T 0434/87 () of 5.9.1989

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1989:T043487.19890905
Date de la décision : 05 Septembre 1989
Numéro de l'affaire : T 0434/87
Numéro de la demande : 81401973.3
Classe de la CIB : A46D 9/02
Langue de la procédure : FR
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Titre de la demande : Procédé de traitement de l'extrémité des fibres naturelles pour brosses à dents
Nom du demandeur : Pierre Fabre S.A.
Nom de l'opposant : Blendax-Werke
Chambre : 3.2.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Inventive step (yes)
activité inventive (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0150/82
T 0169/83
T 0185/84
T 0127/85
T 0248/85
T 0023/86
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 54 484 comprenant huit revendications a été délivré à l'intimée le 13 février 1985 sur la base de la demande de brevet européen n° 81 401 973.3 déposée le 10 décembre 1981 sous priorité du 11 décembre 1980.

II. Le 6 novembre 1985, la requérante a formé opposition au brevet délivré et requis sa révocation pour absence de nouveauté ou d'activité inventive de son objet en s'appuyant sur les enseignements des documents suivants :

(1) DE-U-1 879 941 (2) DE-A-2 922 289 ou DE-U-7 915 845 et (4) US-A-2 227 126 III. Après que, par décision du 6 octobre 1987, la division d'opposition ait rejeté l'opposition et maintenu le brevet tel que délivré, la requérante a formé un recours et payé simultanément la taxe correspondante le 17 novembre 1987. Elle a requis l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet.

Un mémoire exposant les motifs du recours, en ce cas le manque d'activité inventive de l'objet du brevet, a été déposé le 21 janvier 1988.

Dans son mémoire, la requérante a objecté en outre le manque de clarté de l'expression "balancement en va-et-vient" et a fait observer que l'effet obtenu selon l'invention l'était également selon l'enseignement des documents (1) et (2) ou (4).

L'intimée a contesté cette argumentation et fait valoir qu'aucun des documents (1) à (4) ne suggérait un mouvement de balancement des fibres.

IV. En vue de préparer la procédure orale requise par la requérante, la Chambre a adressé aux parties une notification datée du 18 avril 1989 dans laquelle elle attire leur attention sur les enseignements des documents suivants cités dans le rapport de recherche :

(5) US-A-3 417 516 et (6) US-A-3 063 204 Le 27 juillet 1989, l'intimée a présenté en réponse un nouveau jeu de sept revendications et fait valoir que l'invention concernait le traitement de fibres naturelles à l'aide d'une meule verticale et selon un seul balancement des fibres par rotation complète de la meule. Selon l'intimée, les procédés connus ne permettraient pas de resserrer l'extrémité des fibres et d'obturer ainsi le canal médullaire de celles-ci.

V. Au cours de la procédure orale du 5 septembre 1989, la requérante a fait valoir qu'en comparant l'invention à l'enseignement du document (5), il n'y aurait pas de différence entre fibres naturelles et synthétiques, qu'aucun effet particulier ne serait obtenu en orientant l'axe de la meule parallèlement au plan de meulage, que le mouvement de balancement serait décrit dans le document (4), qu'il serait normal de coordonner les mouvements de balancement des fibres et de rotation de la meule et que la combinaison des enseignements des documents (1), (4) et (6) conduirait tout naturellement à l'invention. Pour ces raisons, la requérante a maintenu sa requête en révocation du brevet.

VI. L'intimée a présenté une nouvelle revendication 1 ainsi qu'une partie de description amendée en remplacement de la colonne 1 du brevet délivré et fait observer que, par la combinaison des trois mouvements selon l'invention et la coordination du balancement avec la rotation de la meule, un meulage continu sur toute la périphérie des extrémités des fibres serait obtenu conduisant à l'obturation de leur canal médullaire, l'orientation horizontale de l'axe de la meule permettant un meilleur contrôle du meulage.

Selon l'intimée, aucun des documents cités ne décrirait une telle combinaison de mesures permettant d'obturer le canal des fibres, ce qui justifierait à son avis que le brevet soit maintenu dans sa version modifiée au cours de l'audience.

La revendication 1 modifiée au cours de la procédure orale s'énonce comme suit :

"Procédé de traitement de l'extrémité libre de fibres naturelles utilisées pour la confection de brosses à dents, du type comprenant les étapes connues en soi consistant à appliquer l'extrémité libre des fibres sur une meule (10) selon un mouvement combiné composé d'un balancement en va- et-vient (14, 14') des fibres au dessus de la meule (10) de part et d'autre d'un plan perpendiculaire au plan de meulage et composé d'une rotation (n) simultanée entre la meule (10) et les fibres, autour d'un axe (13) sensiblement perpendiculaire au plan de meulage, dans lequel

- le mouvement combiné comprend en outre l'entraînement en rotation (n) de la meule (10) autour de son axe (12) disposé parallèlement au plan de meulage, et

- la durée d'un balancement en va-et-vient des fibres au- dessus de la meule (10) correspond à la durée d'une rotation complète entre les fibres et la meule, dans le plan de meulage."

Les autres revendications présentées correspondent aux revendications 2 à 6 et 8 délivrées, cette dernière, renumérotée ayant été modifiée de manière à se référer aux précédentes.

VII. La nouvelle revendication 1 ne comportant que des modifications de pure forme vis-à-vis de celle présentée le 27 juillet et transmise le 4 août 1989 à la requérante, celle-ci a pu étudier et exprimer immédiatement son désaccord sur la version proposée au cours de l'audience.

Motifs de la décision

1. Le recours est admissible.

2. La nouvelle revendication 1 est rédigée en une seule partie et résulte de la fusion des contenus des revendications 1 et 7 du brevet délivré dont la forme a été adaptéeà la la circonstance.

2.1. Aucune objection n'est donc formulée au titre de l'article 123 de la CBE.

2.2. En ce qui concerne la règle 29(1), celle-ci ne préconise le mode de présentation en deux parties que si le cas d'espèce le justifie. Or, pour des raisons de clarté et de concision une telle présentation se révèle inappropriée en l'espèce. La forme en une seule partie qui a été choisie ne contrevient donc pas à la règle 29(1) et s'avère acceptable.

3. Bien que l'absence de clarté d'une revendication au sens de l'article 84 ne figure pas parmi les motifs d'opposition énoncés à l'article 100 de la CBE, une Chambre de recours se doit d'examiner une telle objection dès lors qu'elle est formulée à l'encontre d'une nouvelle revendication présentée au cours de la procédure d'opposition ou de la procédure de recours lui faisant suite.

3.1. En l'espèce, dans son mémoire exposant les motifs du recours, la requérante avait formulé une objection de ce type à l'égard de la revendication 1 délivrée. A ce stade, la Chambre n'avait pas lieu de vérifier si les conditions requises par l'article 84 étaient satisfaites.

Mais, étant donné que l'expression litigieuse de la revendication délivrée a été reprise textuellement dans la nouvelle revendication présentée et, qu'en outre, la signification de cette expression entre pour une part significative dans la différenciation de l'objet de la revendication vis-à-vis de l'état de la technique, la Chambre se doit de se prononcer sur ce point (cf. décisions T 23/86, J.O. OEB 1987, 316 et T 127/85, J.O. OEB 1989, 271).

3.2. L'objection concerne l'expression "balancement en va-et-vient" utilisée à deux reprises dans la revendication 1 pour caractériser un élément essentiel de la combinaison de mouvements qui assure le déplacement relatif des fibres vis-à-vis de la meule.

Selon la requérante, cette expression décrirait un mouvement alternatif de va-et-vient des extrémités des fibres mais en aucun cas un déplacement de celles-ci le long d'un arc de cercle tel que l'a interprété la division d'opposition dans sa décision, un tel arc de cercle n'étant mentionné ni dans les revendications, ni dans la description du brevet attaqué.

3.3. Si l'on se réfère aux dictionnaires français les plus connus tels que le Larousse ou le Robert, le mot "balancement" (ou "mouvement de balancier" selon l'expression également utilisée dans la description du brevet) est défini respectivement comme :

"Le mouvement alternatif d'un corps en sens opposés, autour - ou - de part et d'autre - de son centre d'équilibre".

Ces définitions peuvent tout aussi bien désigner un mouvement oscillatoire curviligne qu'un mouvement oscillatoire rectiligne, aussi ni les revendications, ni la description du brevet ne permettent de clarifier avec certitude la nature de cette composante essentielle du mouvement relatif des fibres par rapport à la meule.

3.4. Cependant, dans le silence du texte, il est permis de se référer aux dessins auxquels l'article 69(1) de la CBE attribue le même ordre d'importance qu'à la description lorsqu'il s'agit d'interpréter les revendications (cf. décision T 169/83, J.O. 1985, 193).

Or, la forme incurvée vers le haut des deux flèches opposées représentées à la partie supérieure de la figure 1 ainsi que, sur les figures 1 et 2, les inclinaisons opposées symétriques des positions extrêmes (14) et (14') d'une brosse animée du mouvement de balancement au sens de l'invention suggèrent immédiatement et sans équivoque à l'homme du métier qu'il s'agit d'un mouvement oscillatoire curviligne et que les extrémités des fibres parcourent des trajectoires circulaires au-dessus de la meule, de part et d'autre d'un plan de symétrie perpendiculaire au plan de meulage. En conséquence, l'objection de la requérante est réfutée et les conditions de clarté requises par l'art. 84 de la CBE sont considérées comme satisfaites.

4. Aucun des documents cités au cours des différentes procédures ne décrit un procédé présentant toutes les caractéristiques décrites dans la revendication 1 du brevet présentée au cours de l'audience. En conséquence, eu égard à ces documents, l'objet de cette revendication satisfait à la condition de nouveauté au sens de l'art. 54(1) requise par l'art. 52(1) de la CBE.

5. Parmi tous les documents cités, le document (5) US-A-3 417 516 est le seul qui décrive une méthode de traitement de l'extrémité des fibres d'une brosse dans laquelle le mouvement relatif recherché entre les fibres et la meule est comparable à celui préconisé par l'invention et résulte de la combinaison de trois mouvements rotatifs dont un de balancement desdites fibres. En conséquence, l'état de la technique divulgué dans ce document est considéré comme le plus proche de l'invention.

5.1. En effet, la méthode de traitement mise en oeuvre avec l'appareil décrit dans le document (5) consiste essentiellement (cf. fig. 1) à appliquer les extrémités des fibres de la brosse sur un plateau abrasif rotatif, à faire osciller la brosse autour d'un axe de part et d'autre d'un plan perpendiculaire au plan de meulage (cf. col. 6, lignes 44, 45 et col. 7, lignes 6, 7 et 22-24) et à faire tourner la brosse par rapport au plateau abrasif autour d'un axe perpendiculaire au plan de meulage (cf. col. 7, lignes 8 à 10).

Avec cette méthode de traitement on obtient aussi l'effet de torsion des fibres qui est décrit à la col. 3, lignes 46-50 du brevet attaqué (cf. l'antériorité, col. 8, lignes 9-13).

5.2. Le procédé faisant l'objet de la rev. 1 du brevet attaqué diffère essentiellement de cette méthode connue en ce que :

a) Il est appliqué au traitement de l'extrémité de fibres naturelles destinées à la fabrication de brosses à dents ; b) la meule utilisée pour le meulage a son axe de rotation orienté parallèlement au plan de meulage et, c) les fibres effectuent une rotation complète par rapport à la meule pendant la durée d'un balancement.

5.3. Le problème résolu par l'invention consiste donc dans l'adaptation de la méthode connue du document (5) au traitement de l'extrémité de fibres non plus synthétiques mais naturelles de manière à pouvoir obturer le canal médullaire de celles-ci (cf. col. 1, paragraphes 1 et 4 de la description du brevet repris textuellement dans la description modifiée).

Il s'agit donc de déterminer si, à la date de priorité, il était évident pour une personne du métier désirant traiter des fibres naturelles destinées à des brosses à dents de songer, en partant du procédé connu du document (5) à pivoter la meule de 90° de manière à meuler à l'aide de la surface cylindrique de celle-ci et de faire correspondre exactement la durée d'un balancement avec celle de la rotation relative fibres/meule.

5.4. En ce qui concerne tout d'abord le couple "surface de déplacement des extrémités des fibres/surface de meulage", il y a lieu de remarquer que les documents cités au cours des différentes procédures se répartissent en trois catégories. Dans une première catégorie, à laquelle appartiennent notamment les documents (1) et (4), il est enseigné de déplacer les extrémités des fibres dans un plan tangent à une surface de meulage cylindrique. Selon la deuxième catégorie, qui regroupe le plus grand nombre d'antériorités dont notamment le document (2), il est préconisé de déplacer les extrémités des fibres sur la surface de meulage qui est plane. Enfin, d'après la troisième catégorie représentée notamment par les documents (5) et (6), les extrémités des fibres sont entrainées sur une surface cylindrique tangente à une surface plane de meulage. En d'autres termes, selon l'état de la technique, il est d'usage soit de choisir deux surfaces planes et de les faire coincider, soit d'opter pour une surface plane et une surface cylindrique et les faire tangenter mais en aucun cas de faire tangenter deux surfaces cylindriques comme prévu dans l'invention.

Par conséquent, la mesure consistant à faire tangenter les trajectoires circulaires des extrémités des fibres à une surface de meulage elle-même également cylindrique, n'a pas encore été recommandée malgré qu'elle assure une meilleure maîtrise du meulage et permette d'affiner ce dernier. En outre, étant donné que les seuls documents (5) et (6) qui décrivent un mouvement de balancement des fibres préconisent tous deux l'emploi d'une surface plane de meulage, l'homme du métier n'a, à priori, aucune raison de vouloir remplacer le disque abrasif utilisé dans le procédé connu du document (5) par une meule cylindrique à axe de rotation parallèle au plan de meulage utilisée habituellement pour meuler des extrémités de fibres assujetties à suivre des trajectoires rectilignes (cf. documents (1) et (4)).

5.5. Pour ce qui est du choix de la durée de balancement vis-à- vis de celle du pivotement relatif fibres/meule, mesure jugée essentielle pour assurer un balayage continu de la périphérie des extrémités des fibres et l'obturation des canaux médullaires de celles-ci, aucun des deux seuls documents (5) et (6) qui décrivent un balancement des brosses ne prévoit une quelconque identité des durées conformément à l'invention. Dans le document (5), du fait de l'existence d'un train d'engrenages convertissant la rotation du support de brosse en son balancement, les périodicités des deux mouvements sont nécessairement liées mais aucun rapport particulier entre elles n'est précisé. Quant au document (6), il cite col. 8, lignes 32-37, un exemple de vitesses de rotation angulaire et de balancement sans rapport avec la parité revendiquée dans le brevet, ce qui ne peut inciter l'homme du métier à appliquer la solution retenue selon l'invention.

6. En conséquence de ce qui précède, l'adaptation selon la revendication 1 du procédé connu de (5) afin de traiter des fibres naturelles pour la confection de brosses à dents, ne découle pas naturellement de l'état de la technique au sens de l'art. 56 de la CBE et implique une activité inventive tel que requis par l'art. 52(1).

7. En ce qui concerne la revendication indépendante 7 définissant le produit par son procédé d'obtention, il est de jurisprudence constante (cf. décisions T 150/82, J.O. 1984, 309 et T 248/85, J.O. 1986, 261) qu'une telle revendication ne peut être acceptée que si le produit en tant que tel satisfait aux conditions de brevetabilité, car la brevetabilité du procédé n'entraîne pas nécessairement celle du produit. En l'espèce, la brosse à dents faisant l'objet de la revendication 7 est caractérisée par le fait d'être formée de fibres naturelles traitées selon le procédé décrit dans les revendications précédentes, ce qui signifie en interprétant à l'aide de la description (cf. col.3, lignes 43 à 54 du brevet) que lesdites fibres ont un canal médullaire et que ce canal est obstrué á l'extrémité libre de la fibre.

Aucune brosse de ce type n'étant divulguée, ni même suggérée dans aucun des documents cités et la requérante n'ayant à aucun moment contesté la brevetabilité de ce produit, il n'appartient pas à la Chambre de mettre celle-ci en doute au stade du recours.

8. Comme indiqué au paragraphe VII de la première partie de la décision, la requérante a eu la possibilité de prendre position de manière définitive au sujet de la modification du texte des revendications. Il n'a donc pas été nécessaire de recourir à la notification visée par la règle 58(4) de la CBE (cf. décision T 185/84, J.O. OEB 1986, p.373).

DISPOSITIF

Par ces motifs il eststatué comme suit :

1. La décision de la première instance est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la première instance avec mission de délivrer un brevet sur la base des pièces suivantes :

2.1. Description :

- Pages 1 et 2 présentées au cours de la procédure orale, - Colonnes 2 à 4 du brevet délivré avec suppression col.3, lignes 29, des mots : "une caractéristique avantageuse de...".

2.2. Revendications :

- Revendication 1 à 4 présentées au cours de la procédure orale. - Revendication 5 à 7 reçues le 27.07.1989.

2.3. Dessins :

- Figures 1 et 2 du brevet délivré.

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