T 0406/86 (Trichloréthylèe) of 2.3.1988

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1988:T040686.19880302
Date de la décision : 02 Mars 1988
Numéro de l'affaire : T 0406/86
Numéro de la demande : 81109072.9
Classe de la CIB : C07C 17/42
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Wacker
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : 1. Au cours de la procédure d'opposition (recours), le titulaire du brevet ne peut exiger que ses propositions de modifications soient prises en considération, la décision à ce sujet étant laissée à l'appréciation de l'instance chargée de statuer, qui peut refuser de prendre en compte les modifications proposées, si elles ne sont ni opportunes, ni nécessaires.
2. En particulier, il peut ne pas être tenu compte de propositions de modifications présentées à un stade tardif de la procédure, c'est-à-dire lorsque l'examen de l'opposition ou du recours est déjà bien avancé (cf. la décision de la chambre de recours technique 3.3.1, T 153/85, JO OEB 1988, 1).
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 101(2)
European Patent Convention 1973 Art 110(2)
European Patent Convention 1973 Art 111(1)
European Patent Convention 1973 Art 114
European Patent Convention 1973 R 57
European Patent Convention 1973 R 58
Mot-clé : Non-admission de propositions de modifications au cours de la procédure d'opposition (recours)
Pouvoir d'appréciation
Opportunité/nécessité d'apporter des modifications
Usage antérieur présenté pour la premier foir en procédure de recours
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0001/92
G 0001/99
T 0024/88
T 0059/88
T 0299/89
T 0334/89
T 0543/89
T 0556/89
T 0770/89
T 0541/91
T 0746/91
T 0028/92
T 0304/92
T 0631/92
T 0952/92
T 0206/93
T 0583/93
T 0829/93
T 0840/93
T 0057/94
T 0301/94
T 0417/94
T 0459/94
T 0552/94
T 0575/94
T 0794/94
T 0888/94
T 0007/95
T 0152/95
T 0401/95
T 0937/95
T 0210/96
T 0809/96
T 1015/97
T 1126/97
T 1148/97
T 0047/98
T 0554/98
T 0670/98
T 1042/98
T 0118/99
T 0686/99
T 0098/00
T 0812/00
T 1201/00
T 0064/02
T 0796/02
T 0487/05

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 81 109 072.9, déposée le 28 octobre 1981, revendiquant la priorité d'une demande antérieure déposée en Allemagne le 4 mars 1981, a donné lieu le 26 septembre 1984 à la délivrance du brevet européen n° 59 251 comportant cinq revendications. ...

II. Le 18 juin 1985, l'actuelle requérante a fait opposition au brevet, invoquant l'absence de nouveauté et d'activité inventive ainsi que le manque de clarté des revendications (art. 84 CBE).

III. Par décision en date du 23 septembre 1986, la Division d'opposition a rejeté l'opposition au motif essentiellement que l'objet des revendications non seulement est nouveau, mais implique en outre une activité inventive. ...

IV. L'opposante a formé un recours contre cette décision par un télex en date du 13 novembre 1986, confirmé par le courrier du 17 novembre 1988, et a acquitté la taxe prescrite...

(...)

VI. Dans des communications ultérieures, reçues les 24 juin, 21 septembre et 16 novembre 1987, la requérante fait valoir que le texte des revendications litigieuses n'exclut pas que l'objet de la demande contienne des époxydes. L'intimée soutient en revanche, dans ses réponses reçues les 20 juillet et 8 octobre 1987, que pour interpréter les revendications, il faut faire appel à la description ; or celle-ci exclut nettement cette possibilité. Dans une autre communication, reçue le 30 décembre 1987, elle propose finalement de modifier les revendications afin de remédier au manque de clarté critiqué par la requérante.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 et à la règle 64 de la CBE ; il est donc recevable.

2. Du point de vue de la forme, on peut affirmer ceci, en ce qui concerne les revendications du brevet tel qu'il a été délivré :

2.1. La requérante a raison lorsqu'elle affirme qu'en elle-même l'expression "éther dépourvu de radical hydroxy" comprend et semble donc protéger également les éthers (dépourvus de radical hydroxy) contenant n'importe quel autre radical fonctionnel, y compris le radical époxy.

2.2. En revanche, il ressort déjà de la définition du problème figurant à la page 2, lignes 24 et 25, et de la déclaration sans équivoque figurant à la page 2, lignes 40 et 41 de la description du brevet attaqué, que le produit stabilisant revendiqué (revendications 1 et 2) et le trichloréthylène ainsi stabilisé (revendications 3 à 5) doivent être dépourvus d'époxydes ou que les "éthers dépourvus de radical hydroxy" utilisés ne doivent pas être des époxydes. Il y a donc contradiction entre le texte des revendications et la description, contradiction qui va à l'encontre des dispositions de l'article 84 CBE et qui aurait dû être éliminée dans le cadre de la procédure d'examen.

2.3. Il en va de même du préambule de la revendication 1 : un produit "à base d'au moins une amine, ... d'acétate d'éthyle, de N-méthyl-pyrrole et/ou d'au moins un alkylphénol" est, selon les lois de la langue et de la logique, un produit qui contient un ou plusieurs des quatre constituants suivants : amine, acétate d'éthyle, N-méthyl-pyrrole et alkylphénol. Considérées en soi, les revendications 1 à 4 - ceci ne concerne pas la revendication 5 - couvrent donc un produit stabilisant ou un trichloréthylène stabilisé qui, outre les deux constituants indiqués dans la partie caractérisante de la revendication 1, ne doit contenir que l'un au moins des quatre constituants susmentionnés. Ce n'est que si l'on combine les informations données à la page 3, lignes 19 à 21 avec l'ensemble des exemples cités et avec les développements figurant à la page 2, ligne 62, de la description du brevet litigieux que le sens devient clair :

des quatre constituants susmentionnés, les deux premiers (amine et acétate d'éthyle) sont prescrits impérativement, alors que, pour ce qui concerne les deux autres (N-méthyl-pyrrole et alkylphénol), un seul est nécessaire (N-méthyl pyrrole ou alkylphénol), la présence simultanée des deux constituants étant néanmoins admise.

Là encore, ceci constitue un défaut de clarté, contraire aux dispositions de l'article 84 CBE, et la Chambre serait donc tenue d'exiger qu'il y soit remédié si l'affaire en était encore au stade de la procédure de délivrance.

2.4. Cependant, étant donné que l'article 84 CBE n'est pas cité dans l'énumération exhaustive des motifs d'opposition figurant à l'article 100 CBE et qu'il n'y a pas eu au cours de la procédure d'opposition de modification des revendications qui aurait nécessité l'examen de la conformité de ces modifications aux dispositions de l'article 84 CBE, la Chambre renonce, au stade actuel de la procédure, à exiger que l'on apporte des modifications à la revendication 1 pour remédier à son manque de clarté et se borne à constater que les revendications doivent être interprétées limitativement, ainsi qu'il a été indiqué dans les lignes qui précèdent.

3. Selon la "proposition" de l'intimée reçue le 30 décembre 1987, que la Chambre interprète comme requête principale, la requête subsidiaire demeurant celle qui avait été formulée dans la réponse à l'acte de recours, il y a lieu de remanier la rédaction des revendications afin de remédier à l'imprécision visée aux points 2.1 et 2.2 (mais non à celle signalée au point 2.3), ce qui pose la question de savoir si les modifications proposées doivent ou non être prises en considération au stade actuel de la procédure.

3.1. Au cours de la procédure d'opposition (et de la procédure de recours lui faisant suite), la décision de prendre ou non en compte les propositions de modification de la description ou des revendications présentées par le titulaire du brevet est laissée à l'appréciation de la division d'opposition ou de la chambre de recours, ainsi qu'il ressort des dispositions suivantes de la CBE qui sont déterminantes en la matière :

3.1.1. Les dispositions de l'article 101(2) CBE qui régissent l'examen d'une opposition prévoient que celui-ci

(i) doit se dérouler conformément au dispositions du règlement d'exécution et que

(ii) "la division d'opposition doit inviter les parties, aussi souvent qu'il est nécessaire, à présenter

... leurs observations sur les notifications qu'elle leur a adressées ou sur les communications qui émanent d'autres parties".

3.1.2. Le point (ii) ci-dessus vise essentiellement les observations des parties et non les modifications de documents.

3.1.3. S'agissant des exigences visées au point (i), la règle 57(1) CBE indique que la division d'opposition, lorsqu'elle notifie pour la première fois l'opposition formée au titulaire du brevet, invite celui-ci, dans un délai qu'elle lui impartit, "à présenter ses observations et à soumettre, s'il y a lieu, des modifications à la description, aux revendications et aux dessins". (Le mot "gegebenenfalls" doit ici être compris dans le sens où l'entendent les textes anglais et français de la Convention - "where appropriate" et "s'il y a lieu" - c'est-à- dire un peu au sens de "wenn sachdienlich" ("si elle le juge opportun"). Dès ce stade précoce de la procédure, le titulaire du brevet ne doit donc être invité à soumettre des modifications que si ceci est jugé opportun compte tenu des motifs d'opposition avancés.

3.1.4. La règle 58(2) CBE concerne les notifications faites ultérieurement au titulaire du brevet en application de l'article 101(2) CBE. Elle dispose que le titulaire du brevet doit être invité, "s'il y a lieu" ("gegebenenfalls" en allemand - qui doit là aussi être compris au sens de "wenn sachdienlich" (si cela est jugé opportun), cf. textes anglais et français -) "à déposer, en tant que de besoin, une description, des revendications et des dessins modifiés". La double restriction contenue dans cette phrase et exprimée par "s'il y a lieu" et "en tant que de besoin" souligne la retenue qui s'impose lorsque l'on invite le titulaire du brevet à apporter des modifications au cours de la procédure d'opposition. En d'autres termes, le titulaire du brevet ne doit être invité à apporter des modifications que si une telle invitation est "opportune", et les modifications devraient se borner à répondre à un "besoin" - au sens que revêt ce terme dans l'exposé des motifs de l'opposition qui a été présenté.

3.1.5. Bien que dans les règles 57 et 58 CBE il ne soit directement question que des critères que doit appliquer la division d'opposition lorsqu'il s'agit d'inviter le titulaire d'un brevet à soumettre éventuellement des modifications, pour la Chambre, il ressort clairement et obligatoirement de ces dispositions qu'en l'absence d'invitation expresse de la part de la division d'opposition, le titulaire du brevet ne peut espérer à plus forte raison que les modifications qu'il demande seront prises en considération que si la division d'opposition, exerçant dûment son pouvoir d'appréciation, les juge opportunes et/ou nécessaires au sens où ces termes ont été entendus plus haut.

Considérer que la division d'opposition ne devrait inviter le titulaire du brevet à soumettre des modifications que dans la mesure où celles-ci sont opportunes et nécessaires, et qu'en revanche le titulaire du brevet pourrait même exiger, ce qui constituerait un droit encore plus étendu, que les modifications non opportunes et non nécessaires qu'il a apportées soient prises en considération, serait une interprétation de ces règles qui irait à l'encontre de leur sens véritable.

3.1.6. L'article 102 CBE énumère les différentes décisions possibles en matière d'opposition : si les motifs d'opposition ne s'opposent pas au maintien du brevet européen sans modification, la division d'opposition rejette l'opposition, en application de l'article 102(2) CBE ; dans un tel cas, il est clair qu'il ne serait ni opportun, ni nécessaire d'admettre des modifications. Si, en revanche, certains motifs d'opposition s'opposent au maintien du brevet européen (art. 102(1) CBE), il convient normalement de donner au titulaire du brevet la possibilité d'apporter des modifications pour éviter la révocation du brevet et obtenir le maintien du brevet tel qu'il a été modifié, en application de l'article 102(3) CBE. Toutefois, la division d'opposition ne peut alors décider le maintien du brevet tel qu'il a été modifié que si les modifications apportées sont "opportunes" et "nécessaires", au sens où ces termes ont été utilisés plus haut.

3.1.7. La volonté de ne prendre en compte que dans certaines limites les modifications apportées au cours de la procédure d'opposition favorise le déroulement rapide et rationnel de la procédure ; on peut considérer que ceci traduit également le fait que le brevet européen contre lequel est formée l'opposition constitue, de par sa nature même, un faisceau de brevets nationaux au sens de l'article 64(1) CBE. La procédure d'opposition devant l'Office européen des brevets constitue la seule exception à la règle selon laquelle un brevet européen, une fois délivré, est régi par le droit national des Etats contractants désignés.

3.1.8. Au stade du recours faisant suite à une opposition, l'examen est effectué conformément à l'article 110(2) CBE, dont les dispositions sont analogues à celles de l'article 101(2) CBE (cf. supra, point 3.1.1, alinéas (i) et (ii)). La règle 66(1) CBE précise au sujet de cet examen que - à moins qu'il n'en soit disposé autrement - "les dispositions relatives à la procédure devant la division d'opposition

... sont applicables à la procédure de recours".

3.1.9. De l'avis de la Chambre, il ressort de ce qui précède qu'au cours de la procédure de recours faisant suite à une opposition, le titulaire du brevet ne peut exiger que ses propositions de modifications soient prises en considération, celles-ci n'étant prises en compte au cours de l'examen du recours que dans certaines limites, ainsi qu'il a été expliqué plus haut, puisque les modifications proposées doivent être "opportunes" et "nécessaires". Lorsqu'elle statue sur le recours conformément à l'article 111(1) CBE, la chambre peut, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, refuser de tenir compte des modifications proposées si elle juge qu'elle ne sont ni opportunes, ni nécessaires.

3.2. S'agissant de la production tardive des modifications, il convient de signaler les explications données par la Chambre dans la décision T 153/85 "Autre jeu de revendications/Amoco" (JO OEB 1988, 1), où elle déclarait au point 2.1, second et troisième alinéas (traduction par l'Office) :

"Dans le cas d'une procédure de recours, la règle normale est la suivante : si un requérant souhaite que la chambre de recours qui doit statuer sur le recours examine la question de l'admissibilité (au regard de l'article 123 de la CBE et également d'autres dispositions) d'autres jeux de revendications dont l'objet diffère de celui des revendications qui ont été examinées en première instance, il doit produire ces autres jeux avec le mémoire exposant les motifs du recours ou le plus tôt possible après.

Lorsqu'elle statue sur un recours durant une procédure orale, une chambre est en droit de refuser de prendre en compte d'autres jeux de revendications qui ont été déposés très tardivement, par exemple pendant la procédure orale, si ces autres revendications ne sont pas clairement admissibles." (Dans la décision en question, des justifications de ce principe étaient alors données à la suite du passage qui vient d'être cité).

La décision citée concernait une affaire dans laquelle le titulaire du brevet était le requérant, tandis que, dans la présente affaire, c'est l'intimée qui est titulaire du brevet. Mais le principe qui valait pour cette décision est clair et applicable également aux procédures d'opposition.

3.3. Dans la présente espèce, les motifs du recours ont été notifiés le 4 mars 1987 à la titulaire du brevet qui a présenté des observations le même mois, et a répondu au mois de juillet et octobre 1987 à d'autres communications de la requérante. Aucune des parties n'a présenté de requête en procédure orale. Lorsque l'intimée a soumis des modifications le 30 décembre 1987, l'examen du recours visé à l'article 110 CBE était pratiquement terminé et il existait déjà un projet de décision. Admettre les modifications proposées nuirait donc à la rapidité de la conduite de la procédure, pourrait même peut-être affecter les droits de tiers et irait donc à l'encontre de l'intérêt général.

3.4. Il pourrait en être décidé autrement dans des cas exceptionnels, par exemple s'il s'avérait immédiatement que le texte modifié peut être admis. Mais ce n'est pas le cas ici ; au contraire, si les revendications modifiées étaient jugées recevables, il serait nécessaire d'examiner également si elles répondent aux exigences de l'article 84 CBE, ce qui, compte tenu de ce qui a été exposé au point 2.3, entraînerait des contestations et, par suite, un nouveau retard dans le déroulement de la procédure.

3.5. La Chambre est convaincue que, compte tenu des considérations développées ci-dessus au point 2 en ce qui concerne le fond de ces revendications et de ce qui vient d'être rappelé au sujet du déroulement de la procédure, la modification proposée n'est ni opportune ni nécessaire. Elle n'est donc pas acceptée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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