T 0194/84 (Fibres de cellulose) of 22.9.1988

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1988:T019484.19880922
Date de la décision : 22 Septembre 1988
Numéro de l'affaire : T 0194/84
Numéro de la demande : 80303285.3
Classe de la CIB : H01M 4/24
Langue de la procédure : EN
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : General Motors
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.4.01
Sommaire : L'examen visant à déterminer s'il y a extension de l'objet de la demande ne correspond à l'examen de nouveauté que dans la mesure où, dans les deux cas, il faut vérifier si une information dérive ou non directement et sans aucune équivoque de celles déjà contenues dans un document, à savoir respectivement la demande telle qu'elle a été déposée ou un document de l'état de la technique. Une modification n'est pas admissible si le changement de contenu de la demande qui en résulte, c'est-à-dire si l'objet généré par la modification est nouveau par rapport au contenu de la demande telle que déposée. Ce qu'il importe donc d'examiner, c'est le changement de contenu, c'est-à-dire le contenu modifié moins le contenu initial. C'est uniquement dans ces conditions que ce "test de la nouveauté" est applicable également à des modifications conduisant à une généralisation ou à la suppression d'une caractéristique (cf. point 2.4 des motifs de la décision).
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
Mot-clé : Généralisation inadmissible
Test de la nouveauté ("novelty test")"
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0405/87
T 0248/88
T 0527/88
T 0572/88
T 0601/88
T 0118/89
T 0143/89
T 0392/89
T 0673/89
T 0748/89
T 0157/90
T 0233/90
T 0685/90
T 0064/91
T 0288/92
T 0545/92
T 0758/92
T 0197/93
T 0242/93
T 0680/93
T 0746/93
T 0271/94
T 0476/94
T 1063/96
T 0895/97
T 0904/97
T 1074/97
T 0802/98
T 0433/01
T 0193/03
T 0342/03
T 0583/03
T 1160/04
T 1022/05
T 1464/05

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 80 303 285.3 (publiée sous le n° 0 028 879) a été rejetée par décision de la division d'examen 019. Cette décision a été rendue sur la base des revendications 1 à 4 reçues le 11 octobre 1983.

II. La demande a été rejetée au motif qu'elle avait été modifiée de telle manière que son objet s'étendait au-delà du contenu de la demande telle qu'elle avait été déposée, ce qui est contraire à l'article 123(2) CBE.

III. La requérante a formé un recours contre cette décision.

IV. En réponse à une notification de la Chambre, la requérante conclut à présent à l'annulation de la décision contestée et demande la délivrance d'un brevet sur la base des revendications suivantes :

i) Revendications 1 à 4 déposées le 11 octobre 1983 (requête principale) ; la revendication 1 s'énonce comme suit :

"Cellule alcaline nickel-zinc d'accumulateur électrique comportant une électrode en nickel, une électrode en zinc espacée de cette électrode en nickel et un électrolyte alcalin aqueux remplissant l'espace séparant ces électrodes, dans laquelle l'électrode en zinc comprend une grille conductrice noyée dans une matière active de particules riches en zinc étroitement unies à d'autres ingrédients pour former un mélange, caractérisée en ce que ces autres ingrédients comprennent une combinaison de particules d'oxyde et/ou d'hydroxyde de calcium, permettant de former du zincate de calcium pendant la décharge de la pile, et un ensemble entremêlé d'irrigateurs fibreux stables et en quantité suffisante, à propriétés renforçantes, hydrophiles et absorbantes, qui traversent ledit mélange pour lier entre elles ces particules sur la grille et imbiber d'électrolyte le mélange de façon à y maintenir le pouvoir d'action du Ca0/Ca(0H)2, lesdits irrigateurs comportant des fibres de cellulose dont le pouvoir absorbant est pratiquement comparable à celui de la cellulose naturelle, et la matière active ne contenant pratiquement pas d'autres liants qui, de manière notable, interféreraient avec l'aptitude des fibres à irriguer le mélange ou diminueraient le rendement de l'électrode de zinc."

ii) Revendications 1 à 4 déposées le 10 janvier 1985 à titre de "variante n° 1" (première requête subsidiaire) ; la revendication 1 s'énonce comme suit :

"Cellule alcaline nickel-zinc d'accumulateur électrique comportant une électrode en nickel, une électrode en zinc espacée de cette électrode en nickel et un électrolyte alcalin aqueux remplissant l'espace séparant ces électrodes, dans laquelle l'électrode en zinc comprend une grille conductrice noyée dans une matière active de particules riches en zinc étroitement unies à d'autres ingrédients pour former un mélange, caractérisée en ce que ces autres ingrédients comprennent une combinaison de particules d'oxyde et/ou d'hydroxyde de calcium, permettant de former du zincate de calcium pendant la décharge de la pile, et un ensemble entremêlé de fibres de cellulose stables et en quantité suffisante, à propriétés renforçantes et hydrophyles, qui traversent ledit mélange pour lier entre elles ces particules sur la grille et assurer l'irrigation du mélange par l'électrolyte de façon à y maintenir le pouvoir d'action du Ca0/Ca(0H)2, lesdites fibres de cellulose ayant une aptitude à irriguer au moins pratiquement égale à celle de la cellulose naturelle, et ledit mélange ne contenant pratiquement pas d'autres liants qui, de manière notable, interféreraient avec l'aptitude à irriguer des fibres de cellulose ou diminueraient le rendement de l'électrode de zinc."

iii) Revendications 1 à 3 déposées le 10 janvier 1985 à titre de "variante n° 2" (seconde requête subsidiaire) ; la revendication 1 s'énonce comme suit :

"Cellule alcaline nickel-zinc d'accumulateur électrique comportant une électrode en nickel, une électrode en zinc espacée de cette électrode en nickel et un électrolyte alcalin aqueux remplissant l'espace séparant ces électrodes, dans laquelle l'électrode en zinc comprend une grille conductrice noyée dans une matière active de particules riches en zinc étroitement unies à d'autres ingrédients pour former un mélange, caractérisée en ce que ces autres ingrédients comprennent une combinaison de particules d'oxyde et/ou d'hydroxyde de calcium, permettant de former du zincate de calcium pendant la décharge de la pile, et un ensemble entremêlé de fibres de cellulose naturelle en quantité suffisante afin de lier entre elles ces particules sur la grille et d'assurer l'irrigation dudit mélange par l'électrolyte de façon à y maintenir le pouvoir d'action du Ca0/Ca(0H)2, la matière active ne contenant pratiquement pas d'autres liants qui, de manière notable, interféreraient avec l'aptitude de la cellulose à ainsi irriguer le mélange ou diminueraient le rendement de l'électrode de zinc."

La requérante demande en outre:

iv) Le renvoi de l'affaire devant la division d'examen pour suite à donner en tant que de besoin ;

v) La tenue d'une procédure orale dans le cas où la Chambre aurait l'intention de rejeter le recours ;

vi) Le remboursement de la taxe de recours.

V. Les moyens invoqués par la requérante peuvent se résumer comme suit. En lisant correctement la demande, l'homme du métier doit s'apercevoir que l'invention ne se limite pas à une électrode comportant des fibres de cellulose naturelle, telle que celle mentionnée dans les revendications déposées à l'origine. La phrase suivante : "Un accumulateur Ni-Zn selon la présente invention est muni d'une électrode en zinc pratiquement sans aucun des liants habituels et dont la matière active est traversée par un ensemble entremêlé de fibres stables à propriétés renforçantes et hydrophiles", qui se trouve page 3, lignes 20 à 24 de la description, est une énonciation générale de l'invention alors que, à l'évidence, la phrase : "L'invention comprend (en anglais : "comprehends") ... un ensemble entremêlé de fibres en cellulose naturelle ... etc.", qui commence page 3, ligne 35, pour finir page 4, ligne 6, se rapporte à un mode de réalisation particulier. En effet, dans ce contexte, si l'on se réfère à l'American Heritage Dictionary of the English Language, le verbe anglais "comprehend" ("comprendre") a pour synonymes "include or embrace ; comprise" (c'est-à-dire "inclure" ou "englober"). Les fibres de cellulose naturelle sont un bon exemple de fibres stables à propriétés renforçantes et hydrophiles, telles que celles visées aux lignes 23 et 24 de la page 3, car, entremêlées comme dans le cas du papier, elles assurent le maintien mécanique et la solidité de la matière active tout en pourvoyant à son irrigation par l'électrolyte du fait de leurs propriétés hydrophiles (page 4, lignes 15 à 19). L'homme du métier en déduira que l'on peut tout aussi bien utiliser des fibres ayant une structure similaire et une aptitude à irriguer (ou un pouvoir absorbant) comparable. Les fibres de rayonne (c.-à-d. des fibres de cellulose régénérée) étant, comme on le sait, structurellement identiques à la cellulose dont elles sont issues (Golding B., Polymers and Resins, D. Van Nostrand Co. Inc., New York, Toronto et Londres, 1959, page 194), la modification consistant à englober dans l'invention les fibres de cellulose en général n'a pas introduit un objet s'étendant au- delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée. A cet égard, la requérante invoque notamment les Directives, C-VI, 5.6, dans la mesure où, selon elle, l'objet en question, en l'occurrence les fibres de cellulose autres que des fibres de cellulose naturelle, est, dans le contexte de l'invention, si familier à l'homme du métier que le fait de le mentionner peut de toute évidence être considéré comme un simple éclaircissement. La requérante prétend en outre que cette modification est admissible au regard du "test de la nouveauté" dont traitent les Directives C-VI, 5.4 et C-IV, 7.2.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Requête principale

2.1. La revendication 1 selon la requête principale résulte dans une large mesure de la combinaison des caractéristiques énoncées dans les revendications 1 et 2 déposées à l'origine, tout en mentionnant de façon plus circonstanciée les fonctions divulguées. La différence par rapport à cette combinaison réside dans le fait qu'il est maintenant prévu d'utiliser des "irrigateurs fibreux stables et en quantité suffisante, à propriétés renforçantes, hydrophiles et absorbantes, qui traversent ledit mélange pour lier entre elles ces particules sur la grille ... lesdits irrigateurs comportant des fibres de cellulose dont le pouvoir absorbant est pratiquement comparable à celui de la cellulose naturelle" alors que, d'après la revendication 1 déposée à l'origine, il fallait "un mélange composé ... de suffisamment de cellulose naturelle pour maintenir lesdites particules en place sur la grille." C'est sous cet angle qu'il convient d'examiner si la modification respecte la condition énoncée à l'article 123(2) CBE ; à cet égard, cette modification a pour conséquence essentielle que désormais, l'objet de la revendication peut englober, outre des fibres de cellulose naturelle, des fibres de cellulose autres que des fibres de cellulose naturelle.

2.2. La description et les revendications telles que déposées à l'origine concordent entièrement en ce sens qu'il y est fait uniquement mention de fibres de cellulose naturelle, sauf dans le passage compris entre les lignes 20 et 24 de la page 3, cité au point V supra et qui, pris isolément, pourrait laisser croire que l'invention ne se limite pas aux fibres de cellulose naturelle, ni même aux fibres de cellulose en général. En tout état de cause, c'est le contenu de la demande dans son ensemble qu'il y a lieu de prendre en compte, et le passage en question doit être interprété comme le ferait l'homme du métier, c'est-à-dire en le replaçant dans le contexte de la demande tout entière. Dans le reste de la description, il est plusieurs fois fait référence à des fibres de cellulose naturelle et, là ou ne figurent que les termes "fibres de cellulose" ou "fibres", il est clair, d'après ce qui précède, que c'est bien de fibres de cellulose naturelle qu'il s'agit. Dans la liste des exemples de fibres utilisables, fournie à la page 7, ne sont d'ailleurs citées que des fibres de cellulose naturelle (fibres de cellulose de bois, papier journal et papier-filtre de premier choix). La Chambre estime donc que le passage de la page 3, lignes 20 à 24 mentionné ci-dessus ne saurait être considéré comme autre chose qu'une déclaration générale au sujet de l'invention, qui introduit des explications plus détaillées fournies ensuite, et qu'il ne renseigne absolument pas sur la portée de l'invention.

Il n'est pas possible de suivre la requérante lorsqu'elle allègue que l'emploi, à la page 3, ligne 35, du verbe "comprend" prouve que l'énoncé introduit par ce verbe a trait à un mode de réalisation particulier de l'invention décrite de manière générale dans le passage qui figure entre les lignes 20 et 24 de la page 3. S'il est vrai qu'il convient de lire la demande en tenant compte du lien qui existe entre le passage allant de la ligne 35 de la page 3 à la ligne 6 de la page 4 et celui compris entre les lignes 20 et 24 de la page 3, il n'en demeure pas moins que ce dernier passage concorde avec les revendications dans la mesure où il indique que l'invention a pour objet un accumulateur nickel-zinc, le premier précisant en outre que l'invention comprend une électrode en zinc. Le lecteur auquel s'adresse la description pensera que l'emploi du verbe "comprend" résulte du fait que, de l'accumulateur proprement dit, on en arrive à l'électrode ; et comme, ne serait-ce que d'après les revendications et le titre, il sait que l'objet de l'invention est un accumulateur, il interprétera ce verbe "comprend" comme ayant par exemple la même signification que "a trait particulièrement à". De plus, l'énoncé suivant : "électrode en zinc pour un accumulateur Ni-Zn alcalin comportant un mélange essentiellement homogène de particules riches en zinc" (page 3, ligne 35, à page 4, ligne 4) ne fait que fournir à l'homme du métier une information plus détaillée au sujet de l'électrode en zinc mentionnée page 3, ligne 21. De la même manière, l'expression "fibres de cellulose naturelle entremêlées", qui figure aux lignes 4 et 5 de la page 4, sera censée apporter un supplément d'information au sujet des fibres hydrophiles mentionnées page 3, ligne 24, et non constituer un exemple de ces dernières. Cela est confirmé par l'insertion répétée de l'indication "pratiquement sans aucun des liants habituels", car il est clair ici que cette caractéristique n'a pas valeur d'exemple. De surcroît, en lisant la description, l'homme du métier attachera plus d'importance à l'expression "fibres de cellulose naturelle", qui apparaît à plusieurs reprises dans la suite du texte, qu'au sens possible du verbe "comprend".

Donc, pour l'homme du métier, rien n'indique explicitement que l'électrode en zinc pourrait contenir des fibres de cellulose autres que des fibres de cellulose naturelle.

2.3. La Chambre ne saurait non plus se laisser convaincre par la requérante lorsque celle-ci affirme que, de l'enseignement contenu sous forme explicite dans la demande telle que déposée, l'homme du métier déduit comme indication implicite que des fibres ayant une structure semblable à celle des fibres de cellulose naturelle et une aptitude à irriguer comparable permettraient d'obtenir les mêmes résultats, et que, par conséquent, de telles fibres doivent faire partie du contenu de la demande telle que déposée. La question de l'irrigation est évoquée à quatre reprises dans la description, à savoir page 3, lignes 26 et 27 ("lesdites ... fibres irriguent la matière active") ; page 4, lignes 18 et 19 ("les fibres, du fait de leurs propriétés hydrophiles, assurent l'irrigation de la matière active par l'électrolyte") ; page 6, lignes 4 et 5, à propos du rôle des fibres de cellulose dans l'irrigation (du zinc sous forme de zincate de calcium) ; page 7, lignes 1 à 3 ("des liants ... pas dans une quantité de nature à diminuer l'aptitude de la cellulose à irriguer l'électrode"). Aucun de ces passages n'indique avec précision quelle doit être l'aptitude à irriguer des fibres de cellulose naturelle, ce qui pourrait alors servir de critère pour le choix d'autres fibres ; aussi ne peut-on pas parler à cet égard d'indication implicite, et il n'existe donc pas d'analogie avec l'exemple du caoutchouc/élastomère cité dans les Directives relatives à l'examen C-IV, 7.2, qu'invoque la requérante. Ce qui est dit explicitement, c'est que les électrodes de zinc contenant des fibres de cellulose naturelle se sont révélées avoir un meilleur rendement et assurer une meilleure conservation de capacité après un cycle prolongé (page 4, lignes 9 à 11) et que le mécanisme exact par lequel les fibres de cellulose naturelle pourvoient à la cohésion des particules riches en zinc et à la conservation des niveaux de rendement et de capacité n'est pas complètement compris (page 4, lignes 12 à 15), bien que soit suggérée une possibilité d'explication. Pour ce qui est d'un enseignement implicite, il faut dire que le seul qui soit susceptible de se dégager de la demande considérée dans son ensemble, et plus particulièrement de la partie comprise entre la ligne 35, page 3 et la ligne 3, page 5, est que c'est le caractère "naturel" des fibres de cellulose naturelle, et non pas leur aptitude à irriguer qui contribue à accroître la durée de vie des accumulateurs électriques à des niveaux de rendement et de capacité élevés, notamment lorsqu'elles sont combinées avec des particules d'oxyde ou d'hydroxyde de calcium.

2.4. L'argument qu'avance encore la requérante, selon lequel la demande telle que déposée pourrait à juste titre être citée comme détruisant la nouveauté de l'objet d'une revendication plus générale relative à des fibres de cellulose, se fonde sur une application erronée du "test de la nouveauté" (en anglais "novelty test") aux fins d'apprécier l'admissibilité d'une modification. S'il en était autrement, l'on pourrait déduire que les modifications conduisant à une généralisation ou à la suppression d'une caractéristique sont toujours admissibles. L'examen visant à déterminer s'il y a extension de l'objet de la demande ne correspond à l'examen de nouveauté que dans la mesure où, dans les deux cas, il faut vérifier si une information dérive ou non directement et sans aucune équivoque de celles déjà contenues dans un document, à savoir respectivement la demande telle qu'elle a été déposée ou un document de l'état de la technique. Il s'ensuit qu'une modification n'est pas admissible si le changement de contenu de la demande qui en résulte, c'est- à-dire si l'objet généré par la modification est nouveau par rapport au contenu de la demande telle que déposée ou, en d'autres termes, si le changement de contenu est susceptible de détruire la nouveauté d'une éventuelle revendication produite postérieurement, alors que le contenu originel ne la détruirait pas. Ce qu'il importe d'examiner, c'est le changement de contenu, c'est-à-dire le contenu modifié moins le contenu initial, et, dans ces conditions, ce "test de la nouveauté" est applicable également à des modifications conduisant à une généralisation ou à la suppression d'une caractéristique. Aussi, par "test de la nouveauté", faut-il entendre en fait que la détermination de la nouveauté et l'appréciation de l'admissibilité d'une modification doivent obéir aux mêmes critères.

2.5. Dans la présente espèce, l'objet de la revendication 1 selon la requête principale peut être considéré comme le résultat soit d'une généralisation (passage des fibres de cellulose naturelle aux fibres de cellulose en général), soit de la suppression d'une caractéristique (cellulose naturelle). Dans l'un et l'autre cas, l'objet généré par la modification, à savoir des fibres de cellulose autres que des fibres de cellulose naturelle, est nouveau par rapport au contenu initial de la demande puisque, comme cela a été démontré plus haut aux points 2.2 et 2.3, celle- ci ne fait nullement référence, que ce soit explicitement ou implicitement, à des fibres de cellulose autres que les fibres de cellulose naturelle. Par ailleurs, la nouveauté d'une revendication produite ultérieurement et se rapportant à des fibres de cellulose, à l'exclusion des fibres de cellulose naturelle, serait affectée non pas par le contenu de la demande telle que déposée, mais par l'objet généré par la modification.

2.6. La revendication 1 selon la requête principale contient d'autre part une limitation, en ce sens que le pouvoir absorbant des fibres de cellulose doit être pratiquement comparable à celui de la cellulose naturelle. Malgré cela, force est de constater que le fait de remplacer "fibres de cellulose naturelle" par "fibres de cellulose" constitue une modification non conforme à l'article 123(2) CBE, car toutes les fibres de cellulose autres que les fibres de cellulose naturelle ne sont pas ainsi exclues pour autant. De plus, il semble que cette limitation entraîne elle-même une extension de l'objet de la demande dans la mesure où il n'était nullement fait état du pouvoir absorbant des fibres dans les pièces de la demande telle que déposée. Cette objection resterait valable même si l'on acceptait l'argument de la requérante, selon lequel le pouvoir absorbant d'une fibre, dont la mesure est donnée par sa reprise en humidité, reflète son aptitude à irriguer; en effet, comme indiqué ci-dessus au point 2.3, la demande telle que déposée ne mentionnait pas avec précision quelle doit être l'aptitude à irriguer des fibres de cellulose naturelle et donc, le cas échéant, leur pouvoir absorbant, qui pourrait servir de critère pour le choix d'autres fibres de cellulose.

2.7. Il convient donc de rejeter la requête principale.

3. Première requête subsidiaire

3.1. Dans la revendication 1 telle qu'énoncée dans cette requête, il y a de nouveau eu substitution de "fibres de cellulose naturelle" par "fibres de cellulose". Cette fois, c'est l'aptitude à irriguer des fibres - précédemment leur pouvoir absorbant - qui y est mentionnée comme devant être au moins pratiquement égale à celle de la cellulose naturelle. Ce qui a déjà été dit à propos de la requête principale vaut donc également pour cette revendication.

3.2. Par conséquent, il convient aussi de rejeter la première requête subsidiaire.

4. Seconde requête subsidiaire

4.1 Dans la revendication 1 selon cette requête, il n'est fait mention que de fibres de cellulose naturelle. La plupart des autres caractéristiques qui y sont énoncées se fondent sur la description initiale ; la seule objection à soulever concerne l'emploi de l'expression "intimate mixture" ("étroitement unies à... pour former un mélange"), qui n'apparaissait pas dans la demande telle que déposée et qui semble avoir été introduite pour tenir compte d'une critique que la division d'examen avait émise à l'encontre de l'utilisation de l'adjectif "homogeneous" ("homogène") figurant dans la revendication déposée à l'origine. La Chambre ne voit pas d'objection à l'emploi de l'expression "substantially homogeneous" ("pratiquement homogène"), qui figure à la page 4 de la description initiale, ligne 2, et qu'il convient donc de substituer à "intimate" ("étroitement unies..."). Ainsi modifiée, la revendication 1 selon la seconde requête subsidiaire satisfait aux conditions de l'article 123(2) CBE. Elle est également conforme à l'article 84 CBE. Les revendications 2 et 3 selon la seconde requête subsidiaire sont à leur tour admissibles, en tant que revendications dépendantes de la revendication 1. Toutefois, pour garder l'unité de la terminologie, il convient, dans le texte anglais de la revendication 2, ligne 31, de remplacer le mot "mixture" par "admixture" (le "mélange" évoqué ci-dessus).

5. Dans sa notification du 18 janvier 1983, la division d'examen avait indiqué que la demande contenait une revendication indépendante - ayant pratiquement la même portée que la revendication 1 selon la seconde requête subsidiaire - dont l'objet impliquerait une activité inventive. La Chambre ne voit aucune raison de ne pas partager sur ce point l'avis de la division d'examen. Toutefois, la version la plus récente de la description, qui se compose des pages 3, 5, 6, 8, 9, 10, 12 et 13, reçues le 3 novembre 1982 et des pages 1, 2, 4, 7 et 11, reçues le 5 mars 1983, ne correspond pas aux revendications admissibles. C'est pourquoi la Chambre, usant de la possibilité prévue à l'article 111(1) CBE, a décidé de renvoyer l'affaire devant la division d'examen pour suite à donner.

6. Dans ces conditions, la tenue d'une procédure orale, demandée sous réserve par la requérante, devient inutile.

7. Ayant soigneusement examiné au vu du contenu du dossier le déroulement de la procédure devant la division d'examen, la Chambre n'a pu constater de vice de procédure, et encore moins de vice "substantiel" dont, d'après la règle 67 CBE, l'existence est une condition préalable au remboursement de la taxe de recours ; la requérante n'avait d'ailleurs pas motivé sa requête à cet égard.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée devant la division d'examen avec instruction de délivrer un brevet sur la base des revendications 1 à 3 reçues le 10 janvier 1985 et désignées comme "variante n° 2", compte tenu des modifications suivantes à apporter au texte anglais :

revendication 1, ligne 7 - remplacer "intimate" par "substantially homogeneous" ;

revendication 1, ligne 12 - écrire le mot "entanglement" avec son orthographe correcte ;

revendication 2, ligne 31 - remplacer "mixture" par "admixture";

adapter la description aux revendications modifiées.

3. La requête en remboursement de la taxe de recours est rejetée.

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