T 0358/10 () of 12.7.2012

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2012:T035810.20120712
Date de la décision : 12 Juillet 2012
Numéro de l'affaire : T 0358/10
Numéro de la demande : 99400859.7
Classe de la CIB : E04B 1/88
E04D 13/16
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Toiture thermiquement isolante et acoustiquement absorbante
Nom du demandeur : ROCKWOOL-ISOLATION S.A.
Nom de l'opposant : SAINT GOBAIN ISOVER
Chambre : 3.2.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 54(1)
European Patent Convention Art 54(2)
European Patent Convention R 111(1)
European Patent Convention R 103(1)(a)
Mot-clé : Remboursement de la taxe de recours (oui): vice substantiel de procédure (oui, dû au délai excessif de la signification de la décision écrite)
Nouveauté (oui); un cahier de charges pour l'emploi d'un dispositif n'est pas, contrairement à des brochures commerciales, destiné en soi à être diffusé au public
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0243/87
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0563/11
T 2340/13
T 2707/16

Exposé des faits et conclusions

I. La titulaire a formé sous paiement de la taxe correspondante, le 15 février 2010, recours contre la décision du 14 décembre 2009 de la division d'opposition de révoquer le brevet Nº 962 604.

Les motifs de recours ont été déposés le 23 avril 2010.

II. La décision fut prononcée par la division d'opposition à l'issue de la procédure orale tenue le 30 janvier 2008, dont le procès-verbal fut envoyé aux parties le 8 septembre 2009.

La décision contestée était fondée sur une absence de nouveauté par rapport à D1 (D1a, D1b) de l'objet de la revendication 1 telle que délivrée et libellée comme suit:

"Dispositif de couverture de bâtiment comprenant un support (1) en tôle nervurée, un pare-vapeur (6) comportant une couche imperméable à la vapeur d'eau (6a), un matelas thermiquement isolant (7) et une membrane d'étanchéité (8, 9), mutuellement superposés dans cet ordre, la membrane d'étanchéité recouvrant les extrémités supérieures (10) d'organes d'assemblage qui traversent les autres constituants précités du dispositif, caractérisé en ce que le pare—vapeur comporte en outre une couche (6b) à porosité ouverte d'une masse surfacique d'au moins 240 g/m**(2), conférant au dispositif des propriétés d'absorption acoustique et ne s'écrasant pratiquement pas lorsqu'une personne marche sur celui—ci."

La division d'opposition a par ailleurs établi:

- que l'objet tel que revendiqué dans le brevet satisfaisait au critère de divulgation de l'invention selon les termes de l'article 83/100b) CBE;

- et que les documents D1a et D1b faisaient partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE après avoir introduit dans la procédure, et, par delà, considéré les moyens de preuve D1c à D1g soumis par l'opposante après le délai d'opposition.

III. Documents considérés:

D1a: Photocopie d'un extrait (3 pages) d'une documentation commerciale de la Société Isover Saint-Gobain intitulée "Le monde du silence, lames minérales Isover et confort acoustique, Système Quadracoustic Compact", page de garde, page 86 en bas, système Quadracoustic compact, et dernière page avec la mention "mars 1996";

D1b: Photocopie d'un cahier des charges d'emploi et de mise en oeuvre de la Société Isover Saint-Gobain (14 pages) intitulé "Système Quadracoustic Compact 404, Isolation thermoacoustique des toitures en tôles d'acier nervurées perforées ou crevées", la page de garde indiquant deux dates: "juin 97" et "validité: juillet 2000";

D1c: Copie du courrier de la société Socotec au Département Propriété Industrielle de Saint-Gobain Recherche en date du 14 Novembre 2007;

D1d: Rapport d'enquête technique du cahier des charges D1b établi par la société Socotec et daté du 15 juillet 1997;

D1e : Déclaration sur l'honneur du 22 janvier 2008 de Madame Christine Le Bihan, chef de produit Bâtiment Industriel et Étanchéité en 1996 et 1997 à la société Saint-Gobain;

D1f: Note d'information interne à la société Isover Saint-Gobain, datée du 25 août 1997 et établie par Madame Christine Le Bihan;

D1g: Photocopie d'un extrait (4 pages) d'une documentation commerciale de la société Isover Saint-Gobain, septembre 1996;

D2: Extrait de la norme française NF P 84-206-1 (9 pages), "Mise en oeuvre des toitures en tôles d'acier nervurées avec revêtement d'étanchéité", AFNOR, juin 1995;

IV. Requêtes

La titulaire-requérante a demandé l'annulation de la décision contestée, le remboursement de la taxe de recours et le maintien du brevet tel que délivré ou, à titre subsidiaire, sous forme modifiée selon l'une des requêtes auxiliaires 1 à 6 déposées avec le mémoire de recours ou selon une septième requête subsidiaire déposée par télécopie le 10 juillet 2012.

L'intimée-opposante a demandé le rejet du recours.

V. Les principaux arguments de la requérante-titulaire sont les suivants:

- Le remboursement de la taxe de recours serait justifié du fait de plusieurs vices substantiels entachant la procédure d'opposition, parmi lesquels, entre autres, un délai abusivement long de la transmission du procès-verbal et de la décision écrite par rapport à la date de la procédure orale devant la division d'opposition, une discordance entre certains faits et arguments relatés dans le procès-verbal de la procédure orale et les motifs y relatifs tels qu'énoncés dans la décision, et du non-respect du principe du contradictoire.

- Comme retenu dans la décision contestée, l'invention revendiquée serait suffisamment divulguée pour permettre à l'homme du métier de la réaliser.

- D'une part, la divulgation publique des documents D1a et D1b avant la date de priorité revendiqué dans le brevet attaqué n'aurait pas été établie de manière certaine; d'autre part, les documents D1c à D1g produits tardivement n'étant pas prima facie pertinents n'auraient pas dû être admis à la procédure d'opposition. Quant aux brochures commerciales D1a et D1b, rien ne prouverait qu'elles aient effectivement été diffusées aux clients potentiels. Les documents D1a, D1b et D1g ne sauraient dès lors être compris dans l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE.

- L'objection de défaut de nouveauté sur la base de D2 formulée pour la première fois en procédure orale devant la chambre ne devrait pas être admise.

- L'objet de la revendication 1 telle que délivrée serait nouveau par rapport à D1a et D1g mais aussi par rapport à D2, car la valeur minimale de 240 g/m**(2) pour le grammage de la couche à porosité ouverte du pare-vapeur ne serait pas divulguée dans ces documents.

VI. L'intimée-opposante a présenté pour l'essentiel les arguments suivants:

- L'invention revendiquée ferait défaut de description (article 100b) / 83 CBE), car le brevet ne contiendrait aucune divulgation du lieu de causalité revendiqué entre un grammage supérieur à 240g/m**(2) de la couche poreuse du pare-vapeur, - ceci quelle qu'en fût sa composition exacte (voile de fibres de verre ou autres) ou son épaisseur -, et les propriétés d'absorption acoustique et de résistance à l'écrasement sous le poids d'une personne, qui seraient à l'évidence également influencées par les autres composants du dispositif de couverture.

- Les documents D1c à D1g auraient été introduits à juste titre car très pertinents sur un plan technique et comme éléments probants (notamment la déclaration D1e) de la mise à disposition du public du cahier de charges D1b. Feraient donc partie de l'état de la technique, comme retenu dans la décision contestée, les brochures D1a et D1g ainsi que le cahier de charges D1b.

- Le dispositif revendiqué se verrait anticipé par la divulgation basée sur D1a, D1b et D1g,

- sachant notamment que le Parvacoustic® formant la couche poreuse du pare-vapeur selon D1g serait un feutre en laine de verre (Telstar®) avec une masse volumique d'environ 10kg/m**(3), qui rapportée à une épaisseur non-comprimée de 30mm coïnciderait avec une masse surfacique (ou un grammage) de l'ordre de 300g/m**(2), et

- considérant par ailleurs la référence explicite dans D1g à la nécessité de respecter en cela les prescriptions du cahier de charges Isover spécifique au procédé de mise en oeuvre, à savoir D1b.

VII. A l'issue de la procédure orale qui s'est tenue le 12 juillet 2012, la chambre a prononcé sa décision.

Motifs de la décision

1. Le recours est admissible.

2. Article 83 / 100b) CBE.

Sur ce point, la chambre confirme les motifs et la conclusion énoncés dans la décision contestée.

L'instruction technique donnée à l'homme du métier par la caractéristique incriminée, à savoir:

une couche (6b) a porosité ouverte d'une masse surfacique d'au moins 240 g/m**(2), conférant au dispositif des propriétés d'absorption acoustique et ne s'écrasant pratiquement pas lorsqu'une personne marche sur celui—ci,

est suffisante pour permettre d'exécuter l'invention revendiquée.

Il suffit pour cela que l'homme du métier choisisse une couche poreuse adaptée pour servir de pare-vapeur et présentant une masse surfacique (appelée également grammage) au moins égale à 240 g/m**(2). S'il le fallait, l'homme du métier pourrait encore se tourner vers la description du brevet pour y trouver un exemple de réalisation de cette couche poreuse, par exemple sous la forme d'un ou plusieurs voile(s) de fibres de verre divulgué au paragraphe [0013] du brevet.

Quant aux caractéristiques relatives aux propriétés physiques en termes d'absorption phonique et de résistance à l'écrasement, il est certes indiscutable que les autres constituants du dispositif de couverture de toit y contribuent dans une certaine proportion. Mais l'homme du métier ne conclurait pas à une contradiction voire impossibilité de réalisation de l'invention, au prétexte que cette double fonction serait à satisfaire uniquement par la couche poreuse présentant un grammage élevé.

3. État de la technique

3.1 Brochures D1a et D1g

Les documents D1a et D1g sont des brochures commerciales destinées à présenter des produits nouveaux à la clientèle potentielle et comportent tous les deux une date d'édition, mars, respectivement septembre 1996, soit au moins 18 mois avant la date de priorité revendiquée par le brevet en cause (27 mai 1998).

La chambre ne partage pas l'argument de la requérante, lorsque celle-ci prétend que la preuve de la diffusion des brochures D1a et D1g n'ayant pas été établie par des éléments tangibles, comme par exemple des inserts publicitaires dans des revues techniques spécialisées, leur publication restait improuvée.

Selon la jurisprudence constante des chambres de recours, les prospectus commerciaux ont pour vocation d'être diffusés auprès du public dans un laps de temps réduit suivant leur édition. Dans le cas présent, les brochures D1a et D1g ont ainsi dû être diffusées au courant de l'année 1996, donc bien avant le 27 mai 1998, date de priorité revendiquée par le brevet.

Par ailleurs, l'investissement dans des brochures de plusieurs dizaines de pages laisse conclure, du moins sans preuve apportée du contraire, que leur finalité était de se voir distribuées à des fins commerciales évidentes au sein de la clientèle potentiellement intéressée par le produit.

Les documents D1a et D1g font dès lors partie de l'état de la technique au sens de l'article 52(4) CBE.

3.2 Cahier de charges D1b

3.2.1 En ce qui concerne le document D1b portant la date de "juin 97" et une date de validité de "juillet 2000" apposée par le bureau de contrôle SOCOTEC dans le cadre d'une enquête technique, il ne s'agit très clairement pas d'une brochure publicitaire du type de D1a ou de D1g mais, comme son intitulé "Cahier des charges d'emploi et de mise en oeuvre" l'indique d'ailleurs, d'un cahier des charges, c'est-à-dire d'un manuel ou guide d'emploi et de mise en oeuvre du système "Quadracoustic compact 404".

3.2.2 Ainsi il ne fait aucun doute que le document D1b est destiné au seul technicien-opérateur effectuant le montage du système de couverture sur un toit dans le respect strict des instructions concernant la pose du système telles qu'établies par le fabricant, en l'occurrence Isover Saint-Gobain. Ceci sous-entend que la distribution du manuel D1b n'aurait eu guère de sens et d'utilité avant que le produit n'eût été acheté ou tout le moins commandé par un utilisateur-client. Hormis donc toutes les interrogations légitimes sur la date d'édition ou la date éventuelle de mise à la disposition publique de ce cahier de charges D1b (juin 1997 ou juillet 2000), la question de l'accessibilité au public semble entièrement dépendre de la vente et de la distribution subséquente du produit.

Cette analyse de D1b est d'ailleurs corroborée par la déclaration de Madame Le Bihan (D1e, cf. les deux derniers paragraphes), où il est indiqué que:

- D1b comportait des "spécifications précises quant à la pose" et que "pour des raisons de garantie,.. le client soit informé des préconisations à jour",

- D1b "a été communiqué à nos clients à partir de cette date".

Par client on entend habituellement des personnes ayant acheté le produit, contrairement aux clients dits potentiels, qui eux reçoivent des documentations purement commerciales en général dépourvues de toute directive d'emploi ou de mise en oeuvre des systèmes présentés.

Quant au document D1f, à savoir la "note d'information interne" en date du 25 août 1997, il apparait que cette note fut adressée par Madame Le Bihan à destination purement interne à la société Isover Saint-Gobain, à savoir à des responsables de département comme les directeurs de vente et marketing. L'affirmation de Madame Le Bihan au paragraphe précédent, c'est-à-dire à l'avant-dernier alinéa de la page 1 de D1e, indiquant une mise à la disposition de D1b "à quiconque en faisait la demande" dès le mois de juillet 97 semble dès lors improbable, du moins plus que douteuse.

3.2.3 La chambre est ainsi arrivée à la conclusion que la date de la mise à disposition de D1b est, de part sa nature même, entièrement indissociable de la vente ou du moins de la commande préalable du système Quadracoustic Compact 404. Or, le dossier de l'affaire en cours ne contient aucun élément tangible qui aurait pu objectivement apporter la preuve d'une transaction commerciale aboutie avant la date de priorité, d'autant que l'opposition fut formée par la société Isover Saint-Gobain en 2005, donc très nettement encore dans la période décennale légale, pendant laquelle les archives des sociétés, dont font notamment partie les factures et bons de livraison, doivent être conservées.

En résumé, les documents D1c à D1f soumis lors de la procédure orale devant la division d'opposition ne permettent pas d'établir avec quasi-certitude la date de divulgation effective du cahier de charges D1b. Les documents D1c à D1f soumis très tardivement et sans justification de leur retard n'auraient pas dû être introduits dans la procédure.

La motivation avancée par la division d'opposition dans sa décision (cf. points 2.2 et 2.4) pour l'admission de ces pièces est très superficielle et, à l'évidence, insuffisamment étayée.

3.2.4 Par ailleurs, la note figurant au paragraphe "Mise en oeuvre" de la colonne de droite de la page de garde de D1g, à savoir:

"Les prescriptions du cahier des charges ISOVER spécifique au procédé doivent être respectées.

Les travaux d'étanchéité sont réalisés conformément au DTU 43-3 et aux Avis Techniques des produits utilisés."

demeure, sans plus d'indication, vague et imprécise quant aux détails du cahier de charges.

Dès lors, et contrairement à l'argumentaire de l'intimée, on ne saurait en conclure que le prospectus D1g renvoie nécessairement au cahier des charges d'emploi et de mise en oeuvre selon D1b. S'ajoute à ceci que les prospectus D1a et D1g semblent concerner a priori deux variantes du système Quadracoustic®, le "quadracoustic compact" pour D1a et le "quadracoustic compact 404" pour D1g, chacun ayant le cas échéant son cahier de charges spécifique.

3.2.5 La chambre arrive ainsi à la conclusion que le document D1b, sur lequel le défaut de brevetabilité ayant conduit à la révocation du brevet fut principalement fondé, ne fait pas partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE.

4. Requête principale - Nouveauté

4.1 Par rapport à D1a

La brochure D1a ne contient aucun détail de la réalisation du système Quadracoustic Compact; on y reconnait tout-au-plus une structure multicouche à la page 86. Il est d'ailleurs admis par l'intimée que D1a seul ne divulgue pas l'ensemble des caractéristiques définissant le dispositif de couverture de toit tel que revendiqué.

4.2 Par rapport à D1g

4.2.1 Le système Quadracoustic Compact 404 divulgué dans la brochure publicitaire D1g (cf. notamment la page de garde, paragraphes intitulés "Présentation" et "Mise en oeuvre") présente une structure multicouche du type de celle revendiquée par le brevet, à savoir:

- un support en tôle d'acier nervurée comportant des perforations destinées à favoriser l'absorption acoustique dans le local;

- un pare-vapeur (le "Parvacoustic®") comportant une couche à porosité ouverte constituée par un feutre à dérouler en laine de verre Telstar® (d'une épaisseur au repos de 30mm) revêtu sur une face d'un pare-vapeur, qui se compose d'une feuille d'aluminium renforcée par une grille de verre, et sur l'autre face d'un voile de verre plaqué contre la tôle;

- un matelas thermiquement isolant (le "Panotoit Quadro®"); et

- un revêtement d'étanchéité;

- les dites couches étant mutuellement superposées dans cet ordre.

Le maintien du pare-vapeur et du matelas isolant sur la tôle est assuré par des éléments de fixation traversants (au moins cinq vis par panneau de 1,2m**(2)), qui compriment le pare-vapeur "Parvacoustic®" à une épaisseur de 3 à 5 mm au niveau des points de fixation et dont les extrémités supérieures sont naturellement couvertes par le revêtement d'étanchéité.

4.2.2 Reste ainsi à déterminer dans un premier temps si le pare-vapeur "Paracoustic®" connu de D1g pouvait être doté, du moins implicitement, d'une masse surfacique d'au moins 240 g/m**(2), et, le cas échéant, dans un deuxième temps, si des propriétés d'absorption acoustique et de résistance à l'écrasement peuvent en découler.

La division d'opposition avait conclu dans ses considérations aux points 4.1.3 et 4.1.4 de la décision contestée, que le grammage revendiqué était bien connu du système Quadracoustic en ces termes:

"il est connu d'une manière générale que les panneaux ou les rouleaux de fibres de verre utilisés pour l'isolation et comportant une feuille d'aluminium comme pare-vapeur ont un poids spécifique généralement compris entre 15 et 20 kg/m**(3). Il est facile de constater que dans les épaisseurs utilisées de 3 à 6 cm, la masse surfacique est automatiquement supérieure à 240g/m**(2)."

L'intimée a repris cette ligne argumentaire en l'appliquant toutefois au seul feutre Telstar® en laine de verre et non point à l'ensemble composite du pare-vapeur Parvacoustic®: le Telstar® ayant un poids spécifique de l'ordre de 10 kg/m**(3) et étant employé dans le système Quadracoustic à une épaisseur de 30mm dans le cadre aurait ainsi une valeur de grammage de l'ordre de 300 g/m**(2). Or, aucun élément probant, qui aurait pu permettre de déterminer objectivement les valeurs des masses surfaciques des différentes strates formant le système Quadracoustic ou du moins le pare-vapeur Parvacoustic®, n'a été versé au dossier. Les hypothèses avancées tant par la division d'opposition que par l'intimée ne reposent pas non plus sur des connaissances générales de l'homme du métier dans le domaine.

La chambre en conclut que la déduction de la valeur de grammage retenue pour le pare-vapeur en général par la division d'opposition ou pour un seul de ses composants (Telstar®) pour l'intimée est le fruit d'une allégation basée sur des suppositions non vérifiées et non vérifiables en l'état.

4.2.3 En conséquence, l'objet revendiqué se distingue de l'état de la technique divulgué dans la brochure D1g par la valeur minimale de grammage pour la couche poreuse du pare-vapeur qui selon les termes de la revendication 1 permet de conférer au dispositif des propriétés d'absorption acoustique et de résistance mécanique à l'écrasement.

4.3 Par rapport à D2

Dans sa réplique au mémoire de recours (voir pages 10 et 11), l'intimée a présenté, dans le cadre de la discussion portant sur l'activité inventive, des arguments détaillés quant à la divulgation et l'enseignement technique du document D2. Un aspect essentiel dans ces débats portait sur une prétendue différence de la valeur de grammage pour la couche poreuse décrite dans D2 et celle revendiquée.

De fait, l'argumentaire de la requérante au titre d'un défaut de nouveauté par rapport à D2 ne venait pas de surprise, de sorte que l'intimée était sans aucun doute en l'état d'y apporter contradiction lors de la procédure orale devant la chambre.

Le document D2 correspond à la norme NF P84-206 relative à la mise en oeuvre des toitures en tôles d'acier nervurées et revêtues d'un pare-vapeur et d'un isolant thermique, cf. notamment page 54. Certes, la norme D2 enseigne de choisir un grammage supérieur ou égal à 60g/m**(2) pour le voile de verre du pare-vapeur, voir page 78, partie E.2. Mais ceci n'anticipe en rien une limite inférieure très nettement plus élevée, en l'occurrence de 240g/m**(2) soit un multiple par 4 par rapport à la valeur indiquée dans D2.

La caractéristique définissant la limite inférieure pour la valeur de la masse surfacique de la couche à porosité ouverte du pare-vapeur est ainsi nouvelle par rapport à D2.

4.4 En conclusion, le système défini par la revendication 1 telle que délivrée est nouveau par rapport à l'état de la technique D1a, D1g et D2, et ainsi, contrairement aux conclusions trouvées dans la décision contestée, satisfait aux exigences de l'article 54(1) CBE.

5. Vice(s) substantiel(s) de procédure

5.1 Parmi les éventuels vices de procédure allégués par la requérante, la chambre considère que le retard très excessif pris pour formuler par écrit puis signifier aux parties la décision contestée ainsi d'ailleurs que le procès-verbal de la procédure orale est déterminant.

Conformément aux dispositions de la règle 111(1) CBE, une décision prononcée à une procédure orale doit être formulée par écrit et signifiée aux parties, la signification devant suivre dans les meilleurs délais.

Dans la présente affaire, l'envoi daté du 8 septembre 2009 du procès-verbal de la procédure orale, soit 19 mois après sa tenue (30 janvier 2008), et la signification datée du 14 décembre 2009 de la décision écrite, soit 22 mois après son prononcé à l'issue de la procédure orale, constituent intrinsèquement des manquements inacceptables de procédure suffisants à eux seuls pour ordonner le remboursement de la taxe de recours (cf. point 2 des motifs de la décision T 0243/87).

Force est de constater à cet endroit que de tels retards sont susceptibles d'engendrer des erreurs entachant la formulation écrite de la décision ou la rédaction du procès-verbal. De tels manquements sont en effet apparents dans la présente affaire à la lecture comparative du procès-verbal et de la décision contestée. Ainsi par exemple, les motifs retenus par la division d'opposition en ce qui concerne l'admission des documents D1a à D1g et les conclusions y tirées en terme de défaut de brevetabilité de l'objet de l'invention diffèrent dans la décision de révocation (cf. par exemple les points 2.2 et 2.4) de manière notable de ceux consignés dans le procès-verbal (cf. dernier paragraphe du point 2.1, page 3).

Ces anomalies génèrent ainsi une confusion en ce qui concerne les évènements de la procédure orale, rendant impossible pour la chambre de reconstituer les faits et les détails du déroulement de la procédure orale tenue devant la division d'opposition, et, par conséquent, de se prononcer objectivement sur une contradiction éventuelle entre la décision et le procès-verbal comme l'affirme la requérante entre aux paragraphes 2) et 3) du chapitre IV de son mémoire de recours.

Dès lors, le vice substantiel de procédure constitué par les délais excessifs de transmission des pièces officielles justifie l'annulation de la décision contestée et le remboursement de la taxe de recours en vertu de la règle 103(1)a) CBE.

5.2 L'examen du bien-fondé des allégations formulées par la requérante quant à la présence d'autres vices significatifs de procédure en devient donc caduque.

6. Renvoi devant la première instance

Bien que la procédure d'opposition fût entachée d'au moins une faute substantielle de procédure, la chambre a néanmoins pris la décision de ne pas renvoyer immédiatement l'affaire mais de déterminer au préalable l'état de la technique et de procéder elle-même à l'examen de la nouveauté de l'objet selon la requête principale.

De fait, la chambre est arrivée ci-avant à la conclusion que le motif de défaut de nouveauté retenu dans la décision contestée à l'encontre de la revendication 1 du brevet tel que délivré n'était pas justifié.

Dans ce cadre-là, la décision contestée serait ainsi à annuler quant au fond.

Dans le souci de permettre aux parties de faire instruire l'affaire le cas échéant devant deux instances, la chambre estime qu'il est préférable de renvoyer l'affaire devant la division d'opposition afin que celle-ci procède à la suite de l'examen, notamment de l'examen de l'activité inventive de l'objet de la revendication 1 telle que délivrée.

Les deux parties en présence n'ont pas exprimé de souhait contraire à cet endroit.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition afin qu'elle poursuive la procédure.

3. La taxe de recours est remboursée.

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