European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1987:T016286.19870707 | ||||||||
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Date de la décision : | 07 Juillet 1987 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0162/86 | ||||||||
Numéro de la demande : | 82103443.6 | ||||||||
Classe de la CIB : | C12N 15/00 | ||||||||
Langue de la procédure : | DE | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | Hoechst | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.2.02 | ||||||||
Sommaire : | Pas de sommaire | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive - sélection, à caractère non évident Problème technique - limitation |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 82 103 443.6, déposée le 23 avril 1982 et revendiquant une priorité en date du 30 avril 1981, a été rejetée par décision de la Division d'examen en date du 3 février 1986. Cette décision a été rendue sur la base de deux jeux de revendications comportant l'un, les revendications 1 à 5, reçues le 28 janvier 1985, valables pour l'ensemble des Etats contractants à l'exception de l'Autriche, l'autre les revendications 1 à 4, également reçues le 28 janvier 1985, valables pour l'Autriche.
a) La revendication 1 valable pour les Etats contractants BE, CH, DE, FR, GB, IT, LI, LU, NL et SE s'énonce comme suit :
"1. Plasmide p SG 2, pouvant être obtenu à partir de Streptomyces ghanaensis ATCC 14672, caractérisé par un poids moléculaire de 9,2 mégadaltons, une longueur de contour de 4,58 µm et une longueur de molécule d'environ 13,8 kb."
b) La revendication 1 valable pour l'Autriche s'énonce comme suit :
"1. Procédé d'obtention du plasmide p SG 2, caractérisé en ce qu'on lyse une culture de Streptomyces ghanaensis ATCC 14672 et qu'on isole le plasmide."
Les autres revendications contenues dans les deux jeux de revendications concernaient un procédé d'obtention du plasmide p SG 2 et son utilisation pour la construction de plasmides vecteurs.
II. La demande a été rejetée au motif que les objets de ces revendications, bien que nouveaux, n'impliquaient pas d'activité inventive. L'argumentation développée par la Division d'examen est la suivante : le problème que la demande en litige se propose de résoudre consiste à obtenir des quantités suffisantes d'un plasmide pouvant être utilisé comme vecteur en vue de l'amélioration génétique de souches de Streptomyces, or la solution proposée, c'est-à-dire le plasmide p SG 2 revendiqué, n'apporte pas d'amélioration (génétique) manifeste par rapport au plasmide p UC 6 décrit dans le document I (DE-A-3 005 226) et l'utilisation visée en l'occurrence ne saurait pas davantage impliquer une activité inventive, car elle est dans la nature des choses. De par sa définition scientifique, un plasmide sert en effet à construire des plasmides (hybrides) vecteurs, comme l'a exposé également le document (i). En outre, l'existence de plasmides dans certaines espèces de Streptomyces est incontestablement connue dans l'état de la technique. Il s'ensuit obligatoirement que l'homme du métier pouvait s'attendre à ce que des plasmides existent également dans des espèces de Streptomyces telles que l'espèce connue Streptomyces ghanaensis. Au demeurant, la Division d'examen ne connaît pas d'espèces de Streptomyces sans plasmide.
Par ailleurs, même si l'on fait abstraction de ces arguments, la revendication de produit 1 ne serait pas admissible au regard de l'article 56, étant donné qu'en l'occurrence, en ce qui concerne le plasmide lui-même, l'activité inventive ne saurait découler du seul procédé d'obtention de ce plasmide à partir de Streptomyces ghanaensis.
III. La requérante (demanderesse) a formé un recours contre cette décision, par lettre reçue le 27 mars 1986, en même temps qu'elle acquittait la taxe prescrite. Le mémoire exposant ses motifs a été déposé le 2 mai 1986.
IV. Une procédure orale s'est déroulée le 7 juillet 1987. A l'appui de son recours, la requérante a essentiellement fait valoir les arguments suivants, notamment au cours de la procédure orale :
Le document (i) ne donne aucune précision sur le spectre d'hôtes du plasmide p UC 6. Par rapport à celui-ci, le plasmide revendiqué apporte déjà une "amélioration génétique" dans la mesure où les vecteurs hybrides construits à partir de ce plasmide permettent d'escompter, comme le montre l'expérience, une stabilité particulière dans des cellules hôtes Streptomyces ghanaensis grâce à la portion endogène de ces vecteurs. Par rapport au document (i), le problème consiste en fait à créer un plasmide susceptible d'être utilisé comme vecteur (hybride), qui ne soit pas éliminé aussitôt par la souche de Streptomycetes utilisée comme cellule hôte. Ce problème est résolu par le plasmide p SG 2 revendiqué, qui est un plasmide endogène obtenu à partir de Streptomyces ghanaensis (ATCC 14 672).
L'état de la technique ne fournissant aucun indice permettant de conclure à la présence de plasmides dans Streptomyces ghanaensis, et encore moins dans une souche donnée, l'affirmation de la Division d'examen selon laquelle elle ne connaît pas jusqu'ici d'espèces de Streptomyces sans plasmide est absolument insoutenable, vu la déclaration produite dès le 28 janvier 1985, au cours de la procédure d'examen. La présence de plasmides dans des Streptomycetes est en fait plutôt rare, comme le confirme au demeurant le rapport d'expertise produit le 2 mai 1986.
Au cours de la procédure d'examen, la requérante avait par ailleurs fait valoir que les souches de Streptomycetes mentionnées dans le document II (DE-C-1 113 791) en plus des Streptomyces ghanaensis étaient, à sa connaissance, exemptes de plasmides (cf. lettre parvenue à l'Office le 28 août 1985, page 2, par. 2).
V. La requérante a sollicité l'annulation de la décision de rejet et la délivrance d'un brevet sur la base des pièces produites lors de la procédure orale.
a) La revendication 1 désormais valable (pour l'ensemble des Etats contractants désignés, à l'exception de l'Autriche) s'énonce comme suit :
"1. Plasmide p SG 2 caractérisé en ce qu'il peut être obtenu à partir d'une culture de Streptomyces ghanaensis ATCC 14 672, et qu'il présente une longueur de contour de 4,58 µm et une longueur de molécule d'environ 13,8 kilobases (= kb), et n'est pas fragmenté par les endonucléases de restriction EcoR I, BamH 1, Sal I, Hpa I et Hind II et est cependant décomposé par l'endonucléase de restriction Hind III en un fragment d'une longueur d'environ 14 kb, par Cla I en deux fragments de longueurs 10,15 et 3,65 kb, par Pst I en deux fragments de longueurs 10,85 et 3,0 kb, par Bgl II en deux fragments de longueurs 11,25 kb et 2,6 kb ainsi que par Bcl I en trois fragments de longueurs 11,6 kb, 1,25 kb et 1,0 kb."
b) La revendication 1 désormais valable pour l'Autriche ne diffère de ce texte qu'en ce que la revendication de produit est remplacée par une revendication de procédé pour l'obtention du plasmide p SG 2. Pour le reste, le libellé est le même.
Toutes les autres revendications contenues dans les deux jeux de revendications sont identiques aux revendications portant le même numéro sur la base desquelles la décision de rejet a été rendue.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108 et à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Pour des raisons de clarté, il semble indispensable de reprendre, outre les caractéristiques mentionnées dans la revendication 1 qui a été rejetée, d'autres caractéristiques contenues dans l'exposé initial, afin que le plasmide revendiqué soit caractérisé sans ambiguïté. Outre les indications relatives à l'origine de ce plasmide (souche), à sa longueur de contour et à son poids moléculaire ainsi qu'à sa longueur de molécule, le comportement de fragmentation lors de la digestion par différentes enzymes est essentiel à cet égard : en effet, la détermination du poids et de la longueur moléculaire est entachée d'une imprécision non négligeable, alors que l'on doit savoir à tout moment quel est le plasmide protégé par la revendication, même en présence de plusieurs plasmides qui peuvent être, le cas échéant, des dérivés d'un seul et même plasmide qui n'ont pas été détectés à l'origine. Il n'est cependant pas absolument nécessaire à cette fin de reprendre dans la revendication tous les résultats de la fragmentation indiqués dans la description initiale, notamment lorsque ces indications manquent de précision. La revendication 1 actuelle satisfait à ces exigences et remplit donc les conditions énoncées à l'article 84 CBE.
3. Aucune des deux versions de la revendication n'appelle d'objections au titre de l'article 123(2) CBE.
La revendication 1 désormais valable (pour tous les Etats contractants désignés, à l'exception de l'Autriche) résulte d'un fusionnement des revendications 1 et 2 initiales, l'indication du poids moléculaire du plasmide exprimé en mégadaltons étant supprimée, puisque l'homme du métier peut de toute façon le déduire de la longueur en kilobases de la molécule indiquée dans la revendication.
Les observations ci-dessus valent également pour les caractéristiques relatives au plasmide mentionnées dans le texte remanié de la revendication 1 valable pour l'Autriche. Les autres caractéristiques mentionnées dans cette revendication de procédé se fondent sur le texte initial de la revendication 3.
4. L'objet de la demande en litige concerne le plasmide p SG 2 et son procédé d'obtention à partir d'une culture de Streptomyces ghanaensis ATCC 14 672.
5. Le document représentant l'état de la technique le plus proche est le document (i), qui décrit l'obtention du plasmide p UC 6 à partir d'une culture de Streptomyces espinosus (NRRL 11 439).
Ce plasmide, obtenu lui aussi à partir d'une souche de Streptomycetes, contenant environ 9,2 kilobases, dont la carte de restriction est celle du dessin, peut être utilisé comme vecteur de clonage et pour la création de plasmides recombinants susceptibles d'être insérés par transformation dans des bactéries hôtes (cf. page 6, par. 1 et 2 ; page 18, dernier paragraphe et dessin).
L'intérêt du plasmide p UC 6 tient à ce qu'il peut faire office de vecteur chez des microorganismes d'intérêt industriel, par exemple Streptomyces. C'est ainsi qu'on obtient chez le plasmide p UC 6, par clonage d'une information génétique émanant de Streptomyces, la possibilité d'augmenter le rendement de produits d'intérêt industriel issus de ces organismes, par exemple des antibiotiques. Etant donné que ce plasmide est un plasmide Streptomycete, il constitue un vecteur idéal pour le genre Streptomyces, tout en pouvant également être utilisé comme vecteur dans d'autres microorganismes (par exemple Bacillus, Arthrobacter) (cf. pages 20, par. 1 et 21, lignes 9 à 11).
6. En ce qui concerne le document (i), la requérante a toutefois souligné que ni la souche qui y est mentionnée, ni le genre S. espinosus n'ont pris, à sa connaissance, la moindre importance du point de vue technique. Rien ne donnant à penser le contraire, la Chambre n'a aucune raison de mettre en doute cette allégation. Dans le cas où on utilise des vecteurs construits à partir du plasmide p UC 6 décrit antérieurement dans des espèces autres que S. espinosus, qui présentent par exemple un intérêt industriel pour la production d'antibiotiques, l'on se heurte toutefois à des échecs dus à des problèmes d'élimination, vu le caractère nécessairement exogène dans ces cas du plasmide utilisé au départ.
7. Par rapport au document (i), le problème à résoudre consiste par conséquent à produire un plasmide qui, lorsqu'il fait office de vecteur hybride, ne soit pas éliminé aussitôt par la souche de Streptomycetes utilisée comme cellule hôte, autrement dit un plasmide qui soit stable chez l'hôte.
En ce qui concerne la solution proposée (plasmide p SG 2), la requérante avait déjà fait observer au cours de la procédure d'examen que, par rapport au plasmide p UC 6 exposé dans le document (i), le plasmide p SG 2 avait au moins l'avantage, en tant que plasmide endogène Streptomyces ghanaensis, d'être stable chez cet hôte également sous forme de plasmide hybride, grâce à sa portion endogène (cf. lettre reçue le 28 août 1985, page 5, par. 1). C'est là l'"amélioration génétique" du plasmide revendiqué que la requérante a fait valoir au cours de la procédure de recours. La Chambre estime que cela revient à se borner à expliciter ce qui avait été indiqué dans la description initiale, à savoir que le plasmide p SG 2 est un plasmide pouvant notamment être utilisé comme plasmide de départ pour l'application de méthodes de génie génétique à la souche Streptomyces ghanaensis elle-même (cf. page 2, lignes 7 à 22 de la description).
Selon la jurisprudence constante, pour la détermination objective du problème, seul compte le résultat effectivement atteint par rapport à l'état de la technique le plus proche. Même si, selon la description initiale, le problème général que l'on se proposait de résoudre consistait à produire des quantités suffisantes d'un plasmide pouvant servir de vecteur aux fins de l'amélioration génétique des Streptomyces, il ne doit toutefois pas être interdit, au stade de la procédure de recours, de préciser le problème initialement posé, à condition de rester dans les limites de l'exposé initial (cf. décision T 184/82 "Articles en poly(p-méthylstyrène)/Mobil", JO OEB 1984, 263 et 264, et notamment les motifs de la décision, points 3 à 5). Dans la présente espèce, la reformulation du problème répond aux conditions requises et peut donc être admise, étant donné que, comme indiqué plus haut, l'avantage que fait valoir la requérante ressort déjà implicitement de l'énoncé initial du problème.
8. Selon la revendication de produit 1, il est proposé pour la résolution du problème posé le plasmide p SG 2, qui est issu d'une culture de Streptomyces ghanaensis ATCC 14 672 et qui est défini en outre par un certain nombre de caractéristiques supplémentaires indiquées dans la revendication, telles que la longueur de contour, la longueur de molécule, le comportement de fragmentation (profil de coupure) lors de la digestion par différentes enzymes.
Il convient d'examiner si le problème posé, plus précisément le problème de la stabilité du plasmide lors de son utilisation comme vecteur dans la production d'antibiotiques, est résolu par l'objet revendiqué.
Le document (i) n'apporte aucune précision concernant l'intérêt technique de l'espèce S. espinosus, et l'homme du métier est donc nécessairement amené à se demander quelle utilisation pourrait être faite de ce microorganisme en tant qu'hôte. Il sait simplement que d'autres Streptomycetes se prêtent à la production d'antibiotiques. Il ressort par exemple du document (II) qu'on utilise pour produire l'antibiotique moenomycine une souche de S. bambergiensis ou d'autres Streptomycetes équivalents, tels que S. ghanaensis, S. ederensis ou S. geysiriensis (cf. revendication).
Or, le document (II) ne fait manifestement pas état de l'application de méthodes de génie génétique. Si l'homme du métier entendait toutefois, comme c'est le cas en la présente espèce, utiliser ces nouvelles techniques dans des procédés de production traditionnels, tels qu'ils sont décrits dans le document (i), il ne disposait jusqu'ici que du plasmide exogène p UC 6 décrit dans ce document, qui est obtenu à partir de S. espinosus, et dont on doit forcément se demander s'il est compatible avec les organismes hôtes potentiels.
Or, l'amélioration de la production d'antibiotiques que cherchent notamment à obtenir les hommes du métier par ce moyen ne pourra se réaliser de manière satisfaisante que si les vecteurs nécessaires à cet effet peuvent être intégrés de manière durable dans le microorganisme. Les vecteurs construits à partir de plasmides exogènes n'offrent naturellement pas les meilleures conditions pour cela. Par ailleurs, il ne servirait pas à grand chose d'utiliser un organisme hôte dans lequel le vecteur présenterait certes la stabilité nécessaire, mais qui ne permettrait de préparer qu'un produit sans intérêt, ou même à l'extrême inutilisable (par exemple en raison de sa toxicité).
Etant donné toutefois qu'on dispose à présent à cette fin d'un plasmide de départ approprié issu de la souche techniquement utilisable de S. ghanaensis, et que l'on fournit ainsi un plasmide de départ spécifique (endogène) à un hôte se prêtant à la préparation d'antibiotiques, la Chambre estime que le problème posé est résolu de manière crédible, l'homme du métier pouvant s'attendre à ce que des plasmides endogènes conduisent à des plasmides hybrides à haute stabilité.
9. La nouveauté du plasmide p SG 2 a été reconnue par la Division d'examen et n'a pas été remise en question par la Chambre lorsque celle-ci a réexaminé les documents cités au cours de la procédure.
En conséquence, l'objet de la revendication 1 (valable pour tous les Etats contractants désignés, à l'exception de l'Autriche) est nouveau.
10. Il convient donc à présent d'examiner si la solution revendiquée implique également une activité inventive.
10.1. Le plasmide p UC 6 décrit dans le document (i) est obtenu à partir de Streptomyces espinosus (NRRL 11 439) ; il se prête notamment à une utilisation comme vecteur de clonage pour le genre Streptomyces et fournit par conséquent un moyen d'augmenter le rendement de produits d'intérêt industriel (par exemple, des antibiotiques) obtenus à partir de ces organismes.
Si le document (i) ne donne pas plus de détails sur le spectre d'hôtes de tels vecteurs, il semble toutefois retenir l'hypothèse d'une large utilisation à cet égard dans le genre Streptomyces, et parfois même dans d'autres genres (Bacillus, etc.), ce qui signifie en revanche que c'est normalement un plasmide exogène qui sert de vecteur pour l'hôte choisi et qu'il faut donc s'attendre à ce que ce vecteur ne soit pas toujours stable dans la cellule hôte.
10.2. Il est incontestable que le risque d'élimination du vecteur peut être réduit lorsque l'on dispose, pour la construction du vecteur à introduire dans la cellule hôte, d'un plasmide endogène qui remplit les conditions nécessaires à cette fin (poids moléculaire, nombre de copies, etc.).
Si toutes les bactéries ou tout au moins tous les Streptomycetes contenaient un plasmide, il serait certainement aisé en général pour l'homme du métier d'obtenir le plasmide endogène chez un quelconque microorganisme hôte du genre Streptomyces, et il ne resterait qu'à examiner si les caractéristiques du plasmide laissent prévoir une utilisation génétique. Mais les plasmides ne sont pas aussi omniprésents, comme il ressort sans ambiguïté de la "déclaration" produite par la requérante au cours de la procédure d'examen, dans laquelle il est affirmé notamment que, selon un document publié antérieurement, seules quatre sur trente-quatre souches (de Streptomyces) examinées contenaient des plasmides et que, selon un autre document (également publié antérieurement) seules sept sur trente-deux souches examinées contenaient un ADN "supercoiled" (ce qui peut être un indice de la présence de plasmides (cf. points 4 c) et 4 d) de ladite "déclaration").
Ces arguments, en soi déjà convaincants, de la requérante sont étayés de surcroît par les moyens de preuve reçus le 2 mai 1986 (synthèse d'une communication de 1985 - (document III)). Il en ressort que sur 127 souches de Streptomyces examinées appartenant à quatre espèces, seules neuf contenaient un plasmide. La requérante a donc administré une preuve convaincante du caractère extrêmement hétérogène de ce genre en ce qui concerne la présence de plasmides.
Par contre, l'objection formulée par la Division d'examen, qui avait déclaré sans la moindre preuve qu'il n'existe pas à sa connaissance d'espèce Streptomyces sans plasmide, n'est pas convaincante et semble peu réaliste. Dans une décision antérieure non publiée, une autre chambre avait rejeté une objection quant à la nouveauté qui avait été soulevée sans preuve, sur la seule base des connaissances personnelles de l'instance qui l'avait avancée (cf. décision T 21/83, notamment le point 4 de l'exposé des motifs). Bien que la nouveauté ne soit pas en cause en l'espèce, la Chambre n'a aucune raison, ne serait-ce qu'en raison de la "déclaration" susmentionnée qui a été produite, de porter une autre appréciation sur l'activité inventive.
Dans ces conditions, la Chambre ne peut qu'estimer en conséquence que la présence de plasmides dans les Streptomycetes doit être considérée comme sporadique. Elle n'a donc aucune raison de douter que les autres souches de Streptomycetes citées dans le document (II) en plus de la souche Streptomyces ghanaensis soient toutes exemptes de plasmide.
A supposer que l'homme du métier ait essayé d'appliquer les nouvelles méthodes de génie génétique au procédé classique décrit dans le document (II), il aurait très vraisemblablement choisi à cette fin la souche de l'espèce S. bambergiensis, qui est citée en premier dans le document et qui est au demeurant la seule pour laquelle la description donne un exemple de réalisation de l'invention. Sachant très bien qu'il n'aurait a priori que peu de chance de trouver une souche contenant du plasmide et que les plasmides qu'il trouverait ne se prêteraient pas tous à des applications de techniques du génie génétique (cf. plus bas), il n'aurait été amené par cette expérience qu'à constater l'absence de plasmides dans ce microorganisme. Cette constatation, qui n'a rien de nouveau, ne l'aurait assurément pas incité à aller plus loin dans cette voie.
Par conséquent, il y a lieu de reconnaître que rien dans l'état de la technique opposé à la requérante ne permettait de conclure à la présence d'un plasmide dans Streptomyces ghanaensis ATCC 14 672, et encore moins d'affirmer que de par sa nature, ce plasmide se prête à des applications techniques du génie géné tique telles que la construction de vecteurs.
10.3. Pour résoudre ce problème, il fallait détecter dans le genre des Streptomycetes une souche contenant un plasmide, sans disposer du moindre guide pour la recherche, vu la présence sporadique de plasmides chez les Streptomycetes. Il fallait en outre que le plasmide recherché se prête effectivement à ces applications.
Selon la requérante, il y a lieu de considérer que le poids moléculaire des plasmides, si l'on veut utiliser ces derniers à des fins génétiques, devrait être inférieur à environ 17 Md (soit 25 kb). Il est connu que les poids moléculaires des plasmides ne sont pas tous en-deçà de cette limite. Le poids moléculaire du plasmide p SG 2 revendiqué est de 9,2 Md (soit environ 13,8 kb), et donc légèrement supérieur à celui du plasmide p UC 6 décrit antérieurement, qui est de 6,0 Md. Selon la Chambre, rien ne permet d'affirmer que ceci constituerait un handicap pour le bon fonctionnement ou que d'autres inconvénients majeurs en résulteraient. La découverte de plasmides appropriés n'est au demeurant pas une simple question de routine, ainsi qu'il ressort sans ambiguïté du document (III) susmentionné. Si sur 127 souches examinées provenant de quatre espèces, seules neuf contenaient un plasmide et si seuls trois de ces plasmides avaient un poids moléculaire inférieur à 17 Md (soit moins de 25 kb), cela revient en fait à dire que parmi toutes les souches examinées, seules 2 % contenaient un plasmide d'un poids moléculaire approprié. De surcroît il existe apparemment d'autres espèces chez lesquelles la présence de plasmides n'a pu être établie en dépit de recherches approfondies (par exemple, chez les 31 souches de S. albus examinées).
Un plasmide devant être utilisé à des fins génétiques doit non seulement être de dimension moléculaire appropriée, mais encore manipulable, analysable et également identifiable ou distinguable d'autres plasmides. A cet égard, le comportement de restriction en cas de digestion par différentes enzymes est d'une grande importance. Or, ainsi qu'il ressort déjà de la description initiale (cf. tableau page 3), on peut considérer que sur ce point le plasmide p SG 2 convient mieux que le plasmide p UC 6, car s'il comporte lui aussi un seul site de restriction simple, il a en revanche un plus grand nombre de sites de restriction double (3 : 1). A ce sujet, la requérante a expressément signalé tant dans la procédure d'examen (cf. lettre reçue le 28 août 1985, page 5, dernier paragraphe) que dans la procédure de recours (mémoire exposant les motifs du recours, page 3, par. 2), que d'autres sites de restriction simple avaient été découverts de puis le dépôt de la demande, de sorte qu'on connaît actuellement au total quatre sites de restriction de ce type, à savoir pour Hind III, Eco RV, Pvu II et Nhe I. Les sites de restriction simple étant rares, leur présence est un indice supplémentaire de l'excellente aptitude du plasmide p SG 2 à être utilisé à des fins génétiques. Dans le document (i), un seul site de restriction simple (Bgl II) est indiqué pour le plasmide p UC 6. On ignore si d'autres sites simples ont été découverts par la suite.
Bien que l'homme du métier connût certainement, grâce à la littérature spécialisée, un certain nombre d'autres souches Streptomyces contenant un plasmide, la recherche d'un plasmide pouvant être utilisé à des fins génétiques n'en était pas facilitée pour autant, étant donné que l'homme du métier ne pouvait en l'occurrence rien en déduire qui lui indiquât concrètement o", à l'intérieur du genre, il devait chercher pour parvenir à ses fins.
10.4. La solution du problème posé découle donc directement de la sélection effectuée à l'intérieur du genre Streptomyces, sélection qui n'avait rien d'évident.
Il n'a pas pu être établi que le poids moléculaire légèrement plus élevé du plasmide revendiqué, comparé à celui du plasmide p UC 6, constitue un inconvénient vraiment sérieux, bien que ce poids moléculaire soit plus proche de la limite critique de 17 Md que celui du plasmide décrit auparavant.
De même, on ne peut savoir a priori si la différence entre le nombre de copies du plasmide p UC 6 (20 à 40) et celui du plas mide revendiqué (10 à 20, soit près de la moitié) constitue un inconvénient ou un avantage. Un nombre plus élevé de copies peut être avantageux si l'on veut isoler un plasmide, mais il peut, à l'inverse, le cas échéant, avoir des conséquences fatales pour la cellule hôte (cf. "déclaration", point 2).
Ces différences peuvent donc être négligées. De toute manière, elles sont sans intérêt pour l'appréciation de l'activité inventive, étant donné qu'elles sont sans rapport avec le problème posé et avec sa solution.
L'objet de la revendication 1 (pour tous les Etats contractants désignés, à l'exception de l'Autriche), c'est-à-dire le plasmide p SG 2 revendiqué, implique donc une activité inventive.
11.1. Le procédé correspondant selon la revendication 2 et les sous-revendications 3 et 4 qui en dépendent est un procédé dit analogique mis en oeuvre pour la première fois dans la demande en litige en vue d'obtenir un plasmide à partir d'une culture de Streptomyces ghanaensis ATCC 14 672.
L'objet de la revendication 2 est donc nouveau. Il en va de même pour les revendications 3 et 4 qui en dépendent.
De même, l'utilisation du plasmide p SG 2 en vue de la construction de plasmides vecteurs n'avait manifestement pas été décrite antérieurement, et elle est donc nouvelle.
11.2. Par analogie avec d'autres domaines de la chimie, il y a lieu de lui reconnaître également une activité inventive, découlant en l'occurrence de l'activité inventive qu'implique le produit, à savoir le plasmide p SG 2, qui peut être utilisé pour la construction d'un vecteur stable dans l'organisme hôte.
12. Les développements qui précèdent valent également par analogie pour les revendications de procédé 1 à 3 et pour la revendication d'utilisation 4 valables pour l'Autriche.
13. L'objet de ces deux jeux de revendications est donc nouveau et implique une activité inventive. Les deux jeux de revendications sont donc admissibles (article 52(1) CBE).
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision attaquée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la première instance pour délivrance d'un brevet européen sur la base des pièces suivantes produites lors de la procédure orale :
- Revendications 1 à 5 pour l'Allemagne (République fédérale d'), la Belgique, la France, l'Italie, le Liechtenstein, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse.
- Revendications 1 à 4 pour l'Autriche
- Description, pages 1 à 8