European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1989:T024387.19890830 | ||||||||
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Date de la décision : | 30 Août 1989 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0243/87 | ||||||||
Numéro de la demande : | 79400555.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | C12N 1/18 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Levure sèche active de panification; procédé et souche permettant de l'obtenir, application à la fermentation | ||||||||
Nom du demandeur : | Lesaffre et Cie | ||||||||
Nom de l'opposant : | Gist-Brocades N.V. | ||||||||
Chambre : | 3.3.02 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Procédure orale-décision prononcée à l'audience- décision ensuite formulée par écrit et signifiée aux parties longtemps après et signée par un membre de la division d'opposition qui n'a pas participé à la procédure orale décision non valable oral proceedings - decision given orally decision - signature participation in oral proceeding |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 79 400 555.3 déposée le 3 août 1979 et publiée le 5 mars 1980 sous le n° 8554 a été délivrée le 12 mai 1982.
II. Le 10 février 1983, l'Intimée a fait opposition au brevet, demandant sa révocation pour les motifs visés à l'article 100 CBE.
Le 12 mars 1986, une procédure orale a eu lieu devant la division d'opposition, composée de trois membres techniciens, conformément à l'article 19 CBE.
A l'issue de cette procédure orale, le Président de la division d'opposition a prononcé la décision suivante :
- le brevet n° 8554 est révoqué - la décision écrite sera communiquée aux parties.
III. Le 28 avril 1987, c'est-à-dire plus d'une année après la procédure orale, une décision motivée écrite a été signifiée aux parties, conformément à la règle 68 CBE. Cette décision a été signée par le Président de la division d'opposition et deux membres techniciens. Des trois signataires de la décision motivée, seul le Président et le membre technicien nouvellement désigné en qualité de premier examinateur (deuxième examinateur au cours de la procédure orale) avaient participé à la procédure orale. Le troisième signataire, un nouveau membre de la division nommé ad hoc deuxième examinateur, n'avait pas participé auparavant à l'affaire et n'était intervenu qu'après la procédure orale. Ce mouvement dans la composition de la division d'opposition visait, de toute évidence, à compenser le vide créé par le transfert aux chambres de recours du membre technicien qui avait été le premier examinateur au cours de la procédure orale.
IV. Le 28 juin 1987, la Requérante (titulaire du brevet) a formé son recours et acquitté la taxe correspondante. Dans le mémoire exposant les motifs du recours, la Requérante a souligné que les motifs exposés dans la décision motivée écrite du 28 avril 1987, aux chapitres 4 et 5, n'avaient fait l'objet d'aucun débat à la procédure orale du 12 mars 1986, ces motifs étant différents de ceux débattus à cette date.
L'Intimée (opposante) n'a pas commenté cette remarque dans sa réponse.
V. Dans les circonstances, ayant à l'esprit la décision de la Chambre de recours 3.3.1 du 17 novembre 1987 dans l'affaire T 390/86 (J.O. OEB 1989, 30), et considérant que la question de la validité de la décision attaquée du 28 avril 1987 se posait d'un point de vue formel, le 18 janvier 1989, la Chambre a invité les parties à présenter leurs observations sur cette question de procédure.
VI. En réponse à la notification de la Chambre, la Requérante a maintenu son affirmation que la décision attaquée ne reflétait pas correctement ce qui s'était passé au cours de la procédure orale du 12 mars 1986. A l'appui de cette affirmation, la Requérante a déposé une déclaration sur l'honneur de M. Jean-Paul Rossi, chargé des problèmes de propriétés industrielles de la brevetée, qui avait assisté à l'audience.
En conséquence, et compte-tenu de l'irrégularité relative à la signature de la décision, la Requérante conclut à l'annulation de la décision du 28 avril 1987, au remboursement de la taxe de recours et au renvoi de l'affaire à la division d'opposition pour réexamen.
VII. Dans sa réponse à la notification de la Chambre, l'Intimée a affirmé, pour sa part, que les motifs exposés dans la décision motivée reflétait bien, en ce qui concerne les chapitres 4 et 5, l'objet des discussions lors de la procédure orale du 12 mars 1986. Elle a fait l'offre, pour confirmer cette affirmation, de présenter une déclaration écrite de M. A. Langejan, qui avait assisté à la procédure orale de la part de l'Intimée. Se référant à la décision précitée T 390/86, l'Intimée a souligné que la situation y était totalement différente, et notamment, que dans cette affaire, tous les trois membres de la division d'opposition avait été remplacés par d'autres qui n'avaient pas participé à la procédure orale. En outre, l'Intimée a attiré l'attention de la Chambre sur la partie suivante du point 7 des motifs de cette décision :
"Il peut arriver sans doute que la décision formulée par écrit ne puisse pas être signée par chacun des membres désignés (par ex. en cas de maladie). Néanmoins, la Chambre considère que, compte-tenu des principes évoqués plus haut, pour que la décision d'une division donnée soit valable, elle doit obligatoirement avoir été rédigée au nom des membres désignés pour constituer la division appelée à statuer sur le ou les points faisant l'objet de la décision, reproduire leur point de vue et être signée en conséquence."
Selon l'Intimée, dans la présente affaire, les deux membres qui ont participé à la procédure orale et qui ont signé la décision motivée écrite, représentent le point de vue de la division d'opposition. En conséquence, l'Intimée considère que la décision attaquée est valable. Elle conclut au rejet du recours.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106-108 et à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.
2. Tout d'abord, il convient de souligner qu'il est dans l'ordre des choses, et conforme aux dispositions de la règle 68 CBE, qu'une décision prononcée à une procédure orale soit ensuite formulée par écrit et signifiée aux parties dans les meilleurs délais. Un retard de plus d'une année tel que mis en évidence dans la présente affaire n'est, en règle générale, pas acceptable, compte-tenu des risques considérables d'erreurs de tout ordre qu'il est susceptible d'engendrer. La confusion qui en est résultée, ici, en ce qui concerne les évènements de la procédure orale, est vraisemblablement dûe, en grande partie, à cette anomalie malencontreusement conjuguée à l'irrégularité de la participation d'un membre de la division d'opposition qui n'avait pas participé à la procédure orale à l'issue de laquelle la décision avait été prononcée. Dans la situation telle qu'elle se présente, la Chambre considère qu'il est pratiquemment impossible de reconstruire ce qui s'est passé et ce qui s'est dit réellement, et par conséquent, de prendre position à l'égard de l'affirmation de la requérante, selon laquelle la décision écrite du 28 avril 1987 ne reflète pas correctement ce qui s'est passé au cours de la procédure orale du 12 mars 1986. Le procès-verbal de la procédure orale, joint en annexe aux motifs de la décision signifiée aux parties, n'est d'aucun secours pour la Chambre.
Dès lors, il convient d'annuler la décision attaquée et de renvoyer l'affaire à la division d'opposition pour nouvel examen.
3. En ce qui concerne le remplacement d'un membre de la division d'opposition par un autre après une procédure orale ayant conduit au prononcé de la décision, la Chambre considère que les principes développés dans l'affaire T 390/86 s'appliquent également à la présente affaire.
Conformément à la décision prise dans l'affaire susmentionnée, il est obligatoire qu'une décision motivée soit, pour le moins, rédigée au nom des membres désignés pour statuer sur l'opposition et qui ont effectivement rendu la décision à l'issue de la procédure orale, et qu'elle soit signée en conséquence. Il est vrai, comme rappelé par l'Intimée, que l'affaire T 390/86 se distingue de la présente affaire par le fait que tous les trois membres de la division d'opposition -au lieu d'un seul - avaient été remplacés après la procédure orale. Pour la Chambre, en principe, le nombre des membres remplacés n'est pas un élément décisif. Dès lors qu'un seul membre a été remplacé après la procédure orale, il n'existe plus de garantie que la décision motivée écrite ultérieurement reflète correctement le point de vue de tous les trois membres ayant participé à la procédure orale ou, le cas échéant, de la majorité de la division d'opposition. Une telle situation introduit toujours le risque considérable que la décision motivée écrite soit influencée par le "nouveau" membre, ou encore que ce dernier ne soit pas au fait de ce qui s'est réellement passé au cours la procédure orale.
4. En ce qui concerne la référence au point 7 des motifs de la décision T 390/86, faisant allusion à la situation exceptionnelle d'incapacité d'un des membres désignés, par exemple en cas de maladie, contrairement à l'Intimée, la Chambre considère qu'il s'agit, là, d'un tout autre problème. Pour la Chambre, dans une telle situation exceptionnelle, il convient d'accepter que la décision motivée formulée par écrit soit seulement signée par les membres de la division qui ont effectivement participé à la procédure orale, au nom également, du membre empêché. Il convient, évidemment, de vérifier que la décision motivée écrite représente le point de vue de tous les membres ayant participé à la procédure orale. Toutefois, la Chambre ne voit pas la nécessité du remplacement du membre empêché pour autant qu'un autre, ayant participé au rendu de la décision, peut signer en son nom. Elle considère, en outre, que cette situation exceptionnelle d'incapacité est totalement différente de la situation de remplacement d'un membre ayant participé à la procédure orale, tel que révélé dans la présente affaire.
5. En conclusion, la Chambre considère que la décision attaquée n'est pas valable et, pour toutes ces raisons, doit être annulée.
6. La Chambre estime, en outre, que les faits examinés ci-dessus constituent un vice substantiel de procédure et qu'il serait, donc, équitable de rembourser la taxe de recours, conformément à la règle 67 CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision formulée par écrit en date du 28 avril 1987, confirmant la décision prononcée à la procédure orale du 12 mars 1986, est annulée.
2. La taxe de recours doit être remboursée.
3. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition pour nouvel examen.