T 0136/87 () of 22.6.1989

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1989:T013687.19890622
Date de la décision : 22 Juin 1989
Numéro de l'affaire : T 0136/87
Numéro de la demande : 82400809.8
Classe de la CIB : C09D 3/727
Langue de la procédure : FR
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Titre de la demande : Métal enduit d'un film polymère et son procédé d'obtention
Nom du demandeur : Norsolor S.A.
Nom de l'opposant : BASF AG
Chambre : 3.3.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Etat de la technique le plus pertinent-Réétablissement
Activité inventive - solution évidente
Closest prior art - reassessment
inventive step - obvious solution
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0024/81
T 0032/81
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 82 400 809.8, déposée le 4 mai 1982, a donné lieu le 4 septembre 1985 à la délivrance du brevet européen n° 0 065 450 sur la base de dix revendications dont deux revendications indépendantes (revendications 1 et 9) qui s'énoncent comme suit :

1. Métal enduit d'une couche d'un film de polymère d'éthylène, d'épaisseur comprise entre 10 et 500 microns, caractérisé en ce que ledit film consiste en un terpolymère ayant un indice de fluidité compris entre 2 et 10 dg/mn et comprenant de 88 à 98,7 % en moles de motifs dérivés de l'éthylène, de 1 à 10 % en moles de motifs dérivés d'un (méth) acrylate d'alkyle et de 0,3 à 3 % en moles de motifs dérivés de l'anhydride maléïque.

9. Procédé d'obtention d'un métal enduit selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il consiste à enduire ledit film de terpolymère sur un support métallique à une température comprise entre 140°C et 300°C, la vitesse de défilement dudit support métallique étant comprise entre 40 et 400 mètres par minute.

II. Par lettre reçue le 12 avril 1986, la Requérante (opposante) a formé opposition au brevet européen et requis sa révocation pour défaut de brevetabilité aux termes des articles 52 à 57 de la CBE.

Parmi les documents opposés par la Requérante, seuls les documents suivants ont une importance pour la présente décision :

(5) FR-A-1 323 379 (8) DE-A-1 719 098 III. Par décision rendue le 9 mars 1987, la Division d'opposition a rejeté l'opposition sur la base de la reconnaissance d'une activité inventive vis-à-vis des documents opposés.

La Division d'opposition a notamment considéré que le problème qui se posait dans le brevet en cause consistait à améliorer la qualité des revêtements de filins polymères sur des substrates métalliques et qu'une comparaison avec les documents opposés - en particulier le document GB-A-1 394 883 - montrait que les terpolymères connus avaient des propriétés différentes qui les rendaient impropres au but visé par l'invention revendiquée. Vu les essais comparatifs indiqués dans la description, l'argumentation et les nouveaux documents produits par l'opposant ne sauraient être déterminants.

IV. Par lettre reçue le 18 avril 1987, la Requérante a introduit un recours contre cette décision et acquitté simultanément la taxe de recours prescrite.

Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 3 juin 1987.

L'Intimée (titulaire du brevet) s'est prononcée à ce sujet dans ses observations reçues le 5 novembre 1987.

V. Dans une notification établie conformément à l'Article 110(2) CBE, la Chambre a exposé en détail les motifs pour lesquels elle considérait que l'objet de la revendication 1 ne semblait pas impliquer une activité inventive eu égard aux documents (5) et (8).

VI. En réponse à cette notification, la Requérante a fait savoir qu'elle considérait pouvoir se passer de s'exprimer.

VII. L'Intimée, par contre, a soutenu, dans sa réponse, que l'objet de la revendication 1 impliquait une activité inventive en faisant valoir principalement les arguments suivants :

Bien que, dans le cas présent, on puisse effectivement considérer que le terpolymère décrit dans le document (8) comme enduit pour métal avait été remplacé par une autre matière polymère (voir page 1, point 1 de la revendication en instance), l'homme du métier n'aurait pas été naturellement incité à combiner les enseignements des documents (5) et (8) puisqu'il n'existe aucun recouvrement entre les domaines techniques du document (5), du document (8) et de la présente invention respectivement. En outre, les terpolymères décrits dans le document (5) sont essentiellement des adhésifs et l'homme du métier compétent n'aurait pas, pour cette raison, envisagé d'aller chercher dans ce document la matière polymère de remplacement, d'autant plus qu'il avait le choix entre, d'une part, un acide insaturé répondant à la définition générale du document (8) et, d'autre part, des molécules porteuses de différentes fonctions parmi lesquelles, toutefois, l'anhydride maléïque.

Par ailleurs, aucune objection n'a été faite, dans la notification, à l'encontre des autres revendications.

VIII. La Requérante demande l'annulation de la décision contestée ainsi que la révocation du brevet.

L'Intimée demande le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux Articles 106 à 108 ainsi qu'à la Règle 64 CBE ; il est donc recevable.

2. Le brevet européen en question concerne un métal enduit d'un film polymère et son procédé d'obtention. Les métaux enduits ainsi obtenus trouvent des applications variées et de grande diffusion. Les films d'aluminium enduits peuvent être utilisés, par exemple, dans l'industrie de l'emballage alimentaire pour maintenir les aliments à l'abri de l'humidité et conserver leur arôme. D'autre part, l'enduction de tuyaux d'acier, tels que tuyaux pour le transport de pétrole et de gaz, permet de protéger ces tuyaux contre l'oxidation et les chocs (voir col. 3, lignes 14 à 25 de la description).

3. Comme exprimé dans la notification de la Chambre et contrairement à l'avis exprimé implicitement par la première instance, la Chambre considère le document (8) comme l'état de la technique le plus proche. Ce document décrit des feuilles à structure stratifiée binaire comprenant un métal enduit d'un film polymère ayant une épaisseur comprise entre 0,02 et 1 mm et consistant en un terpolymère comprenant 60 à 90 % en poids d'éthylène, 0,5 à 20 % en poids d'acide carboxylique à insaturation éthylénique ayant de préférence de 3 à 5 atomes de carbone, ainsi que 0,5 à 20 % en poids d'ester d'acide carboxylique à insaturation éthylénique (voir notamment revendication 1 et 2).

Le film de terpolymère a des propriétés thermoplastiques et agit comme colle à fusion. Les terpolymères pouvant servir de films polymères sont connus de la chimie des polymères (voir page 1, premier alinéa ; page 3, dernier alinéa et page 4, premier alinéa). L'application du film polymère sur le support métallique est effectuée à chaud à une température de 80 à 250°C (voir page 4, premier alinéa). Le terpolymère utilisé dans le seul exemple de réalisation décrit dans la description contient l'acide acrylique comme acide carboxylique à insaturation éthylénique (voir également revendication 3).

Ces feuilles peuvent être utilisées comme feuilles de protection dans différentes industries (meuble, bâtiment etc...). Elles trouvent également une application large dans le secteur de l'emballage (voir page 4, deuxième alinéa).

4. Partant du document (8), le problème technique consistait à trouver pour le terpolymère décrit comme enduit pour métal, une matière de remplacement.

Pour résoudre ce problème, il est suggéré, conformément à la revendication 1 du brevet attaqué, de choisir un terpolymère comprenant de 88 à 98,7 % en moles de motifs dérivés de l'éthylène, de 1 à 10 % en moles de motifs dérivés d'un (méth)acrylate d'alkyle et de 0,3 à 3 % en moles de motifs dérivés de l'anhydride maléïque et ayant un indice de fluidité compris entre 2 et 10 dg/mn.

5. La Chambre ne dispose d'aucun document décrivant l'objet des revendications indépendantes 1 et 9. Par conséquent, le produit et le procédé revendiqués doivent être considérés comme nouveaux.

6. Il reste à examiner la question de savoir si la solution revendiquée implique une activité inventive, c'est-à-dire si l'homme du métier était incité ou non par l'état de la technique à modifier les plages de concentration des constituants du terpolymère connu et à remplacer l'acide carboxylique insaturé pour arriver à la solution revendiquée.

6.1. Le document (8) contient l'enseignement que le terpolymère servant d'enduit pour le métal doit obligatoirement comprendre un acide carboxylique à insaturation éthylénique et qu'en plus il doit agir comme une colle à fusion. Le fait reste cependant que seul l'acide acrylique est mentionné explicitement. Toutefois, ce document contient en outre l'observation que cet acide carboxylique n'est pas le seul acide à insaturation éthylénique susceptible de conduire à un terpolymère utilisable comme enduit pour métaux, mais que d'autres acides ayant de préférence de 3 à 5 atomes de carbone conviennent également et que les feuilles ainsi obtenues trouvent notamment une application large dans le secteur de l'emballage, qui est l'un des domaines d'application explicitement mentionnés dans le brevet européen. Cependant, au lieu de dresser une liste complète de tous les terpolymères utilisables à cette fin, il est simplement dit, dans ce document, qu'il s'agit de terpolymères connus de la chimie des polymères.

Pour la Chambre, un tel enseignement s'adresse avant tout au chimiste qui est, par ailleurs, sans aucun doute l'homme du métier appelé dans le cas présent à trouver une matière polymère de remplacement conformément au problème indiqué ci-dessus (voir décision T 32/81, JO OEB 1982, 225), d'autant plus que les métaux enduits revendiqués ne sont pas destinés à une spécialité déterminée du fait qu'ils trouvent des applications variées allant de l'emballage alimentaire aux tuyaux pour le transport de pétrole ou de gaz. Dans ces conditions, il n'y a aucune raison d'attribuer une importance particulière aux domaines d'application des produits revendiqués.

6.2. Or, l'homme du métier, en l'occurence le chimiste, ici spécialiste des matériaux polymères, n'aurait pas manqué de s'intéresser au document (5), cité dans la description, puisque les terpolymères de même type y sont décrits avec leurs méthodes de préparation et qu'en outre ces matières polymères sont présentées comme copolymères d'éthylène avec certains comonomères des types esters et acide convenant spécialement bien pour être utilisées comme adhésifs (par fusion à chaud) et comme revêtements. Il y est également dit qu'elles adhèrent bien à de nombreuses surfaces ou matières (p.ex. aluminium) (voir page 1, colonne 1, deuxième alinéa) et que ces terpolymères peuvent être notamment des copolymères de a) au moins 65 % en poids d'éthylène ; b) 5 à 35 % en poids d'un second monomère éthylénique pouvant être constitué par un ester de (méth)acrylate d'alcoyle (p.ex. acrylate d'éthyle) ; et c) 0,01 à 10 % en poids d'un troisième monomère éthylénique pouvant être entre autres l'acide acrylique, l'acide maléïque ou l'anhydride maléïque (voir résumé 1° et page 1, colonne 1, dernier alinéa à colonne 2, premier alinéa).

Compte tenu de ces données, la Chambre estime qu'il ne peut échapper à l'homme du métier que ces terpolymères correspondent pour le moins en partie aux terpolymères considérés comme appropriés dans le document (8) et qu'en outre un acide carboxylique à insaturation éthylénique tel que l'acide maléïque, ayant 4 atomes de carbone, peut tout aussi bien être utilisé sous forme d'anhydride.

6.3. Ainsi, en suivant simplement les indications fournies dans le document (8), l'homme du métier est tout naturellement conduit à considérer comme terpolymères appropriés pour l'enduction du métal ceux qui contiennent les acides ou les anhydrides des acides à insaturation éthylénique mentionnés dans le document (5), notamment l'acide maléïque et son anhydride.

Il est vrai que dans le document (5), l'anhydride maléïque est cité à côté d'autres monomères éthyléniques en partie porteurs de fonctions différentes de la fonction acide. Toutefois, lors de l'examen de l'activité inventive, il convient d'évaluer l'état de la technique du point de vue de l'homme du métier, ce qui implique qu'il faut considérer toutes les formes de réalisation publiées auparavant qui pouvaient suggérer à l'homme du métier une solution au problème posé, et cela même si elles n'étaient pas particulièrement mises en relief (voir décision T 24/81, "Valorisation des métaux", J.O. OEB 1983, 133).

6.4. En outre, il est explicitement mentionné dans le document (5) qu'une teneur en monomère du groupe (c) supérieure à environ 10 % n'est généralement pas requise pour obtenir un copolymère ayant les propriétés désirées d'adhérence et de durcissement (voir page 2, colonne 1, deuxième alinéa).

On constate, par ailleurs, qu'en prenant comme masse molaire des monomères possibles (éthylène, acrylate d'éthyle et anhydride maléïque) les données fournies par l'Intimée (voir lettre reçue le 14.1.84, page 2, lignes 27 et 28), le document (5) décrit en partie des films de terpolymère ayant la même composition (en mol %) et la même épaisseur que ceux du brevet attaqué. Dans ces conditions, il n'y a aucune raison de supposer que l'indice de fluidité de ces terpolymères soit différent de celui des terpolymères utilisés dans le brevet européen, d'autant plus que les valeurs d'indice de fusion données dans le document (5) se situent entre 0,5 et 200 et que l'on sait que plus cet indice est bas, plus le poids moléculaire est élevé (voir page 2, colonne 2, dernier alinéa à page 3, colonne 1, premier alinéa). La conclusion qui s'impose est que les terpolymères à poids moléculaire relativement élevé (indice de fluidité entre 2 et 10) utilisés dans le brevet attaqué correspondent généralement à ceux décrits dans le document (5) pour lesquels l'indice de fusion est relativement bas. Ceci est d'ailleurs explicitement confirmé dans le brevet européen (voir en particulier colonne 1, lignes 60 à 63 de la description).

En conclusion, les plages de concentration revendiquées recouvrent généralement les plages de concentration connues des documents (8) et (5) et aucune observation objective, ni aucun élément de preuve ne permet de percevoir dans les différences éventuelles avec l'état de la technique considéré un quelconque aspect inventif. L'intimée n'a d'ailleurs fait valoir aucun avantage à ce sujet.

6.5. Compte tenu de ce qui précède, l'objet de la revendication 1 n'implique pas d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

Les conditions de la CBE n'étant pas toutes satisfaites pour la revendication principale, c'est l'ensemble des revendications qui doit être rejeté. Dans ces conditions, la remarque de l'Intimée que la Chambre n'a soulevé aucune objection à l'encontre des autres revendications est sans objet. En l'absence de requête visant le maintien du brevet européen sous forme amendée, la non brevetabilité de la revendication 1 doit conduire à la révocation du brevet.

De son propre mouvement la Chambre a évalué les possibilités de limitation de l'objet revendiqué prenant en considération les autres revendications. Or, ni l'inclusion d'un quatrième monomère, présenté facultativement et pour lequel aucun exemple ne supporterait le caractère inventif, ni le procédé d'obtention des produits revendiqués ne paraissaient aptes à permettre une telle possibilité.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. Le brevet européen n° 0 065 450 est révoqué.

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