T 0136/93 () of 23.11.1994

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1994:T013693.19941123
Date de la décision : 23 Novembre 1994
Numéro de l'affaire : T 0136/93
Numéro de la demande : 89402279.7
Classe de la CIB : A47J 41/00
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Conteneur isotherme, plus spécialement destiné au transport et à la distribution de produits alimentaires liquides
Nom du demandeur : De Buyer, Hervé René Jacques Marie
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.2.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Inventive step (yes)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0002/83
T 0056/87
T 0606/89
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le requérant (demandeur) a formé un recours le 7. octobre 1992 contre la décision de la division d'examen notifiée le 9 septembre 1992, relative au rejet de la demande de brevet européen n° 89 402 279.7 publiée sous le n° 0 356 312.

La taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 4. janvier 1993.

La division d'examen est parvenue à la conclusion que la dernière revendication principale déposée comportait de la matière nouvelle (article 123(2) CBE), n'était pas claire (article 84 CBE) et ne contenait pas de combinaison de caractéristiques inventive (article 56 CBE) en comparaison de l'état de la technique divulgué par les documents suivants cités dans le rapport de recherche européenne :

- D1 : FR-A-727 859

- D3 : FR-A-2 601 656 et

- D4 : FR-A-2 554 420.

II. Dans son mémoire exposant les motifs du recours le requérant a prétendu notamment que les conteneurs selon D1 et D4 adaptés respectivement au transport du lait et à l'usage domestique appartiendraient à des domaines de la technique très éloignés de celui de l'invention et qu'ils n'auraient donc pas à satisfaire à des exigences notamment d'hygiène et de résistance aux chocs comparables à celles requises pour le conteneur décrit dans la revendication 1.

A son avis l'art antérieur le plus proche serait constitué par le conteneur représenté à la figure 2 de D3 et il ne serait pas évident de combiner cet enseignement avec celui de D4 qui ne prévoierait pas un renfoncement dans un but de protection mais pour créer des renflements internes destinés au maintien de bouteilles.

III. Par télécopie datée du 23 novembre 1994 le demandeur a déposé un nouveau jeu de trois revendications destiné à servir de base au présent recours.

La revendication 1 s'énonce comme suit :

"Conteneur isotherme adapté au transport et à la distribution de produits alimentaires liquides et apte à subir de nombreuses et importantes manipulations pouvant aller jusqu'à un parachutage sur le lieu de son utilisation, conteneur isotherme comportant un corps de conteneur (2) muni d'un fond (20) et de parois latérales (21) entourant ce dernier, un couvercle (3) coopérant notamment avec un joint d'étanchéité (8) et/ou avec des organes de fermeture (10) pour permettre de fermer le corps de conteneur (2) de façon étanche, ainsi qu'un robinet (13) coopérant avec une prise d'air (15) munie d'une soupape (16) de façon à permettre le soutirage du liquide présent dans le conteneur, le couvercle (3) et le corps de conteneur (2) comportant une paroi interne (4', 4) métallique inoxydable, le cas échéant amovible, destinée à être en contact avec les produits alimentaires, et une paroi externe (5', 5) antichocs en une matière plastique résistante ou un produit assimilable, notamment en polyéthylène haute densité, ces deux parois étant séparées par une couche d'un isolant thermique (6', 6), notamment de mousse de polyuréthane injectée entre les deux parois, conteneur isotherme caractérisé en ce que le couvercle (3) comporte, d'une part, sur sa périphérie externe, un renfoncement (11) dans lequel le robinet (13) est logé dans sa totalité de façon à permettre le soutirage du liquide contenu dans le corps de conteneur (2) lorsque, à partir de sa position de stockage normale dans laquelle il repose sur son fond (20), celui-ci est basculé dans une position de distribution dans laquelle il s'appuie sur ses parois latérales (21), le robinet (13) se trouvant alors à la partie inférieure du conteneur et, d'autre part, la prise d'air (15) coopérant avec le robinet (13) lors du soutirage du liquide."

IV. Il ressort du contenu de la télécopie du 23 novembre 1994 que le requérant requiert la délivrance d'un brevet européen sur la base des documents suivants :

- description de la demande telle que déposée,

- revendications 1 à 3 déposées le 23 novembre 1994 et

- figures 1 à 3 des dessins de la demande telle que déposée.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours

Le recours est conforme aux exigences des articles 106 à 108 de la CBE.

La requête qui compose l'acte de recours déposé le 7. octobre 1992 identifie la décision attaquée mais n'indique pas explicitement dans quelle mesure la révocation de ladite décision est demandée.

Toutefois, le requérant ayant présenté de nouvelles revendications, la Chambre considère que la révocation de la décision est implicitement requise dans la mesure où elle affecte ces dernières revendications.

Le recours satisfait donc aussi aux prescriptions de la règle 64 CBE et il est recevable.

2. Admissibilité des modifications (Article 123 CBE)

Le texte de la nouvelle revendication 1 reprend pour l'essentiel le contenu des revendications 1 à 4 de la demande telle que déposée avec quelques ajouts supplémentaires destinés à préciser d'une part les conditions d'utilisation sévères pour lesquelles le conteneur est conçu et d'autre part que la prise d'air est "munie d'une soupape" et que la paroi externe est "antichocs". Ces caractéristiques ajoutées sont supportées par la description telle que déposée respectivement aux pages 5 (lignes 31 à 35) et 6 (lignes 12 à 18) et aux pages 5 (lignes 25 à 27), 9 (lignes 2 à 4) et 7 (ligne 27).

Ces modifications clarifient donc la revendication 1 de la demande telle que déposée sans ajouter de matière nouvelle. Elles satisfont donc aux prescriptions de l'article 123(2) CBE et sont acceptables.

3. Clarté et interprétation de la revendication 1

Dans la décision faisant l'objet du recours la première instance avait soulevé une objection de manque de clarté basée essentiellement sur le fait que plusieurs conteneurs en nombre indéfini étaient revendiqués. La nouvelle revendication 1 présentée le 23 novembre 1994 ayant été modifiée notamment pour ne plus revendiquer qu'un seul conteneur, l'objection précitée n'est plus justifiée et la Chambre considère que les conditions de l'article 84 de la CBE sont remplies.

En ce qui concerne l'interprétation à donner à l'expression "antichocs", celle-ci ressort de la description de la demande telle que déposée (cf. en particulier page 7, ligne 27) et signifie "résistant aux chocs".

Par ailleurs, il ressort implicitement des indications précisant que le conteneur et son couvercle comportent respectivement "un robinet coopérant avec une prise d'air" et "un renfoncement dans lequel le robinet est logé dans sa totalité" que le robinet est monté "à demeure" sur le couvercle et qu'il fait corps avec lui de manière démontable ou non, l'ensemble constituant une entité permanente.

4. Nouveauté

4.1. Le conteneur décrit dans D1 ne comporte ni paroi externe en matière plastique, ni robinet de soutirage monté à demeure sur le couvercle, ni renfoncement sur le couvercle pour loger ledit robinet tel que décrit dans la revendication de la demande.

Le document FR-A-2 594 415 (D2) également cité dans le rapport de recherche divulgue non pas un conteneur isotherme mais un tonneau formé de deux embases qui ne comportent aucun couvercle.

Quant aux conteneurs décrits dans D3 et D4, ils ne comportent aucun robinet de soutirage de liquide monté à demeure sur leur couvercle et aucun renfoncement dans ledit couvercle pour loger un éventuel robinet comme décrit dans la revendication 1.

4.2. Par conséquent, aucun des documents cités dans le rapport de recherche ne décrit un conteneur présentant en combinaison toutes les caractéristiques de l'objet de la revendication 1 qui doit donc être considéré comme nouveau au sens de l'article 54 de la CBE.

5. Etat de la technique le plus proche

5.1. L'état de la technique le plus proche de l'invention est par définition celui qui se rapporte à une utilisation identique ou similaire et qui requiert le minimum de modifications structurelles et fonctionnelles pour s'identifier à l'invention (cf. décision T 606/89 non publiée).

En l'occurrence, cet état de la technique est constitué par le conteneur isotherme représenté à la figure 2 de D3 car il appartient au même domaine d'utilisation que le conteneur selon l'invention. Il est en outre du même type et comporte de nombreuses similitudes de structure notamment en ce qui concerne la constitution de la double paroi isotherme, la présence d'une prise d'air ménagée sur le couvercle et le montage à demeure du robinet de soutirage.

5.2. L'objet de la revendication 1 diffère toutefois de ce conteneur connu en ce qu'il comporte un renfoncement à la périphérie externe de son couvercle et en ce que son robinet de soutirage est logé dans sa totalité dans ce renfoncement au lieu d'être monté de manière saillante à la base de la cuve comme représenté sur la figure 2 de D3.

6. Problème technique et solution

Si l'on tient compte de ces différences, le problème technique déterminé objectivement apparaît résider d'une part dans la réduction des coûts de fabrication et d'utilisation de ce type de conteneurs (cf. la demande telle que déposée : page 3, ligne 33 à page 4, ligne 16 et page 4, ligne 33 à page 5, ligne 9) et d'autre part dans l'amélioration de leur résistance aux chocs et de leur aptitude au gerbage (cf. page 5, ligne 31 à page 6, ligne 7).

La Chambre est convaincue que la solution préconisée dans la revendication 1 permet effectivement de résoudre ce double problème technique.

7. Activité inventive

7.1. Pour l'appréciation de l'activité inventive au sens de l'article 56 CBE, il y a lieu de considérer tel quel et dans son intégralité le conteneur selon la figure 2 de D3, et il n'est pas permis d'en ignorer des éléments essentiels après comparaison avec l'invention (cf. décision T 56/87, JO OEB 1990, 188), ce qui constituerait une approche "ex-post facto".

Il convient ensuite de déterminer si la personne du métier qui souhaite réduire les coûts et accroître la robustesse de ce conteneur connu aurait trouvé à la date de dépôt de la demande dans le même domaine technique ou dans des domaines voisins non seulement les moyens éparses nécessaires à la réalisation de l'invention mais également des indications qui lui auraient permis d'escompter un perfectionnement ou un avantage quelconque s'il les combinait dans l'optique de l'invention.

Il ne suffit donc pas qu'il ait eu à sa disposition les différents éléments essentiels et de ce fait la possibilité de réaliser l'invention, encore faut-il qu'existe une incitation qui aurait pu l'amener à les choisir parmi d'autres et à les utiliser en combinaison conformément à l'invention (cf. décision T 2/83, JO OEB 1984, 265).

7.2. Par ailleurs la personne du métier ne peut ignorer que le conteneur de D3 qu'elle cherche à améliorer est conçu avantageusement de manière à constituer un ensemble complet qui se suffise à lui-même aussi bien pour le transport et le stockage que pour la distribution différée des liquides et que ce conteneur ne nécessite l'installation ultérieure d'aucun dispositif supplémentaire du fait qu'il comporte un robinet monté à demeure. La personne du métier cherchera naturellement à conserver cet avantage et s'intéressera en premier lieu aux récipients conçus de cette façon.

7.3. De plus, en présence de récipients de grande contenance comme ceux concernés notamment par l'invention (cf. colonne 1, lignes 24 à 28 du fascicule de la demande), qui ne peuvent être que lourds et délicats à manipuler quand ils sont pleins, la personne du métier percevra comme un inconvénient majeur le fait de devoir les basculer pour le soutirage de leur contenu car l'opération peut s'avérer difficile et exiger l'emploi de moyens de manutention puissants et spécialisés.

En outre, la personne du métier peut aussi craindre que le fait de coucher le récipient entraine des fuites à la partie basse du joint du couvercle du fait de la forte pression exercée par le liquide sur ledit couvercle.

7.4. De D1 la personne du métier apprendra qu'il est possible et déjà connu en soi de ménager une ouverture de soutirage à la périphérie du couvercle d'un récipient destiné au transport du lait. Cependant le conteneur divulgué ne comporte aucun robinet installé à demeure et D1 enseigne que pendant le transport et le stockage l'ouverture de soutirage doit être obturée par un bouchon, un robinet n'étant monté sur le couvercle qu'au moment de la distribution du liquide, ce qui ajouté à l'obligation de basculer le récipient incite plutôt le spécialiste à rejeter d'emblée ce type de conteneur en vertu de ce qui a été dit précédemment (cf. sections 7.2 et 7.3).

7.5. Dans la mesure où D4 enseigne de placer l'orifice de soutirage au voisinage du fond du conteneur, évitant ainsi d'avoir à le basculer pour la distribution des liquides, et dans la mesure où il préconise d'encastrer un robinet à demeure dans un renfoncement du récipient, ce qui permet d'améliorer ainsi à la fois l'aptitude au gerbage et la robustesse du conteneur, l'homme du métier sera plutôt tenté d'adopter cette solution de préférence à celle selon D1 et se trouvera ainsi détourné de la solution revendiquée.

7.6. Et en admettant même que, allant à l'encontre de la tendance naturelle de placer le robinet à la base de la cuve et malgré l'absence de robinet monté à demeure, l'homme du métier optait néanmoins pour la structure proposée dans D1 et l'adaptait sur le conteneur de D3, pour parvenir à l'invention il lui faudrait encore prévoir de donner au couvercle une épaisseur suffisante au moins égale à la partie saillante du robinet pour pouvoir loger celui-ci, ce qui de prime abord va à l'encontre de la réduction recherchée des coûts de fabrication et de stockage.

7.7. Par conséquent, la démarche adoptée pour parvenir à l'invention en contradiction de tout ce qui précède et qui est délibérément opposée à ce qu'on attendrait naturellement d'une personne du métier implique une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

8. Pour ces raisons, la Chambre considère que l'objet de la revendication 1 et celui des revendications 2 et 3 qui lui sont rattachées satisfont aux conditions de brevetabilité de la CBE et que la demande peut être accordée sur cette base.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de délivrer un brevet européen dans la version suivante : Description :

- Description de la demande telle que déposée. Revendications :

- revendications 1 à 3 déposées le 23 novembre 1994. Dessins :

- Figures 1 à 3 de la demande telle que déposée.

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