T 0840/98 () of 15.12.1999

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1999:T084098.19991215
Date de la décision : 15 Décembre 1999
Numéro de l'affaire : T 0840/98
Numéro de la demande : 89403127.7
Classe de la CIB : C08J 5/18
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 37 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Film élastomère thermoplastique perméable à la vapeur d'eau à base de polyétheresteramide, son procédé de fabrication et articles comprenant un tel film
Nom du demandeur : ELF ATOCHEM S.A.
Nom de l'opposant : Degussa-Hüls Aktiengesellschaft Patente und Marken Standort
Marl
Chambre : 3.3.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive - analyse ex post facto
Inventive step (yes) - ex post facto analysis
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0009/91
G 0010/91
G 0004/95
T 0219/83
T 0153/85
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n 89 403 127.7 déposée le 14. novembre 1989, pour laquelle a été revendiquée la priorité du 25 novembre 1988 fondée sur un dépôt antérieur en France (FR 8815441), a donné lieu le 18. janvier 1995 (Bulletin 95/03) à la délivrance du brevet européen n 0 378 015 sur la base de 9. revendications, la revendication 1 s'énonçant comme suit :

"Matériau perméable à la vapeur d'eau et imperméable à l'eau comprenant

(i) un film d'un élastomère thermoplastique à base de polyétheresteramide

(ii) associé à un tissu, à du cuir ou à une matière plastique."

Les revendications 2 à 9 sont des revendications dépendantes portant sur des matériaux préférés tels que définis dans la revendication 1.

II. Le 11 octobre 1995 une opposition a été formée à l'encontre du brevet européen précité aux motifs énoncés à l'article 100 a) CBE, en fait que son objet n'était pas nouveau au sens de l'article 54(2) CBE et n'impliquait pas d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

Ces objections s'appuyaient sur les documents suivants :

(1) DE-A-3 615 471 et (2) EP-A-0 167 714.

Le 26 mars 1998 l'opposante a fait de plus référence au document

(3) US-A-4 713 068

qui a été admis dans la procédure.

III. Par décision intermédiaire au titre des articles 102(3) et 106(3) CBE signifiée le 23 juin 1998, la Division d'opposition a estimé que les motifs invoqués ne s'opposaient pas au maintien du brevet sous une forme modifiée (requête principale). La modification apportée résidait dans une définition plus précise de la caractéristique (ii) de la revendication 1 :

"(ii) associé par collage à chaud ou à l'aide d'un agent de collage approprié à un tissu, à du cuir ou à une matière plastique."

i) Dans la décision il était d'abord constaté que cet ajout dans la revendication 1 ne contrevenait pas aux dispositions de l'article 123(2) et (3) CBE.

ii) Il était ensuite indiqué que le document (1) décrivait certes un film de polyétheresteramide associé à une couche d'une matière connue, mais que cette dernière n'était pas précisée. La mention explicite d'un tissu, du cuir et d'une matière plastique dans la revendication 1 du brevet en cause conférait donc la nouveauté au matériau perméable revendiqué.

iii) L'objet revendiqué impliquait une activité inventive dans la mesure où le document (3), qui représentait l'état de la technique le plus proche, ne suggérait pas, que ce soit isolément ou en combinaison avec le document (2), l'ensemble des caractéristiques définissant le matériau revendiqué.

IV. Le 14 août 1998 la requérante (opposante) a formé un recours à l'encontre de cette décision et acquitté simultanément la taxe prescrite à cet effet.

Les motifs de recours, qui ont été exposés dans un mémoire déposé le 21 octobre 1998, concernaient les objections de fond considérées par l'instance du premier degré et reprenaient pour l'essentiel les arguments présentés antérieurement.

(i) Contrairement à l'interprétation de la Division d'opposition, le document (1) décrivait un matériau perméable à la vapeur d'eau et imperméable à l'eau comportant un film de polyétheresteramide associé par collage à chaud ou par une colle appropriée à un substrat de type textile, cuir ou polymère, ce qui correspondait à la définition même du matériau revendiqué dans le brevet en cause.

(ii) Concernant l'activité inventive, le document (3) divulguait un matériau composite ayant la même structure et les mêmes propriétés que le matériau revendiqué et comprenant une première couche relativement poreuse en papier, textile ou matériau synthétique et une deuxième couche continue constituée d'un film d'alcool polyvinylique. Ce document faisait de plus référence à un autre document censé décrire une structure composite à base de polymères hydrophiles contenant p. ex. des groupes hydroxy et des segments polyéthers. Cette dernière caractéristique se retrouvant dans les polyétheresteramides, il était évident de remplacer le film d'alcool polyvinylique par un film de ce polymère, tel que décrit dans les documents (1) et (2).

V. Dans son mémoire en réponse déposé le 8 mars 1999 l'intimée (titulaire du brevet) a successivement

i) mis l'accent sur les différences de structure existant entre le pansement décrit dans le document (1) et le film élastomère thermoplastique revendiqué, et

ii) fait valoir que l'homme du métier n'avait aucune raison de remplacer le film d'alcool polyvinylique, qui était une caractéristique essentielle de la structure composite divulguée dans D3, par un film de polyétheresteramide. La combinaison avec l'enseignement des documents (1) et (2) relevait d'une analyse a posteriori, car le film de polyétheresteramide y était mentionné dans un contexte technique différent.

En annexe au mémoire de l'intimée du 10 novembre 1999 étaient joints deux nouveaux jeux de revendications à titre de requêtes subsidiaires.

VI. Au cours de la procédure orale qui s'est déroulée le 15. décembre 1999, après discussion préliminaire du problème de procédure lié à la présence non annoncée d'un expert technique accompagnant le représentant de la requérante, celui-ci a pour la première fois soulevé une objection au titre de l'article 123(2) CBE à l'encontre de la modification apportée au libellé de la revendication 1 en procédure d'opposition ainsi qu'une objection d'insuffisance de l'exposé de l'invention au titre de l'article 100 b) CBE.

Quant au fond, les arguments échangés par les parties n'ont pas apporté un éclairage nouveau sur l'interprétation des documents et les analyses des divers éléments du dossier faites antérieurement.

VII. La requérante conclut à l'annulation de la décision contestée et à la révocation du brevet. L'intimée conclut au rejet du recours, alternativement au maintien du brevet sur la base des revendications selon l'une des deux requêtes subsidiaires déposées le 10. novembre 1999.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Il ressort de l'exposé des faits ci-dessus (cf. point VI) que la Chambre a été confrontée lors de la procédure orale aux questions préliminaires de procédure suivantes :

- présence non annoncée d'un expert technique accompagnant le représentant de la requérante ;

- objection au titre de l'article 123(2) CBE soulevée tardivement à l'encontre de la modification apportée au libellé de la revendication 1 en procédure d'opposition ; et

- nouveau motif d'opposition (insuffisance de l'exposé de l'invention au titre de l'article 100 b) CBE) soulevé pour la première fois lors de l'audience.

2.1. La présence non annoncée d'un expert technique accompagnant le mandataire agréé de la requérante a conduit la Chambre à évoquer au début de l'audience les principes exposés dans la décision G 4/95 (JO OEB 1996, 412).

Selon le point 10 des motifs de cette décision, "si une partie à une procédure orale tenue devant une Division d'opposition ou une Chambre de recours souhaite qu'un exposé oral soit présenté pour son compte par un assistant, en supplément à la présentation complète de sa cause par son mandataire agréé, ce dernier doit, bien avant la procédure orale, demander l'autorisation qu'un tel exposé oral soit effectué ... Dans tous les cas, la requête doit être présentée suffisamment à l'avance du jour fixé (ou à fixer) pour la procédure orale, de façon que toutes les parties adverses aient la possibilité de se préparer convenablement à répondre à l'exposé oral qu'il est proposé de présenter ... Si une requête portant sur la présentation d'un exposé oral par un assistant est formulée soit très peu de temps avant la date fixée pour la procédure orale, soit lors de la procédure orale, elle doit être, en l'absence de circonstances exceptionnelles, rejetée par l'OEB, à moins que toutes les parties adverses acceptent que l'exposé oral demandé soit effectué."

Bien que l'intimée ne se soit pas expressément opposée à une intervention de l'expert technique accompagnant le représentant de la requérante, celui-ci a indiqué ne pas attacher une importance particulière à cette question et en fait renoncer à toute déclaration ou explication de son assistant.

2.2. Bien que soulevée pour la première fois lors de la procédure orale l'objection au titre de l'article 123(2) CBE à l'encontre de la modification apportée au libellé de la revendication 1 et de manière correspondante à la description a été débattue.

Après examen des motifs invoqués par la requérante et des arguments présentés par l'intimée la Chambre a décidé de ne pas donner suite à cette objection comme ayant été soulevée tardivement.

2.3. L'objection selon laquelle l'invention n'était pas exposée dans la demande d'origine de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter (article 100 b) CBE) a été soulevée pour la première fois en procédure de recours lors de la procédure orale.

Ceci a conduit la Chambre à rappeler les principes régissant l'étendue de l'obligation et de la compétence des chambres pour examiner des motifs d'opposition, tels qu'ils ont été définis dans les décisions G 9/91 et G 10/91 (JO OEB 1993, 408 resp. 420). Selon la Grande Chambre de recours de nouveaux motifs d'opposition ne peuvent être pris en considération au stade de la procédure de recours qu'avec le consentement du titulaire du brevet. L'intimée n'ayant pas donné son aval à l'extension du cadre de droit et de fait de la procédure, la requérante a pris acte de ce refus.

3. Les objections de fond soulevées par la requérante ont rendu nécessaire une discussion préliminaire de la portée des revendications tant du point de vue de la composition de l'élastomère que de la structure du matériau.

3.1. La première clarification à apporter concerne le choix de l'élastomère thermoplastique utilisé, dans la mesure où celui-ci est défini dans la revendication 1 comme étant un élastomère à base de polyétheresteramide et dans la revendication 4, qui est dépendante de la revendication 1, comme étant un polyéther bloc amide. La même ambiguïté apparaît dans la description où, faisant suite à la définition du polyétheresteramide par sa structure, sa composition et quelques paramètres physico-chimiques (page 2, lignes 25 à 49), il est indiqué : "Parmi les polyétheresteramides qui conviennent pour l'invention, la demanderesse a remarqué que certains étaient particulièrement imperméables à la vapeur d'eau : ce sont les polyéther bloc amides dont les séquences polyéthers contiennent du PEG, homo- ou copolymérisé, et de manière préférentielle ceux dont les séquences polyamides dérivent de PA-12, PA-11, PA-12,12, homo- ou copolymérisés, tels que par exemple le co-PA-6,12." (page 2, lignes 50 à 54).

Afin de donner une certaine cohérence à l'ensemble de ces informations, autrement dit afin que les "polyéther bloc amides" puissent effectivement être considérés comme des "polyétheresteramides" préférés, il convient d'admettre que leur définition est correcte, mais que l'appellation est inappropriée.

Cette interprétation est étayée par les définitions mêmes des deux polymères. D'une part, les polyétheresteramides sont définis comme étant "le produit de la copolymérisation de séquences polyamides à extrémités réactives avec des séquences polyéthers à extrémités réactives", en particulier de séquences polyamides à fins de chaîne dicarboxyliques avec des séquences polyétherdiols (page 2, lignes 29 à 31). D'autre part, les séquences polyéthers et polyamides des polyéthers bloc amides correspondent aux séquences polyéthers (page 2, lignes 42/43) et polyamides (page 2, lignes 36 à 39) préférées des polyétheresteramides et sont donc également réactives. Il en résulte que la formation des polyéthers bloc amides, comme celle des polyétheresteramides, implique une copolycondensation par estérification.

En conclusion, la référence à des polyéther bloc amides vise en réalité des polyétheresteramides séquencés par opposition aux polyétheresteramides statistiques, qui sont également envisagés (page 2, lignes 25 à 28) ; la revendication 4 et le passage page 2, ligne 50 à 54 sont donc à interpréter dans ce sens.

3.2. Au cours de la procédure orale la requérante a fait valoir que la structure du matériau obtenue par collage à chaud ou à l'aide d'un agent de collage d'un film à base de polyétheresteramide sur un support, tel que tissu, cuir et matériau plastique, n'était pas précisée et que, en particulier, une structure dont la cohésion serait assurée par des contacts localisés ou ponctuels entre les deux couches n'était pas écartée.

Une telle interprétation n'est pas tenable, car elle est contraire à l'enseignement même du fascicule de brevet. En effet, quelle que soit l'application envisagée (page 3, lignes 30 à 56), le matériau revendiqué se présente sous la forme d'un film adhérent complètement à son support, autrement dit sous la forme de deux surfaces associées dans leur totalité de manière irréversible. Cette disposition apparaît clairement lors de la fabrication de sièges automobiles, au cours de laquelle le support est d'abord plaqué contre le moule, puis recouvert du film, la mousse introduite ensuite ayant pour effet de plaquer le film contre le support.

3.3. Les objections de fond seront examinées à la lumière de ces deux interprétations de l'objet revendiqué.

4. Les trois documents produits par la requérante peuvent être résumés comme suit :

4.1. Le document (1) a trait à un pansement comprenant (a) une feuille souple de base présentant une pellicule adhésive sur la face avant, et (b) un film souple délimitant une chambre superposée à la surface arrière susceptible de recevoir un tampon absorbant, le pansement présentant une ouverture traversant à la fois l'adhésif et la feuille de base pour communiquer avec le tampon (revendication 1). Un matériau approprié pour la réalisation de deux films est un polyéther bloc amide (revendications 7 et 8), qui a le double avantage d'être thermoplastique afin d'assurer le thermosoudage et d'être perméable à la fois à la vapeur d'eau et à l'oxygène (page 7, lignes 20 à 25).

4.2. Le document (2) décrit des films en polyéther bloc amide hydrophile utilisables dans le domaine du bâtiment en raison de leur capacité d'absorption momentanée de l'humidité (page 5, lignes 16 à 20). Ces films sont disposés sous les matériaux de couverture et sous toute la surface du toit afin tout à la fois d'assurer l'élimination de l'humidité du bâtiment et d'augmenter l'étanchéité du toit (page 1, ligne 12 à page 3, ligne 22). Le seul polyéther bloc amide auquel il est fait référence est défini comme étant un polymère séquencé contenant alternativement des séquences polyamides rigides et des séquences polyéthers flexibles (page 5, ligne 21 à page 6, ligne 4) et portant la dénomination commerciale "PEBAX" ou "PEBA" (page 5, ligne 22 et page 7, ligne 17).

4.3. Le document (3) concerne un matériau composite perméable à la vapeur d'eau et imperméable à l'eau comprenant (A) une pellicule d'un matériau textile poreux, et (B) un film d'alcool polyvinylique dont l'épaisseur est déterminée par la densité superficielle de la pellicule (revendication 1). Le matériau constituant la pellicule, pour autant qu'il satisfasse à certains critères en matière de densité superficielle, diamètre des fibres et surface spécifique des pores, n'est pas critique et peut être choisi parmi pratiquement n'importe quel polymère thermoplastique (colonne 9, ligne 41 à colonne 10, ligne 30).

5. L'objection de défaut de nouveauté soulevée à l'encontre du document (1) a conduit lors de la procédure orale à considérer successivement le matériau constituant la feuille souple de base et la structure du pansement.

5.1. Sans disputer le fait que le document (1) ne divulgue nulle part la mise en oeuvre d'une feuille constituée d'un polyétheresteramide (cf. point 4.1 ci-dessus), la requérante a prétendu, d'abord en faisant valoir un abus de langage, puis en se référant au document D2, que le polyéther bloc amide mentionné dans D1 désignait en réalité un polyétheresteramide.

5.1.1. Concernant l'utilisation prétendument courante du terme polyéther bloc amide au lieu de polyétheresteramide, la requérante, qui en tant qu'opposante conserve la charge de la preuve (cf. T 219/83, JO OEB 1986, 211 corr. 328), n'a pas apporté la moindre évidence au support de ses allégations. De son côté, la Chambre malgré des recherches dans des ouvrages spécialisés n'a pas trouvé d'indice confirmant la thèse de la requérante.

En fait, comme l'a expliqué la Chambre lors de la procédure orale, la terminologie polyéther bloc amide ne peut par définition s'appliquer qu'à un polymère séquencé dont la chaîne principale contient des liaisons éther et amide explicitement identifiées ; si on étend au bénéfice de la requérante cette définition à des polymères séquencés comprenant en plus une liaison indéterminée, voire plusieurs liaisons indéterminées, il en résulte une famille de polymères répondant à une certaine formule générale, qui englobe certes le cas particulier des polyétheresteramides caractérisés par des liaisons ester additionnelles, mais n'en constitue pas une divulgation au sens de l'article 54(2) CBE.

5.1.2. Au cours de la procédure orale la requérante s'est appuyée sur le contenu du document (2) pour interpréter le terme polyéther bloc amide comme désignant un polyétheresteramide au sens du brevet en cause.

Observant que le document (1) ne contient pas une référence expresse au document (2), la Chambre a d'abord rappelé que pour l'appréciation de la nouveauté l'exposé d'un document antérieur particulier devait toujours être considéré isolément et qu'il n'était pas admis de combiner entre eux différents éléments provenant de l'état de la technique (cf. T 153/85, JO OEB 1988, 001).

Quant au fond, le passage invoqué par la requérante dans le document (2) (page 5, ligne 22 à page 6, ligne 4), selon lequel les polyéthers bloc amides vendus sous la dénomination "PEBAX" et censés être des polyétheresteramides étaient particulièrement appropriés pour la réalisation de films, ne fait que confirmer que les polyétheresteramides font partie des polyéthers bloc amides. Il en ressort que les deux termes ne sont pas équivalents, mais désignent respectivement une classe spécifique de polymères et une catégorie générale de polymères, et que, par conséquent, la divulgation du terme générique dans le document (1), interprété ou non à la lumière du document (2), ne peut anticiper les polymères spécifiques selon le brevet en cause, qui sont caractérisés par la présence simultanée de liaisons éther, ester et amide.

5.2. L'analogie apparente de structure entre le pansement selon le document (1) et le matériau composite revendiqué, à savoir polyéther bloc amide resp. polyétheresteramide/couche adhésive/film, masque en réalité des différences de fonction au niveau de ces caractéristiques.

Comme l'a expliqué l'intimée, le collage à chaud sur un support textile selon le brevet en cause a pour effet à la fois de créer des liaisons physico-chimiques entre le polymère et le support et d'induire une déformation du film afin que celui-ci épouse au moins partiellement la forme des fibres de ce tissu. Il en résulte une association irréversible entre le polymère et le tissu, celui-ci ne pouvant être séparé qu'avec destruction du film.

La structure du pansement selon le document (1), telle qu'elle découle des figures et de la description (page 6, ligne 20 à page 8, ligne 31), est au contraire celle d'un matériau qui est non seulement pelable, mais doit être pelé pour que l'adhésif se fixe sur la peau. De plus, la figure 1 met aussi en évidence, contrairement au matériau revendiqué, qu'il n'y a pas association sur toute le surface du film, mais des contacts localisés correspondant à des cordons de soudure à chaud entre les deux films.

5.3. Il s'ensuit que le matériau tel que revendiqué dans le brevet en cause se distingue de l'enseignement du document (1) par la composition du film ainsi que par sa structure et que l'exigence de nouveauté est donc satisfaite.

6. Le brevet en cause a trait à un matériau perméable à la vapeur d'eau et imperméable à l'eau comprenant un film de polyétheresteramide.

6.1. Un matériau composite possédant précisément cette combinaison de propriétés est décrit dans le document (3) que la Chambre, comme la Division d'opposition et les parties, considère comme représentant l'état de la technique le plus proche. Ce matériau est obtenu par enduction d'un support textile poreux présentant certaines caractéristiques physiques par une solution aqueuse d'alcool polyvinylique qui en séchant adhère fortement à ce support, ce qui confère à l'ensemble les propriétés requises (revendication 1 ; colonne 15, lignes 14 à 57). Les applications envisagées (colonne 1, lignes 36 à 39) correspondent en partie aux utilisations mentionnées dans le fascicule de brevet (comparer page 3, lignes 30 à 32 et 41 à 46), de sorte qu'il est légitime d'admettre des propriétés pour le moins similaires.

6.2. En l'absence d'éléments de comparaison appropriés le problème technique sous-jacent au brevet en cause peut donc être vu dans la mise à disposition d'un matériau composite comparable.

6.3. Selon le brevet en cause, ce problème est résolu par un matériau associant par collage un film de polyétheresteramide à un support, comme précisé dans la revendication 1.

6.4. Les exemples du brevet en cause mettent en évidence des niveaux de perméabilité à la vapeur d'eau et de résistance évaporative qui démontrent que la combinaison des caractéristiques de composition et de structure du matériau composite tel que revendiqué permet effectivement de résoudre ledit problème. Ce point n'a d'ailleurs pas été mis en doute par la requérante.

7. Il reste à décider si pour un homme du métier cette solution découle d'une manière évidente des documents considérés.

7.1. Une analyse plus fine de l'enseignement du document (3) montre que les propriétés du matériau composite sont en fait la résultante de nombreuses caractéristiques (colonne 8, lignes 48 à 55 ; colonne 10, lignes 6 à 30 ; colonne 14, lignes 9 à 26), à savoir

(i) la densité superficielle, le diamètre des fibres et la surface spécifique des pores en tant que paramètres du support (colonne 10, ligne 31 à colonne 11, ligne 61),

(ii) l'épaisseur moyenne du film d'alcool polyvinylique et le choix de ce polymère (colonne 11, ligne 62 à colonne 12, ligne 42 ; colonne 13, lignes 1 à 36), et

(iii) la cohésion du matériau composite (colonne 15, lignes 45 à 51 ; colonne 16, lignes 43 à 52).

Cette interdépendance a pour conséquence qu'en s'écartant du cadre strict de cet enseignement l'homme du métier, à la recherche d'une structure alternative, ne dispose d'aucune instruction ou directive pour compenser la détérioration des propriétés à laquelle il doit normalement s'attendre. Ceci s'applique particulièrement au film d'alcool polyvinylique qui, grâce à sa capacité d'absorption des molécules d'eau, en assure le transfert (colonne 12, lignes 27 à 42) et représente donc un élément essentiel dans le contrôle de la perméabilité de ce matériau composite.

Il s'ensuit que le document (3) considéré isolément n'est pas susceptible de conduire l'homme du métier à la solution préconisée dans le brevet en cause.

7.2. Quelle que soit l'interprétation donnée au terme polyéther bloc amide dans le document (1), il est essentiel d'apprécier le contexte technique dans lequel cette caractéristique de composition se situe.

Comme l'a montré la discussion relative à la question de la nouveauté (cf. point 5.2 ci-dessus), les différences en matière de structure et de cohésion de ce matériau composite par rapport au document (3) sont telles que l'homme du métier n'avait aucune raison de considérer la caractéristique de composition dissociée de la caractéristique de structure, en d'autres termes de considérer un polyéther bloc amide sans une structure basée sur des contacts localisés correspondant à des cordons de soudure à chaud entre deux films.

La Chambre ne conteste pas qu'une interprétation du terme polyéther bloc amide dans le sens de la thèse de la requérante et que l'utilisation d'une feuille de polyétheresteramide au lieu du film d'alcool polyvinylique dans le matériau composite divulgué dans le document (3) permettraient de reconstituer la structure revendiquée. En fait, la question de l'activité inventive ne se ramène pas à la question de savoir si l'homme du métier aurait pu concevoir une telle combinaison de caractéristiques, mais s'il l'aurait effectivement envisagée dans la perspective du problème à résoudre. Les considérations ci-dessus montrent clairement qu'il ne peut être répondu que par la négative et que la démarche de la requérante repose par conséquent sur une appréciation rétrospective de cet art antérieur.

7.3. Les mêmes considérations s'appliquent a fortiori au document (2) qui a trait spécifiquement au domaine du bâtiment et se situe donc dans un autre domaine technique que le document (3), ce qui exclut en principe toute combinaison de ces enseignements.

Au cours de la procédure orale la requérante a cependant fait valoir que, dans le cas de l'espèce, cette différence n'était pas rédhibitoire dans la mesure où le brevet en cause prévoyait comme domaines d'utilisation des matériaux revendiqués, outre divers usages médicaux correspondant à ceux mentionnés dans les documents (1) et (3), certaines applications dans le domaine du bâtiment ; il existait donc, selon la requérante, un lien entre les pansements adhésifs et l'industrie du bâtiment créant pratiquement une situation de sens unique.

Indépendamment du fait que l'exploitation de l'enseignement du document (2) appelle les réserves exprimées ci-dessus à propos du document (1) quant à l'interprétation du terme polyéther bloc amide, la prise en compte de l'enseignement du brevet en cause pour créer un lien entre les documents (3) et (2) afin de justifier une telle combinaison est l'évidence même que l'homme du métier n'aurait pas fait le rapprochement à la date de priorité et que la réflexion de la requérante ne peut être que le fruit d'une analyse a posteriori.

7.4. Pour ces diverses raisons, la Chambre conclut que pour un homme du métier l'objet de la revendication 1 ne découle pas d'une manière évidente des documents invoqués, qu'ils soient considérés isolément ou en combinaison, et qu'il implique par conséquent une activité inventive.

8. Il en est de même des revendications dépendantes 2 à 9, qui portent sur des modes de réalisation particuliers des matériaux selon la revendication 1 et, à ce titre, bénéficient de la brevetabilité de la revendication principale.

9. Comme il a été fait droit à la requête principale de l'intimée, il n'y a pas lieu de considérer ses requêtes subsidiaires.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

Quick Navigation