European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1986:T001785.19860606 | ||||||||
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Date de la décision : | 06 Juin 1986 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0017/85 | ||||||||
Numéro de la demande : | 80106420.5 | ||||||||
Classe de la CIB : | C09C 1/02 | ||||||||
Langue de la procédure : | DE | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | Plüss-Staufer | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.3.01 | ||||||||
Sommaire : | Si la plage de nombres préférée d'un document antérieur empiète en partie sur une plage revendiquée, cette plage n'est en tout état de cause plus nouvelle lorsque les valeurs indiquées dans les exemples de réalisation de l'invention figurant dans le document antérieur ne sont qu'à peine en dehors de la plage revendiquée et permettent à l'homme du métier de conclure qu'il peut travailler à l'intérieur de toute cette plage. | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Nouveauté (absence de) Sélection dans une plage de nombres Limitation d'une plage de nombres Modification des revendications |
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Exergue : |
- |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 80 106 420.5 (n° de publication : 27 997), déposée le 21 octobre 1980, revendiquant la priorité d'une demande allemande déposée le 29 octobre 1979, a été rejetée le 6 juillet 1984 par décision de la Division d'examen. Cette décision a été rendue sur la base de deux revendications, dont la première s'énonçait comme suit :
"Charge minérale, en particulier carbonate de calcium, caractérisée en ce que le rapport
% en poids de particules de diamètre < 1 µm = R =4 à 10."
% en poids de particules de diamètre < 0,2 µm
A titre de requête subsidiaire en délivrance, il avait été déposé un autre jeu de revendications qui différait de celui sur lequel portait la requête principale par le "disclaimer" suivant ajouté à la fin de la revendication 1 : "à l'exception de 9,4 et 9,7".
II. Il est précisé dans la décision que l'objet de la revendication 1 selon la requête principale n'est pas nouveau eu égard aux produits C, D et E cités dans le document antérieur FR-A-2 418 263, pour lesquels les valeurs de R (si on fait le calcul) sont respectivement de 9,7, 9,4 et 10 ; en revanche, l'objet de la revendication 1 selon la requête présentée à titre subsidiaire est effectivement nouveau, en ce qu'il constitue une sélection, mais il découle de manière évidente du document antérieur. Il en va de même pour la valeur préférée de R selon la revendication 2 de la requête principale et de la requête présentée à titre subsidiaire.
III. La requérante a formé le 13 août 1984 un recours contre cette décision, en acquittant la taxe prescrite, et dans son exposé des motifs du recours, produit le 9 novembre 1984, a développé en substance les arguments suivants :
Le document antérieur n'indique aucune valeur pour R, et ne conduit pas l'homme du métier qui ne connaît pas l'invention à forger une valeur quelconque pour R. Il n'énonce pas la règle à appliquer selon l'invention, mais divulgue simplement quelques valeurs qui relèvent "par hasard" de celle-ci. L'objet de la demande est donc nouveau. Il n'était pas non plus évident, car l'on peut effectivement déduire du document antérieur certains effets défavorables d'une teneur trop élevée en particules de diamètre inférieur à 0,2 micron, mais on ne peut en conclure qu'il convient de réduire cette teneur au profit d'une teneur en particules de diamètre compris entre 0,2 et 1 micron ; l'homme du métier sait en effet que lorsqu'on effectue un broyage pour obtenir des produits à faible teneur en particules de diamètre inférieur à 0,2 micron, on obtient aussi automatiquement des teneurs plus faibles en particules de diamètre inférieur à 1 micron, donc des valeurs de R sortant de la plage revendiquée. La requérante a également renvoyé à ce propos à des résultats d'essais déjà soumis à la première instance, tendant à prouver les propriétés avantageuses inattendues des produits revendiqués.
IV. Même après avoir reçu deux notifications dans lesquelles la Chambre mettait en doute la nouveauté des revendications selon la requête principale et la requête subsidiaire, revendications qui avaient été rejetées par la première instance, et contestait également la nouveauté des revendications limitées qui avaient été produites à la suite de ce rejet, la requérante persiste à défendre dans sa requête principale les revendications limitées actuelles ; dans une requête présentée à titre subsidiaire, elle sollicite la délivrance d'un brevet encore plus limité par introduction d'une autre caractéristique dans la revendication 1.
V. Les revendications selon la requête principale s'énoncent comme suit :
"1. Charge minérale, en particulier carbonate de calcium naturel, pour peintures et pour masses d'enduction pour papier, caractérisée en ce que le rapport
% en poids de particules de diamètre < 1 µm = R = 4 à 8.
% en poids de particules de diamètre < 0,2 µm
2. Charge selon la revendication 1, caractérisée en ce que la valeur de R est voisine de 5."
Selon la requête présentée à titre subsidiaire, la revendication 1 doit - suivie de la revendication 2 inchangée et après correction d'une faute de transcription évidente - s'énoncer comme suit :
"Charge minérale, en particulier carbonate de calcium naturel, pour peintures et pour masses d'enduction pour papier, caractérisée en ce que le rapport
% en poids de particules de diamètre < 1 µm = R = 4 à 8
% en poids de particules de diamètre < 0,2 µm
et qu'au moins 93 % en poids des particules ont un diamètre inférieur à 2 microns."
Enfin, la requérante présente pour la première fois un jeu de revendications distinct pour l'Autriche, dont la revendication 1 s'énonce comme suit :
VI. A l'appui de sa requête principale, la requérante fait également valoir que :
i) ce qu'elle avait affirmé précédemment, à savoir que le document antérieur n'énonce pas la règle applicable selon l'invention, mais divulgue uniquement quelques valeurs relevant "par hasard" de celle-ci, se trouve confirmé par deux décisions allemandes, à savoir une décision du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) "Etikettiermaschine" (Etiqueteuse), GRUR 1981, 812, et une décision du Tribunal fédéral des brevets 13 W (pat) 87/82, en date du 20 février 1984.
ii) la décision "Thiochloroformiates/HOECHST" (JO OEB n° 7/1985, p. 209) citée par la Chambre ne peut pas s'appliquer à l'objet de la demande, car il ne s'agit pas dans la présente espèce, comme pour le cas visé par ladite décision, d'une invention de sélection ; en effet, une sélection doit porter sur l'enseignement (d'une invention déjà connue) lui-même et non sur le résultat auquel conduit cet enseignement.
iii) enfin, la demande de brevet allemand correspondant à la présente demande a elle aussi abouti à la délivrance du brevet, alors que l'état de la technique pris en compte était le même (le document DE-A-2 808 425 qui y est cité correspond au document FR-A-2 418 263 cité en la présente espèce).
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108, ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Il faut tout d'abord examiner la recevabilité des revendications nouvellement présentées.
2.1. La nouvelle revendication 1 selon la requête principale et selon la requête présentée à titre subsidiaire est limitée, en ce qui concerne la valeur de R revendiquée, à une plage comprise entre 4 à 8. Dans les pièces déposées à l'origine, il était fait mention d'une plage préférée comprise entre 4 et 10 (par exemple revendication 2 déposée à l'origine) ; en outre, il était également indiqué, à la suite des valeurs de R, citées à titre d'exemples, de 5,0, 4,53 et 5,33 dans le cas des carbonates de calcium naturels (page 4, lignes 34 à 36) - lesquels sont signalés tout au long de la description comme étant des exemples préférés de charges minérales, sans que soit faite de distinction par rapport à d'autres substances en ce qui concerne les tailles des particules (voir par exemple page 1, lignes 14 à 15 ; page 2, lignes 20 à 27 ; page 3, lignes 28 à 30) - que "R peut avoir des valeurs beaucoup plus élevées ..., par exemple des valeurs excédant 8" (page 5, lignes 1 et 2). Outre la valeur limite inférieure de la plage préférée commençant par R = 4, divulguée initialement, la valeur limite supérieure ("8") figurait donc déjà elle aussi dans les pièces déposées à l'origine, car l'expression "également ... excédant 8" suppose une plage partielle se terminant à 8. Le rapprochement de ces deux valeurs figurant dans la plage préférée divulguée à l'origine afin que soit évité un recoupement avec l'état de la technique n'appelle pas d'objections de forme (voir la décision T 02/81, "Méthylène-bis-(phénylisocyanate)/MOBAY", JO OEB 10/1982, p. 394 s., ainsi que la décision non publiée T 53/82, "Furnaceruße" (noirs de fumée) du 28 janvier 1982, alinéa commun aux pages 4 et 5).
2.2. La charge faisant l'objet de la nouvelle revendication 1 selon la requête principale et selon la requête présentée à titre subsidiaire a en outre été précisée par l'introduction des mots "pour peintures et pour masses d'enduction pour papier". On peut trouver dans le texte initial de nombreuses allusions à une telle utilisation des charges revendiquées ; en particulier "les masses d'enduction pour papiers ainsi que les peintures" sont mentionnées expressément page 9, lignes 16 et 17. L'introduction des mots en question n'appelle donc aucune critique.
2.3. Dans la nouvelle revendication 1 selon la requête présentée à titre subsidiaire figure en outre la caractéristique selon laquelle "au moins 93 % en poids des particules ont un diamètre inférieur à 0,2 micron". (Il faut lire en fait, comme dans le document DE-C-2 943 652 correspondant "inférieur à 2 microns" ; car d'une part une valeur de R supérieure à 4 exclut par définition une teneur de plus de 25 % en particules de diamètre inférieur à 0,2 micron, d'autrepart, c'est ce qui ressort des tableaux I et III de la description). Cette caractéristique n'appelle aucune objection de forme, car elle apparaît et est donc divulguée dès l'origine dans tous les produits selon l'invention décrits concrètement (page 5, tableau I, produits 3 et 4 ; page 8, tableau III, produits 3 à 5), avec des pourcentages se situant entre 93 et 99,5 %.
2.4. La nouvelle revendication 2 selon la requête principale et selon la requête présentée à titre subsidiaire n'appelle elle non plus aucune objection de forme, car une valeur de R "voisine de 5" est déjà divulguée comme étant préférée page 5, ligne 11, du texte initial.
2.5. La nouvelle rédaction des revendications selon la requête principale et selon la requête présentée à titre subsidiaire est donc recevable, abstraction faite en tout état de cause du jeu de revendications distinct déposé pour l'Autriche.
3. Le seul document pertinent de l'état de la technique cité dans le rapport de recherche et au cours de la procédure devant la première instance est le document FR-A-2 418 263. Partant d'un état de la technique selon lequel il apparaissait souhaitable, en particulier eu égard au brillant recherché pour les masses d'enduction pour papier, qu'une proportion aussi élevée que possible des particules de la charge utilisée présente un diamètre aussi faible que possible (page 1, ligne 32 à page 2, ligne 31 ; cf. en particulier page 2, lignes 8 à 11), ce document antérieur enseigne que, pour améliorer encore le brillant des peintures ou des masses pour couchage du papier (page 2, lignes 36 à 40), il n'est pas souhaitable non plus d'avoir des particules de charge trop petites. Il propose concrètement des charges ne contenant pas si possible de particules de diamètre inférieur à 0,2 micron (page 3, lignes 6 à 8), tout en considérant que l'on peut admettre dans la pratique une teneur de 15 % au maximum en particules d'une telle finesse.
4. Au contraire, le problème qu'entend résoudre l'invention est celui d'une optimisation poussée du brillant sans qu'elle s'accompagne d'une viscosité trop élevée (page 3, ligne 5 en liaison avec les lignes 10 à 11 du texte initial) ou nécessite des conditions de préparation nuisant à la rentabilité (page 5, ligne 13).
5. Pour la résolution de ce problème, l'invention pose comme règle, conformément à la revendication 1 de la requête principale, que la valeur de R doit par conséquent se situer entre 4 et 8.
6. Les tableaux II, p. 6 et IV, p. 8 du texte initial (qui comparent l'un les produits n°s 3 et 4, l'autre les produits n°s 3, 4 et 5 avec les produits n°s 1 et 2) tendent à montrer qu'un accroissement de la valeur de R conduit à une amélioration du brillant. Les résultats d'essais produits le 8 mars 1983 prouvent en outre qu'un accroissement de la valeur de R au-delà de 8 ne permet plus d'améliorer encore le brillant que dans de modestes proportions, et entraîne en revanche une augmentation indésirable de la viscosité (comparaison entre les produits VP3 et VP4, deux dernières lignes du tableau synoptique des résultats). L'on constate en outre que même pour les valeurs de R sensiblement inférieures à 4, non seulement le brillant est fortement amoindri, mais encore la viscosité est fortement accrue (produit VP1, ligne 1 du tableau synoptique). Il y a donc tout lieu de penser que le problème posé est effectivement résolu par la règle revendiquée.
7. En ce qui concerne la nouveauté de la revendication 1 selon la requête principale, la seule chose qui compte, puisque la seule antériorité citée concerne incontestablement les charges minérales (en particulier le carbonate de calcium naturel) pour peintures et pour masses d'enduction pour papier, c'est de savoir si l'homme du métier pouvait également déduire de ce même document une valeur de R (telle que définie dans la revendication de la présente demande) comprise entre 4 et 8.
7.1. Tout d'abord cette antériorité tend déjà à montrer - dans la perspective là aussi d'une amélioration du brillant - non seulement que la proportion de particules de diamètre inférieur à 0,2 micron doit être maintenue aussi basse que possible (page 3, lignes 3 à 5), mais encore qu'il est nécessaire de maintenir aussi élevée que possible la proportion de particules de diamètre inférieur à 1 micron (page 4, lignes 33 à 36). Au vu de ces deux recommandations, l'homme du métier ne pouvait que conclure qu'il convient d'avoir le maximum de particules de diamètre compris entre 0,2 et 1 micron, en d'autres termes que l'important, c'est le rapport représenté selon la demande par le symbole R, même si l'on ne trouve dans l'antériorité ni ce symbole lui-même, ni sa présentation mathématique sous forme de quotient. Ce qui compte, c'est que ce document met ces deux plages de diamètre de particules dans un rapport mathématique - quelle que soit la formulation choisie.
7.2. Si l'on considère maintenant les plages préférées délimitées avec précision dans les revendications 2 et 5 de ladite antériorité pour les dimensions susmentionnées des particules (3 à 12 % < 0,2 µm ; 80 à 95 % < 1 µm), il en découle immédiatement, lorsqu'on met en relation les valeurs limites extrêmes des deux plages préférées, un rapport correspondant pour le fond à la valeur de R, soit
80 à 95 = 6,67 à 31,6.
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La plage préférée qui est ainsi divulguée empiète sur la plage revendiquée qui va de R = 4 à R = 8 et en détruit donc la nouveauté.
7.3. Cette divulgation est complétée par des exemples concrets de réalisation de l'invention : alors que les produits B, C, D et E cités à titre d'exemples dans le document antérieur contiennent moins de 15 % de particules de diamètre inférieur à 0,2 micron, et ont respectivement, si l'on fait le calcul, des valeurs de R de 13, 9,7, 9,4 et 10,0 et un bon brillant, les produits A, F et G contiennent plus de 15 % de particules de diamètre inférieur à 0,2 micron et ont respectivement, si l'on fait le calcul, des valeurs de R de 3,1, 3,6 et 2,6 et un brillant certes insuffisant, mais cependant acceptable en pratique.
Bien que ces valeurs soient toutes à l'extérieur de la plage revendiquée dans la présente demande, elles ne conduisent pourtant pas à limiter la plage préférée définie dans les revendications 2 et 5, de formulation plus large, de ce document antérieur ; ce sont plutôt des valeurs représentatives, qui indiquent à l'homme du métier comment on peut faire varier le brillant de la charge en modifiant le diamètre des particules, avec même la possibilité de sortir de la plage préférée, au prix d'une perte de brillant. Ainsi qu'il ressort de l'énumération susmentionnée des valeurs de R, les exemples cités à l'intérieur et à l'extérieur de la plage préférée, en particulier ceux ayant pour valeurs de R 3,6 et 9,4, sont si proches l'un de l'autre qu'ils suggèrent immédiatement à l'homme du métier la plage revendiquée en l'espèce, à savoir R compris entre 4 et 8. Par conséquent, à la lecture du document antérieur, l'homme du métier devait forcément penser à la plage de valeurs de R comprise entre les valeurs 3,6 et 9,4 auxquelles correspondaient les exemples, si bien que cette plage intermédiaire est dépourvue elle aussi de nouveauté.
7.4. En résumé, il ressort de ce qui vient d'être développé sous les points 7.2 et 7.3 que si la plage préférée dans un document antérieur empiète en partie sur une plage revendiquée, cette plage n'est en tout état de cause plus nouvelle lorsque les valeurs indiquées dans les exemples de réalisation de l'invention figurant dans le document antérieur ne sont qu'à peine en dehors de la plage revendiquée et permettent à l'homme du métier de conclure qu'il peut travailler à l'intérieur de toute cette plage.
7.5. Cette appréciation de la situation est conforme à une décision déjà citée rendue antérieurement dans l'affaire "Thiochloroformiates/HOECHST" : la Chambre avait admis sous certaines conditions qu'il puisse être opéré une sélection dans un domaine de nombres. D'après cette décision, la sélection d'un domaine limité à l'intérieur d'un domaine de nombres plus large peut être brevetée à condition que le domaine limité faisant l'objet de la sélection soit étroit et suffisamment éloigné du domaine connu, illustré par des exemples. La Chambre avait considéré à l'époque que le fait de choisir dans un domaine général connu allant de > 0 à < 100 % en moles une concentration de catalyseur comprise dans le domaine limité allant de 0,02 à 0,2 constitue une sélection sévère. En outre, le domaine illustré par des exemples était éloigné d'au moins une puissance de dix du domaine sélectionné.
Ces conditions ne sont pas réunies dans la présente espèce. La partie de plage correspondant à R = 4 à 8 revendiquée en l'occurrence ne constitue pas une portion étroite de la plage partielle connue qui va de 6,67 à 31,6, et elle n'est pas non plus suffisamment éloignée de la plage connue, illustrée par des exemples, qui va de 2,6 à 13, puisqu'elle se trouve au contraire en plein milieu. L'homme du métier voit dans ces exemples fournis lors de l'indication de la plage préférée non pas des modes isolés de réalisation de l'invention, à caractère ponctuel, mais des exemples représentatifs d'une plage qui s'étend en tout état de cause de la valeur inférieure (R = 2,6) à la valeur supérieure (R = 13) de distribution des particules et couvre ainsi toutes les valeurs intermédiaires, et donc également la plage revendiquée en l'espèce.
7.6. Qu'un brevet ait été délivré sur la base de la demande de brevet allemande correspondante ne change rien à cette situation, d'autant que la revendication qui a été admise dans ce brevet était limitée par une autre caractéristique au sens où l'entend la présente requête formulée à titre subsidiaire, si bien que la délivrance du brevet ne permet absolument pas de conclure que le Tribunal fédéral des brevets aurait reconnu la nouveauté de la revendication 1 qui fait l'objet de la présente requête principale.
7.7. Même si elle prend en considération les décisions de tribunaux allemands citées par la requérante, la Chambre ne peut que s'en tenir à cette appréciation de la situation. La décision déjà citée de la Cour fédérale de justice "Etikettiermaschine" s'applique à une situation qui n'est pas comparable à celle dont il est question ici - à savoir une simple sélection dans une plage de nombres -, car dans le cas sur lequel avait statué la Chambre, à la différence du cas présent, il était question d'une sélection dans un "domaine général indifférencié sans paramètre concret" (2e partie du sommaire). La décision du Tribunal fédéral des brevets 13 W (pat) 87/82, dont la requérante a déposé copie le 7 avril 1986, concerne bien il est vrai une sélection dans une plage de nombres (dans le domaine des alliages) ; la conclusion qu'elle tire, citée par la requérante, est effectivement celle-ci: "... des résultats auxquels on n'est parvenu que par hasard dans l'état de la technique et qui ne se sont pas concrétisés dans des instructions pour la mise en oeuvre technique ... ne peuvent pas remettre en question la nouveauté du contenu de la demande". Statuant sur le pourvoi ouvert dans cette affaire, la Cour fédérale de justice en a toutefois décidé autrement (décision du 11 juillet 1985, "Borhaltige Stähle" (Aciers contenant du bore), voir GRUR 1986, 163), en constatant dans le sommaire que : "Une 'règle de proportions' à respecter lorsqu'on prépare des alliages n'est pas nouvelle si des alliages ayant qualitativement et quantitativement les mêmes composants appartiennent à l'état de la technique et si l'on a respecté pour leur préparation la 'règle de proportions' revendiquée, même sans la connaître". Cette décision reste dans le droit fil de la jurisprudence antérieure de la Cour selon laquelle on ne peut à nouveau protéger un domaine dont on connaît déjà des domaines partiels (GRUR 1982, 610 ; "Langzeitstabilisierung" (Stabilisation de longue durée). La décision du Tribunal fédéral des brevets citée par la requérante ne peut donc constituer un argument en faveur de la thèse soutenue par celle-ci.
8. Vu ce qui a été développé sur le point 7, il y a lieu de conclure que la revendication 1 selon la requête principale n'est pas brevetable, étant dépourvue de nouveauté. Etant donné que la décision rendue sur une requête ne se divise pas, la Chambre n'a pas, avant de statuer sur la requête principale, à examiner la revendication 2 et le jeu de revendications distinct déposé pour l'Autriche. Par conséquent, le recours doit être rejeté pour ce qui est de la requête principale.
9. Il en va autrement de la requête présentée à titre subsidiaire pour les Etats contractants suivants : DE, FR, BE, NL, SE, GB et IT : pour la Chambre, la caractéristique introduite dans la revendication 1 en cause, à savoir que "93 % au moins en poids des particules sont de diamètre inférieur à 2 microns" ne figure pas dans le document FR-A-2 418 263. Cette revendication et donc aussi la revendication 2 qui en dépend sont par conséquent nouvelles.
10. Ces revendications n'ont cependant pas encore été présentées à la première instance ; cette dernière n'a donc pas encore pu porter un jugement définitif sur leur brevetabilité. En outre, le jeu de revendications distinct déposé pour l'Autriche n'a pas non plus été présenté à la première instance ; celle-ci n'a pas encore pu par conséquent examiner s'il satisfaisait aux conditions de brevetabilité. Pour éviter que la procédure ne saute une instance, la Chambre juge donc équitable de renvoyer l'affaire devant la Division d'examen pour que celle-ci poursuive l'examen quant au fond sur la base du texte actuel des revendications correspondant à la requête présentée à titre subsidiaire.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. L'affaire est renvoyée devant la Division d'examen pour que celle-ci poursuive la procédure d'examen sur la base du texte des revendications correspondant à la requête présentée à titre subsidiaire.
3. Le recours concernant toute autre requête est rejeté.