T 0242/93 () of 16.9.1994

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1994:T024293.19940916
Date de la décision : 16 Septembre 1994
Numéro de l'affaire : T 0242/93
Numéro de la demande : 87907236.1
Classe de la CIB : H01M 6/16
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Nouveau matériau à conduction ionique constitué par un sel en solution dans un électrolyte liquide
Nom du demandeur : Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), et Al.
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.4.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
Mot-clé : Modifications - extension de l'objet de la demande (non - deuxième requête subsidiaire)
Amendments - added subject-matter - no (second auxiliary request)
Remittal to examining division
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0190/83
T 0201/83
T 0194/84
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le requérant (demandeur) a formé un recours contre la décision de la division d'examen relative au rejet de la demande de brevet n° 87907236.1.

La division d'examen était parvenue à la conclusion que la demande ne satisfaisait pas aux conditions prévues par l'article 123(2) CBE.

II. Le requérant a requis la délivrance d'un brevet sur la base des documents suivants :

requête principale :

Revendications :

N° : 1 à 9 fournies avec la lettre du 24. janvier 1992,

Description :

Pages : 1 à 5 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991, à adapter,

première requête subsidiaire :

Revendications :

N° : 1 à 9 fournies avec le mémoire du 15. février 1993,

Description :

Pages : 1 à 5 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991, à adapter,

deuxième requête subsidiaire :

Revendications :

N° : 1 à 9 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991,

Description :

Pages : 1 à 5 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991.

III. Le libellé de la revendication 1 selon la requête principale est le suivant :

"Matériau à conduction ionique comprenant au moins un sel en solution dans un solvant liquide aprotique polaire, caractérisé en ce que le sel est représenté par une des formules suivantes :

(I) M [RF-SO2-N-SO2-R'F]

(II) M [RF-SO2-N-CO-R'F]

(III) M [RF-CO-N-CO-R'F] / SO2

(IV) M [QF N] / SO2

formules dans lesquelles :

- M est un métal alcalin, alcalino-terreux, un métal de transition ou une terre rare,

- RF et R'F sont identiques ou différents et représentent chacun un radical perhalogéné, de préférence perfluoré, ayant de 1 à 12 atomes de carbone,

- QF est un radical divalent perfluoré ayant de 2 à 6 atomes de carbone.".

Le libellé de la revendication 6 selon la requête principale est le suivant :

"Générateur électrochimique caractérisé en ce qu'il est constitué par une cellule électrochimique selon la revendication 5 et qu'il comporte une électrode négative contenant du lithium.".

Le libellé de la revendication 1 selon la première requête subsidiaire est identique au libellé de la revendication 1 selon la requête principale.

Le libellé de la revendication 6 selon la première requête subsidiaire ne se différencie du libellé de la revendication 6 selon la requête principale qu'en ce que l'expression "contenant du lithium" est remplacée par "de lithium".

Le libellé de la revendication 1 selon la deuxième requête subsidiaire ne se différencie du libellé de la revendication 1 selon la requête principale qu'en ce que l'expression "comprenant au moins un sel" est remplacée par "constitué par un sel".

Le libellé de la revendication 6 selon la deuxième requête subsidiaire est identique au libellé de la revendication 6 selon la première requête subsidiaire.

IV. Le requérant a développé les arguments suivants :

Les modifications introduites dans les revendications 1 et 6 selon la requête principale ne constituent que l'indication de connaissances générales à la portée de l'homme de métier avant le dépôt de la présente demande et n'introduisent pas de matière nouvelle. Elles ne contreviennent par conséquent pas aux exigences de l'article 123(2) CBE.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 et à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.

2. Requête principale

2.1. Revendication 1

La revendication 1 selon la requête principale se distingue, en premier lieu, de la revendication 1 telle que déposée par la mention que le solvant liquide est "aprotique polaire" et, en second lieu, le remplacement de la caractéristique spéciale "matériau ... constitué par un sel en solution ..." par l'expression généralisante "matériau ... comprenant au moins un sel en solution ...".

La caractéristique que le solvant liquide est aprotique polaire est divulguée à page 1, lignes 30 à 32, de la description initiale.

2.1.1. En ce qui concerne la seconde modification, elle a pour conséquence que désormais l'objet de la revendication peut englober, outre des matériaux à conduction ionique constitués par un sel dans un solvant, des matériaux de ce type comprenant divers autres constituants facultatifs, par exemple un second sel, un second solvant ou des additives variés.

Pour déterminer si cette modification apportée à la revendication doit être considérée comme introduisant un objet s'étendant au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée et, pourtant, inacceptable au vu de l'article 123(2) CBE, il y a lieu de rechercher si la modification globale du contenu de la demande qui en résulte est telle que les informations présentées à l'homme du métier ne dérivent pas directement et sans ambiguïté de celles que la demande contenait initialement, même en tenant compte d'éléments implicites pour l'homme du métier d'après ce qui a été expressément mentionné dans la demande (cf. les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, paragraphe C-VI,5.4). En d'autres termes, il faut rechercher si la nouvelle revendication présentée trouve un support dans la demande d'origine.

Dans le cas présent, il importe donc de rechercher si l'homme du métier lisant la demande de brevet telle qu'elle a été déposée, considérerait que, outre un sel, la présence d'autres constituants dans le solvant est prévue ou au moins suggérée.

La description et les revendications telles que déposées à l'origine concordent entièrement en ce sens qu'il y est fait uniquement mention d'un matériau constitué par un sel dans un solvant. A cet égard, les seuls passages considérés comme pertinents sont les suivants :

- selon la page 1, lignes 9 à 11, le matériau de l'invention est constitué par un sel en solution dans un solvant liquide,

- selon l'exemple 1, le sel Li(CF3SO2)2N est en solution dans du carbonate de propylène ou tétrahydrofurane,

- selon l'exemple 2, le sel Li(CF3SO2)N est en solution dans un mélange de carbonate de propylène et de carbonate d'éthylène,

- selon les exemples 3 et 4, le sel de l'exemple 2 est en solution dans un mélange de carbonate de propylène et de diméthoxyéthane,

- selon l'exemple 5, un sel cyclique de formule donnée (cf. page 4, lignes 3 à 7) est en solution dans le solvant de l'exemple 3,

- selon l'exemple 6, le sel Li(CF3SO2)2N est en solution dans un mélange de diméthoxyéthane et de sulfolane,

- selon l'exemple 7, le sel Li(CF3SO2)2N est en solution dans du nitrométhane,

- selon l'exemple 8, le sel Li(C4F9SO2)2N est en solution dans de l'acétonitrile,

- selon l'exemple 9, le sel K(CF3SO2-N-CO-CF3) est en solution dans de l'acétonitrile,

- selon l'exemple 10, le sel Na(CF3SO2)N est en solution dans CH3NO2,

- selon l'exemple 11, le sel K(CF3SO2)N est en solution dans du nitrométhane, et enfin

- selon la revendication 1, le matériau est constitué par un sel en solution dans un solvant liquide.

Donc, pour l'homme du métier, rien ne fait référence, que ce soit explicitement ou implicitement, à ce que le matériau pourrait comprendre des constituants autres qu'un sel et un solvant.

2.1.2. Le requérant allègue dans son mémoire du 15. février 1993 exposant les motifs du recours (cf. page 2, paragraphes 4 et 6) que les constituants de base d'un matériau à conduction ionique sont un sel et un solvant et qu'il était connu, bien avant la date de priorité de la présente demande, d'ajouter aux constituants de base divers autres constituants facultatifs, par exemple un second sel, un second solvant ou des additives. Il admet, en outre, que ces éléments ne figurent pas explicitement dans la demande telle qu'elle a été déposée à l'origine. Toutefois, à son avis, il s'agit de connaissances générales dans le domaine technique des générateurs électrochimiques et, partant, la modification introduite dans la revendication 1 ne constitue que l'indication d'une caractéristique généralement connue de l'homme de métier avant le dépôt de la présente demande et n'introduit pas de matière nouvelle.

L'argument du requérant concernant le niveau des connaissances de l'homme du métier n'est pas erroné en soi. Le fait est néanmoins que, lors du contrôle de ce qui est divulgué, les connaissances techniques, grâce auxquelles l'homme du métier peut appréhender le contenu des pièces initiales de la demande, ne font pas automatiquement partie de la divulgation à moins qu'elles en puissent être déduites sans ambiguïté.

A cet égard, on peut mentionner l'image utilisée dans la décision T 190/83 (non publiée), dans laquelle la demande initiale est comparée à un réservoir où le demandeur peut puiser pour modifier la demande. Toutefois, en vertu de l'article 123(2) CBE, la demande initiale devrait être considérée comme un réservoir dont la contenance ne peut être augmentée après la date de dépôt, en l'espèce par des connaissances de l'homme du métier qui ne trouvent pas de support dans la description et les revendications d'origine.

2.1.3. Selon les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB, paragraphe C-VI,5.5, "si une demande de brevet européen porte sur un composé à base de caoutchouc dans lequel entrent plusieurs ingrédients, et si le demandeur cherche à introduire l'information selon laquelle il serait possible d'ajouter un autre ingrédient, il devrait normalement être fait objection à cette tentative de modification pour la raison qu'elle est contraire à l'article 123, paragraphe 2". Au paragraphe VI,5.6, on continue en faisant remarquer que "si, toutefois, le demandeur pouvait démontrer de façon convaincante que l'objet en question était, dans le contexte de l'invention, si familier à l'homme du métier que le fait de le mentionner pouvait de toute évidence être considéré comme un simple éclaircissement, la modification pourrait être admise. Ainsi, dans le cas du composé à base de caoutchouc évoqué au point VI,5.5, si le demandeur pouvait démontrer que le nouvel ingrédient dont il souhaite faire mention était, par exemple, un additif connu, normalement utilisé dans des composés de ce type pour faciliter le mélange et que, d'une façon générale, le fait de ne pas le mentionner soulèverait des problèmes (soulignement ajouté), il serait alors permis de le mentionner, étant donné que cela aurait simplement pour effet de clarifier la description sans introduire d'élément nouveau inconnu de l'homme du métier".

Dans la présente espèce, le requérant, sur la base de l'état de la technique cité au cours de la procédure, a démontré que le fait d'ajouter divers autres constituants, par exemple un autre sel, un autre solvant ou un additif, dans un matériau à conduction ionique constitué par un sel dans un solvant était bien connu avant la date de dépôt de la demande. Toutefois, il a admis que les constituants en question sont facultatifs, c'est-à-dire que le fait de ne pas les utiliser ne soulève pas nécessairement des problèmes (cf. le mémoire du 15 février 1993, page 2, paragraphe 5, "Or le demandeur ne prétend pas qu'il faut utiliser des additifs, mais que l'on peut utiliser des additifs, une telle utilisation étant usuelle et bien connue. A cet égard les matériaux de la présente demande de brevet ne constituent pas une exception à la règle générale."). Il ressort donc que la modification proposée ne peut pas être considérée comme un éclaircissement essentiel visant à éliminer une imperfection dans la demande initiale mais comporte l'introduction de matière nouvelle.

2.1.4. Etant donné que l'article 123(2) CBE vise à interdire l'introduction d'information après la date de dépôt, il a été considéré dans des décisions antérieures des chambres de recours que l'examen de la conformité aux dispositions de l'article 123(2) CBE "équivaut fondamentalement à un examen de nouveauté" (cf. la décision T 201/83, JO OEB 1984, 481, paragraphe 3). Selon la décision T 194/84 (JO OEB, 1990, 59, paragraphe 2.4), l'"examen visant à déterminer s'il y a extension de l'objet de la demande ne correspond à l'examen de nouveauté que dans la mesure où, dans les deux cas, il faut vérifier si une information dérive ou non directement et sans aucune équivoque de celle déjà contenues dans un document, à savoir respectivement la demande telle qu'elle a été déposée ou un document de l'état de la technique. Il s'ensuit qu'une modification n'est pas admissible si le changement de contenu de la demande qui en résulte, c'est-à-dire si l'objet généré par la modification est nouveau par rapport au contenu de la demande telle que déposée ou, en d'autres termes, si le changement de contenu est susceptible de détruire la nouveauté d'une éventuelle revendication produite postérieurement, alors que le contenu originel ne la détruirait pas. Ce qu'il importe d'examiner, c'est le changement de contenu, c'est-à-dire le contenu modifié moins le contenu initial, et, dans ces conditions, ce "test de la nouveauté" est applicable également à des modifications conduisant à une généralisation ou à la suppression d'une caractéristique."

Dans la présente espèce, l'objet de la revendication 1 est considéré comme le résultat d'une généralisation qui consiste dans le passage des matériaux à conduction ionique constitués par un sel en solution aux matériaux comprenant au moins un sel en solution. L'objet généré par la modification, à savoir des matériaux à conduction ionique autres que ceux constitués par un sel et un solution, est nouveau par rapport au contenu initial de la demande puisque, comme cela a été démontré plus haut au paragraphe 2.1.1, celle-ci n'y fait nullement référence, que ce soit explicitement ou implicitement.

2.1.5. Par ces motifs, dans la revendication 1 selon la requête principale, le fait de remplacer la caractéristique "matériau ... constitué par un sel en solution ..." par l'expression "matériau ... comprenant au moins un sel en solution ..." constitue une modification non conforme à l'article 123(2) CBE.

2.2. Revendication 6

Etant donné que la revendication 1 selon la requête principale n'est pas considérée comme admissible, il n'est pas nécessaire d'examiner la revendication 6 qui a été également modifiée.

2.3. Par conséquent, il convient de rejeter la requête principale.

3. Première requête subsidiaire

Le libellé de la revendication 1 selon la première requête subsidiaire est identique au libellé de la revendication 1 selon la requête principale.

Donc, il convient aussi de rejeter la première requête subsidiaire.

4. Deuxième requête subsidiaire

Les revendications 1 à 9 selon la deuxième requête subsidiaire correspondent à celles indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30. juillet 1991. Elles satisfont aux conditions de l'article 123(2) CBE.

En particulier, les revendications 1 à 3 correspondent aux revendications 1 à 3 initiales sauf que les revendications 1 et 3 ont été modifiées par la mention de la caractéristique que le solvant liquide est "aprotique polaire" qui est divulguée à page 1, lignes 30 à 32, de la description initiale. Les revendications 4 à 9 ont été ajoutées et trouvent support dans la description d'origine :

- rev. 4 : cf. les exemples 1, 6 et 7,

- rev. 5, 6 et 7 : cf. l'exemple 1,

- rev. 8 : cf. page 5, lignes 29 à 31, et les exemples 7 à 10,

- rev. 9 : cf. page 5, lignes 32 et 33, et l'exemple 11.

La description ne se distingue de celle déposée à l'origine que par l'adaptation à la nouvelle revendication 1 et des modifications d'ordre rédactionnel.

La deuxième requête subsidiaire est donc recevable.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. La requête principale et la première requête subsidiaire sont rejetées.

3. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de poursuivre la procédure sur la base du texte suivant (deuxième requête subsidiaire) :

Revendications :

N° : 1 à 9 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991,

Description :

Pages : 1 à 5 indiquées dans la notification selon la règle 51(4) CBE du 30 juillet 1991.

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