T 0089/90 (Transformateur à noyau annulaire) of 27.11.1990

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1990:T008990.19901127
Date de la décision : 27 Novembre 1990
Numéro de l'affaire : T 0089/90
Numéro de la demande : 81105435.2
Classe de la CIB : H01F 40/06
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : Sprecher & Schuh
Nom de l'opposant : Siemens; Asea Brown Boveri AG
Chambre : 3.5.01
Sommaire : Aucune objection, tant du point de vue formel que sur le fond, ne peut être soulevée à l'encontre de la pratique permanente de l'OEB, qui consiste à rendre des décisions intermédiaires susceptibles de recours au sens de l'article 106(3) CBE, en cas de maintien du brevet tel qu'il a été modifié.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 102(3)
European Patent Convention 1973 Art 106(3)
European Patent Convention 1973 R 58(4)
European Patent Convention 1973 R 58(5)
Mot-clé : Décision intermédiaire au sens de l'article 106(3) CBE en cas de maintien d'un brevet tel qu'il a été modifié, en application de l'article 102(3) CBE (non critiquable)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0055/90
T 1063/92
T 0839/95

Exposé des faits et conclusions

I. L'intimé est titulaire du brevet européen n° 0 063 636 (n° de dépôt 81 105 435.2).

II. Siemens AG et Asea Brown Boveri AG ont fait opposition à ce brevet au motif que son objet était dépourvu de nouveauté et d'activité inventive.

III. Au cours de la procédure orale du 26 janvier 1989, la division d'opposition a envisagé le maintien du brevet européen sur la base des nouvelles revendications 1 à 3 déposées à cette occasion.

IV. Par une notification officielle conforme à la règle 58(4) CBE, les parties ont été informées du texte dans lequel la division d'opposition avait l'intention de maintenir le brevet européen.

V. Dans sa lettre du 13 mars 1989, l'opposant Siemens a fait savoir qu'il n'avait pas d'objections à l'encontre du texte dans lequel le brevet européen devait être maintenu. Mais il a fait expressément remarquer qu'il jugeait nécessaire la révocation du brevet pour absence de nouveauté et d'activité inventive eu égard à l'état de la technique cité.

VI. Dans sa décision intermédiaire au sens de l'article 106(3) CBE, rendue le 28 novembre 1989, la division d'opposition a considéré que les observations faites par la société Siemens dans sa lettre du 13 mars 1989 constituaient une nouvelle requête en révocation. Elle a constaté, en indiquant ses motifs, que, compte tenu des modifications apportées par le titulaire du brevet au cours de la procédure d'opposition, le brevet et l'invention qui en fait l'objet satisfaisaient aux conditions de la CBE. Ladite décision prévoit un recours indépendant (article 106(3) CBE).

VII. Siemens AG a formé un recours contre cette décision. L'opposant Asea Brown Boveri AG n'a formé aucun recours et n'a pas été partie à la procédure de recours.

VIII. Au cours de la procédure orale, qui s'est tenue devant la Chambre de recours le 27 novembre 1990, le débat a tout d'abord porté sur la question de la recevabilité de la décision intermédiaire du 28 novembre 1989, posée par le requérant (Siemens AG). La question quant au fond, c'est-à-dire celle de la brevetabilité du brevet en litige, a ensuite été discutée.

IX. Concernant la question de la recevabilité de la décision intermédiaire, le requérant a demandé que cette décision soit reconnue irrecevable, que le remboursement de la taxe de recours soit ordonné et, à titre subsidiaire, que la Grande Chambre de recours soit saisie de cette affaire.

X. Les arguments avancés par le requérant à l'appui de ces requêtes peuvent être résumés comme suit :

1. Le texte du paragraphe 3 de l'article 102 CBE correspond dans une très large mesure à celui des paragraphes 1 et 2 dudit article, et vise à ce que la division d'opposition décide de maintenir le brevet tel qu'il a été modifié si, compte tenu des modifications apportées par le titulaire du brevet européen au cours de la procédure d'opposition, le brevet et l'invention qui en fait l'objet satisfont aux conditions de la CBE. Il faut donc admettre que, dans la présente affaire également, la décision doit être entendue, au sens de la CBE, comme une décision finale, liée toutefois à l'observation des conditions de l'article 102(3)a) et b) CBE. Par conséquent, l'article 102(3) CBE ne fait pas de place à une décision intermédiaire ; il requiert au contraire, comme dans les paragraphes 1 et 2 précédents, une décision finale.

2. La constatation, selon la décision intermédiaire attaquée, que le brevet (tel qu'il a été modifié) et l'invention qui en fait l'objet satisfont aux conditions de la CBE, montre clairement que - exception faite des questions de forme visées à l'article 102(3) a) et b) CBE - l'affaire en était arrivée au point où elle pouvait faire l'objet d'une décision finale.

3. La CBE s'accommode à dessein de ce qu'une décision (décision finale) relative au maintien du brevet tel qu'il a été modifié ne doive être rendue que lorsque le titulaire du brevet s'est déclaré d'accord sur le texte modifié et qu'il a acquitté la taxe d'impression d'un nouveau fascicule du brevet, avec comme conséquence pour le titulaire qu'il devra éventuellement payer, dans le cadre d'une procédure de recours consécutive à la procédure d'opposition, des taxes d'impression d'un autre nouveau fascicule du brevet européen.

4. La procédure d'opposition désormais pratiquée à l'OEB (consistant à rendre des décisions intermédiaires au sens de l'article 106(3) CBE) place l'opposant dans une situation plus difficile que ne le prévoit la CBE. L'opposant est ainsi tenu - pour continuer à être partie à la procédure - de préparer et former un recours contre la décision intermédiaire et d'acquitter la taxe de recours, ce qui lui cause beaucoup de travail à un stade de la procédure pour lequel le texte de la CBE n'en prévoit pas. Or, il n'est pas sûr, à ce stade, que ce travail soit vraiment nécessaire si la procédure d'opposition est menée conformément à la CBE, puisque le brevet sera peut-être révoqué par la suite, uniquement parce que le titulaire du brevet n'aura pas acquitté la taxe d'impression.

5. En l'espèce, il ne faut pas oublier non plus que la notification du 24 février 1989, établie conformément à la règle 58(4) CBE (OEB Form 2325.4 03.88), stipule que si l'opposant n'émet aucune objection quant au texte dans lequel le brevet doit être maintenu, la notification visée à la règle 58(5) CBE (c'est- à-dire l'invitation faite au titulaire du brevet d'acquitter la taxe d'impression et de produire une traduction des revendications modifiées) est envoyée. C'est à la suite de cette notification que la requérante a indiqué à l'OEB, dans sa lettre du 13 mars 1989, qu'elle n'émettait aucune objection quant au texte dans lequel le brevet en litige devait être maintenu. Le fait qu'une décision intermédiaire au sens de l'article 106(3) CBE ait été rendue à la place de l'invitation prévue à la règle 58(5) CBE constitue donc une infraction au principe de la bonne foi.

XI. L'intimé a demandé le rejet des requêtes résumées au point IX et, pour appuyer son raisonnement, a développé essentiellement les arguments suivants :

1. La pratique constante de l'OEB en matière de décisions intermédiaires susceptibles de recours lors de la procédure d'opposition est justifiée et n'entraîne pour le requérant aucun inconvénient déraisonnable. Elle est tout à fait conforme à la CBE.

2. Si aucune décision intermédiaire susceptible de recours n'est rendue en cas de maintien du brevet tel qu'il a été modifié, conformément à l'article 102(3) CBE, mais qu'au contraire une décision finale est rendue directement (après paiement de la taxe d'impression et production de la traduction en application de la règle 58(5) CBE), le système des délais de la CBE implique obligatoirement que le nouveau fascicule du brevet doit être publié précisément au moment où le délai de recours arrive aussi à expiration. Mais la publication au Bulletin européen des brevets du nouveau fascicule et de la mention de la délivrance du brevet fait naître chez le public l'impression totalement trompeuse que le brevet a été maintenu définitivement pendant la procédure d'opposition, alors que cela n'est pas du tout exact dans le cas d'un recours. Pour éviter de telles interférences dans les délais, il ne fait pas de doute que, du point de vue de la procédure, il est justifié de traiter le cas visé à l'article 102(3) CBE différemment des cas visés à l'article 102(1) et (2) CBE, d'autant plus que l'article 106(3) prévoit expressément des décisions intermédiaires avec recours indépendant.

3. La procédure que le requérant (opposant) préconise (décision finale immédiate sans décision intermédiaire) présente pour le titulaire du brevet l'inconvénient majeur qu'il doit, le cas échéant, prendre en vain à sa charge les taxes d'impression et les traductions des revendications (à savoir dans le cas où il doit y avoir d'autres modifications dans le cadre d'une procédure de recours). Face à cela, le seul risque minime que court l'opposant lors de la procédure introduite officiellement avec décision intermédiaire susceptible de recours, est qu'il forme et motive un recours sans savoir avec une certitude absolue si, en fin de compte, le titulaire du brevet s'intéresse toujours (c'est- à-dire après la fin de la procédure de recours et un renvoi de l'affaire à la division d'opposition) au maintien du brevet, et s'il a acquitté la taxe d'impression. Il est toutefois hautement improbable que le titulaire d'un brevet renonce à ce dernier alors qu'il vient de franchir avec succès les procédures d'examen, d'opposition et de recours. En outre, si le titulaire du brevet renoncait à ce dernier, par exemple au vu du mémoire exposant les motifs du recours, cela ne pourrait qu'aller dans le sens souhaité par l'opposant.

XII. Au cours de la procédure orale, la Chambre a rejeté les requêtes de la requérante, mentionnées au point IX ci-dessus.

XIII. En ce qui concerne la question quant au fond, c'est-à-dire celle de la brevetabilité du brevet en litige, la requérante a présenté la requête suivante: "Vu le maintien de la requête en révocation du brevet dans sa totalité, il est demandé, dans le cadre du présent recours contre la décision intermédiaire du 28 novembre 1989, que la constatation qui y est faite soit annulée".

XIV. Pour motiver cette requête, la requérante s'est essentiellement référée, comme auparavant devant la division d'opposition, au fascicule du brevet français FR-A-1 100 351 (E1), et a réitéré son point de vue, à savoir que le transformateur à noyau annulaire selon la présente revendication 1 du brevet en litige est antériorisé par le seul transformateur selon la figure 2 de ce fascicule et que, dans une très large mesure, il découle de manière évidente de l'état de la technique. ...

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Sur la recevabilité de la décision intermédiaire

2.1 En vertu de l'article 102(1), (2) et (3) CBE, une opposition formée contre un brevet européen peut aboutir à la révocation du brevet, au rejet de l'opposition ou au maintien du brevet tel qu'il a été modifié. Dans ce dernier cas, il est nécessaire de publier un nouveau fascicule du brevet européen. En vertu de l'article 102(3)b) CBE, le paiement de la taxe d'impression est une condition sine qua non pour le maintien du brevet tel qu'il a été modifié, et, conformément à l'article 65(1) CBE, l'invitation à acquitter cette taxe peut marquer dans les Etats contractants le point de départ du délai de production des traductions.

2.2 Comme indiqué dans la décision de la Grande Chambre de recours G 1/88 du 27 janvier 1989 (JO OEB 1989, 189), l'OEB a très tôt instauré une pratique consistant à arrêter tout d'abord le texte modifié du brevet dans une décision intermédiaire, qui en soi n'a pas été expressément prévue dans ce contexte. C'est seulement lorsque cette décision est devenue définitive (ou, le cas échéant, après la décision de la chambre de recours) qu'il est demandé, en application de la règle 58(5) CBE, d'acquitter la taxe d'impression et de produire une traduction des revendications dans les autres langues officielles. Ces exigences satisfaites, la décision finale et désormais sans appel de maintien du brevet dans sa forme modifiée est rendue, et le nouveau fascicule de brevet est alors publié.

2.3 Il résulte des observations de la Grande Chambre de recours figurant dans la décision ci-dessus (voir notamment le point 7 des motifs de la décision) qu'elle aussi estime que les décisions intermédiaires sont justifiées (cf. Singer, Europäisches Patentübereinkommen, pages 407, 438, 439). Cette pratique a pour but d'éviter au titulaire du brevet des frais supplémentaires pour la modification du texte du brevet, si celui-ci doit une nouvelle fois être modifié pendant une procédure de recours postérieure. Les Directives relatives à l'examen pratiqué à l'OEB se basent elles aussi sur cette pratique (partie D, chapitre VI, 6.2.2) qui a été explicitée à deux reprises dans des communications de l'Office européen des brevets, publiées au Journal officiel de l'OEB (JO OEB 1981, 74, et 1985, 272).

2.4 Une décision intermédiaire repose juridiquement sur l'article 106(3) CBE, selon lequel une décision qui ne met pas fin à une procédure à l'égard d'une des parties ne peut faire l'objet d'un recours qu'avec la décision finale, à moins que ladite décision ne prévoie un recours indépendant. La CBE ne contient aucune disposition générale concernant la date à laquelle il est possible ou nécessaire de recourir à ces décisions intermédiaires. Il incombe donc à l'instance compétente d'apprécier si une décision intermédiaire est opportune dans les cas particuliers ou si la question à l'ordre du jour ne doit être réglée que dans une décision finale mettant fin à la procédure. Il s'agit alors de prendre en considération différents éléments, par exemple la possibilité d'accélérer ou de simplifier l'ensemble de la procédure grâce à une décision intermédiaire (le règlement d'une question litigieuse de priorité peut par exemple jouer un rôle décisif quant à la forme et l'ampleur que prendra la procédure par la suite). Il est clair également que les aspects financiers entrent dans le cadre des éléments devant être pris en considération. Ce qui précède (voir motifs 2.3) montre que la pratique mise en oeuvre à l'OEB depuis longtemps déjà, qui consiste à rendre des décisions intermédiaires susceptibles de recours en cas de maintien du brevet tel qu'il a été modifié, est fondée sur cet examen des aspects financiers.

2.5 Les observations du requérant n'ont pas convaincu la Chambre que l'examen des aspects financiers, qui est à la base de la pratique de l'OEB, fait du tort au requérant. A cet égard, la chambre se range à l'avis de l'intimé (voir point XI, 3. ci- dessus). Comme indiqué plus haut au point 2.3 des motifs, la Grande Chambre de recours n'a émis aucune réserve à ce sujet. L'exercice du pouvoir d'appréciation en vertu de l'article 106(3) CBE n'est donc pas arbitraire, mais justifié quant au fond.

2.6 Force est donc de constater qu'aucune objection, tant du point de vue formel que sur le fond, ne peut être soulevée quant à la pratique constante de l'OEB, qui consiste à rendre des décisions intermédiaires susceptibles de recours au sens de l'article 106(3) CBE, en cas de maintien du brevet tel qu'il a été modifié. Eu égard aux observations relatives à cette question, que la Grande Chambre de recours a formulées très récemment dans la décision G 1/88 citée plus haut, il n'y a à l'évidence aucun motif d'en saisir à présent la Grande Chambre de recours.

2.7 La Chambre ne peut accepter l'allégation de la requérante, selon laquelle une décision intermédiaire rendue en l'espèce doit être considérée comme une infraction au principe de la bonne foi (voir point X, 5. ci-dessus). Même s'il n'était possible de donner une interprétation différente de la mention accompagnant la notification visée à la règle 58(4) CBE que d'après son libellé, il aurait dû ressortir du contexte que l'invitation visée à la règle 58(5) CBE ne serait émise que si l'opposant n'avait absolument aucune objection au maintien du brevet tel qu'il a été modifié, c'est-à-dire que si elle était d'accord, non seulement avec le texte du brevet modifié, mais aussi avec l'observation des autres conditions de la brevetabilité. Or, en l'espèce, le requérant a expressément fait savoir, dans sa réponse à la notification établie conformément à la règle 58(4) CBE (lettre du 13 mars 1989), qu'elle continuait de tenir pour nécessaire la révocation du brevet pour absence de nouveauté ou, tout au moins, d'activité inventive. Cela montre que le requérant lui-même a certainement pensé qu'il ne s'agissait pas uniquement du libellé. Au demeurant, le fait de rendre une décision intermédiaire susceptible de recours n'a entraîné aucune perte de droits pour le requérant.

3. Sur la question quant au fond de brevetabilité du brevet litigieux ...

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. Les requêtes du requérant, citées au point IX ci-dessus et portant sur la question de la recevabilité de la décision intermédiaire, sont rejetées.

2. La décision de la division d'opposition en date du 28 novembre 1989 est annulée.

3. L'affaire est renvoyée à la première instance, à charge pour elle de maintenir le brevet tel qu'il a été modifié, conformément à la requête principale de l'intimé (titulaire du brevet), moyennant une adaptation de la partie de la description s'y rapportant (cf. colonne 1, lignes 53 à 61).

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