableau 1 selon le document A a été comparé avec le dérivé 8-allylé correspondant, conforme à la demande, et un triplement de la durée d'extraction jusqu'à une teneur résiduelle de 50a été obtenu.
En effectuant cet essai, la demanderesse voulait tenir compte du fait que, dans le cas présent, l'état de la technique est si proche de l'objet de la demande qu'il y a lieu de montrer l'existence d'une activité inventive, et ce, d'une manière souvent choisie et probante en chimie, à savoir d'apporter la preuve de propriétés supérieures.
4. La requérante estime qu'un effet inattendu par rapport à un représentant préféré de l'état de la technique est suffisant. Point n'est besoin, pour établir la vraisemblance de l'activité inventive, d'apporter une preuve supplémentaire vis-à-vis d'un représentant cité seulement incidemment et qui, somme toute, ne devient actuel qu'a posteriori, une fois connu le contenu de la présente demande.
Or, il convient de faire observer tout d'abord que la notion même de comparaison suppose la connaissance de l'objet de la demande; on ne peut sinon ni effectuer la recherche de l'état de la technique pertinent, ni apprécier la nouveauté de l'invention et l'activité inventive qu'elle implique. La connaissance de l'invention est par conséquent nécessaire pour déterminer son éloignement de l'état de la technique. L'examen de l'activité inventive se limite à la question de l'évidence en considérant tout le champ de l'état de la technique, à partir du document constituant l'antériorité la plus proche (démarche prospective), et non pas celui de l'invention (démarche rétrospective).
Lorsque la requérante considère comme appropriés pour la comparaison uniquement les composés préférés d'un document antérieur, elle met l'accent sur le progrès technique par rapport aux composés connus considérés comme les plus efficaces. Selon la Convention sur le brevet européen, le progrès technique n'est pas une condition de brevetabilité. Un effet démontré au moyen d'un essai comparatif peut toutefois être considéré comme recelant une activité inventive; seuls conviennent pour cela des essais axés sur la proximité de structure par rapport à l'invention, car c'est uniquement de là que doit provenir l'effet inattendu.
5. Pour être pertinent, un tel essai comparatif doit satisfaire à des conditions déterminées, dont, tout d'abord, le choix d'un composé exposé conformément à la demande, d'une part, et d'une substance de comparaison tirée de l'état de la technique, d'autre part, ainsi qu'une concordance la plus grande possible de la paire comparée, du point de vue de la structure et de l'utilisation.
On peut considérer que le composé choisi conformément à la demande dans l'essai comparatif, le 3 - allyl-2,2,4,4 - tétraméthyl - 7 - oxa - 3,20-diaza - 21 - oxo - dispiro[5,1,11,2]hénéicosane, est exposé, du fait qu'il est apparemment identique au produit de réaction non décrit avec plus de précision dans l'exemple 1 (cf. son point de fusion, à comparer à celui du composé 20-allylé correspondant selon l'exemple 4). Comme composé de comparaison selon l'état de la technique, on a choisi le 2,2,4,4 - tétraméthyl - 7-oxa - 3,20 - diaza - 21 - oxo - dispiro[5,1,11,2] - henéicosane. S'il est vrai que ce composé est décrit dans le document A (cf. p. 5 du texte originaire, lignes 1 et 2), il ne représente pas l'état de la technique le plus proche sur le plan de la structure.
L'exigence d'une comparaison par rapport à l'état de la technique le plus proche est fondée sur le principe de la dépendance des propriétés des produits chimiques vis-à-vis de la structure, c'est-à-dire sur le fait que ces propriétés sont marquées par la structure des composés. Dans le cas où l'on s'attend à des propriétés semblables en raison de la similitude de structure de deux composés, la mise en évidence d'une amélioration singulière peut être considérée comme inattendue. Plus la différence de structure entre les composés comparés est grande, moins sont inattendues des différences d'effet. Afin de pouvoir conclure éventuellement à la vraisemblance d'une activité inventive, on doit par conséquent comparer des composés qui présentent un maximum de concordance du point de vue de la structure.
6. Cela n'est pas le cas pour l'essai comparatif proposé, car un composé 8-méthyl-spiro est structuralement plus proche d'un composé 8-allyl-spiro conforme à la demande qu'un dérivé spiro non substitué sur cette position (composé n° 31 du document A).
La Chambre a proposé comme base de comparaison un dérivé 8-méthylé quelconque des composés spiro mentionnés dans les revendications 3 à 7 du document A. La requérante n'en a pas tenu compte, parce qu'elle considère que ces substances n'avaient pas été divulguées antérieurement.
7. La Chambre a établi, dans sa décision T 12/81 "Diastéréoisomères" (Journal officiel de l'OEB n° 8/1982, p. 296), qu'une substance chimique mentionnée quoique de façon non explicite dans une publication antérieure (mais implicitement) par l'indication du produit de départ et du procédé décrit correspondant fait partie de l'état de la technique. Dans les revendications 3 à 7 selon le document A, par l'intermédiaire du renvoi à la revendication 2 qui désigne les variables R1 et R2 comme étant des groupes méthyles, R5 de l'hydrogène et n comme étant égal à zéro, on mentionne comme individus particuliers des composés spiro bien déterminés non substitués en position 8, qui doivent être alkylés sur cette position avec un bromure d'alkyle en C1-C4 conformément à la revendication 9 (cf. dans la revendication 9 le renvoi aux revendications 1 à 7). Cela étant, bromure d'alkyle en C1 est synonyme de bromure de méthyle. D'après le principe posé dans la décision "Diastéréoisomères", selon lequel un procédé décrit avec précision d'après les produits de départ et d'après le mode opératoire fait entrer le produit qui en est le résultat obligatoire dans le contenu de l'exposé de cet enseignement, les dérivés 8-méthylés des composés spiro selon les revendications 3 à 7 font partie de l'état de la technique.
Lorsque la requérante estime que la citation du domaine susmentionné constitue uniquement au moyen de la définir, elle méconnaît la teneur de l'exposé de l'enseignement selon la revendication 9, d'après lequel, au-delà du domaine de groupes, le bromure de méthyle, qui se trouve être expressément désigné, représente un agent d'alkylation pour les composés spiro mentionnés ci-dessus. Cette information incontestablement exploitable par l'homme du métier fait entrer les composés 8-méthyl-spiro susdits dans l'état de la technique, qu'ils aient ou non été préparés. De l'avis de la Chambre, un composé cité, à quelque fin que ce soit, constitue un état de la technique préalablement spécifié.
8. La requérante a en outre allégué que le domaine des "bromures d'alkyle en C1-C4" peut aussi être défini autrement, par exemple par "bromures d'alkyle ayant au maximum 4 atomes de carbone", "bromures d'alkyle ayant moins de 5 atomes de carbone" ou "bromures d'alkyle ayant plus de 0 et moins de 5 atomes de carbone". De tels domaines recéleraient, malgré une formulation différente, une information identique et seraient compris par l'homme du métier comme un exposé de l'ensemble des 8 bromures d'alkyle possibles, sans qu'ils soient individualisés.
Il est incontestable que toutes ces définitions englobent les 8 bromures d'alkyle que l'on peut imaginer; il faut rigoureusement séparer de ce contenu purement conceptuel des définitions leur teneur en information au sens d'un enseignement concret en vue d'une exploitation industrielle. Alors que la définition "en C1-C4" mentionne concrètement le bromure de méthyle en tant qu'individu particulier et les bromures de butyle en tant que famille (4 possibilités), la définition "au maximum en C4" n'individualise pas le bromure de méthyle, parce que ce composé n'est pas mentionné ou décrit avec plus de précision. Les deux autres définitions évitent judicieusement toute indication concrète sur le bromure de méthyle, ainsi que d'ailleurs sur la famille en C4. Lorsqu'on interprète l'enseignement tiré d'une antériorité, il faut s'arrêter sur la teneur effective de son exposé au sens d'une règle technique concrète finie. Un groupe de composés dans lequel le substituant est caractérisé par un domaine n'éclaire l'homme du métier que sur les individus particuliers du groupe qui sont désignés concrètement. Les termes bromure d'alkyle en C1-C4 choisis dans l'antériorité A dans la revendication de préparation 9 décrivent par conséquent, en relation avec les dérivés spiro prévus à cet effet selon les revendications 3 à 7, les dérivés 8-méthylés correspondants dans tous leurs détails.
9. Cette interprétation de l'exposé selon le document A réfute de même totalement l'autre objection de la requérante, selon laquelle l'énumération des composés spiro non substitués en position 8, d'une part, et des 8 bromures d'alkyle, d'autre part, conduit à de nombreuses possibilités de combinaison qui, toutes sans exception, doivent être considérées comme non décrites antérieurement. La requérante ne peut se prévaloir du principe, expressément admis par la Chambre dans sa décision "Diastéréoisomères", de la nouveauté de telles combinaisons à partir de deux listes de produits de départ différents. Comme il a été dit, le cas est ici différent; en effet, on ne peut justement pas considérer la revendication 9 comme une liste de l'ensemble des 8 bromures d'alkyle qu'elle englobe.
10. D'après les considérations qui précèdent, on peut voir aisément pourquoi la Chambre a jugé inappropriés les essais comparatifs avec un composé 8-propyl-spiro et 8-butyl-spiro exigés par la première instance et a suggéré d'effectuer des essais comparatifs avec un composé 8-méthyl-spiro.
11. Etant donné, comme on l'a montré, qu'un essai comparatif pertinent fait défaut, il convient de voir le problème technique qui est à la base de la présente demande dans la proposition d'autres stabilisants à la lumière pour polymères.
Ce problème est résolu par la préparation des polyalkylpipéridine-spirooxazolones définies plus précisément dans la revendication 1.
12. Cet enseignement n'a pas été antérieurement décrit dans l'état de la technique dont dispose la Chambre; il est donc nouveau.
Il convient dès lors d'examiner s'il repose sur une activité inventive. C'est à l'antériorité A qu'il faut faire appel pour cela; elle décrit en effet des stabilisants à la lumière pour polymères, ayant le même squelette de base. Y sont également déjà cités des dérivés 8-alkylés ayant 1 à 4 atomes de carbone dans le reste alkyle. Les composés revendiqués ne s'en distinguent qu'en position 8, plus précisément par le fait qu'ils contiennent, entre autres, les deux restes alcényles allyle et méthallyle.
Il faut par conséquent examiner si le remplacement des restes alkyles en C1-C4 connus, par les restes alcényles selon la demande était évident pour la résolution du problème technique consistant en la proposition d'autres stabilisants à la lumière. Le document A décrit, aux pages originairement numérotées 24 et 25, la stabilisation du polypropylène au rayonnement UV par addition de 7 dérivés de polyalkylpipéridine-spirooxazolone différents et établit que tous les composés réussissent le test avec un égal succès (diminution de l'allongement à la rupture de 10après plus de 800 heures). Les 6 premiers de ces composés constituent les dérivés du 7,7,9,9-tétraméthyl - 1 - oxa - 3,8 - diaza - 4-oxo - spiro - [4,5] - décane substitués en 2 par des restes butyle, iso-pentyle, undécyle, méthyle et propyle, méthyle et nonyle, auxquels s'ajoute un dérivé substitué en 2,2 par un reste dibenzyle; le septième composé est un dérivé dispiro (l'indication correcte entre crochets est [5,1,5,2]). L'homme du métier en déduit que l'effet de stabilisation repose essentiellement sur le squelette de base, commun à ces composés, de la pipéridine-spirooxazolone et non sur leur substitution spéciale. En suivant cet enseignement, il était évident, pour le problème consistant à proposer d'autres stabilisants à la lumière, de préparer des composés spiro ayant le même squelette de base et une substitution semblable, également en position 8. Les dérivés 8-allylés et 8-méthallylés selon la demande représentent de tels composés avec une substitution semblable; en effet, ils ne se distinguent des dérivés alkylés connus que par le degré de saturation, c'est-à-dire l'absence de deux atomes d'hydrogène.
13. La requérante défend par contre l'opinion que seuls auraient été évidents les composés spiro non substitués en position 8, car ils sont les seuls à avoir été mis en relief comme composés préférés. Elle renvoie également à ce propos à la décision de la Chambre T 01/80 "Papier copiant sans carbone" (Journal officiel de l'OEB n° 8/1981, p. 206), selon laquelle un document n'a fourni aucune suggestion quant à l'utilisation d'une classe spéciale de composés pour la production de papiers copiants améliorés, parce que cette classe spéciale de composés n'a été mentionnée qu'incidemment et qu'aucun exemple ne l'a fait ressortir. Ce passage, isolé de son contexte, ne confirme aucunement cette opinion, qui ne tient pas compte de deux différences fondamentales entre les deux cas envisagés.
Dans la décision citée, il est constaté en effet qu' "une simple mention d'un groupe de produits avec de nombreux autres groupes de produits laisse tout au plus supposer une aptitude et une efficacité comparables pour l'objectif d'application visé lorsqu'on échange tous ces groupes de produits". Cela signifie qu'une telle mention d'une classe de composés laisse bien escompter une efficacité seulement comparable, mais non pas meilleure. Comme indiqué au point 11, le problème selon la demande ne réside pas dans l'amélioration de stabilisants connus, mais dans la proposition d'autres stabilisants ayant une efficacité comparable; par conséquent, la mention des composés 8-alkyl-spiro dans le document A, qui n'étaient pas spécialement mis en relief, pouvait effectivement inciter à poursuivre leur développement du simple point de vue de la structure.
La deuxième différence par rapport au cas évoqué est qu'il ne s'agit pas de la simple mention d'un groupe de produits avec de nombreux autres groupes de produits; en effet, le document A ne décrit qu'une seule classe de composés, à savoir celle des polyalkylpipéridine-spirooxazolones.
Au demeurant, la Chambre, dans la décision ultérieure "Valorisation des métaux", T 24/81, (Journal officiel de l'OEB n° 4/1983, p. 133), a émis l'opinion selon laquelle, lors de l'examen de l'activité inventive, il convient de faire appel à toutes les formes de réalisation publiées auparavant qui pouvaient suggérer à l'homme du métier une solution au problème posé, et cela même si elles n'étaient pas particulièrement mises en relief dans l'antériorité.
14. En ce qui concerne la requête subsidiaire, l'article 112 (1) CBE ne prévoit la saisie de la Grande Chambre de recours que sur des questions de droit d'importance fondamentale. De telles questions ne se posent pas en l'espèce. Les deux questions formulées par la requérante reviennent plutôt à se demander si l'homme du métier peut comprendre d'emblée, d'après ses connaissances, le contenu technique de l'antériorité A; or, il s'agit avant tout d'une question technique, du fait qu'elle exige l'interprétation d'une information technique par l'entremise de l'homme du métier.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit:
1. Le recours est rejeté.
2. La requête tendant à saisir la Grande Chambre de recours est rejetée.