T 0689/90 (Détecteur d'événements) of 21.1.1992

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1992:T068990.19920121
Date de la décision : 21 Janvier 1992
Numéro de l'affaire : T 0689/90
Numéro de la demande : 85302557.5
Classe de la CIB : G01R 31/08
Langue de la procédure : EN
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Raychem Corporation
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.4.01
Sommaire : 1. Les caractéristiques qui n'ont pas été divulguées dans la description de l'invention telle que déposée initialement et qui ne sont décrites que dans un document de référence indiqué dans ladite description ne font, de prime abord, pas partie du "contenu de la demande telle qu'elle a été déposée", au sens où l'entend l'article 123(2) CBE. Ce n'est que sous certaines conditions que ces caractéristiques peuvent être intégrées dans les revendications d'une demande par le biais d'une modification.
2. Une telle modification n'est pas contraire à l'article 123(2) CBE si pour l'homme du métier, il ressort clairement de la description de l'invention telle que déposée :
a) que la protection est ou pourrait être recherchée pour ces caractéristiques ;
b) que de telles caractéristiques concourent à la réalisation de l'objectif technique poursuivi par l'invention et font de ce fait partie de la solution du problème technique qui sous-tend l'invention revendiquée dans la demande ;
c) que de telles caractéristiques sont de toute évidence comprises implicitement dans la description de l'invention que doit comporter la demande lors du dépôt (article 78(1)b) CBE), et font donc partie du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée (article 123(2) CBE) ;
d) que lesdites caractéristiques sont définies de façon précise et peuvent être identifiées parmi l'ensemble des informations techniques que renferme le document de référence.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 78(1)(b)
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
Mot-clé : Modifications fondées sur un document de référence indiqué dans la description
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
J 0016/13
T 0196/92
T 0952/93
T 0287/94
T 0144/96
T 0374/96
T 0927/96
T 0497/97
T 0546/97
T 1187/97
T 0762/98
T 0945/98
T 0569/99
T 0292/01
T 0750/02
T 0558/03
T 0960/03
T 0236/04
T 0150/05
T 1497/06
T 0417/07
T 1415/07
T 0191/08
T 1378/08
T 1427/10
T 0664/11
T 0857/11
T 1436/12
T 1451/12
T 2477/12
T 2498/12
T 1321/13
T 0926/16
T 1125/17
T 1084/22

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 85 302 557.5 (numéro de publication : 0 160 440) a été rejetée par décision de la division d'examen. ...

II. Comme motif du rejet, la division d'opposition a fait valoir que les revendications 1 et 9 selon la requête principale comportaient chacune une modification contraire à l'article 123(2) CBE, que l'objet des revendications 1 à 8, 10 et 11 de la première requête subsidiaire n'impliquait pas d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE, et que la revendication 9 de la première requête subsidiaire ainsi que la revendication 1 de la seconde requête subsidiaire renfermaient toutes deux une modification contraire à l'article 123(2) CBE.

III. En ce qui concerne la constatation de la division d'opposition selon laquelle la revendication 9 de la requête principale et la revendication 9 de la seconde requête subsidiaire renfermaient toutes deux une modification contraire à l'article 123(2) CBE, il est à noter que, dans un cas comme dans l'autre, la revendication modifiée comportait une caractéristique selon laquelle "l'élément de localisation (11) et/ou l'élément de retour (12) comprend (comprennent) une âme métallique et une gaine allongée qui entoure électriquement l'âme et qui est composée d'un polymère conducteur". La demanderesse considère que cette caractéristique de la description se fonde en particulier sur la phrase suivante de la description déposée initialement : "Pour de plus amples détails concernant l'élément source, l'élément de localisation et l'élément de retour appropriés, il y a lieu de se reporter à la demande correspondant au document US 509 897" (cf. page 11, lignes 1 à 3 de la description déposée initialement).

A l'appui de ses constatations, la division d'examen a souligné que la demande déposée initialement n'exposait nullement la caractéristique revendiquée, que ce soit de façon explicite ou implicite, étant donné que la demande américaine à laquelle il était fait référence (dénommée ci-après "US 509 897") n'avait pas encore été publiée à la date de priorité de la demande en litige. Par conséquent, pour la division d'examen, le contenu de US 509 897 ne faisait pas partie de la description déposée initialement.

La division d'examen a également fait observer que même si elle pouvait être déduite directement de US 509 897, la caractéristique revendiquée n'avait pas été, dans la demande déposée initialement, identifiée sans équivoque comme étant la caractéristique essentielle du dispositif pour lequel la protection était recherchée. A cet égard, la division d'examen a affirmé que "pour que l'invention puisse être exposée de façon suffisamment claire et complète, l'exposé dans la demande des caractéristiques essentielles qui définissent l'invention doit se suffire à lui-même".

La division d'examen a déclaré qu'en l'occurrence la situation était différente de celle dont il était question dans la décision T 6/84 dont a excipé la demanderesse, notamment parce que dans l'affaire T 6/84, l'objet que l'on cherchait à ajouter à la revendication faisait partie intégrante d'un brevet publié et constituait de toute évidence un élément essentiel de l'invention.

IV. La demanderesse a formé un recours contre la décision précitée et a produit une nouvelle requête principale et une nouvelle requête subsidiaire en même temps que le mémoire exposant les motifs du recours. En ce qui concerne l'objection soulevée au titre de l'article 123(2) CBE, le mémoire exposant les motifs du recours faisait référence aux Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, notamment au point C-II, 4.18.

Dans une notification jointe à une citation à comparaître à une procédure orale, la Chambre a émis un avis préliminaire selon lequel la revendication 1 de la requête principale ne semblait pas satisfaire aux dispositions de l'article 56 CBE, et la revendication 7 de la requête principale et la revendication 1 de la requête subsidiaire semblaient renfermer des modifications qui allaient à l'encontre de l'article 123(2) CBE, compte tenu de ce qui a été exposé au point III ci-dessus. Il semblait notamment que l'indication concernant US 509 897 et la demande correspondante manquait de clarté et de précision et qu'il n'était pas facile de trouver ces documents ; en outre, il ne ressortait pas clairement du passage où il était fait référence à US 509 897 que les "plus amples détails" qui y étaient évoqués faisaient indiscutablement partie de l'invention pour laquelle la protection était recherchée, comme l'exigeait la décision T 6/84.

V. Avant la procédure orale du 15 janvier 1992, la requérante, présentant ses observations, a déclaré, sous toutes réserves, qu'elle n'entendait pas remettre en question la brevetabilité de la revendication 1 de sa requête principale. Elle a par conséquent formulé une nouvelle requête principale, qui reprenait en les combinant les objets des précédentes revendications 1 et

7. Dans ses observations, la requérante indiquait également que ce qui l'intéressait avant tout du point de vue commercial, c'était l'utilisation des techniques qu'elle avait mises au point dans le domaine des polymères conducteurs, et que la nouvelle revendication de sa requête principale comprenait ces caractéristiques techniques utiles d'un point de vue commercial.

Dans ses observations, la requérante indiquait également comment identifier la demande US 509 897 et, partant, la demande de brevet européen correspondante.

VI. ...

VII. A l'issue de la procédure orale qui s'est tenue devant la Chambre le 21 janvier 1992, la requérante a demandé l'annulation de la décision attaquée et la délivrance d'un brevet sur la base de ...

VIII. En ce qui concerne la question-clé que soulèvent aussi bien la requête principale que la requête subsidiaire, celle de savoir si l'intégration de la caractéristique (h) dans la revendication 1 de la requête principale et d'une caractéristique de formulation identique dans la revendication 1 de la requête subsidiaire satisfait aux exigences de l'article 123(2) CBE, la requérante a essentiellement avancé les arguments suivants :

a) Dans la description de la présente demande, il est clairement indiqué, à la page 11, lignes 1 à 3, que pour trouver "de plus amples détails" sur l'élément source, l'élément de localisation et l'élément de retour, le lecteur doit se reporter au document US 509 897, lequel amène tout naturellement l'homme du métier à consulter la demande de brevet européen correspondante, c'est-à- dire le document :

D1 : EP-A-0 133 748.

Le document susmentionné étant mentionné sept fois dans la présente demande, son importance ne peut échapper au lecteur. De surcroît, la présente demande portant sur un dispositif qui est une réplique du dispositif décrit dans le document de référence D1, elle peut être considérée comme une demande additionnelle ayant trait à une invention étroitement apparentée. L'expression "de plus amples détails" est un raccourci qui a été choisi pour cette référence, de manière à éviter que l'OEB ne puisse objecter que la présente demande englobe tout le contenu du document D1.

b) Se reportant au document D1, comme l'y invite la présente demande, page 11, lignes 1 à 3, l'homme du métier constatera que dans ce document de référence D1, page 23, lignes 9 à 19 et pages 25 à 27, les matériaux et la structure de l'élément de localisation, de l'élément de retour et de l'élément source sont décrits comme des éléments techniques indépendants, et il n'aura pas de mal à faire un choix parmi les éléments divulgués dans le document D1 pour en tirer l'enseignement selon lequel l'élément de localisation et l'élément de retour comprennent une âme métallique et une gaine allongée qui entoure électriquement l'âme et qui est composée d'un polymère conducteur.

c) Selon la décision T 6/84, il est permis de transférer dans une revendication indépendante d'une demande des éléments provenant d'un document cité dans cette demande afin de conférer à ladite revendication un contenu technique impliquant une activité inventive, les éléments transférés devenant alors partie de l'invention. Bien qu'il soit indiqué dans la décision T 6/84 que "les caractéristiques essentielles d'une même structure qui ont été exposées dans le document cité doivent toutes être intégrées dans la revendication", il doit être permis de les transférer toutes ou d'en intégrer une seule, en excluant toutes les autres, dans la revendication.

d) L'invention selon la présente demande est définie dans la revendication 1 déposée initialement, qui concerne notamment un élément de localisation et un élément de retour, si bien que de toute évidence les "plus amples détails" concernant ces éléments font partie de l'invention au sens où l'entend la décision T 6/84. Autre lien de nature technique qui prouve que l'âme métallique entourée d'un polymère conducteur dans l'élément de localisation et l'élément de retour fait partie de l'invention, il est indiqué à la page 7, paragraphe 2 de la description que l'impédance de la connexion constitue un facteur important qui doit être connu, et il est de fait qu'une âme métallique ainsi entourée d'un polymère conducteur permet de détecter l'apparition d'événements très divers.

e) D'autre part, dans la décision T 784/89 (JO OEB 1992, 438), il a été considéré qu'un dispositif dont l'utilisation dans un procédé donné a été divulguée dans un document de l'état de la technique cité dans le texte initial de la demande est implicitement divulgué dans cette demande telle qu'elle a été déposée. Par analogie avec cette décision, le contenu technique du document D1 doit donc être considéré comme étant implicitement divulgué dans la présente demande. En outre, dans cette décision T 784/89, une revendication indépendante pour un dispositif avait été admise bien que les caractéristiques de ce dispositif n'aient été divulguées que dans ce document de l'état de la technique qui avait été cité. Par conséquent, si l'on en juge par cette décision, il doit être possible d'intégrer dans la revendication indépendante 1 de la présente demande les caractéristiques concernant la structure et le matériau de l'élément de localisation et de l'élément de retour - bien qu'elles n'aient été divulguées que dans le document de référence D1.

IX. ...

Motifs de la décision

1. Article 123(2) CBE - Revendication 1 de la requête principale et de la requête subsidiaire

1.1 Comme il est indiqué au point V ci-dessus, l'invention sur laquelle porte la revendication 1 de la requête principale et de la requête subsidiaire inclut la caractéristique exposée au point (h) de la revendication 1 de la requête principale, caractéristique qui a été intégrée dans ces revendications par le biais d'une modification proposée après le dépôt de la demande. Comme l'a reconnu la requérante, si les modifications proposées en vue d'intégrer ladite caractéristique dans ces revendications sont contraires à l'article 123(2) CBE, la requête principale et la requête subsidiaire doivent toutes deux être rejetées, auquel cas aucune autre requête n'ayant été soumise à la Chambre, le recours et par voie de conséquence la demande doivent être rejetés. L'objection soulevée au titre de l'article 123(2) CBE revêt donc une importance fondamentale pour le recours.

1.2 Le recours pose d'une façon générale la question de savoir dans quelles circonstances l'on peut admettre qu'une demande de brevet européen fasse référence à un autre document, et quelle est l'incidence d'une telle référence, notamment lorsque l'on cherche par le biais d'une modification à inclure une partie du contenu d'un tel document dans la revendication principale de la demande.

Une condition fondamentale énoncée à l'article 78(1)b) CBE est que la demande de brevet européen "doit contenir une description de l'invention". Il semble donc que l'on puisse en conclure de prime abord que toutes les caractéristiques essentielles de l'invention pour lesquelles la protection est recherchée ou pourrait être recherchée doivent être incluses dans la description en tant que telle, telle qu'elle a été déposée initialement. C'est là la thèse adoptée au point C-II, 4.18 des Directives relatives à l'examen, où il est indiqué que "en ce qui concerne les caractéristiques essentielles de l'invention, la description du brevet doit être complète, c'est-à-dire qu'elle doit pouvoir être comprise sans que l'on ait à se reporter à un autre document". Toutefois, cette indication avait été donnée à propos en particulier du respect des dispositions de l'article 83 CBE concernant l'exposé de l'invention.

Dans le passage des Directives qui vient d'être cité, l'on trouve ensuite une énumération des conditions qui doivent être remplies pour qu'un document auquel il a été fait référence puisse être pris en considération si ce document n'était pas accessible au public avant la date de dépôt de la demande : à la date de dépôt de la demande ou avant cette date, une copie du document doit avoir été remise à l'Office, et le document doit avoir été rendu accessible au public au plus tard à la date de publication de la demande.

Alors qu'il est indiqué dans les Directives qu'un document auquel il est fait référence peut être "pris en considération" si ces conditions sont remplies, ceci - bien que ce ne soit pas dit expressément - lorsqu'il s'agit du respect de l'article 83 CBE, il n'est dit mot dans ces mêmes directives de l'incidence d'une telle référence dans le cas où il s'agit du respect de l'article 123(2) CBE.

1.3 Vu les informations fournies par la requérante dans ses observations en date du 15 janvier 1992, la Chambre est convaincue qu'il était possible sur la base des données bibliographiques divulguées initialement d'identifier avec certitude le document D1 à la date ou après la date de dépôt de la demande, et que ce document pouvait être pris en considération, puisque toutes les conditions requises à cet égard dans le passage précité des Directives étaient remplies. C'est ce qu'elle a clairement expliqué à la requérante au début de la procédure orale.

1.4 Il reste néanmoins à déterminer s'il est possible, après le dépôt de la demande, d'intégrer dans la revendication principale des caractéristiques qui ont été divulguées uniquement dans le document D1 cité en référence.

A cet égard, la question qui se pose à propos du respect de l'article 123(2) CBE est de savoir si l'objet de la demande modifiée "s'étend au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée". Pour la réponse à cette question, il est important de noter que l'article 93 CBE prévoit que pour toute demande de brevet européen, "la description, les revendications et, le cas échéant, les dessins, tels que ces documents ont été déposés" sont publiés dès que possible après le dépôt de ladite demande. Ainsi, après la publication, l'homme du métier qui lira la demande publiée pourra déterminer l'étendue de l'objet compris dans le "contenu de la demande telle qu'elle a été déposée", et par conséquent, l'étendue de l'objet pour lequel la protection est ou pourrait être recherchée.

De l'avis de la Chambre, l'homme du métier qui lit une demande de brevet européen publiée est normalement en droit d'attendre que la "description de l'invention" que cette demande doit contenir en vertu de l'article 78(1)b) CBE permette à elle seule d'identifier toutes les caractéristiques de l'invention décrite pour laquelle la protection est ou pourrait être recherchée. Ce n'est que dans des conditions particulières que des caractéristiques qui n'étaient pas incluses dans la description de l'invention telle que déposée initialement et qui ont été exposées uniquement dans un autre document indiqué dans ladite description peuvent être introduites ultérieurement par le biais d'une modification dans les revendications de la demande, et présentées comme des caractéristiques essentielles de l'invention pour laquelle la protection est recherchée. A première vue, ces caractéristiques ne sont pas comprises dans le "contenu de la demande telle qu'elle a été déposée", lequel, aux fins de l'article 123(2) CBE, est constitué de la description de l'invention, des revendications et, le cas échéant, des dessins, conformément à l'article 78(1) CBE.

Si ce n'était pas le cas, le contenu d'une demande dont la description comporte de nombreuses références à d'autres documents, qu'il s'agisse d'autres fascicules de brevets ou, par exemple, de manuels, n'aurait pratiquement plus de limites, notamment si ces documents renferment à leur tour des références à d'autres documents, et ainsi de suite.

2.1 A la connaissance de la Chambre, il n'existe jusqu'ici qu'un seul cas dans lequel une chambre de recours a admis l'introduction a posteriori dans la revendication principale de la demande de caractéristiques qui ne figuraient pas dans la description de l'invention contenue dans la demande telle que déposée initialement, mais qui étaient exposées dans un autre document cité en référence dans la dite description : il s'agit de la décision T 6/84 dont s'est prévalue la requérante dans la présente affaire (cf. point III ci-dessus).

Dans l'affaire précitée, la revendication 1 déposée initialement s'énonçait comme suit :

"1. Procédé pour le déparaffinage catalytique d'une huile hydrocarbonée paraffinique, impliquant la mise en contact de ladite huile avec un catalyseur dans des conditions de déparaffinage, caractérisé en ce que le catalyseur est de l'offretite synthétique."

La description initiale (EP-A-0 016 530, page 8, points 3 et 4), dans laquelle les caractéristiques étaient divulguées par référence à un autre document, comportait le texte suivant :

"L'offretite synthétique est une zéolite bien définie ayant un diagramme de diffraction des rayons X connu et dont la structure cristalline proposée est ...

L'offretite synthétique utilisée dans la présente invention et son procédé d'obtention sont divulgués dans le brevet canadien 934 130 ...".

Il ressort clairement de ces passages que le catalyseur "offretite synthétique" auquel il était fait référence dans la partie caractérisante de la revendication principale déposée initialement était une matière bien définie, et qu'il était indiqué dans la description de l'invention déposée initialement que d'autres paramètres caractérisant cette matière, ainsi que son mode de préparation étaient exposés dans le brevet canadien cité en référence.

Les autres paramètres caractérisant cette offretite synthétique qui ont été repris du brevet canadien dans la revendication principale étaient le rapport molaire des oxydes contenus dans l'offretite synthétique et le diagramme de diffraction des rayons X par la méthode des poudres avec des angles de Bragg et des intensités bien définis. Ces paramètres étaient déjà implicitement présents dans la revendication principale et ne faisaient que définir de façon plus précise l'offretite synthétique qui constituait déjà une caractéristique essentielle de l'invention revendiquée et décrite dans la demande déposée initialement.

En ce qui concerne les faits dont il est question dans l'affaire ayant fait l'objet de la décision T 6/84, il est clair que les autres paramètres caractérisant l'offretite synthétique (le rapport molaire des oxydes et le diagramme de diffraction des rayons X par la méthode des poudres) qui ont été repris dans la revendication principale par le biais d'une modification constituaient en réalité des caractéristiques faisant incontestablement partie de l'invention pour laquelle la protection était déjà recherchée, étant donné que l'utilisation d'offretite synthétique comme catalyseur était le seul élément caractérisant de la revendication déposée initialement, et que les caractéristiques ajoutées ensuite dans cette revendication ne faisaient que préciser la définition de cette offretite synthétique.

Par conséquent, dans l'affaire T 6/84 les faits étaient très différents de ceux de la présente affaire. D'autre part, la Chambre estime que les principes énoncés dans le sommaire de ladite décision ne peuvent véritablement s'appliquer aux faits de la présente espèce, que cette application joue ou non en faveur de la requérante.

2.2 Toutefois, compte tenu notamment de ce qui est énoncé dans le sommaire de la décision T 6/84, la Chambre estime que pour pouvoir décider si des caractéristiques qui n'ont pas été mentionnées dans la description de l'invention et qui ne sont décrites que dans un document de référence peuvent être intégrées dans une revendication d'une demande de brevet européen, il est nécessaire de voir si pour l'homme du métier, il ressort clairement de la description de l'invention telle que déposée :

a) que la protection est ou pourrait être recherchée pour des caractéristiques qui ne sont divulguées que dans le document de référence ;

b) que de telles caractéristiques concourent à la réalisation de l'objectif technique de l'invention et font de ce fait partie de la solution du problème technique qui sous-tend l'invention revendiquée dans la demande ;

c) que de telles caractéristiques sont de toute évidence comprises implicitement dans la description de l'invention que doit comporter la demande (article 78(1)b) CBE), et font donc partie du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée (article 123(2) CBE) ;

d) que lesdites caractéristiques sont définies de façon précise et peuvent être identifiées parmi l'ensemble des informations techniques que renferme le document de référence.

Si ces conditions précises sont remplies, la Chambre estime qu'il est possible d'introduire dans les revendications de la demande, sans enfreindre les dispositions de l'article 123(2) CBE, les caractéristiques qui ne sont divulguées que dans le document de référence, ces caractéristiques devant à juste titre être considérées comme faisant partie du "contenu de la demande telle qu'elle a été déposée".

3.1 En conséquence, la Chambre va examiner ci-dessous au point 3.2, alinéas a) à d) si les conditions précitées correspondantes a) à d) ont été respectées dans la présente espèce.

De ce point de vue, le document D1 divulgue un système qui ressemble assez à celui divulgué dans la présente demande, et qui comprend un élément de localisation, un élément source et un élément de retour, ces éléments étant décrits essentiellement par leurs propriétés électriques (cf. pages 7 à 10). Plus loin, aux pages 20 à 27, sont exposées des caractéristiques préférées de ces éléments, notamment dans le passage de la page 23 qui est celui invoqué avant tout par la requérante, du fait qu'il décrit des caractéristiques qui correspondent aux modifications qu'il est proposé d'apporter aux revendications de la présente demande. Aux pages 42 à 47, l'on trouve une description précise à l'aide de dessins représentant les éléments précités.

3.2 a) Dans la revendication 1 initiale de la présente demande, les propriétés de "l'élément de localisation" et de "l'élément de retour" qui ont été revendiqués ont été définies uniquement dans l'exposé respectivement des caractéristiques (a) et (b), dont le texte est identique à celui figurant dans la revendication 1 actuelle selon les requêtes principale et subsidiaire (cf. point VI ci-dessus). L'homme du métier peut donc déduire de la présente demande telle que déposée initialement que l'élément de localisation et l'élément de retour - au sens où l'entend l'invention pour laquelle la protection est recherchée - sont des moyens "allongés électriquement conducteurs" ayant une impédance donnée. La description initiale précise pour les modes de réalisation de ces moyens allongés électriquement conducteurs qui ont été revendiqués la longueur, la résistivité et le coefficient de température de la résistance, tout en limitant l'exposé des éléments structuraux au fait que l'élément de localisation, l'élément source et l'élément de retour sont combinés physiquement en un seul câble flexible. Toutefois, dans l'exposé initial de ces modes de réalisation, il n'est dit mot du matériau utilisé pour fabriquer l'élément de localisation et l'élément de retour.

De même, les dessins de la présente demande divulguent un élément de localisation et un élément de retour qui se présentent chacun exclusivement sous la forme d'un élément de circuit dont la résistance constitue une propriété essentielle du circuit, inhérente à celui-ci, et qui ne fournissent aucune indication précise sur la forme spatiale de ces éléments ni sur les matériaux dont ils sont constitués. Par conséquent, la Chambre estime que pour l'homme du métier qui lirait la présente demande et en interpréterait l'exposé initial considéré dans son ensemble, il serait clair que l'élément de localisation et l'élément de retour de la présente invention sont des éléments de circuit définis exclusivement par leur conductivité électrique.

3.2 b) La présente demande porte sur un dispositif pour contrôler l'apparition d'un événement et pour localiser cet évènement à son apparition (cf. description initiale, de la page 1, ligne 28, à la page 2, ligne 15). Pour atteindre cet objectif, l'on mesure la chute de tension le long de l'élément de localisation entre l'endroit où se produit l'événement et un point de référence. Il est clair pour l'homme du métier qu'en application de ce principe de base, il est essentiel pour la précision de cette localisation de connaître exactement l'impédance de la connexion électrique établie par l'événement entre l'élément de localisation et l'élément de retour (cf. également la description initiale, page 7, 2e paragraphe). Toutefois, contrairement à ce qu'a avancé la requérante (cf. point VIII d) ci-dessus), l'impédance de la connexion établie par l'événement est déterminée non pas par les âmes métalliques des éléments entourées d'un polymère conducteur, mais par la résistivité de la connexion ionique entre les éléments (cf. document D1, numéros de référence 20, 21 des figures 33 et 34 ; description correspondante, pages 42 et 43) ou par la mesure du courant qui passe dans la connexion (cf. description de la présente demande, page 7, lignes 13 et 14).

Le fait que l'âme métallique (entourée d'un polymère conducteur) d'un élément de localisation et d'un élément de retour permette de détecter l'apparition d'événements très divers ne découle pas des documents de la demande initiale, et n'est donc pas un argument qui peut être retenu dans le raisonnement de la requérante reproduit au point VIII d).

Par conséquent, l'on ne peut trouver dans le texte de la présente demande telle qu'elle a été déposée initialement l'exposé d'un lien technique quelconque amenant l'homme du métier à constater que l'une des caractéristiques exposées dans le document de référence peut être essentielle ou utile pour atteindre l'objectif technique qu'il poursuit et pour résoudre le problème technique décrit dans la demande telle qu'elle a été déposée.

3.2 c) Il ne ressort nullement de la description de l'invention déposée initialement que les "plus amples détails" à chercher dans le document D1 pour ce qui est de l'élément de localisation et de l'élément de retour appropriés (détails qui sont actuellement repris dans l'exposé de la caractéristique H de la revendication 1 selon la requête principale et de la revendication 1 selon la requête subsidiaire) doivent permettre d'identifier des caractéristiques de l'invention pour laquelle la protection pourrait être recherchée, ni que lesdites caractéristiques sont de toute évidence contenues implicitement dans la description de l'invention.

3.2 d) De l'avis de la Chambre, le fait qu'il ait été indiqué dans la présente demande, page 11, lignes 1 à 3, que l'on peut trouver dans le document de référence "de plus amples détails" concernant les éléments "appropriés" ne constitue pas une définition précise et sans équivoque des informations techniques spécifiques contenues dans ledit document, qu'il faudrait incontestablement considérer comme faisant implicitement partie du contenu de la demande telle que déposée. En fait, le document de référence D1 évoque bon nombre de modes de réalisation possibles de l'élément de localisation, de l'élément de retour et de l'élément source, en citant à cet égard d'autres brevets et demandes ainsi que d'autres documents pertinents, de sorte que si la divulgation du document D1 relative aux "plus amples détails" devait faire partie du contenu de la présente demande, ce dernier serait quasiment illimité. A cet égard, le document D1 ne présente même pas les caractéristiques que l'on cherche à inclure dans les revendications de la présente demande comme étant des caractéristiques essentielles de l'élément de localisation et de l'élément de retour qu'il décrit, mais y voit simplement des caractéristiques optionnelles propres à "de nombreuses applications de l'invention, notamment celles dans lesquelles l'événement se produit en présence d'un électrolyte, (auquel cas) l'on peut alors obtenir une combinaison excellente des propriétés désirées" (cf. page 23, lignes 9 à 19).

La Chambre estime en outre que la divulgation du document D1 ne peut nullement conduire l'homme du métier à sélectionner l'âme métallique de l'élément de localisation entourée d'un polymère conducteur 111, 112 parmi les caractéristiques qui sont indissociables et constituent les modes de réalisation représentés dans les figures 33 et 34 de ce document D1. D'autre part, à la différence du texte des modifications que la requérante propose d'apporter aux revendications, le texte du document D1 ne divulgue pas le revêtement de l'élément de retour au moyen d'un polymère conducteur. L'élément de retour 16 des modes de réalisation mentionnés dans le document D1 a une âme métallique entourée soit d'une gaine isolante 161, soit d'une feuille polymère isolante 22 (cf. document D1, figures 33 à 37, ainsi que la description correspondante, pages 42 à 45). Par conséquent, la Chambre ne peut retenir les arguments de la requérante reproduits ci-dessus aux points VIII a), b) et c).

4. Compte tenu de ce qui précède, la Chambre est d'avis que les caractéristiques transférées du document D1 dans la revendication 1 des requêtes principale et subsidiaire actuelles sont contraires à l'article 123(2) CBE, et ne sont donc pas admissibles.

5. La requérante a également cité la décision T 784/89 à l'appui de ses affirmations (cf. point VIII e) ci-dessus). Cette décision avait autorisé l'intégration dans la demande, après le dépôt, de revendications pour un dispositif (revendications 14 à 26 du document EP-B1-0 144 026) dans lesquelles l'expression "des moyens pour" avait été ajoutée au début de l'exposé de chaque mesure revendiquée dans les revendications de procédé 1 à 13, les seules à avoir été déposées initialement (cf. notamment mesures (a) à (h) de la revendication 1), et dans lesquelles des caractéristiques fonctionnelles et structurelles déjà revendiquées avaient été maintenues avec la formulation correspondante. Dans le cas de la décision T 784/89, aucune des informations techniques contenues dans le document de l'état de la technique qui avait été cité (US-A-4 297 637) n'avait été reprise dans les nouvelles revendications de dispositif qui avaient été ajoutées. Vu que des mesures particulières et les moyens mis en oeuvre pour exécuter ces mesures sont indissociables du point de vue technique, ces moyens portant sur un dispositif font en soi partie d'une invention de procédé. En outre, il était précisé explicitement dans les pièces initiales de la demande que "l'invention vise également à fournir des moyens ..." (cf. EP-A-0 144 026, page 5, ligne 14), ce qui prouve incontestablement que la demande telle que déposée visait déjà à obtenir également une protection pour un dispositif.

On le voit, les circonstances dans l'affaire ayant fait l'objet de la décision T 784/89 sont très différentes de celles de la présente espèce, si bien que cette décision ne peut être invoquée pour prouver l'admissibilité des modifications dans la présente affaire.

6. ...

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. ...

2. Le recours est rejeté.

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