European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1988:T029587.19881206 | ||||||||
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Date de la décision : | 06 Décembre 1988 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0295/87 | ||||||||
Numéro de la demande : | 78300314.8 | ||||||||
Classe de la CIB : | C08G 65/40 | ||||||||
Langue de la procédure : | EN | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | ICI PLC | ||||||||
Nom de l'opposant : | BASF AG BASF Lacke + Farben Union Carbide |
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Chambre : | 3.3.01 | ||||||||
Sommaire : | 1. Au cours de la procédure d'opposition, le titulaire du brevet a le droit, aux termes de l'article 101(2) et de la règle 57(1) CBE, de présenter des observations en réponse à un acte d'opposition. Par la suite, les observations présentées par les parties ne sont admissibles que si la division d'opposition ou la chambre de recours, exerçant leur pouvoir d'appréciation, les jugent nécessaires et opportunes au sens de l'article 101(2) et de la règle 57(3) CBE. Pour le bon déroulement de la procédure d'opposition, les observations présentées par les parties doivent être dûment limitées à ce qui est nécessaire et opportun (cf. point 2 des motifs de la présente décision). 2. Des modifications apportées au cours de la procédure d'opposition au texte d'un brevet délivré ne devraient être considérées comme appropriées et nécessaires au sens où l'entendent les règles 57(1) et 58(2) CBE, et par voie de conséquence admissibles, que si l'on peut affirmer à bon droit qu'elles étaient appelées par les motifs d'opposition invoqués. Une modification qui consiste à proposer de nouvelles revendications n'ayant pas d'équivalent dans le brevet délivré et qui ne constitue pas une réponse à un motif d'opposition n'est pas admissible (cf. décision T 127/85 en date du 1er février 1988) (point 3 des motifs de la présente décision). |
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Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Admissibilité d'observations au cours de la procédure d'opposition Admissibilité de revendications additionnelles déposées au cours de la procédure d'opposition (non) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
Exposé des faits et conclusions
I. Le 24 mars 1982, a été publiée la mention de la délivrance du brevet n° 1879 ..., comportant quatorze revendications.
La revendication 1 s'énonçait comme suit :
"Polyéthercétone aromatique thermoplastique cristalline renfermant l'unité récurrente ... ."
Les autres revendications indépendantes avaient pour objet la production d'un polymère renfermant l'unité récurrente I (revendication 7) et une isolation électrique comprenant un polymère contenant l'unité récurrente I (revendication 14).
II. Le 9 décembre 1982, l'opposante I a fait opposition à la délivrance du brevet en invoquant l'absence de nouveauté des revendications de produit et le défaut d'activité inventive des revendications de procédé. Elle objectait en outre que les deux demandes antérieures dont la priorité était revendiquée n'étaient pas les premières à divulguer la prétendue invention.
Le 16 décembre 1982, l'opposante II a formé opposition au brevet délivré et en a demandé la révocation au motif qu'il ne satisfaisait pas aux dispositions des articles 54 et 56 CBE.
Le 24 décembre 1982, l'opposante III (la requérante) a également formé opposition au brevet qui avait été délivré et en a demandé la révocation pour absence de nouveauté et d'activité inventive, en faisant valoir par ailleurs que l'invention n'était pas exposée de manière suffisante pour permettre à un homme du métier de l'exécuter.
(...)
Ces différentes objections, qui ont été développées par la suite dans de nombreuses prises de position et également lors de la procédure orale, se fondaient essentiellement sur les documents suivants :
(...)
III. Par décision en date du 26 mai 1987, la division d'opposition a maintenu le brevet sous une forme modifiée, sur la base d'un nouveau jeu de quatorze revendications, dont la première était libellée comme suit :
"Polyéthercétone aromatique thermosplastique cristalline tenace constituée essentiellement par les unités récurrentes I ... ."
Les revendications 3 et 4 étaient les suivantes :
Revendication 3 : Polyéthercétone suivant la revendication 1 ou la revendication 2, qui contient jusqu'à 30 % en moles des unités récurrentes IV, V et/ou VI.
Revendication 4 : Polyéthercétone selon la revendication 1, qui est le produit obtenu par polycondensation de l'hydroquinone, de la 4,4' -dihydroxybenzophénone et de la 4,4'-difluorobenzophénone.
Les motifs de cette décision peuvent être résumés comme suit :
(...)
IV. Le 11 juillet 1987, la requérante (opposante III) a formé un recours contre cette décision, en acquittant la taxe prescrite. Les arguments qu'elle a présentés dans le mémoire exposant les motifs du recours produit le 24 septembre 1987, ainsi que dans les autres prises de positions soumises ultérieurement, et qu'elle a également développés au cours de la procédure orale tenue le 6 décembre 1988, se fondaient sur plusieurs autres documents, notamment le document US-A-4 105 635 (document 39) ; ces arguments peuvent être résumés comme suit :
(...)
V. Les arguments avancés par l'intimée (titulaire du brevet) par écrit et au cours de la procédure orale tenue le 6 décembre 1988 peuvent se résumer comme suit :
(...)
VI. Au cours de la procédure orale, l'intimée a déposé dans le cadre de sa requête principale le jeu de revendications suivant :
Revendication 1 telle qu'admise par la première instance, sous réserve que ...
VII. Bien que les opposantes I et II, parties à la procédure de recours en vertu de l'article 107 CBE, aient été dûment citées à la procédure orale, elles se sont abstenues de comparaître.
VIII. La requérante a demandé l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet.
L'intimée a demandé le rejet du recours et le maintien du brevet sur la base des revendications 1 à 12 soumises au cours de la procédure orale.
Au terme de la procédure orale, la Chambre a décidé le maintien du brevet conformément à la requête de l'intimée.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
Questions de procédure
2. Au cours de la procédure devant la division d'opposition, pendant la période de près de quatre années qi s'est écoulée entre le dépôt des actes d'opposition en décembre 1982 et la procédure orale tenue en septembre 1986, toutes les parties ont soumis de nombreuses et longues prises de position écrites ; c'est là un bon exemple de ce qu'il vaudrait mieux ne pas faire au cours de la procédure d'opposition telle que prévue à l'article 101 et aux règles 57 et 58 CBE.
Il convient de noter que l'article 101(2) CBE stipule que "la division d'opposition invite les parties, aussi souvent qu'il est nécessaire, à présenter, ..., leurs observations sur les notifications qu'elle leur a adressées ou sur les communications qui émanent d'autres parties". De même, la règle 57, paragraphes 1 et 2 CBE, qui régit la phase initiale de la procédure d'opposition suivant immédiatement le dépôt de l'(des) acte(s) d'opposition, offre sans ambiguïté au titulaire la possibilité de présenter de plein droit ses observations en réponse à cet(ces) acte(s) d'opposition. Pour la suite de la procédure, en revanche, la règle 57(3) CBE précise que lorsque les observations du titulaire de brevet (ainsi que toutes modifications qu'il a soumises) ont été notifiées aux autres parties, la division d'examen n'invite celles-ci à répliquer que "si elle le juge opportun".
Bien que, pris à la lettre, l'article 101(2) et la règle 57 CBE mentionnent simplement le critère que la division d'opposition doit appliquer lorsqu'elle examine si il y a lieu d'inviter les parties à présenter leurs observations, la Chambre estime qu'il découle nécessairement et sans ambiguïté de ces dispositions qu'en l'absence d'invitation expresse de la part de la division d'opposition, les parties ne peuvent présenter des observations que si la division d'opposition, exerçant son pouvoir d'appréciation, le juge "nécessaire" ou "opportun" au sens qui a été indiqué plus haut. Ces dispositions n'auraient aucun sens si l'on considérait qu'elles signifient que la division d'opposition ne devrait inviter les parties à présenter leurs observations que si elle le juge "nécessaire" et "opportun", les parties, elles, pouvant de droit présenter des observations même lorsque celles- ci sont superflues ou inopportunes (voir à ce propos la décision T 406/86 en date du 2 mars 1988, publiée au JO OEB 1989, 302).
Il est bien évidemment tout à fait souhaitable pour le bon déroulement de la procédure d'opposition et il est, par conséquent, dans l'intérêt du public que les observations présentées par les parties soient dûment limitées à ce qui est nécessaire et opportun, ce qui exige de la part de la division d'opposition (et par analogie de la chambre de recours) un contrôle approprié de l'admissibilité des observations présentées par les parties ainsi que des documents produits à l'appui de ces observations. Il va de soi que pour apprécier dans quelle mesure il est nécessaire ou opportun que les parties soumettent d'autres observations, il doit être tenu compte de toutes sortes de facteurs, et notamment de la complexité des problèmes soulevés, la décision ne pouvant être prise que cas par cas. Ceci dit, il est à signaler que la division d'opposition et les chambres de recours peuvent et même doivent, s'il y a lieu, refuser d'examiner au cours de la procédure d'opposition ou de recours des observations et/ou des documents produits à l'appui des ces observations, et ce en vertu du pouvoir d'appréciation qui leur a été conféré par les articles 101(2) et 114(2) ainsi que par la règle 57(3) CBE.
Il convient à cet égard de se référer aux "principes généraux" applicables à la procédure d'opposition qui ont été énoncés dans la Communication de l'Office européen des brevets publiée dans le JO OEB 1985, 272, et que la Chambre reprend à son compte : "l'Office européen des brevets s'efforce, dans l'intérêt du public aussi bien que dans celui des parties à la procédure d'opposition, d'établir clairement et le plus rapidement possible si le brevet délivré peut ou non être maintenu au vu des moyens invoqués au cours de la procédure d'opposition. Il faut pour cela une procédure rapide et rationalisée, ce qui implique qu'elle soit conduite, dans toutes ses phases, selon des règles strictes par la division d'opposition. Il convient toutefois de donner aux parties la possibilité de défendre leur point de vue de telle manière que la décision rendue soit équitable".
Dans la présente affaire, la Chambre a précisé dès le début de la procédure orale que les documents qui n'avaient pas été soumis en temps utile à l'appui des observations présentées ne seraient considérés par elle comme admissibles que si elle avait acquis la conviction qu'ils étaient suffisamment pertinents. Toutefois, de l'avis de la Chambre, la division d'opposition aurait pu contrôler plus sévèrement l'admissibilité des nombreuses observations présentées par les parties, si elle avait appliqué lors de l'examen de l'opposition les principes énoncés par l'article 101 et par la règle 57 CBE, tels qu'ils ont été rappelés plus haut.
3. De même, dès le début de la procédure orale, la Chambre a soulevé la question de l'admissibilité des revendications 3 et 4 acceptées par la division d'opposition et reproduites ci-dessus au point III, l'objet de ces revendications étant nouveau par rapport à celui des revendications qui avaient été admises.
La Chambre a décidé pour les motifs exposés ci-après que ces revendications n'étaient pas admissibles ; au cours de la procédure orale, l'intimée a donc déposé dans le cadre de sa requête principale un jeu de revendications ne reprenant pas l'objet desdites revendications 3 et 4.
Dans la décision précitée T 406/86, il est discuté de l'admissibilité de modifications apportées au texte d'un brevet au cours de la procédure d'opposition, et il est précisé en particulier que l'admission de modifications produites au cours de la procédure d'opposition est laissée à l'appréciation de l'instance chargée de statuer, en vertu des règles 57(1) et 58(2) CBE. Comme il est indiqué dans cette décision, de telles modifications ne sont admissibles que si elles sont "appropriées" et "nécessaires", compte tenu de la nature des motifs de l'opposition et des problèmes soulevés à cette occasion. De l'avis de la Chambre, des modifications apportées au cours de la procédure d'opposition au texte d'un brevet délivré ne devraient être considérées comme "appropriées" et "nécessaires" au sens où l'entendent les règles 57(1) et 58(2) CBE, et par voie de conséquence admissibles, que si l'on peut affirmer à bon droit qu'elles étaient appelées par les motifs d'opposition qui ont été invoqués en vertu de l'article 100 CBE. La Chambre estime que la procédure d'opposition prévue aux articles 100, 101 et 102 CBE et dans les dispositions correspondantes du règlement d'exécution, en particulier les règles 57 et 58 CBE, a été instituée aux fins de l'examen de la validité d'un brevet sur la base des objections soulevées au titre de l'article 100 CBE. Elle ne doit pas être l'occasion pour le titulaire de proposer des modifications du texte du brevet, dès lors qu'il ne s'agit pas à l'évidence de répondre à un motif d'opposition invoqué en vertu de l'article 100 CBE. Elle ne permet pas en particulier d'inclure dans les revendications un nouvel objet qui, tout en étant fondé sur la description initiale, n'a pas été revendiqué auparavant en tant que tel.
Dans la présente affaire, la revendication 4 portait sur le polymère obtenu conformément à l'exemple 14, et la revendication 3 concernait une réalisation préférée, à savoir un rapport molaire spécifique des unités IV, V et/ou VI dans le copolymère. De l'avis de la Chambre, l'adjonction de telles revendications, qui n'avaient pas d'équivalent dans le texte des revendications sur la base desquelles avait été délivré le brevet en litige, ne saurait être considérée comme une tentative de répondre à une objection soulevée au titre de l'article 100 CBE. Ces revendications représentent en effet des modifications qui vont au-delà des objections effectivement soulevées à l'encontre de la validité du brevet ; elles ne sont donc ni nécessaires ni opportunes au sens des règles 57 et 58 CBE.
(...)
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision de la division d'opposition est annulée.
2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition à charge pour elle de maintenir le brevet sur la base de la description et des revendications figurant dans la requête principale.