R 0015/12 (Violation fondamentale alléguée de l'article 113(1) CBE) of 11.3.2013

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2013:R001512.20130311
Date de la décision : 11 Mars 2013
Numéro de l'affaire : R 0015/12
Requête en révision de : T 1572/11
Numéro de la demande : 05775356.8
Classe de la CIB : A47J 37/04
A47J 39/00
Langue de la procédure : FR
Distribution : B
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Titre de la demande : Friteuse à enduction automatique de matière grasse
Nom du demandeur : SEB S.A.
Nom de l'opposant : Tristar Europe B.V.
Paolo Pellizzari
Genius GmbH
Chambre : EBA
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 112a(2)(c)
European Patent Convention Art 113(1)
European Patent Convention R 106
European Patent Convention R 109(2)(a)
Mot-clé : Requête en révision - manifestement non fondée
Exergue :

-

Décisions citées :
R 0002/08
R 0003/08
R 0004/08
R 0009/08
R 0003/09
R 0012/09
R 0015/09
R 0018/09
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
R 0019/12
R 0008/13
R 0016/13
R 0002/14
R 0007/15
R 0008/15
R 0006/16
R 0007/16
R 0008/17
R 0010/17
R 0006/18
R 0008/18
R 0006/19
R 0004/20
R 0009/20
R 0024/22
T 1394/12

Exposé des faits et conclusions

I. Le titulaire du brevet EP 1 781 154 (dénommé ci-après "le requérant") requiert la révision de la décision de révoquer le brevet que la chambre de recours 3.2.04 a prononcée oralement le 27 mars 2012 et rendue par écrit le 7 mai 2012 dans l'affaire T 1572/11. Le requérant fait valoir que la procédure est entachée de cinq violations fondamentales de l'article 113 CBE. Il demande l'annulation de la décision de révocation du brevet et la réouverture de la procédure de recours.

II. La revendication 1 du brevet délivré s'énonce comme suit :

"Friteuse à cuisson sèche (1) comprenant d'une part un corps principal (2) destiné à accueillir en son sein des aliments à frire, caractérisée en ce qu'elle comprend, monté au sein dudit corps principal (2), un moyen (5,6) pour enduire automatiquement lesdits aliments d'une pellicule de matière grasse par brassage desdits aliments avec de la matière grasse, ladite friteuse comportant, monté sur le corps principal (2), un moyen de chauffe principal (24) conçu pour générer un flux chauffant (25) orienté de façon à frapper sensiblement directement au moins une partie des aliments, ledit moyen de chauffe principal (24) assurant à lui seul au moins l'essentiel de l'apport thermique permettant la cuisson."

Au point 3 de la requête, le requérant décrit l'importance de la caractéristique distinctive de cette revendication, à savoir que l'objet de la revendication se distingue nettement des dispositifs antérieurs connus et vendus actuellement, qui nécessitent soit l'immersion dans un bain d'huile de plusieurs litres d'huile chaude, soit un remuage actif dans un film de 2 à 3 millimètres d'huiles de fond (rissolage), soit la pulvérisation de grandes quantités d'huile. Le requérant a également souligné le grand succès commercial de cette invention.

III. Les principales étapes de la procédure sont les suivantes :

a) La division d'opposition a estimé que l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré n'était pas nouveau par rapport au document A5 (US-A-4 581 989), mais a ordonné que le brevet soit maintenu sur la base de la cinquième requête subsidiaire du requérant.

b) Le requérant et l'opposant 2 ont tous deux formé un recours.

c) Les requêtes présentées par le requérant ont évolué au cours de la procédure de recours. A la fin de la procédure, le requérant a requis le maintien du brevet tel que délivré ou, à titre subsidiaire, sur la base d'un certain nombre de requêtes subsidiaires. Aux fins de la présente requête en révision, il suffit de se référer à la troisième requête subsidiaire. Dans cette requête, la formulation qui figure à la fin de la revendication 1 et qui est reprise de la revendication 1 du brevet tel que délivré ("ledit moyen de chauffe principal (24) assurant à lui seul au moins l'essentiel de l'apport thermique permettant la cuisson.") a été remplacée par la formulation suivante :

"ledit flux chauffant (25) étant un flux d'air chaud, ledit moyen de chauffe principal (24) étant conçu et agencé pour assurer la totalité de l'apport thermique permettant la cuisson."

d) La seule question pertinente concernant la requête principale et la troisième requête subsidiaire était de savoir si l'objet de la revendication 1 était nouveau par rapport au document A5. Cette question a été discutée en détail dans la phase écrite de la procédure de recours.

e) Lors de la procédure orale qui a eu lieu le 27 mars 2012, la première question de fond qui a été traitée était la nouveauté de l'objet de la requête principale par rapport au document A5. Il ressort du procès-verbal de la procédure que la discussion a porté plus particulièrement sur les éléments "enduire d'une pellicule de matière grasse" et "induction par brassage", sur l'exigence d'une divulgation claire et non ambiguë (G 2/88), ainsi que sur la charge de la preuve (T 219/83). Après avoir délibéré, la chambre technique a conclu que l'objet de la revendication 1 de la requête principale n'était pas nouveau par rapport au document A5.

f) Le procès-verbal énonce qu'à ce stade "La [requérante] déclare qu'elle se réserve le droit d'introduire une requête en révision contre la décision de la chambre qui contrevient à toutes les décisions connues concernant l'examen de la nouveauté (objection selon la règle 106 CBE)."

g) La discussion a ensuite porté sur les objections concernant les requêtes subsidiaires du requérant. Aux fins de la présente requête en révision, il convient seulement de noter que l'objection tirée de l'absence de nouveauté de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 a été discutée. A l'issue du débat, la chambre a déclaré qu'elle maintenait cette objection.

h) La chambre a considéré que toutes les autres requêtes étaient soit irrecevables soit non admissibles, si bien qu'elle a annulé la décision de la division d'opposition et révoqué le brevet.

IV. Les motifs écrits de la décision de la chambre ont été envoyés aux parties le 7 mai 2012. La chambre a motivé en détail la conclusion selon laquelle elle considérait que le document A5 détruisait la nouveauté de l'objet de la revendication 1 selon la requête principale et la troisième requête subsidiaire. Ces motifs s'énoncent comme suit :

a) Nouveauté de l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré

"3.1 Il est incontesté que le document A5 décrit par rapport au mode d'exécution selon la figure 6, une friteuse à cuisson sèche comprenant un corps principal destiné à accueillir en son sein des aliments à frire et, monté au sein dudit corps principal, un moyen pour enduire automatiquement lesdits aliments de matière grasse, ladite friteuse comportant, monté sur le corps principal, un moyen de chauffe principal (628) conçu pour générer un flux chauffant orienté de façon à frapper sensiblement directement au moins une partie des aliments, ledit moyen de chauffe principal (628) assurant à lui seul au moins l'essentiel de l'apport thermique permettant la cuisson.

3.2 La titulaire a cependant contesté que A5 décrive également un moyen pour enduire les aliments d'une pellicule de matière grasse par brassage desdits aliments avec de la matière grasse. De plus elle a considéré que la friteuse selon A5 ne comportait qu'un seul moyen assurant à la fois le brassage et le chauffage, tandis que le libellé de la revendication 1 impliquait la présence de deux moyens distincts. La titulaire a en outre soutenu que l'opposante affirmait sans apporter de preuve que ces caractéristiques étaient divulguées par A5. La titulaire s'est référée à la décision T 219/83 (OJ OEB 1986, 211) pour soutenir que l'opposante, contrairement à la décision citée n'apportait pas la preuve de ce qu'elle affirmait, et à la décision G 02/88 (OJ OEB 1990, 093) dans laquelle la Grande Chambre souligne "qu'en vertu de l'article 54(2) CBE, la question est de savoir ce qui a été "rendu accessible" au public … l'utilisation non révélée du fait qu'elle n'a pas été mise à la disposition du public ne constitue pas un motif de récusation de la validité d'un brevet européen". La titulaire en a tiré la conclusion qu'a défaut d'être spécifiquement décrites dans A5 les dites caractéristiques n'avaient pas été rendues accessible au public par ce document.

3.3 La chambre ne partage pas ces points de vue. Différents passages de A5 ont été cités par l'opposante à l'appui de ses affirmations. Ainsi le passage colonne 14, lignes 15 à 17 indique que des vitesses [d'air] très élevées remuent et retournent les aliments; c'est-à-dire les brassent. De plus, comme le flux d'air contient de l'huile en dispersion (colonne 5, lignes 58 à 60) les aliments sont brassés avec de la matière grasse. Il est exact que la formation d'une pellicule de matière grasse n'est pas explicitement mentionnée dans ce document. Néanmoins, il y est indiqué colonne 13, lignes 38 à 45, que le flux de fluide échangeur de chaleur atteint le plan dans lequel se trouvent les aliments dans sa totalité; qu'ainsi la génération de point chauds ou d'espaces morts est fortement réduite et que de cette façon les aliments frits, qui sont très sensibles à une répartition uniforme de la chaleur, développent une surface croustillante uniforme. En outre, il est mentionné que le transfert de chaleur est amélioré par la présence de matière grasse et que celle-ci entre intimement en contact avec les aliments (colonne 6, lignes 21 à 24).

Un homme du métier considérera que les dits résultats (réduction des points chauds et espaces morts, répartition uniforme de la chaleur et développement d'une surface croustillante uniforme par contact intime avec la matière grasse) ne peuvent être obtenus que si les aliments sont entièrement enrobés par de la matière grasse, c'est-à-dire, que s'il y a formation d'une pellicule de matière grasse. La formation d'une pellicule de matière grasse n'est donc pas un effet non révélé par A5 comme l'a soutenu la titulaire, mais un effet qui doit être nécessairement réalisé pour atteindre les résultats annoncés.

3.4 En outre, la chambre ne partage pas l'avis de la titulaire selon lequel le moyen de chauffe principal est le flux d'air chaud. La chambre soutient que dans le mode d'exécution selon la figure 6 de A5 le moyen de chauffe principal est formé par les résistances chauffantes 628 (Figure 6) qui constituent le seul moyen technique pour produire et apporter de la chaleur et non par le flux d'air qui résulte principalement de l'action du ventilateur 620.

Les moyens de brassage (ventilateur et flux d'air) et de chauffage (résistances) décrits dans A5 sont donc distincts.

3.5 Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'est pas nouveau par rapport à A5."

(b) Requête subsidiaire 3

"4.4 ... Dans A5 il est indiqué qu'un flux chauffant est formé et que de l'huile est dispersée dans le flux d'air (colonne 13, lignes 26 à 28; colonne 14, lignes 11 à 15). La quantité d'huile utilisée restant faible (colonne 14, 43 à 45). Le flux chauffant est donc principalement un flux d'air chaud, qui est chauffé exclusivement par les résistances 628 (figure 6; colonne 14, lignes 27 à 31).

La titulaire a soutenu que dans A5 le flux chauffant n'était pas un flux d'air chaud mais un flux d'air chargé en huile dans lequel l'huile est le principal vecteur de chaleur.

Dans la friteuse revendiquée l'air circule en circuit fermé (spécification brevet, colonne 5, lignes 1 à 5), cet air, qui est continuellement aspiré dans la friteuse et soufflé sur les aliments (paragraphe [0092]) enduits de matière grasse, contient donc forcément une certaine quantité de matière grasse en suspension qui participe, elle aussi, au transfert de chaleur.

Le flux chauffant décrit dans A5 ne diffère donc pas pour l'essentiel du flux chauffant selon l'invention revendiquée et est donc lui-aussi un flux d'air chaud dans les sens de l'invention revendiquée."

V. La requête en révision a été présentée le 16 juillet 2012 (avec une déclaration du représentant du requérant, M. Martin) et la taxe correspondante a été acquittée le même jour. Par notification envoyée avec la citation à la procédure orale le 22 janvier 2013, la Grande Chambre a exposé son avis provisoire selon lequel la requête en révision n'était manifestement pas fondée, dans la mesure où elle n'était pas manifestement irrecevable. Le requérant a produit de nouveaux moyens le 11 février et le 1er mars 2013.

VI. La procédure orale devant la Grande Chambre siégeant dans une formation de trois membres conformément à la règle 109(2)a) CBE a eu lieu le 11 mars 2013.

VII. La requête en révision expose cinq griefs distincts. Le troisième grief a été retiré lors de la procédure orale devant la Grande Chambre. Les autres griefs ainsi que les arguments présentés par le requérant tant par écrit que durant la procédure orale devant la Grande Chambre peuvent se résumer comme suit (la numérotation initiale a été maintenue).

VIII. Grief 1

(a) Le grief porte sur la conclusion de la chambre technique selon laquelle, bien que la caractéristique figurant dans la revendication 1 selon la requête principale et portant sur la formation d'une pellicule de matière grasse ne soit pas explicitement mentionnée dans le document A5, la formation d'une pellicule de matière grasse est néanmoins un effet qui doit être nécessairement réalisé pour atteindre les résultats annoncés (dernière phrase, point 3.3 des motifs de la décision). Le requérant affirme que cette conclusion n'est fondée sur aucune divulgation objective ou implicite dans le document A5 et que la chambre s'est livrée à une extrapolation excessive à partir de faits erronés. Selon le requérant, le fondement erroné résulte à son tour d'une lecture incorrecte du document A5, lequel divulgue selon la chambre que "le flux de fluide échangeur de chaleur atteint le plan dans lequel se trouvent les aliments dans sa totalité", alors que le document A5 divulgue en fait que "the flow of heat exchange fluid substantially totally intersects the plane of the material to be heated" (soulignement ajouté). La présence de l'adverbe "substantially" introduit pourtant une information technique supplémentaire et importante.

(b) Selon la requête en révision, la procédure est entachée d'une violation fondamentale de l'article 113 CBE dans la mesure où ce n'est que dans la décision écrite que le breveté a pu prendre connaissance des faits sur lesquels se basait la chambre de recours et de leur enchaînement logique, de telle sorte que bien évidemment le breveté n'a pas été en mesure de défendre pleinement sa cause lors de la procédure orale.

(c) Le requérant se plaint du fait que la chambre a refusé d'expliquer son interprétation du document A5 et pourquoi elle a considéré que ce document détruisait la nouveauté de l'invention, de sorte que le requérant n'a pas été en mesure de défendre le brevet. Il dit que son représentant a expressément demandé à la chambre d'exposer ses motifs lorsque cette conclusion a été annoncée, mais que la chambre a refusé, se bornant à affirmer que le document A5 divulguait explicitement ou implicitement toutes les caractéristiques de la revendication (requête en révision, point 3.2.4, paragraphes 6 et 7, point 3.2.5, paragraphe 2, et déclaration de M. Martin).

(d) Ainsi, non seulement la chambre s'est fondée sur des faits erronés ou tronqués pour asseoir sa décision mais encore a-t-elle refusé de donner ouvertement la moindre information concernant le fondement de son raisonnement quant à la pertinence de A5 dans une situation où le breveté s'appuyait pourtant sur une décision d'une Grande Chambre de recours (G 2/88). Ceci a mis le breveté dans l'impossibilité de défendre objectivement sa cause dans la suite de la procédure orale, et constitue un non-respect du principe de l'égalité de traitement entre les parties ainsi qu'un défaut de réponse à une requête explicite du breveté.

IX. Grief 2

a) Selon le requérant, les motifs donnés par la chambre au soutien du rejet de la requête subsidiaire 3 pour défaut de nouveauté ne sont pas cohérents avec les motifs de rejet de la requête principale. Aussi l'une de ces requêtes est-elle nécessairement admissible.

b) Pour fonder le rejet de la requête principale du breveté, la chambre a considéré que dans le mode d'exécution selon A5, le moyen de chauffe principal est formé par les résistances chauffantes qui constituent le seul moyen technique pour produire et apporter de la chaleur et non par le flux d'air qui résulte principalement de l'action du ventilateur (voir point 3.4 de la décision). Ainsi, pour la chambre, ce sont les résistances chauffantes qui constituent le moyen de chauffe principal, et le flux d'air n'est pas un moyen technique qui produit et apporte de la chaleur; de plus, le ventilateur ne fait pas partie du moyen de chauffe principal.

c) Outre le fait que ce raisonnement a non seulement pris le requérant complètement au dépourvu, il est de surcroît totalement illogique. Le raisonnement de la chambre selon lequel les moyens de brassage et de chauffe principaux de A5 étaient bien distincts aurait dû également être appliqué à la revendication 1 selon la troisième requête subsidiaire. Toutefois, en décidant que cette revendication était également dénuée de nouveauté par rapport au document A5, la chambre a affirmé que le flux d'air chauffant "est donc principalement un flux chaud" qui est chauffé exclusivement par les résistances de A5 (voir le point 4.4 de la décision). La chambre était dès lors contrainte de reconnaître implicitement que les moyens de brassage de les moyens de chauffe selon le document A5 ne sont alors plus distincts, ce qui est en parfaite contradiction avec ce qu'elle a reconnu auparavant. En outre, la chambre fait ainsi assumer deux fonctions distinctes à un même moyen technique à quelques pages d'intervalle dans sa décision, puisque le flux d'air est dans un premier temps considéré comme faisant partie des moyens de brassage en étant bien distinct des moyens de chauffe, alors que dans un second temps le flux d'air est considéré comme faisant partie des moyens de chauffe.

d) Cette contradiction flagrante affecte le coeur même de la décision rendue, qui souffre d'un vice fondamental de procédure au sens de l'article 113 CBE, car le raisonnement suivi par la chambre pour déclarer que la revendication 1 du brevet délivré n'était pas nouvelle devait logiquement la conduire à déclarer que la revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 était nouvelle ou inversement.

e) Si le requérant avait eu connaissance des motifs et du raisonnement au cours de la procédure orale, il aurait pu contester la contradiction inhérente à un tel raisonnement lequel, en tout état de cause, devait d'ailleurs conduire logiquement à déclarer la requête 3 nouvelle dès lors que la requête principale était rejetée. Ce n'est qu'à la lecture de la décision écrite que la requérant a pu réaliser et comprendre qu'il avait perdu une chance de défendre au moins la requête subsidiaire 3.

f) Il n'est pas nécessaire d'examiner l'affaire au fond. Il est ainsi inutile d'examiner ce que divulgue ou ne divulgue pas le document A5. Il y a simplement lieu de constater le changement de motif et de raisonnement tenu par la chambre. La requérant a cité entre autres les décisions T 532/91, point 3.3, et T 187/95, point 8.

X. Grief 4

Il est soutenu que bien que la chambre ait affirmé - pour résumer l'argument du requérant sur la nouveauté, que le titulaire du brevet a cependant contesté - que A5 décrive également un moyen pour enduire les aliments d'une pellicule de matière grasse par brassage desdits aliments avec de la matière grasse, la question n'a jamais été de savoir si le document A5 divulguait la présence d'un moyen pour enduire les aliments, mais si le document A5 divulguait l'effet technique du brassage des aliments avec de la matière grasse et l'enduction des aliments par une pellicule de matière grasse.

La décision ne traite pas les arguments du requérant et ne dit pas pourquoi la chambre a rejeté l'argument selon lequel l'opposant ne s'était pas acquitté de la charge de la preuve à cet égard, en particulier en ce qui concerne l'enduction des aliments par une pellicule de matière grasse. La chambre ayant ainsi ignoré les arguments du requérant, la procédure était entachée, selon ce dernier, d'une violation fondamentale de l'article 113 CBE.

XI. Grief 5

(a) Ce grief concerne la déclaration de la chambre selon laquelle celle-ci "ne partage pas l'avis de la titulaire selon lequel le moyen de chauffe principal est le flux d'air chaud. La chambre soutient que dans le mode d'exécution selon ... A5 le moyen de chauffe principal est formé par les résistances chauffantes ... qui constituent le seul moyen technique pour produire et apporter de la chaleur et non par le flux d'air qui résulte principalement de l'action du ventilateur ... Les moyens de brassage (ventilateur et flux d'air) et de chauffage (résistances) décrits dans A5 sont donc distincts" (point 3.4 des motifs).

(b) Le requérant arrive aux conclusions suivantes :

i) La question portant sur le moyen de chauffe n'a jamais été discutée au cours de la procédure d'opposition ou de recours, si bien que les conditions fixées dans la décision R 1/08 pour une révision sont réunies.

ii) Si le document A5 ne divulgue pas un flux d'air chauffant, comme l'a affirmé la chambre, il s'ensuit nécessairement que toutes les requêtes comprenant la caractéristique du flux d'air chauffant sont nouvelles par rapport au document A5 et que la décision est entachée d'un vice fondamental de procédure, qui représente une violation de l'article 113 CBE.

Motifs de la décision

Recevabilité

1. Les conditions prévues aux articles 112bis(1), (2) et (4) CBE ainsi qu'à la règle 107 CBE sont remplies.

Le bien fondé

2. La Grande Chambre, siégeant dans la formation prévue à la règle 109(2)a) CBE, doit examiner pour chaque grief si la requête, dans la mesure où elle est fondée sur un de ces griefs, est ou non "manifestement irrecevable" ou "manifestement non fondée", cf. la décision de la Grande Chambre de recours R 3/08, point 1.3 des motifs.

Le bien fondé du grief 1

3. Il ressort clairement des lettres du requérant du 11 février et du 1er mars 2013, ainsi que des déclarations qu'il a faites au cours de la procédure orale devant la Grande Chambre que, même si le requérant a estimé que ce grief constitue en soi un motif suffisant de révision de la décision, il se plaint surtout de la prétendue incohérence entre les décisions prises par la chambre technique au sujet de la requête principale et de la troisième requête subsidiaire. En effet, si l'une ou l'autre décision pourrait éventuellement être justifiée (ce que le requérant a contesté), les deux ne pouvaient pas l'être. Or, d'avance, c'est-à-dire avant que le requérant ne reçoive les motifs écrits de la décision rien ne suggérait que la chambre pourrait utiliser un tel raisonnement incohérent.

Dans la requête de révision, ce grief d'incohérence faisait uniquement l'objet du deuxième grief, mais le requérant a ensuite précisé (en toute logique) que cet aspect d'incohérence valait également pour le premier grief. La précision du requérant se résume comme suit : il y a eu un grief fondamental. La décision était entachée d'un manque de logique; ce manque de logique émerge selon le requérant en comparant le raisonnement du manque de nouveauté de l'objet de la requête principale (moyen de chauffe : les résistances) avec celui de l'objet de la requête subsidiaire 3 (moyen de chauffe : le flux d'air chaud).

La chambre va néanmoins examiner tout d'abord le premier grief tel que formulé dans la requête de révision, puis le soi-disant grief fondamental du requérant en relation avec le deuxième grief.

4. Un aspect du premier grief concerne l'allégation selon laquelle la chambre n'a fourni au requérant, au cours de la procédure orale, aucune explication (ou du moins aucune explication suffisante) à l'appui de la conclusion selon laquelle la revendication 1 de la requête principale était selon la chambre technique dénuée de nouveauté par rapport au document A5. Si l'absence d'explications préliminaires était le seul objet du grief, celui-ci serait clairement irrecevable car, au cours de la procédure orale, le requérant avait connaissance de ce fait et aurait pu soulever une objection à ce sujet au titre de la règle 106 CBE. L'objection soulevée par le requérant (cf. point III f), supra) n'aurait quant à elle pas satisfait à l'exigence de la règle 106 CBE, étant donné qu'elle ne portait pas clairement sur ce vice (cf. R 4/08, point 2.1 des motifs), c'est-à-dire le défaut d'explications préliminaires.

La Chambre considère toutefois, en faveur du requérant, que cet aspect du premier grief fait en réalité partie d'un grief plus large, à savoir que ce n'est qu'à partir du moment où le requérant a reçu les motifs écrits de la chambre technique qu'il a pu comprendre pourquoi celle-ci était parvenue à la conclusion du manque de nouveauté. Le requérant dit en effet qu'il a essayé en vain, au cours de la procédure orale, de savoir quels étaient ces motifs de manque de nouveauté.

Par conséquent, s'agissant du premier grief, la Chambre peut accepter qu'il est conforme à la règle 106 CBE.

5. Quant à la question de savoir si la requête en révision est manifestement non fondée sur ce motif, la Chambre rappelle ce qui a déjà été dit clairement dans de nombreuses décisions antérieures de la Grande Chambre :

a) Le droit d'être entendu prévu à l'article 113(1) CBE n'implique pas qu'une partie a le droit de connaître à l'avance les motifs pour lesquels une chambre envisage de rejeter une requête. La jurisprudence en la matière est résumée dans la décision R 12/09 (point 11 des motifs), ainsi que dans les décisions ultérieures R 15/09 (point 4 des motifs), R 18/09 (points 14, 15 et 18 des motifs), et R 15/10 (points 7 à 9 des motifs). Ce principe s'applique non seulement aux motifs d'une décision en général, mais également à l'interprétation d'un passage de l'état de la technique qui fait uniquement partie de ces motifs. On ne saurait donc conclure que le droit d'être entendu n'a pas été accordé si, après avoir entendu toutes les parties dans une procédure inter partes, une chambre de recours tire sa propre conclusion, qui est ensuite exposée dans les motifs écrits; cf. décision R 19/11, point 2.2 des motifs.

b) La requête en révision ne permet pas de contester le bien-fondé de la décision elle-même; cf. entre autres les décisions R 2/08, R 9/08 et R 3/09.

Il est vrai que l'article 113(1) CBE garantit non seulement le droit d'une partie d'être entendue avant que ne soit rendue une décision à son encontre, mais également le droit à ce que les motifs pertinents soient pleinement pris en considération dans la décision écrite; cf. R 19/10, point 6.2.

Ce principe a toutefois des limites : dès lors que les motifs donnés par la chambre permettent au requérant de comprendre si la décision est justifiée ou non, la chambre n'est nullement tenue de traiter chaque argument présenté par la partie concernée. La chambre peut se prononcer uniquement sur les éléments essentiels du litige, de sorte que la partie concernée puisse se faire une idée raisonnable des motifs pour lesquels ses moyens n'ont pas été considérés comme convaincants (décision R 19/10, point 6.2, qui cite la décision T 1557/07). L'article 112bis CBE prévoit un nombre limité de motifs sur lesquels une requête en révision peut être fondée. Il n'appartient donc pas à la Grande Chambre d'examiner si le raisonnement de la décision contestée est convaincant ou non, et il ne suffit pas de faire valoir que le requérant n'a pas eu la possibilité d'expliquer pourquoi la décision de la chambre est erronée, cf. R 3/12, points 2.1 à 2.3 des motifs. L'obligation faite aux chambres de recours d'examiner les arguments des parties dépend toujours des circonstances de l'espèce. Les chambres sont donc tenues de discuter dans leurs décisions des questions et des arguments qui sont pertinents pour la décision, et la réfutation d'un argument peut découler implicitement du raisonnement particulier de la chambre (cf. R 21/10, point 2.4 des motifs, R 13/12, point 2.2 des motifs, et R 13/12, point 2.2 des motifs). Une prétendue violation du droit d'être entendu ne saurait être utilisée comme moyen d'obliger la Grande Chambre à vérifier si une chambre de recours a bien compris un argument ou en a tiré la bonne conclusion (cf. R 13/12, point 2.5 des motifs).

6. Le requérant fait valoir pour l'essentiel que la chambre a mal lu le document A5 ou a méconnu le principe selon lequel il appartenait à l'opposant de prouver qu'il y avait eu une divulgation claire et non ambiguë.

7. Toutefois, la décision explique clairement pourquoi la chambre n'a pas admis les arguments du requérant et pour quelles raisons elle a considéré que l'objet de la revendication 1 n'était pas nouveau par rapport à A5 et, en particulier, que les caractéristiques contestées étaient divulguées (cf. point IV supra ). Non seulement le requérant ne se réfère pas à tous les motifs exposés par la chambre, mais en outre la décision explique clairement pourquoi la chambre n'a pas admis les arguments du requérant et pour quelles raisons elle a considéré que l'objet de la revendication 1 n'était pas nouveau par rapport à A5 et, en particulier, que les caractéristiques contestées étaient divulguées. Son argument réel consiste à dire que les motifs de la chambre sont erronés.

8. Ceci n'est pas un motif admissible sur lequel peut être fondée une requête en révision, si bien que la requête est manifestement non fondée sur ce point.

Le bien fondé du grief 2

9. Selon le requérant, les motifs donnés par la chambre au soutien du rejet de la troisième requête pour défaut de nouveauté ne sont pas cohérents avec les motifs de rejet de la requête principale. Aussi l'une de ces requêtes est-elle nécessairement admissible. Ce n'est qu'à la lecture de la décision écrite que la requérant a pu réaliser et comprendre qu'il avait perdu une chance de défendre sa cause.

10. En ce qui concerne le grief 2, la chambre peut accepter qu'il est conforme à la règle 106 CBE.

11. Quoi qu'en dise le requérant, celui-ci essaie de contester le bien-fondé de la décision. Cela ressort d'ailleurs de la requête en révision, où le requérant déclare que :

"la décision de la Chambre de recours est entachée d'un autre vice fondamental de procédure dans la mesure où la décision écrite contient une erreur manifeste de logique ...." (point 3.3.1).

"En outre, la Chambre fait ainsi assumer deux fonctions distinctes à un même moyen technique à quelques pages d'intervalle dans sa décision ..." (point 3.3.4, paragraphe 8)

" 3.3.5 Cette contradiction flagrante affecte le coeur même de la décision rendue qui souffre d'un vice fondamental de procédure au sens de l'article 113 CBE, car le raisonnement suivi par la chambre pour déclarer que la revendication 1 du brevet délivré n'était pas nouvelle devait logiquement la conduire à déclarer que la revendication 1 de la requête auxiliaire 3 était nouvelle ou inversement."

(c'est la Grande Chambre qui souligne).

12. Bien que le requérant tente d'ériger ce qu'il perçoit comme étant une contradiction en violation du droit d'être entendu tel que prévu à l'article 113(1) CBE (cf. points VIII d) et e), supra), il se plaint en réalité du fait que la décision est erronée (en relation avec la requête principale ou avec la troisième requête subsidiaire). A cet égard, il convient de souligner à nouveau que les arguments relatifs à la nouveauté ont été traités de manière approfondie dans la procédure écrite et lors de la procédure orale, ainsi que dans les motifs de la chambre (cf. point IV supra). En outre, la nouveauté de l'objet revendiqué par rapport à l'état de la technique doit être examinée pour chaque requête. Il suffit à cet égard qu'une interprétation de l'état de la technique détruise la nouveauté de l'objet en question, même si à première vue cette interprétation semble différente dans les deux cas.

Le bien fondé des griefs 1 et 2 : conclusion

13. En ce qui concerne les griefs 1 et 2, la requête en révision est manifestement non fondée.

Le bien fondé du grief 4

14. Il est soutenu que la décision ne traite pas les arguments du requérant et ne dit pas pourquoi la chambre a rejeté l'argument selon lequel l'opposant ne s'était pas acquitté de la charge de la preuve à cet égard, en particulier en ce qui concerne l'enduction des aliments par une pellicule de matière grasse.

15. Au cours de la procédure orale devant la Grande Chambre, le requérant a admis que pour l'essentiel, les griefs 4 et 5 sont subsidiaires par rapport aux deux premiers griefs.

16. La réponse est néanmoins la même que pour le premier grief.

17. En ce qui concerne le grief 4, la requête en révision est manifestement non fondée.

Le bien fondé du grief 5

18. Ce grief est lui aussi articulé en deux moyens :

a) S'agissant de la question de savoir si pendant toute la procédure la discussion portait sur le moyen de chauffage, il s'avère correct que ce point n'a jamais été soulevé dans la procédure écrite. On ne sait pas clairement s'il a été discuté ou non au cours de la procédure orale, ou qui l'a soulevé. Cela est toutefois sans importance pour les raisons suivantes :

i) Cette question concerne une éventuelle caractéristique distinctive de la revendication 1 selon la requête principale par rapport au document A5. Si le requérant n'a jamais, dans ses moyens, fait valoir qu'il s'agissait d'une caractéristique distinctive, la décision selon laquelle ce n'était pas une caractéristique distinctive ne peut pas lui avoir fait grief. En d'autres termes, il n'y a aucun lien de causalité entre une quelconque violation du droit d'être entendu et la décision.

ii) Cette question est uniquement un élément de la motivation. Le requérant méconnaît le point 3.3 des motifs de la décision de la chambre.

b) Le requérant conteste une nouvelle fois les motifs de la décision, ce qui ne peut en soi faire l'objet d'une requête en révision.

19. En ce qui concerne le grief 5, la requête en révision est donc manifestement non fondée.

Conclusion

20. La requête en révision est manifestement non fondée.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

La requête en révision est rejetée comme étant manifestement non fondée.

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