T 0263/99 () of 20.6.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T026399.20000620
Date de la décision : 20 Juin 2000
Numéro de l'affaire : T 0263/99
Numéro de la demande : 93402215.3
Classe de la CIB : A61M 16/12
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 29 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Installation et procédé de fourniture d'un mélange gazeux aux voies respiratoires d'un utilisateur
Nom du demandeur : L'AIR LIQUIDE, SOCIETE ANONYME / GEORGES CLAUDE
Nom de l'opposant : 1. Siemens - Elema AB, Solna (SE)
2. AGA Aktiebolag
Chambre : 3.2.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Détermination de l'état de la technique le plus proche
Nouveauté et activité inventive (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0005/81
T 0056/87
T 0606/89
T 0074/90
T 0989/93
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0287/02

Exposé des faits et conclusions

I. A la suite de deux oppositions formées contre la délivrance du brevet européen n 0 589 751, la Division d'opposition a décidé le 27 janvier 1999 de maintenir le brevet sous une forme modifiée au cours de la procédure orale.

II. La requérante (opposante 1) a formé un recours contre cette décision par acte reçu le 8 mars 1999. Dans son mémoire reçu le 29 avril 1999, elle a contesté la nouveauté et l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 vis-à-vis du document D13 EP-A-0 073 219 estimé le plus proche de l'invention, en combinaison avec le document D15 WO-A-92/10228. En outre, elle a soulevé une objection contre l'objet de la revendication 9. de procédé, sur la base de l'art. 52(4) CBE (méthode de traitement thérapeutique exclu de la brevetabilité).

L'opposante 2 a retiré son opposition au cours de la procédure d'opposition.

III. L'intimée (propriétaire du brevet) a répliqué par lettre du 25 août 1999 aux arguments de la requérante, mais en considérant le document D15 comme étant le plus proche de l'invention. En outre, elle a refusé de donner son accord sur la prise en compte du nouveau motif d'opposition basé sur l'art. 52(4) CBE.

IV. Dans une notification datée du 14 février 2000, envoyée en préparation à une procédure orale, la Chambre priait les parties de se concentrer sur l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 vis-à-vis de la combinaison des documents D13 et D15, et introduisait dans la procédure le document WO-A-82/03014 (de langue anglaise) correspondant au document D13 (de langue allemande), afin de lever les doutes éventuels sur l'interprétation de ce dernier.

V. Avec ses répliques successives du 9 mai et du 13. juin 2000, l'intimée a déposé de nouveaux jeux de revendications selon cinq requêtes auxiliaires, en sus de la requête principale formée par la version maintenue par la décision intermédiaire.

La revendication 1 selon la requête principale se lit :

"Installation de fourniture de mélange gazeux aux voies respiratoires d'un utilisateur, comprenant un dispositif (1) de fourniture séquentielle d'un mélange respiratoire dans un embout d'utilisation (2) et comportant un dispositif de détection de début de phase inspiratoire de l'utilisateur, et comportant, en outre, une source de monoxyde d'azote (8) et des moyens (8 ; 18. ; 10), agissant en réponse au dispositif de détection, pour adjoindre (11), dans l'embout d'utilisation (2), des doses contrôlées de monoxyde d'azote."

VI. Une procédure orale a eu lieu le 20 juin 2000 au début de laquelle le président a déclaré que le nouveau motif d'opposition basé sur l'art. 52(4) CBE ne serait pas pris en compte, en l'absence de l'accord du titulaire. Les parties ont argumenté comme suit :

i) la requérante

- Le document D13 représente l'état de la technique le plus proche de l'invention car il divulgue une installation pour la fourniture de gaz respiratoires, contrôlée en fonction de la détection du début des phases inspiratoires du patient, avec possibilité d'administrer séparément un ou plusieurs gaz additionnels, tel qu'un gaz anesthésique ou thérapeutique, dans un embout introduit au plus près du système respiratoire du patient.

- Par rapport au document D13, l'objet de la revendication 1 ne se différencie que par le fait que le gaz thérapeutique injecté est du monoxyde d'azote (NO). Comme le choix du gaz n'est pas une caractéristique structurelle du dispositif lui-même, l'objet de la revendication 1 ne se distingue pas de l'installation divulguée par le document D13, et donc n'est pas nouveau.

- Même si l'on admettait la nouveauté de la revendication 1, son objet serait néanmoins dépourvu d'activité inventive car le document D13 propose une installation qui convient à l'administration séparée d'un gaz additionnel, en aval du conduit d'alimentation du mélange respiratoire. Comme la divulgation n'est pas limitée à un gaz thérapeutique particulier, il n'est pas exclu d'utiliser dans le document D13 du monoxyde d'azote, recommandé dans le document D15 pour ses propriétés vaso-dilatatrices pulmonaires.

- Le document D15 divulgue plusieurs dispositifs pour fournir des mélanges respiratoires contenant du monoxyde d'azote. Dans la réalisation selon la fig. 7, le dioxyde d'azote N02 toxique, produit lors du mélange préalable entre N0 et 02, est éliminé au moyen d'un piège à dioxyde. Mais d'autres formes d'administration plus directes du monoxyde d'azote N0 gazeux sont invoquées (cf. page 24), dont les réalisations concrètes sont considérées à la portée de l'homme du métier (cf. page 17). Par conséquent, l'objet de la revendication 1 est suggéré par la combinaison des documents D13 et D15, quel que soit le point de départ considéré pour la combinaison.

- Enfin, dans le document D13 (fig. 1), l'humidificateur 22 placé dans la ligne d'alimentation du gaz additionnel peut être omis si nécessaire, selon la nature du gaz thérapeutique injecté, d'autant plus qu'un autre humidificateur 12 existe déjà dans le conduit principal d'alimentation en mélange respiratoire. Cette modification mineure est à la portée de l'homme du métier.

ii) L'intimée

- Le document D15 représente l'état de la technique le plus proche de l'invention car c'est le seul document qui propose d'ajouter au mélange respiratoire du monoxyde d'azote connu pour ses propriétés vaso-dilatatoires pulmonaires et qui invoque les risques liés à la toxicité du dioxyde d'azote NO2 résultant de l'oxydation du N0. L'administration de N0 dans le mélange respiratoire étant une caractéristique essentielle de l'invention, le document D13 qui ne mentionne pas l'adjonction de N0 au mélange respiratoire, ne peut pas représenter l'état de la technique le plus proche.

- Le document D15 divulgue une installation (fig. 7) dans laquelle le prémélange entre le monoxyde d'azote N0 et l'oxygène 02 donne lieu à la formation de dioxyde d'azote N02 toxique, qu'il faut ensuite d'éliminer au moyen d'un piège avant d'administrer le mélange au patient. Cette solution est radicalement différente de celle proposée dans l'invention où il n'y a pas de prémélange entre N0 et les autres gaz respiratoires, précisément pour éviter la formation de N02 toxique.

- Le document D13 ne mentionne pas l'utilisation de monoxyde d'azote et n'est pas approprié à son administration car la présence d'un humidificateur, dans le conduit d'injection des gaz additionnels, interdit toute administration de N0 instable, qui s'oxyderait inévitablement au contact de l'humidité pour produire du N02 toxique. Une combinaison des enseignements des documents D13 et D15 ne permettrait pas non plus de parvenir à l'objet de la revendication 1 car le document D15 suggère à l'homme du métier une solution qui va à l'encontre du but recherché dans l'invention d'éviter la formation de N02 toxique.

VII. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen.

L'intimée requiert le rejet du recours (requête principale) ou l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet selon l'une des cinq requêtes auxiliaires déposées le 10 mai 2000.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Etat de la technique le plus proche et nouveauté de la revendication 1 (requête principale)

2.1. Dans les installations de fourniture de mélange gazeux aux voies respiratoires, il est généralement connu d'administrer du N0 (monoxyde d'azote ou oxyde nitrique) par inhalation, afin d'exploiter ses propriétés vaso-dilatatrices pulmonaires. Un dispositif simple (inhalateur manuel) est illustré dans le document D15 par la figure 17. Mais le mélange du N0 avec l'air dans la chambre de mélange, préalablement à l'utilisation, favorise la formation de N02 (dioxyde d'azote) toxique. De plus, le dosage du mélange n'est pas contrôlable avec précision.

Dès lors, le problème à la base de l'invention (cf. brevet, col. 1, lignes 31-39) était essentiellement de fournir des quantités contrôlées de N0 dans le mélange, directement dans les voies respiratoires, c'est-à-dire sans mélange préalable avec de l'air ou de l'oxygène.

Le document D15 divulgue un autre dispositif (fig. 7) dans lequel un mélange gazeux composé d'oxygène 02, d'azote N2 et de monoxyde d'azote N0 est effectué dans un sac mélangeur, en vue de son administration dans les voies respiratoires par l'intermédiaire d'un ventilateur. Mais ce dispositif ne répond pas non plus au problème ci-dessus puisqu'il y a également prémélange du N0 avant son administration et donc formation de N02 toxique en grande quantité, que le dispositif propose d'éliminer au moyen d'un piège à N02. Par conséquent, le document D15 ne peut pas représenter l'état de la technique le plus proche.

2.2. L'état de la technique le plus proche doit normalement être représenté par un document dans lequel les mêmes problèmes se posent. Dans le cas présent, il s'agit essentiellement d'éviter l'oxydation du N0 avant son administration. Mais, en l'absence d'un tel document, l'état de la technique le plus proche doit être recherché dans un document qui se rapporte à un problème technique voisin ou étroitement lié à celui du brevet en cause (T 989/93, 16.04.1997, point 12) et qui propose un dispositif qui semble convenir, c'est-à-dire qui présente le plus de ressemblances structurelles et fonctionnelles avec l'objet revendiqué (T 606/89, 18.09.1990, point 2), même si le dispositif connu est utilisé pour produire des mélanges gazeux ne présentant pas de risques de toxicité.

2.3. Parmi les documents cités, la Chambre estime donc que le document D13 est le plus proche de l'objet de la revendication 1 car il divulgue toutes les caractéristiques structurelles de l'installation, à l'exception d'une source de monoxyde d'azote. Dans ce qui suit, référence sera faite au document WO-A-82/03014 correspondant à D13.

Ce document divulgue (cf. fig. 1) une installation fournissant un mélange gazeux composé, d'une part, d'un mélange d'oxygène et d'air ou de protoxyde d'azote N20 (mélangeur 17) envoyé vers la sortie 11 d'un ventilateur pulmonaire 10 placé dans le conduit principal 14 d'alimentation du mélange respiratoire et, d'autre part, d'un ou de plusieurs gaz additionnels administrés par un conduit 20 séparé et indépendant du conduit principal. L'embout du conduit principal 14 est introduit dans la trachée artère du patient, tandis que l'extrémité 21 du conduit de gaz additionnel est située en aval du conduit principal et à proximité immédiate des poumons. Le mélange respiratoire et les gaz additionnels sont amenés par les lignes 25-27 dans un bloc distributeur-répartiteur 24 (fig. 2) contrôlé par un régulateur 42, de manière à injecter par l'embout d'utilisation du conduit 20 des doses contrôlées de l'un au moins des gaz présents à l'entrée de répartiteur ou d'un mélange de ces gaz. En outre, un signal électrique 51c (fig. 1 et 3), détectant le début de la phase inspiratoire du patient, est appliqué au régulateur.

Les gaz additionnels amenés par les lignes indépendantes 26, 27 peuvent être des gaz anesthésiques ou des gaz ayant une action thérapeutique (cf. page 7, ligne 30 et p. 18, l. 22-24). Mais bien que le monoxyde d'azote N0 puisse, dans les conditions du brevet, être considéré comme un gaz thérapeutique, le document D13 ne mentionne pas ce gaz car son exploitation pour ses propriétés thérapeutiques n'est pas recherchée.

2.4. Stricto sensu, l'objet de la revendication 1 se distingue donc de la divulgation du document D13 par l'existence d'une source de monoxyde d'azote et par l'adjonction de ce gaz dans l'embout d'utilisation.

Bien que cette caractéristique distinctive relève plus de l'utilisation que de la structure du dispositif, l'objet de l'invention porte néanmoins sur une installation pour la fourniture d'un mélange gazeux aux voies respiratoires, combinant des caractéristiques structurelles et fonctionnelles. Mais compte tenu des difficultés présentées par la manipulation du monoxyde d'azote, la nature instable de ce gaz implique des précautions particulières qui font de son choix une caractéristique essentielle de l'invention. Comme le document D13 ne divulgue pas l'administration de doses contrôlées de N0, cette caractéristique est nouvelle. En outre, comme il est précisé dans les directives C.IV.7.4, la mention d'un terme générique (gaz thérapeutique) dans un document ne suffit pas à conclure à la divulgation d'un terme plus spécifique (monoxyde d'azote).

2.5. Comme aucun document ne divulgue l'ensemble des caractéristiques de la revendication 1, son objet est nouveau au sens de l'art. 54(1) CBE.

3. Activité inventive (requête principale)

3.1. Les caractéristiques distinctives de la revendication 1 mentionnées au point 2.4 ci-dessus représentent la solution d'un problème plus spécifique, de pouvoir administrer efficacement à un patient des doses additionnelles de monoxyde d'azote N0, tout en évitant son oxydation préalablement à son administration.

3.2. Le document D13 prévoit, de façon générale, l'adjonction de gaz thérapeutiques par les lignes indépendantes 26, 27, ce qui, théoriquement, inclut aussi le monoxyde d'azote au sens du brevet ou du document D15. Cependant, le monoxyde d'azote peut aussi être considéré comme un gaz toxique s'il est absorbé à d'autres concentrations, de façon non contrôlée. Dans ce cas, N0 ne correspond plus à la définition d'un gaz thérapeutique. Comme les deux interprétations sont possibles, on ne peut, prima facie, tirer du document D13 aucune conclusion définitive sur l'injection de monoxyde d'azote en tant que gaz thérapeutique (T 74/90, 1.10.91, point 4.3).

En outre, la présence d'un humidificateur 22 dans le conduit 20 suffit à exclure l'administration de ce gaz, car il s'oxyderait obligatoirement en présence d'eau pour produire du dioxyde d'azote toxique.

La présence d'un humidificateur dans le conduit 20 doit nécessairement être prise en compte car aucune autre possibilité n'est envisagée dans le document D13. En effet, bien que la divulgation d'un document ne soit pas, en principe, limitée aux exemples de réalisation décrits, il faut s'abstenir de toute abstraction trop poussée et interpréter l'enseignement du document de façon restrictive (T 05/81, JO OEB 1982, 249, point 11). En outre, il n'est pas permis d'isoler arbitrairement de leur contexte des parties d'un document en vue d'en déduire une information technique qui différerait, voire irait à l'encontre de l'enseignement global du document (T 56/87 JO OEB 1990, 188). Dans le cas présent, l'homme du métier n'avait aucune raison de vouloir supprimer l'humidificateur prévu dans la ligne 20, en l'absence d'une quelconque incitation à le faire, puisque l'administration de N0 n'est jamais envisagée dans ce document. Dans ces conditions, l'installation décrite dans le document D13 ne convient pas à l'administration de monoxyde d'azote.

3.3. Le document D15 prévoit aussi la possibilité (cf. page 24, lignes 4-13) d'administrer du N0 gazeux directement dans les poumons du patient afin d'obtenir un effet rapide et localisé, les formes de réalisation des inhalateurs appropriés relevant de la compétence normale d'un homme du métier (cf. page 17, lignes 15-20).

Mais cette observation générale n'engage que le document D15 lui-même et n'est pas suffisante pour rendre évidente toute autre réalisation que celles décrites en relation avec les figures 7, 17 ou 18. En réalité, le document D15 conduit l'homme du métier vers une solution de nature différente, selon laquelle on n'empêche pas la formation de N02 toxique, mais on l'élimine avant l'administration du mélange respiratoire au patient. Différemment, la solution selon l'invention empêche la formation de N02 pour ne pas avoir ensuite à l'éliminer.

3.4. Comme aucune des installations décrites dans les documents D15 et D13 ne convient à l'administration directe de N0 dans le système respiratoire du patient, c'est-à-dire sans prémélange ni dégradation du N0 en N02, même une combinaison hypothétique des documents D13 et D15 ne permettrait pas de parvenir à l'objet de la revendication 1. Des modifications, non suggérées par les documents en présence, seraient encore nécessaires.

Pour ces raisons, la Chambre est arrivée à la conclusion que l'objet de la revendication 1 est inventif, au sens de l'art. 56 CBE. Par conséquent, les revendications qui en dépendent sont également acceptables.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

Quick Navigation