T 1026/98 (Intervention/KALLE) of 13.6.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T102698.20030613
Date de la décision : 13 Juin 2003
Numéro de l'affaire : T 1026/98
Numéro de la demande : 91108077.8
Classe de la CIB : B32B 27/34
Langue de la procédure : DE
Distribution : A
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Kalle Nalo GmbH & Co. KG
Nom de l'opposant : Kureha Kagaku Kogyo Kabushiki Kaisha
Intervenant 1 : Carsten Nicolaisen GmbH & Co. KG
Intervenant 2 : ALFANOVA Deutschland GmbH
Chambre : 3.3.07
Sommaire : Conformément à l'article 112(1)a) CBE, la Chambre soumet les questions de droit suivantes à la Grande Chambre de recours pour décision :
I. Lorsque l'unique recours a été retiré, la procédure peut-elle se poursuivre avec une partie qui est intervenue pendant la procédure de recours ?
II. Dans l'affirmative,
L'intervenant doit-il avoir rempli, outre les critères de recevabilité de l'intervention énoncés expressément à l'article 105 CBE, certaines conditions de forme, et doit-il notamment avoir acquitté la taxe de recours, afin de pouvoir poursuivre la procédure ?
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 105
European Patent Convention 1973 Art 107
European Patent Convention 1973 Art 112(1)(a)
European Patent Convention 1973 R 57(4)
European Patent Convention 1973 R 60(2)
Mot-clé : Intervention dans la procédure de recours
Poursuite de la procédure après le retrait de l'unique recours
Saisine de la Grande Chambre de recours
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0002/91
G 0004/91
G 0008/91
G 0010/91
G 0009/92
G 0008/93
G 0001/94
G 0001/97
T 0027/92
T 0684/92
T 1011/92
T 0195/93
T 0467/93
T 0471/93
T 0590/94
T 0144/95
T 0886/96
T 0989/96
T 0517/97
T 1001/97
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0003/04
T 1007/01
T 1108/02
T 1286/23

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n°0 467 039 a été délivré avec effet au 9 août 1995 sur la base de la demande n° 91 108 077.8.

II. Deux oppositions ont été formées, visant l'une et l'autre à la révocation de l'intégralité du brevet. L'opposant 1 a retiré son opposition au cours de la procédure devant la division d'opposition.

III. Par décision en date du 25 août 1998, la division d'opposition a constaté que le brevet tel que limité pouvait être maintenu.

IV. L'opposant 2 (requérant) a formé un recours le 23 octobre 1998 contre cette décision et a acquitté en même temps la taxe prescrite. Il a déposé le mémoire exposant les motifs de son recours le 18 décembre 1998.

V. Deux interventions ont eu lieu pendant la procédure de recours. L'intervenant 1 a retiré son intervention. L'intervenant 2 a présenté une déclaration d'intervention motivée le lundi 22 avril 2002. Il a réglé en même temps les taxes d'opposition et de recours. Il a prouvé que le titulaire du brevet (intimé) avait engagé contre lui une action en contrefaçon du brevet litigieux qui a été signifiée le 21 janvier 2002. Aucune objection à la recevabilité de son intervention n'a été soulevée ou n'était manifeste.

VI. Le 29 janvier 2003, les parties ont été citées à une procédure orale dont la date a été fixée au 16 mai 2003.

VII. Le requérant et l'intervenant 2 ont requis la révocation du brevet, l'intimé a demandé finalement le maintien du brevet sur la base du jeu de revendications remis par courrier en date du 16 avril 2003.

VIII. Le 14 mai 2003, le requérant a retiré son recours. Par télécopie en date du 15 mai 2003, la Chambre a informé les autres parties qu'elle s'attacherait d'abord à examiner pendant la procédure orale si une décision au fond pourrait encore être rendue dans la présente affaire. Elle a cité la jurisprudence pertinente des chambres de recours, qui ont exprimé des points de vue différents sur la question de savoir si un tiers intervenant pendant la procédure de recours pouvait poursuivre la procédure lorsque l'unique recours avait été retiré.

IX. Pendant la procédure orale, l'examen a porté exclusivement sur les conséquences que le retrait du recours comporte pour la procédure. L'intervenant 2 a soutenu à cet égard qu'il convenait de poursuivre la procédure. Il a requis, à titre subsidiaire, la saisine de la Grande Chambre de recours concernant les questions de droit suivantes :

"1. L'intervenant dans une procédure de recours en instance faisant suite à une opposition, qui a satisfait aux conditions de l'article 105 CBE en matière de procédure et qui a réglé les taxes d'opposition et de recours, a-t-il le droit de poursuivre la procédure en qualité de requérant indépendant lorsque l'unique recours a été retiré ?

2. Dans l'affirmative, l'intervenant doit-il acquitter la taxe de recours pour pouvoir obtenir la qualité de requérant indépendant ?"

X. L'intimé était en revanche de l'avis que le retrait du recours avait pour effet de mettre fin à la procédure de recours. Il n'a pas considéré que la saisine de la Grande Chambre de recours était nécessaire, au motif que la jurisprudence existante, notamment celle de la Grande Chambre de recours, donnait des réponses suffisamment claires aux questions posées.

Motifs de la décision

1. En règle générale, le retrait de l'unique recours met fin à la procédure de recours, et il n'est donc plus nécessaire de statuer sur les requêtes sur le fond (G 8/91, JO OEB 1993, 346). Dans la présente affaire, la question se pose de savoir s'il convient de procéder autrement, du fait qu'un tiers est valablement intervenu dans la procédure de recours.

2. Dans la jurisprudence existante, les chambres de recours ont apporté des réponses différentes à cette question.

2.1 La jurisprudence récente est fondée sur la décision G 4/91 (JO OEB 1993, 707), dans laquelle aucune des parties à la procédure devant la première instance n'avait attaqué la décision de la division d'opposition de maintenir le brevet. La Grande Chambre de recours a estimé qu'un tiers ne pouvait ni intervenir dans la procédure, ni former de recours contre la décision de la division d'opposition pendant le délai de recours visé à l'article 108 CBE, et ce même s'il a satisfait aux autres conditions attachées à l'intervention. A l'appui de sa décision, elle a principalement considéré que l'intervention au titre de l'article 105 CBE suppose, par définition, qu'une procédure est en instance. Or, lorsque la déclaration d'intervention a été produite, plus aucune procédure n'était pendante, aucune des parties n'ayant formé de recours.

Dans la décision suivante G 1/94 (JO OEB 1994, 787), la Grande Chambre de recours a considéré qu'une intervention au cours d'une procédure de recours était recevable, ni le libellé ni la finalité de l'article 105 CBE ne fournissant en effet de réponse claire à la question de savoir si la procédure d'opposition englobe également, au sens de l'article précité, une procédure de recours ultérieure. S'appuyant sur les travaux préparatoires à la CBE, elle a conclu à la recevabilité de l'intervention au stade de la procédure de recours, conforme, selon elle, à l'intention du législateur (loc. cit. points 8 à 10 des motifs). La Grande Chambre de recours a déclaré en outre que l'intervenant pouvait invoquer de nouveaux motifs d'opposition. D'après elle, si l'intervenant ne peut se défendre par tous les moyens à sa disposition contre l'action du titulaire du brevet, la finalité de l'intervention n'est pas respectée (loc. cit. point 13 des motifs). La Grande Chambre de recours n'a pas répondu aux questions supplémentaires qui ont été abordées dans le cadre de la saisine à propos de certains aspects de la procédure d'intervention, considérant qu'il convient de trancher en la matière au cas par cas, à la lumière des arguments avancés par les parties. Parmi ces questions, il y avait notamment celle de savoir si l'intervenant doit acquitter une taxe de recours (loc. cit. point 11 des motifs).

2.2 Deux décisions divergentes ont été rendues en la matière peu de temps après.

En premier lieu, dans la procédure qui a conduit à la saisine G 6/93, close sans qu'une décision soit prise, la taxe de recours a été remboursée après que la Grande Chambre de recours a répondu à la question dont elle avait été saisie dans la procédure G 1/94, car la validité de l'intervention ne dépendait pas de cette taxe (décision T 27/92 en date du 25 juillet 1994, citée dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, 4e édition 2001, VII.D.5.4.2). La chambre a établi qu'en vertu du principe de sécurité juridique, seules les conditions visées à l'article 105 CBE sont exigibles en ce qui concerne l'intervention. Elle a estimé qu'il n'était pas nécessaire de trancher la question de savoir si, en payant la taxe de recours, l'intervenant peut obtenir une autre qualité, à savoir celle de requérant indépendant (point 6 des motifs).

S'écartant explicitement de ce point de vue, la décision T 1011/92 en date du 16 septembre 1994 (citée dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, loc. cit.), dispose que l'intervenant dans une procédure de recours doit acquitter à la fois la taxe d'opposition et la taxe de recours. La chambre a affirmé dans cette affaire qu'il convenait de traiter l'opposition en tant que recours, par analogie avec l'article 105(2) CBE, dernière phrase. L'intervenant a les droits d'un requérant mais doit aussi assumer les obligations qui incombent à ce dernier. Il peut poursuivre de manière indépendante la procédure de recours si le seul et unique recours est retiré (points 3.4 et suivants des motifs).

2.3 Les décisions rendues par la suite, divergeant de la décision T 1011/92 (loc. cit.), ont abouti dans leur majorité à la conclusion selon laquelle le paiement de la taxe de recours n'est pas une condition de recevabilité de l'intervention pendant la procédure de recours (décision T 195/93 en date du 4 mai 1995, citée dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, loc. cit., cf. points II et suivants de l'exposé des faits ; T 467/93 en date du 13 juin 1995, non publiée au JO OEB, point 2 des motifs ; T 684/92 en date du 25 juillet 1995, non publiée au JO OEB, point 2 des motifs ; T 471/93 en date du 5 décembre 1995, citée dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, loc. cit., point 2.5 et suivants des motifs ; T 590/94 en date du 3 mai 1996, citée dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, loc. cit., point 2.5 des motifs ; T 144/95 en date du 26 février 1999, citée dans la Jurisprudence des chambres de recours de l'OEB, loc. cit., point 2.8 des motifs ; T 1001/97 en date du 25 janvier 2000, non publiée au JO OEB, point 6 des motifs ; T 989/96 en date du 5 juillet 2001 et T 886/96 en date du 6 juillet 2001, citées toutes deux dans la Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB en 2001, édition spéciale du JO OEB 2002, 76).

En revanche, la décision T 517/97 (JO OEB 2000, 515, point IV de l'exposé des faits, points 2 et 9 des motifs), s'appuie sur la décision T 1011/92, selon laquelle la taxe de recours doit être payée.

2.4 La jurisprudence a évolué de manière moins claire sur un autre point, à savoir la possibilité pour l'intervenant d'obtenir la qualité de requérant indépendant en acquittant la taxe de recours de sa propre initiative. Certaines décisions qui ont traité cette question l'ont laissée en suspens car elle ne présentait pas d'importance pour la décision (T 27/92, loc. cit. ; T 471/93, loc. cit. ; T 590/94, loc. cit. ; T 1001/97, loc. cit.).

A l'opposé, la décision T 144/95 (loc. cit.) rejette expressément cette possibilité, au motif que l'intervenant ne remplit pas les conditions de l'article 107 CBE, première phrase, et que le délai de paiement de la taxe de recours prévu à l'article 108 CBE a expiré. Les décisions T 989/96 et T 886/96 ont abouti à la même conclusion (loc. cit. ; avec référence à l'affaire T 144/95).

3. Pour défendre son point de vue, l'intervenant a invoqué en premier lieu les décisions G 1/94 et T 1011/92 (loc. cit.). Il estime que la possibilité d'intervenir dans la procédure de recours n'a pas de sens si l'intervenant ne peut obtenir une position juridique indépendante de l'opposant requérant. La finalité de l'intervention est précisément de permettre au contrefacteur présumé de faire valoir, pendant la procédure d'opposition européenne centralisée, des motifs de révocation existants et, partant, de ne pas devoir engager une action en nullité au plan national. C'est la raison pour laquelle il convient de considérer que la procédure de recours faisant suite à une opposition fait partie intégrante de la procédure d'opposition au sens de l'article 105(1) CBE.

L'article 105(2) CBE est muet en ce qui concerne l'intervention dans la procédure de recours. D'après l'intervenant, il convient de combler cette lacune en appliquant par analogie l'article 105(2) troisième phrase CBE, afin d'assimiler à un recours l'intervention dans la procédure de recours faisant suite à une opposition. De plus, on ne saurait exiger de l'intervenant qu'il satisfasse aux conditions de forme du recours, alors qu'il n'est plus en mesure de le faire au moment de son intervention. A cet égard, il y a lieu de considérer l'application par analogie de l'article 105(2) CBE comme une disposition particulière eu égard à l'article 107 CBE, première phrase, dont la portée peut donner lieu, du reste, à des conclusions différentes dans les trois langues officielles. Par ailleurs, le principe selon lequel seul le requérant peut décider du maintien du recours qu'il a formé ne s'applique pas en l'espèce, car il est en contradiction avec la qualité de l'intervenant pour agir de manière indépendante au regard du droit procédural. Or, en payant la taxe de recours et en exposant les motifs de son intervention, l'intervenant a indiqué expressément qu'il souhaitait obtenir la qualité de requérant indépendant.

L'intervenant estime que la décision la plus récente qui a abouti à un jugement contraire, à savoir l'affaire T 886/96 (loc. cit.), ne peut convaincre. Elle n'est pas, de surcroît, pertinente, étant donné qu'elle porte sur un recours que le titulaire d'un brevet a formé à la suite de la révocation de son brevet, et que la procédure s'est conclue en faveur de l'intervenant, le requérant ayant retiré son recours.

4. L'intimé a soutenu que la procédure de recours faisant suite à une opposition était une procédure relevant du contentieux administratif. En principe, c'est le requérant qui introduit une telle procédure, à laquelle il a également la possibilité de mettre fin en retirant son recours. La décision G 1/94 crée, certes, une exception au principe accusatoire, étant donné que l'intervenant se voit autorisé à invoquer de nouveaux motifs que l'opposant requérant ne peut plus introduire dans la procédure sans le consentement du titulaire du brevet. Cependant, cela n'a pas pour effet supplémentaire de limiter le principe de la libre disposition de l'instance, selon lequel c'est celui qui a introduit une procédure qui peut y mettre fin. Le fait d'admettre que l'intervenant a qualité pour agir de manière indépendante dans la procédure aurait pour conséquence, à cet égard, d'affaiblir la position juridique du requérant. Pour ce dernier, la possibilité de clore la procédure représente un moyen de régler le litige à l'amiable avec le titulaire du brevet pendant la procédure. Le fait que l'intervenant ait le droit de poursuivre la procédure réduirait les possibilités d'entente entre le requérant et l'intimé et donc entre le titulaire du brevet et un éventuel contrefacteur.

L'intimé estime que dans la décision G 1/94 (loc. cit.), l'intervenant devait se voir accorder uniquement l'occasion, dans un souci d'économie de la procédure, d'utiliser la procédure de recours déjà en instance pour se défendre contre le brevet. Néanmoins, cette idée ne justifie pas que l'on offre à l'intervenant la possibilité de continuer à mener, contre la volonté des parties concernées, une procédure qui a été close à la suite du retrait du recours. La décision G 1/94 établit d'ailleurs qu'il ne peut y avoir de participation de l'intervenant sans le recours formé par le requérant.

On ne peut donc parler de lacune dans les dispositions de l'article 105(2) CBE. Le paragraphe 2, troisième phrase, dudit article constitue plutôt une disposition dérogatoire, puisqu'il permet à un tiers de participer à une procédure sans avoir formé sa propre opposition ou son propre recours. De par son caractère dérogatoire, cette disposition doit cependant être interprétée de manière étroite. Dans la présente espèce, il convient de se placer dans la situation où l'opposition a été retirée. Si l'opposition est retirée en première instance, la procédure d'opposition peut Htre poursuivie d'office, conformément à la règle 60(2) CBE. Si l'opposition est retirée pendant la procédure de recours, le retrait de l'opposition par l'unique requérant met fin immédiatement à la procédure de recours (G 8/93, JO OEB 1994, 887). L'opinion défendue par l'intervenant soulève en outre une question supplémentaire, celle de savoir si, lorsque l'intervenant obtient la qualité pour agir de manière indépendante dans la procédure, certaines parties d'un brevet n'avaient initialement pas été contestées pourraient elles aussi être attaquées à la suite de l'intervention.

De plus, le paiement de la taxe de recours n'est pas un critère approprié pour accorder à un intervenant la qualité de partie indépendante à une procédure. La taxe de recours, qui n'est qu'un élément constitutif de la recevabilité d'un recours, ne peut être isolée de son contexte. Le paiement de la taxe n'est en outre valable que s'il est effectué dans le délai réglementaire fixé (T 144/95, loc. cit.).

5. La jurisprudence existante de la Grande Chambre de recours ne permet pas à la Chambre de déduire de réponse claire aux questions qui se posent en l'espèce.

5.1 Aucune des parties ne peut invoquer, à l'appui de son point de vue, la décision G 1/94 (loc. cit.), et ce pour plusieurs raisons. D'une part, cette décision ne porte expressément que sur la question de la recevabilité de l'intervention pendant une procédure de recours en instance et sur les motifs recevables d'une intervention, la Grande Chambre de recours laissant délibérément le soin à la jurisprudence future (cf. point 2.1 loc. cit.) de statuer sur les autres aspects. D'autre part, la Grande Chambre de recours a relevé le conflit d'intérêts qui existe ici : il y a d'abord l'intérêt du tiers menacé par une action en contrefaçon, qui doit être mis en mesure de se défendre efficacement dès le stade de la procédure d'opposition européenne centralisée. Il y aussi, dans le même ordre d'idées, l'intérêt d'éviter une répétition inutile du travail devant les tribunaux nationaux et de rendre une décision uniforme sur la validité du brevet. A l'opposé, il y a l'intérêt du titulaire du brevet, qui veut éviter les complications et les retards que l'intervention peut causer dans la procédure (loc. cit., points 7 et 13 des motifs). Le législateur a voulu tenir compte, au moins partiellement, de l'intérêt du titulaire du brevet. Il a prévu par conséquent que l'intervention soit traitée comme une opposition, tout en admettant des exceptions à ce principe (article 105(2) dernière partie de phrase ensemble la règle 57(4) CBE ; cf. Conférence intergouvernementale pour l'institution d'un système européen de délivrance de brevets, rapport relatif à la deuxième session du comité de coordination, doc. BR/209/72 en date du 6 juin 1972, point 73). Devant les intérêts en jeu, la Grande Chambre de recours n'a pas tiré d'autres conclusions que celles afférentes aux questions dont elle avait été saisie, et même les réponses qu'elle a données à cet égard en faveur de l'intervenant s'appuient pour l'essentiel sur la volonté du législateur, étant donné le manque de clarté de la Convention.

5.2 Au demeurant, la jurisprudence de la Grande Chambre de recours semble pertinente du point de vue suivant :

5.2.1 La décision G 2/91 (JO OEB 1992, 206) statue sur le principe général de droit procédural, examiné pendant la procédure orale devant la présente Chambre, selon lequel seul le requérant peut décider du maintien du recours qu'il a formé et clore la procédure en retirant le recours (principe confirmé dans les décisions G 8/91 et G 8/93, loc. cit.). Ainsi, la chambre n'a plus compétence pour statuer et "pour examiner les faits" (G 9/92, JO OEB, 1994, 875, point 3 des motifs). Dans la décision G 2/91, ce principe s'est appliqué aux dépens de l'intimé, qui ne peut poursuivre la procédure après le retrait de l'unique recours. La question se pose à cet égard de savoir s'il faut procéder de la même façon pour l'intervenant. A ce propos, il est bon de rappeler que dans la décision G 4/91 (loc. cit.), la Grande Chambre de recours a interdit au contrefacteur présumé d'introduire lui-même un recours, car elle a considéré qu'une intervention n'était possible que si une procédure de recours était en instance. La question de savoir si, en l'espèce également, le droit de décider de mettre fin à la procédure de recours découle uniquement de ce que la procédure a été engagée, soulève une autre interrogation : veut-on que le rôle du contrefacteur présumé se limite à une participation à une procédure déjà en instance sur la validité du brevet, ou considère-t-on le fait qu'une telle procédure devienne pendante comme suffisant pour en faire la procédure du contrefacteur présumé, dans l'intérêt de ce dernier ?

5.2.2. Force est de noter dans ce contexte que dans la décision G 1/94 (loc. cit.), la Grande Chambre de recours a déjà relevé le conflit qui existe entre l'introduction de nouveaux motifs d'opposition par l'intervenant et la conception de base développée dans sa jurisprudence antérieure concernant la procédure de recours faisant suite à une opposition. L'avis G 10/91 (JO OEB 1993, 420, point 18 des motifs) a défini la finalité principale de la procédure de recours inter partes comme le fait de donner à la partie déboutée une possibilité de réexamen de la décision rendue par la division d'opposition. L'examen de nouveaux motifs d'opposition ne correspond pas, selon la Grande Chambre de recours, à cette finalité. Elle a cependant accepté cette contradiction dans le cas de l'intervention pendant la procédure de recours, afin de pràserver la finalité de l'intervention (décision G 1/94, loc. cit., point 13 des motifs). On peut, dès lors, se demander si une telle extension des finalités de la procédure de recours n'est possible que par rapport aux faits à considérer et, partant, au principe accusatoire, ou si elle peut s'inscrire, plus largement, dans le cadre de la compétence de la chambre de recours en matière de décision et, par conséquent, du principe de la libre disposition de l'instance.

5.2.3 Pour ce qui est enfin de la différence d'approche entre les parties en ce qui concerne la possibilité de faire dépendre du paiement de la taxe de recours l'existence en propre de la qualité de partie, il convient de rappeler les rôles respectifs de la jurisprudence et de la loi, exposés dans la décision G 1/97 (JO OEB 2000, 322). Selon cette décision, dans un système de codification, le juge ne peut se substituer, au fur et à mesure des besoins, au législateur. Certes, il peut être amené à combler des lacunes quand il s'avère que le législateur a omis de régler certaines situations (loc. cit. point 3b des motifs). Se fondant sur la décision T 1011/92 (loc. cit.), l'intervenant a proposé à cet égard l'application, par analogie, de l'article 105(2) CBE, troisième phrase. L'intimé s'y est opposé, alléguant que la taxe de recours ne saurait être isolée des autres conditions de recevabilité d'un recours, parmi lesquelles les délais à respecter. La décision G 1/97 rappelle le caractère formel du droit procédural, qui doit permettre aux justiciables de bien s'informer quant aux modalités de la procédure. Pour atteindre ce but, la voie législative est sans aucun doute mieux appropriée que la voie prétorienne.

6. Sur les questions relatives à la qualité de l'intervenant pendant la procédure de recours, qui étaient en suspens depuis la décision G 1/94 et ont fait l'objet, depuis les décisions T 27/92 et T 1011/92, de réponses différentes, aucune jurisprudence uniforme ne s'est développée à ce jour. Les conditions d'introduction, de conduite et de clôture d'une procédure doivent être régies par des dispositions claires, dans l'intérêt de la sécurité juridique, afin que les justiciables sachent quelles conséquences entraîneront leurs actes pendant la procédure. La Chambre estime par conséquent qu'il est nécessaire que la Grande Chambre de recours se prononce afin de clarifier la situation juridique.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Conformément à l'article 112(1)a) CBE, la Chambre soumet pour décision les questions de droit suivantes à la Grande Chambre de recours :

1. Lorsque l'unique recours a été retiré, la procédure peut-elle se poursuivre avec une partie qui est intervenue pendant la procédure de recours ?

2. Dans l'affirmative,

l'intervenant doit-il avoir rempli, outre les critères de recevabilité de l'intervention énoncés expressément à l'article 105 CBE, certaines conditions de forme, et doit-il notamment avoir acquitté la taxe de recours, afin de pouvoir poursuivre la procédure ?

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