T 0491/99 (Caisse octogonale/OTOR) of 24.10.2000

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2000:T049199.20001024
Date de la décision : 24 Octobre 2000
Numéro de l'affaire : T 0491/99
Numéro de la demande : 93110403.8
Classe de la CIB : B65D 5/02
Langue de la procédure : FR
Distribution : B
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Titre de la demande : Caisses en une matière en feuille et flans pour la réalisation de telles caisses
Nom du demandeur : OTOR
Nom de l'opposant : Fulda Verpackung Stabernack JR GmbH
Roman Bauernfeind Verpackungswerk AG
Rechtsanwalt Werner Folger Konkursverwalter
Lande Wellpappen AG
Chambre : 3.2.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Document de brevet opposé à titre d'antériorité : interprétation de son contenu opposable
Limitation de son contenu opposable au seul mode de réalisation qui peut être matériellement exécuté par l'homme du métier
Exergue :

Si, par suite de la terminologie utilisée, un document de brevet antérieur paraît de prime abord suggérer l'invention de produit revendiquée, ce document antérieur n'est pas susceptible d'en affecter la brevetabilité dès lors que l'homme du métier ne peut matériellement réaliser le produit en question qu'ultérieurement, à partir du procédé et de la machine décrits pour la première fois dans le brevet européen en cause (voir point 5 des motifs).

Décisions citées :
T 0206/83
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. L'intimée est titulaire du brevet européen 0 570 023 (n de dépôt : 93 110 403.8).

Les revendications indépendantes 1 de caisse et 14 de flan se lisent comme suit :

"1. Caisse (C1 à C10) de matière en feuille de carton réalisée à partir d'un flan (F1 à F10) comportant une suite de huit volets rectangulaires (1 à 8) formant des parois latérales de la caisse et terminée par une languette rectangulaire de fixation (16), lesdits volets et ladite languette étant reliés les uns aux autres par des premières lignes de pliage (9 à 15 et 17) parallèles les unes aux autres, à savoir quatre volets principaux séparés deux à deux par quatre volets intermédiaires et un premier ensemble de rabats latéraux (18.1, 18.3, 18.5, 18.7) disposés d'un côté et reliés aux volets principaux par des deuxièmes lignes de pliage (20.1, 20.3, 20.5, 20.7) perpendiculaires aux premières lignes de pliage et formant au moins partiellement le fond de la caisse, lesdits volets intermédiaires étant dénués de rabat, au moins un rabat sur deux (18.1, 18.3, 18.5, 18.7) présentant ses deux côtés latéraux au moins en partie en biais vers l'extérieur dudit rabat à partir des deuxièmes lignes de pliage, caractérisé en ce que lesdites deuxièmes lignes de pliage (20.1, 20.3, 20.5, 20.7) sont alignées, et en ce que le volet d'extrémité de la suite de volets et la languette d'une part, et les rabats adjacents d'autre part, sont fixés uniquement par application les uns sur les autres et par collage, ladite caisse étant montée automatiquement par rabattement desdits volets et des rabats dudit premier ensemble autour d'un mandrin (23)."

"14. Flan (F1 à F10) pour la réalisation d'une caisse à huit parois latérales, comportant une suite de huit volets rectangulaires (1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8) terminée par une languette rectangulaire de fixation (16), destinés à former lesdites parois latérales, reliés les uns aux autres par des premières lignes de pliage (9 à 15. et 17) parallèles les unes aux autres, à savoir quatre volets principaux séparés deux à deux par quatre volets intermédiaires et un premier ensemble de rabats latéraux (18.1, 18.3, 18.5, 18.7) disposés d'un côté et reliés aux volets principaux par des deuxièmes lignes de pliage (20.1, 20.3, 20.5, 20.7) perpendiculaires aux premières lignes de pliage et destinés à former au moins partiellement le fond de ladite caisse, lesdits volets intermédiaires étant dénués de rabats, au moins un rabat sur deux (18.1, 18.3, 18.5, 18.7) présentant ses deux côtés latéraux au moins en partie en biais vers l'extérieur dudit rabat à partir des deuxièmes lignes de pliage, caractérisé en ce que lesdites deuxièmes lignes de pliage (20.1, 20.3, 20.5 et 20.7) sont alignées, et en ce que le volet d'extrémité de la suite de volets et la languette d'une part, et les rabats adjacents d'autre part, sont destinés à être fixés uniquement par application les uns sur les autres et par collage, ledit flan étant propre à être plié par rabattement desdits volets et des rabats du premier ensemble autour d'un mandrin (23)."

II. Les requérantes I et II (opposantes 01 et 02) et les autres parties (opposantes 03 et 04) ont fait opposition et requis la révocation complète du brevet européen.

Pour en contester la brevetabilité, elles ont opposé une pluralité de documents parmi lesquels seulement les documents suivants ont joué un rôle important au cours de la procédure orale devant la Chambre :

- D1 : US-A-2 967 655 ;

- D3 : extrait du répertoire "documentation technique BOBST", boîtes traitées sur plieuses-colleuses n 0 300 106 ;

- D5 : US-A-4 932 930 (correspondant au brevet FR-A-2 629 012 cité et analysé dans la partie introductive du brevet européen en cause).

III. Par décision remise à la poste le 4 mars 1999, la Division d'opposition a rejeté l'opposition et maintenu le brevet européen tel que délivré.

IV. Par télécopies en date du 4 mai 1999, les requérantes I, II (opposantes 01 et 02) ont formé un recours contre cette décision et réglé la taxe correspondante.

Le mémoire dûment motivé de la requérante I a été déposé le 14 juillet 1999 ; celui de la requérante II le 2. juillet 1999.

V. Dans une notification adressée en annexe à la convocation à la procédure orale, la Chambre a estimé de façon provisoire que le document D5 portait sur la réalisation en automatique de caisses polygonales par enroulement d'un flan autour d'un mandrin. L'homme du métier pouvait par conséquent en déduire que la machine et le procédé qui y étaient décrits étaient aussi conçus pour fabriquer en automatique des caisses polygonales à huit côtés.

VI. La procédure orale s'est tenue en présence des requérantes I, II et de l'intimée le 24 octobre 2000.

Les requérantes I, II demandent l'annulation de la décision entreprise et la révocation complète du brevet européen en cause.

L'intimée (titulaire du brevet) sollicite le rejet du recours et le maintien du brevet européen tel que délivré.

VII. Pour contester la brevetabilité de l'invention revendiquée, la requérante I s'est notamment appuyée sur le document D3 et plus précisément sur le flan portant la référence 14-8-4. Un tel flan comporte, comme celui de la présente invention, quatre volets principaux séparés deux à deux par quatre volets intermédiaires, les deuxièmes lignes de pliage ménagées entre les volets principaux et les rabats étant également alignées. La requérante I a allégué que les volets intermédiaires étaient également dénués de rabat au sens de l'invention revendiquée et que les rabats adjacents pouvaient être aussi fixés uniquement par application les uns sur les autres et par collage.

VIII. Au soutien de son action, la requérante II développe pour l'essentiel l'argumentation suivante :

En accord avec l'opinion provisoire de la Chambre, c'est le document D5 qui constitue l'état de la technique le plus proche puisqu'il concerne la réalisation d'une caisse polygonale, notamment quadrilatère sur machine automatique par enroulement d'un flan polygonal autour d'un mandrin. Ainsi qu'il est exposé dans le brevet européen en cause, une caisse carrée ou rectangulaire de ce genre présente un triple inconvénient : une fois que la caisse est chargée par un groupe d'objets cylindriques notamment de bouteilles, les quatre coins demeurent saillants et vides. Il s'ensuit que la charge à l'intérieur de la caisse peut bouger entraînant une instabilité ; au surplus, les quatre coins saillants de la caisse sont exposés aux agressions externes et peuvent être aisément déchirés. Enfin, les coins vides de la caisse constituent un gaspillage de matière en feuille puisque inutile.

Par conséquent, le problème posé et résolu par la caisse octogonale et le flan à huit volets revendiqués est celui de remédier aux inconvénients susvisés.

La caisse revendiquée se distingue de la caisse polygonale connue, décrite dans le document D5 par une section octogonale, ainsi que par les deux éléments caractéristiques suivants :

a) au moins un rabat sur deux présente deux côtés s'étendant en biais ; b) les volets intermédiaires sont dénués de rabat.

Il est vrai que le mode de réalisation spécifiquement décrit dans le document du brevet de brevet D5 a trait à une caisse à section carrée ou rectangulaire mais cette antériorité fait systématiquement état de caisses à section polygonale de sorte que l'homme du métier comprend immédiatement que l'enseignement qui y est donné s'étend aussi aux caisses polygonales à huit côtés de la prétendue invention. Cette antériorité suggère par conséquent à elle seule d'employer des caisses octogonales conçues pour être montées par enroulement d'un flan octogonal autour d'un mandrin. De toute façon, l'homme du métier peut aussi se référer au document D1 qui concerne également, d'une façon générale, des caisses polygonales (voir le titre "polygonal carton") mais qui lui décrit spécifiquement une caisse octogonale en carton présentant clairement les caractéristiques a) et b) susvisées. Il s'ensuit que la caisse octogonale et le flan à huit volets revendiqués résultent à l'évidence de l'enseignement des documents D5 et D1.

IX. L'intimée (titulaire du brevet) a contesté l'argumentation des deux requérantes et exposé de façon détaillée que la mise en oeuvre du procédé et du dispositif décrits dans le document D5 ne permet nullement de former une caisse octogonale et encore moins une caisse octogonale selon l'invention. Dans le cas d'espèce, l'homme du métier ne pouvait reproduire l'invention revendiquée qu'à partir du procédé et de la machine qui sont divulgués dans le brevet européen en cause et qui font aussi l'objet de la demande initiale n 91 402 004.5 (brevet européen n 0 468 860) bénéficiant des mêmes dates de dépôt et de priorité que le brevet européen en cause.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Nouveauté

La nouveauté n'ayant plus été contestée pendant la procédure orale devant la Chambre, il n'y a pas lieu de s'y attarder.

3. Problème-solution

3.1. Dans le brevet européen en cause, le point de départ de l'invention revendiquée est constitué par une caisse à section carrée ou rectangulaire du type décrit dans le document D5, obtenue par enroulement d'un flan autour d'un mandrin.

Le flan utilisé comporte un ensemble de volets reliés les uns aux autres par des premières lignes de pliage parallèles, lesdits volets étant pourvus de rabats reliés par des secondes lignes de pliage perpendiculaires aux premières, ces volets étant destinés à former respectivement le fond et le couvercle de la caisse ; le bord libre d'un des volets est pourvu d'une languette de fixation.

Le procédé qui est spécifiquement décrit dans le document D5 consiste :

- à enrouler l'ensemble de volets autour d'un mandrin de section carrée ou rectangulaire, dont la section extérieure correspond à la section intérieure de la caisse à obtenir, de façon que chacun desdits volets s'applique contre une face du mandrin et que les premières lignes de pliage reliant entre eux les volets viennent chacune en appui contre une arête correspondante du mandrin ;

- à fixer par collage ladite languette sur le bord de l'autre volet d'extrémité ;

- à replier les rabats se trouvant d'un même côté des volets contre une face d'extrémité du mandrin autour des secondes lignes de pliage correspondantes qui se trouvent en correspondance avec les arêtes dudit mandrin et

- à fixer les uns aux autres par collage les rabats ainsi repliés.

La caisse à quatre côtés faisant l'objet du mode de réalisation du document de brevet D5 présente le triple inconvénient mentionné en colonne 1, 4ème paragraphe du brevet européen en cause : en premier lieu, la charge à l'intérieur de la caisse n'est pas fermement maintenue et les coins de ladite caisse demeurent saillants et vides ; en second lieu, les coins saillants de la caisse sont exposés aux agressions externes et peuvent être aisément déchirés, ce qui nuit à la présentation et à la protection des produits emballés ; et en troisième lieu, les coins vides de la caisse constituent un gaspillage de matière en feuille.

Par conséquent, en partant de cet état de la technique, le problème posé dans le brevet européen en cause est celui de remédier aux inconvénients que présentent les caisses à section carrée ou rectangulaire, tout en conservant les avantages du montage en automatique par enroulement d'un flan autour d'un mandrin.

3.2. Ce problème est pour l'essentiel résolu par la caisse (et le flan) revendiqués comprenant une suite de huit volets rectangulaires (4 volets principaux et 4 volets intermédiaires), présentant en outre, les éléments caractéristiques suivants :

i) les secondes lignes de pliage sont alignées ;

ii) au moins un rabat sur deux présente deux côtés latéraux s'étendant au moins en partie en biais vers l'extérieur dudit rabat à partir des secondes lignes de pliage ;

iii) les volets intermédiaires sont dénués de rabat ;

iv) les rabats sont fixés uniquement par application les uns sur les autres et par collage ;

v) la caisse et le flan sont montés automatiquement par rabattement des volets et des rabats autour d'un mandrin.

Ainsi qu'il est exposé dans le brevet européen en cause, la caisse octogonale revendiquée permet de supprimer les coins saillants vides et inutiles, ce qui a pour effet de réduire les risques de détérioration des coins saillants et de faire des économies de matière en feuille. Dans la caisse octogonale selon l'invention, les coins saillants (dièdre à 90 ) sont alors transformés en dièdre plus ouvert (angle supérieur à 90. ) moins vulnérable aux agressions extérieures (voir colonne 2, lignes 15 à 29 du brevet européen en cause). Au surplus, par suite des caractéristiques essentielles i) à v) susvisées, le montage de la caisse selon l'invention s'effectue en automatique par enroulement des volets autour d'un mandrin (comprenant des arêtes formant des angles obtus), collage de la languette de fixation sur le volet d'extrémité puis repliage et collage des rabats formant le fond de la caisse sur la face d'extrémité du mandrin. La machine apte à former en automatique la caisse revendiquée est décrite en liaison avec les figures 5 à 16 du brevet européen en cause et fait également l'objet du brevet européen n 0 468 860 bénéficiant de la même date de dépôt que le brevet européen en cause.

4. Ainsi que l'a fait ressortir à juste titre l'intimée (titulaire du brevet), les éléments caractéristiques iv) et v) susvisés définissent la structure de la caisse et du flan selon l'invention et ne sont pas des caractéristiques spécifiques à la machine ou au procédé pour la réalisation de la caisse.

Ainsi, la fixation uniquement par collage des rabats est aussi une caractéristique structurelle de la caisse revendiquée puisque cette fixation implique, d'une part, la présence de colle et, d'autre part, l'absence de tout autre moyen de fixation, tel que l'encliquetage. De même, la caractéristique v) ci-dessus est également structurelle et a un effet limitatif sur la portée de la revendication de caisse puisque - ainsi qu'il sera exposé ci-après - elle exclut des flans du type décrit dans les documents D1 ou D3. Au surplus, l'enroulement d'un flan en carton ondulé autour d'un mandrin qui occupe un volume fixe, entraîne par repliage des côtés, et du fait de l'épaisseur même du carton, une longueur de volet différente pour deux volets en vis-à-vis. Par conséquent, l'enroulement du flan autour du mandrin se traduit par une caractéristique structurelle, à savoir la fabrication d'une caisse octogonale ayant des volets en vis-à-vis de longueur différente.

5. Document de brevet D5 : interprétation de son contenu opposable

Ce document de brevet opposé à titre d'antériorité concerne un procédé et une machine pour la réalisation de caisses à section polygonale et les caisses ainsi obtenues. Les expressions "caisses à section polygonale" et "mandrin à section polygonale" sont systématiquement utilisées dans les revendications et employées à de multiples reprises dans la partie introductive de la description, bien que le mode de réalisation spécifiquement décrit en liaison avec les dessins concerne une machine pour la réalisation de caisses à section carrée ou rectangulaire. Prise dans son sens littéral, une caisse octogonale est une caisse à section polygonale. C'est ainsi que le document de brevet US-A-2 967 655 (D1) porte en titre "polygonal carton" (carton polygonal) et décrit à titre de mode de réalisation préféré, la fabrication d'une caisse octogonale. Par conséquent, la question qui se pose est de savoir si le document de brevet antérieur D5 enseigne bien de former en automatique une caisse polygonale à huit côtés par enroulement des volets autour d'un mandrin, collage de la languette de fixation sur le volet d'extrémité, puis repliage des rabats formant le fond de la caisse sur l'extrémité du mandrin et leur assemblage par collage.

A cet égard, l'intimée (titulaire du brevet) a montré de façon convaincante que l'homme du métier, même en adaptant le procédé et la machine décrits dans le document D5, c'est-à-dire en prévoyant notamment un mandrin à huit côtés au lieu de quatre ne pouvait nullement, par de simples opérations d'exécution, sans faire oeuvre inventive, réaliser matériellement une caisse octogonale et encore moins une caisse octogonale selon l'invention.

En effet, si l'on se réfère aux figures 2a-2c du document de brevet D5, qui illustrent l'enroulement d'un flan à quatre volets autour d'un mandrin à section rectangulaire, le guidage précis du flan par rapport au mandrin au moyen d'une plaque plane est rendu possible grâce aux deux faces latérales verticales du mandrin immédiatement adjacentes à la face horizontale qui vient appuyer un volet du flan contre la plaque de guidage. Ainsi, le volet en question pourra être emmené en exacte coïncidence avec la face correspondante du mandrin.

En revanche, si l'on tente d'utiliser la plaque plate considérée avec un flan à huit volets (quatre volets principaux et quatre volets intermédiaires) et un mandrin à huit côtés, il est extrêmement difficile pour ne pas dire exclu d'emmener les deux lignes de pliage qui bordent le volet en question en coïncidence avec les deux arêtes correspondantes du mandrin octogonal, de sorte que le flan risque fort d'être plié de façon erronée en dehors des lignes de pliage qui étaient initialement prévus.

Pour remédier à cet inconvénient majeur, la machine décrite dans le brevet européen en cause est munie d'une plaque de guidage qui n'est pas plate mais qui au contraire présente deux faces inclinées additionnelles d'extrémité, visant à assurer un guidage précis du flan par rapport au mandrin octogonal.

Au surplus, l'homme du métier sait aussi qu'il se pose un problème important dit de "tuilage" dans la formation de caisses à partir d'un flan de carton ondulé. Il s'agit là d'une déformation vrillée du carton ondulé qui entraîne des difficultés de guidage du flan et surtout de positionnement précis du flan sur le mandrin. Il est clair que les inconvénients du tuilage lors de l'enroulement du flan de carton autour du mandrin sont considérablement aggravés lorsque le nombre de lignes de pliage est augmenté et passe de quatre à huit.

Force est donc de constater que, si l'homme du métier par une interprétation purement littérale des termes "caisse polygonale" et "mandrin polygonal" pouvait théoriquement envisager de réaliser une caisse octogonale à partir de la machine et du procédé décrits dans le document D5, un examen approfondi de cette machine et ses connaissances des emballages en carton lui montrent qu'une caisse octogonale n'est pas réalisable même après adaptation, en mettant en oeuvre un mandrin octogonal à la place d'un mandrin rectangulaire. Autrement dit, le mode de réalisation suggéré dans le document de brevet D5, à savoir une caisse octogonale formée par enroulement autour d'un mandrin, n'est nullement exposé de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter.

Il s'ensuit que dans l'appréciation de la brevetabilité de l'invention revendiquée, le contenu opposable du document D5 est limité au mode de réalisation techniquement réalisable, c'est-à-dire à une caisse quadrilatère mais en tout cas pas à une caisse octogonale. Une caisse octogonale, bien que polygonale ne fait pas partie du contenu opposable du document D5.

La Chambre estime ainsi, d'une façon générale, qu'un document de brevet antérieur n'est opposable que dans la mesure où l'invention qui y est décrite peut être matériellement reproduite par l'homme du métier, les modes de réalisation qui y sont suggérés mais qui ne peuvent être reproduits qu'avec les moyens décrits pour la première fois dans le brevet européen en cause, étant par voie de conséquence exclus de son contenu opposable (voir également décision T 206/83, JO OEB 1987, 005, point 2 des motifs).

6. Activité inventive

6.1. Pour contester l'activité inventive, la requérante II a pris en combinaison les documents D5 et D1. Ce dernier décrit effectivement une caisse en carton réalisée à partir d'un flan comportant une suite de huit volets rectangulaires, en l'espèce quatre volets principaux, séparés deux à deux par quatre volets intermédiaires ayant la même dimension que les volets principaux.

Cette antériorité ne divulgue en aucune façon l'élément caractéristique i) visé ci-dessus (alignement des secondes lignes de pliage) mais enseigne au contraire la nécessité d'un décrochement au moins égal à une épaisseur de carton entre les lignes de pliage de deux des rabats principaux par rapport aux lignes de pliage de deux rabats adjacents destinés à former le fond ou le couvercle de la caisse. En effet, le problème que vise à résoudre le rédacteur du document D1 est d'éviter toute excroissance lors de l'application des rabats les uns sur les autres pour constituer le fond (voir colonne 1, lignes 42 à 48). Il est précisé que par ce décalage des lignes de pliage, il est possible d'obtenir une surface parfaitement plane en vue de faciliter le stockage vertical des cartons en palette (colonne 2, lignes 15 à 18).

Au surplus, la caisse faisant l'objet de ce document n'est nullement conçue pour être montée automatiquement par rabattement des volets et des rabats autour d'un mandrin (élément caractéristique v) visé ci-dessus) les rabats étant fixés entre eux par collage (élément caractéristique iv). En effet, il est prévu une première étape de pliage à plat du flan suivant deux premières lignes de pliage parallèles de façon que la languette d'extrémité de la suite de volets vienne en appui sur le volet extrémité, ladite languette étant ensuite fixée sur le volet extrême en question. Le flan à plat présente alors une section fermée, en forme d'octogone aplati, les rabats destinés à constituer le fond et le couvercle étant disposés à l'extérieur, de part et d'autre de l'octogone aplati. Un tel flan plié et collé ne peut en aucune façon être enfilé autour d'un mandrin à section octogonale dont la section extérieure, rappelons-le, doit correspondre à la section intérieure de la caisse octogonale. Par conséquent, le document D1 enseigne de coller et de plier à plat, en forme d'octogone aplati, un flan prédécoupé, ce flan à section fermée en forme d'octogone aplati étant ensuite mis en forme soit manuellement soit dans une machine de formage classique pour donner un carton de section octogonale.

En fait, pour permettre alors le montage de la caisse, ce document prévoit des lignes de pliage (19) dans les rabats et des points de fixation arrachables entre deux rabats adjacents.

L'homme du métier ne saurait envisager de monter une caisse en automatique à partir du flan du document D1 en mettant en oeuvre un mandrin octogonal, puisqu'un tel montage est contraire à l'enseignement de cette antériorité et que, de toute façon, un tel flan préplié et prédécoupé ne peut nullement être réalisé par montage en automatique autour d'un mandrin octogonal : en effet, les lignes de pliage entre les rabats et les volets ne sont pas alignées et les rabats adjacents sont fixés entre eux par des points de fixation arrachables.

6.2. La requérante II (opposante 02) a tenté de faire valoir que l'invention revendiquée se distingue de la caisse polygonale du document D5 par une section octogonale ainsi que par les éléments caractéristiques ii) et iii) susvisés. Or, ces caractéristiques se retrouvent intégralement dans le document D1. Il suffisait donc, selon elle pour arriver à l'invention revendiquée, de combiner les enseignements des documents D5 et D1.

Un tel raisonnement ne saurait être suivi dans son ensemble : en effet, ainsi qu'il a déjà été exposé, l'homme du métier peut certes théoriquement envisager de former une caisse octogonale en automatique autour d'un mandrin octogonal en raison de la terminologie utilisée dans le document D5. En effet, ce document se réfère à de multiples reprises à une caisse "à section polygonale" et à un mandrin "à section polygonale". Toutefois, à la suite d'un examen plus approfondi, l'homme du métier est amené à constater que ce document constitue uniquement une "antériorité de papier" qui ne saurait affecter la brevetabilité de la caisse et du flan revendiqués puisque le procédé et la machine décrits dans ce document ne permettent en aucune façon de réaliser matériellement une caisse octogonale par montage en automatique autour d'un mandrin octogonal.

Ce n'est pas bien entendu le document D1 qui pourrait donner à l'homme du métier l'enseignement nécessaire pour reproduire l'invention revendiquée puisque ce document concerne une technique de montage nullement comparable, dans laquelle on procède tout d'abord au pliage et à la fixation à plat d'un flan prédécoupé et préplié afin de former un octogone aplati qui reste tel quel pendant le stockage et le transport. Ce n'est qu'au moment de l'utilisation, que le flan en forme d'octogone aplati est mis en forme soit manuellement soit le plus souvent dans une machine classique de formage pour donner une caisse octogonale. Ainsi, en supposant même que l'homme du métier soit amené à combiner les deux documents D1 et D5, il ne pouvait nullement aboutir à l'invention revendiquée, puisque à partir de ces deux enseignements pris isolément ou en combinaison, l'invention n'était pas techniquement réalisable.

En fait, l'homme du métier ne pouvait matériellement réaliser l'invention revendiquée qu'ultérieurement à partir du procédé et de la machine décrits pour la première fois dans le brevet européen en cause.

6.3. Le document D3 (documentation technique "BOBST" portant sur des caisses traitées sur plieuses-colleuses) n'enseigne pas non plus à l'homme du métier les moyens lui permettant de monter une caisse octogonale en automatique autour d'un mandrin octogonal. Le flan prédécoupé et préplié du type "14-8-4" comporte certes une suite de huit volets rectangulaires (4 volets principaux et 4 volets intermédiaires de petite dimension), mais ces volets intermédiaires se terminent par un petit rabat. Au surplus, la présence d'oreilles à l'extrémité de certains rabats suggère à l'homme du métier que le fond de la caisse est prévu pour être au moins partiellement fixé par encliquetage. Ainsi que l'a exposé la titulaire du brevet, un tel encliquetage n'est pas totalement incompatible avec un montage par rabattement autour d'un mandrin, mais l'emploi d'une telle technique aurait des conséquences néfastes sur le carton, car il faudrait fortement déformer les rabats vers l'intérieur en direction du mandrin pour effectuer l'encliquetage. De toute façon, un tel flan préplié et prédécoupé est destiné à être travaillé sur une machine plieuse/colleuse de la société BOBST, c'est-à-dire à être plié et collé à plat pour former un octogone aplati. Après son transport et son stockage, ce flan en forme d'octogone aplati est mis en forme pour constituer une caisse en carton à huit côtés.

Force est donc de constater que le document D3 ne donne en aucune façon l'enseignement nécessaire pour permettre à l'homme du métier de réaliser en automatique une caisse octogonale par enroulement d'un flan approprié autour d'un mandrin octogonal, collage de la languette de fixation sur le volet d'extrémité puis repliage des rabats formant le fond de la caisse sur l'extrémité du mandrin et leur assemblage par collage.

6.4. Pour les motifs ci-dessus exposés, l'objet de la revendication 1 de caisse et celui de la revendication 14 de flan présentent l'activité inventive requise (article 56 CBE).

7. Cette conclusion s'étend également aux revendications dépendantes 2 à 13 et 15 à 27 qui concernent des modes particuliers de réalisation de la caisse selon la revendication 1 et respectivement du flan selon la revendication 14.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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