T 0057/84 (Tolylfluanide) of 12.8.1986

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1986:T005784.19860812
Date de la décision : 12 Août 1986
Numéro de l'affaire : T 0057/84
Numéro de la demande : 79103777.3
Classe de la CIB : B27K 3/40
Langue de la procédure : DE
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : BAYER
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : S'il est essentiel, s'agissant d'un produit, qu'une propriété (en l'occurrence une activité fongicide élevée) se manifeste dans différentes conditions, il importe pour la supériorité de l'invention que cette propriété soit améliorée dans toutes les conditions revêtant une importance cruciale dans la pratique, en particulier dans les différentes conditions d'essai mises au point à cet effet (en l'espèce, essais d'expositions à l'eau et au vent). Si des essais comparatifs sont présentés pour prouver une telle amélioration, les résultats des essais doivent être considérés conjointement. Il importe alors d'établir que l'invention est dans l'ensemble supérieure, dans les différents essais, à la substance de référence (en l'espèce par une concentration sensiblement plus faible en produit polluant l'environnement), même si la substance de référence se rélève meilleure dans un essai particulier.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive
Base de comparaison pour administrer la preuve d'une amélioration
Comparaison autorisée de valeurs issues de différents tests
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0038/88
T 0470/90
T 0678/02
T 1503/14
T 1914/15

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 79 103 777.3, déposée le 3 octobre 1979 avec revendication d'une priorité allemande du 13 octobre 1978, a donné lieu à la délivrance le 29 avril 1981 du brevet européen n° 10 635, sur la base de trois revendications, dont la première s'énonce comme suit :

"Utilisation de N,N-diméthyl-N'-p-tolyl-N'-dichlorofluoro- méthylthiosulfamide dans des agents d'imprégnation du bois".

(La substance à utiliser selon le brevet est ci-après dénommée "tolylfluanide").

II. Le 14 août 1981, l'intimée a formé opposition contre le brevet délivré, en s'appuyant sur le document suivant :

(1) W. Perkow, "Substances actives des produits de protection des plantes et des produits parasiticides", données acquises au mois de mai 1974, mot-clé "Tolylfluanide",

et elle a demandé la révocation du brevet dans sa totalité pour absence d'activité inventive. Elle a complété ultérieurement ses allégations en faisant référence aux documents suivants :

(2) R. Wegler, "Chimie des produits de protection des plantes et des produits parasiticides", vol. 4, 194 (1977) ;

(3) EP-A-22 900 ;

(4) Manuel des pesticides, 6e édition, 278 (1979) ; et

(5) EP-A-38 109.

La société titulaire du brevet a, pour sa part, fait notamment référence à d'autres passages de l'ouvrage cité sous (4), à savoir

(4a) Manuel des pesticides, 3e édition, 172 et 477, (1972).

III. Par décision du 15 décembre 1983, signifiée le 16 janvier 1984, la Division d'opposition a révoqué le brevet pour absence d'activité inventive. Selon cette décision, le tolylfluanide ne se distingue du dichlofluanide, utilisable comme on sait dans le domaine de la protection du bois, que par le remplacement du groupe phényle par le groupe p-tolyle. Dans la mesure où l'activité inventive invoquée se fonde sur la meilleure solubilité du tolylfluanide dans les solvants organiques, cet avantage est déjà connu d'après (1). La meilleure efficacité du tolylfluanide contre les champignons nuisibles pour le bois n'est pas surprenante. En effet, il apparaît d'après (2) que ce composé est aussi plus efficace que le dichlofluanide contre l'oïdium. La solubilité bien connue du tolylfluanide dans l'eau n'est en fin de compte, avec une valeur de seulement 4 pour mille, pas importante au point de justifier un préjugé contre son utilisation, et ce d'autant moins qu'un tel préjugé n'est pas étayé par des citations tirées de la littérature brevets.

IV. Le 16 février 1984, la requérante (titulaire du brevet) a introduit un recours contre cette décision et acquitté simultanément la taxe prescrite. Le mémoire exposant les motifs du recours a été déposé le 14 mai 1984. La requérante s'élève en particulier contre le fait que l'on ait pu conclure, à partir de la meilleure activité contre l'oïdium, à une activité du même ordre contre les champignons nuisibles du bois - les résultats d'un essai d'activité fongicide ont été présentés à l'appui du mémoire exposant les motifs du recours - et contre la prétendue insignifiance de la meilleure solubilité du tolylfluanide dans l'eau. Sur l'invitation de la Chambre, elle a soumis de nouveaux essais comparatifs - cette fois selon des méthodes d'essai reconnues au plan international - à partir desquels elle fait valoir que le tolylfluanide est, par comparaison avec le dichlofluanide, mieux approprié pour la lutte contre les champignons nuisibles pour le bois. A l'appui de ses dires, elle a également fait référence à

(6) W. Metzner et coll., "Le bois comme matière première et comme matériau" 35, 233-237 (1977),

et sous la date du 7 août 1986, à

(7) Angew. Chemie 76e année/fascicule 19, 807-812 (1964).

V. L'intimée (opposante) soutient au contraire que l'activité améliorée d'un fongicide vis-à-vis d'un champignon déterminé ne permet pas de prévoir une efficacité également améliorée vis-à-vis d'autres champignons, mais qu'elle incite à effectuer des essais dans ce sens. Elle conteste par ailleurs que les essais comparatifs nouvellement présentés par la requérante fassent ressortir une meilleure activité fongicide du tolylfluanide, par comparaison avec le dichlofluanide ; elle constate au contraire qu'il n'y a "aucune tendance homogène". Enfin, l'intimée conteste également l'existence d'un préjugé fondé sur la connaissance d'une "plus grande" solubilité du tolylfluanide dans l'eau. Elle invoque à cet égard le fait qu'en raison de l'adsorption attendue de la substance active sur le bois, il n'est pas possible de transposer au système à trois composants : substance active/eau/bois, des calculs de solubilité effectués sur la base du système à deux composants : substance active/eau.

VI. Au cours de la procédure orale du 12 août 1986, les parties ont confirmé pour l'essentiel leurs points de vue, à cela près que la requérante n'insiste plus sur l'existence d'un préjugé technique fondé sur la meilleure solubilité du tolylfluanide dans l'eau par comparaison avec le dichlofluanide. En revanche, elle souligne tout particulièrement le fait que, pour les produits de protection du bois, une action protectrice suffisante tant vis-à-vis de l'eau que vis-à-vis du vent est essentielle. Lorsque l'on compare les qualités de tels produits, il faudrait par conséquent s'en tenir dans tous les cas à la quantité minimale de produit avec laquelle on obtient une action suffisante dans les deux tests.

L'intimée conteste la justesse de ce critère d'évaluation. Selon elle, on ne pourrait comparer que ce qui est comparable, c'est-à-dire les valeurs limites des deux substances dans le cas d'une exposition à l'eau, d'une part, et, d'autre part, leurs valeurs limites dans le cas d'une exposition au vent. En outre, il conviendrait de ne pas tenir compte du document (7) présenté tardivement, mais de l'utiliser subsidiairement contre la requérante, car il fait ressortir l'utilisation de tolylfluanide pour la protection de matériaux - et donc pour la protection du bois.

La requérante conclut à l'annulation de la décision attaquée et au rejet de l'opposition. L'intimée demande le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est donc recevable.

2. Alors que le document (6) était versé aux débats dès le 18 novembre 1985 - il est d'ailleurs déjà mentionné dans l'introduction de la description contenue dans le brevet attaqué, à la page 2 ligne 11, la requérante a signalé pour la première fois le document (7) dans une requête reçue à l'Office cinq jours avant la procédure orale et qui n'a donc pas été portée à la connaissance de la Chambre avant celle-ci. Le document (7) constitue un moyen de preuve qui n'a pas été produit en temps utile au sens de l'article 114(2) CBE. La Chambre ne tient pas ce document pour pertinent et il n'en sera pas tenu compte par la suite.

Comme l'a constaté à juste titre la première instance, les documents (3) et (5) n'ont pas été publiés et n'ont donc pas non plus à être pris en compte.

Il convient par conséquent de ne considérer que les documents (1), (2), (4) ou (4a) et (6) dans le cadre de la présente décision.

3. L'invention se situe dans le domaine des agents de protection du bois.

4. La Chambre considère que le document (6) représente l'état le plus proche de la technique. Il enseigne l'utilisation de dichlofluanide comme constituant fongicide dans les produits d'imprégnation du bois (voir page 234, section 2, conjointement avec les tableaux 2 à 4 de la page 235).

5. A partir de là, le problème de l'invention consiste à rechercher un composant actif qui soit dans l'ensemble encore mieux approprié pour jouer ce rôle. Il s'agit en particulier de réduire la pollution qui résulte du rejet inévitable de certaines quantités de constituants actifs dans l'environnement, par une réduction de la quantité de constituant actif nécessaire pour assurer une protection suffisante du bois.

6. Le brevet attaqué propose comme solution à ce problème l'utilisation de tolylfluanide dans les produits pour l'imprégnation du bois.

7. Il convient tout d'abord d'examiner si la solution proposée résout effectivement le problème existant.

7.1. La requérante a présenté le 18 novembre 1985 les résultats d'essais comparatifs dans lesquels ont été déterminées, à chaque fois pour le dichlofluanide et pour le tolylfluanide la valeur limite (en kg/m3) pour laquelle on n'obtient encore aucune protection ("valeur limite inférieure") et celle à partir de laquelle on obtient une protection ("valeur limite supérieure") contre l'attaque par les champignons sur trois combinaisons bois-champignon normalisées (A : bois d'aubier de pin/Coniophora puteana ; B : bois de hêtre/Coriolus versicolor ; C : bois d'aubier de pin/Gloeophyllum trabeum), dans trois conditions normalisées (a : sans vieillissement ; b : exposition à l'eau ; c : exposition au vent), et selon des méthodes d'essai reconnues au plan international (cf. tableau figurant en "Annexe 1" à la requête du 14 novembre 1985).

7.2. Les parties s'étant accordées pour reconnaître que dans la pratique on rencontre la plupart du temps des cas d'exposition à l'eau et au vent, la Chambre examinera en priorité les valeurs en cause dans les conditions b et c.

7.2.1. Pour la combinaison bois-champignon A, aucune différence n'est enregistrée entre les valeurs limites déterminées pour le dichlofluanide et pour le tolylfluanide. Par contre, de très nettes différences apparaissent en ce qui concerne les valeurs limites pour les combinaisons B et C. Reste à savoir dans quel sens il convient de les interpréter :

7.2.2. Si, comme l'estime l'intimée, il ne faut comparer que des valeurs émanant chaque fois du même essai, une même importance étant alors attribuée aux valeurs supérieures et inférieures, il en résulte à chaque fois pour la combinaison B dans les conditions b et c un "rétrécissement" du domaine, en ce sens qu'à une valeur limite supérieure améliorée pour le tolylfluanide s'opposerait une valeur limite inférieure plus mauvaise, donc en moyenne un résultat à peu près également bon ; pour la combinaison C, on constaterait une nette amélioration dans la condition b selon l'invention et une nette détérioration dans la condition c. L'intimée conclut donc à "l'absence de tendance homogène", avec pour conséquence que le problème existant n'apparaîtrait pas résolu.

7.2.3. Cette manière de voir ne tient tout d'abord pas compte du fait que la protection du bois représente la protection d'un bien économique durable, et qu'elle vise à empêcher absolument toute attaque des champignons nuisibles pour le bois, si bien que la Chambre est d'avis que les valeurs limites supérieures ont une importance nettement plus grande que les valeurs limites inférieures. Les premières sont cependant meilleures pour le tolylfluanide que pour le dichlofluanide, non seulement avec la combinaison C dans la condition b, mais aussi avec la combinaison B dans les conditions b et c ; seules les valeurs limites supérieures pour la combinaison C dans la condition c se comportent en sens inverse. Il est donc possible de faire état d'une "tendance homogène" prédominante en ce qui concerne le tolylfluanide, même si l'on ne compare que des "choses comparables" au sens où l'entend l'intimée.

7.2.4. La Chambre estime que les considérations ci-après ont encore bien plus de poids : un agent d'imprégnation du bois à l'efficacité éprouvée et conforme à la pratique doit pouvoir résister à une exposition respectivement à l'eau et au vent, telle que fixée pom les essais normalisés reconnus au plan international et mesurée séparément, en conservant une action protectrice suffisante, c'est-à-dire avec le moins possible de pertes. La concentration minimale initiale en agent fongicide qu'il convient d'utiliser apparaît déterminante à cet égard, non seulement pour des raisons économiques, mais encore et surtout pour des raisons écologiques ; en effet, l'influence des intempéries se traduit par la libération dans l'eau et dans le vent de certaines quantités de fongicide, lequel n'est habituellement pas dépourvu de toxicité, et en conséquence par la pollution de l'environnement. A partir de cette double exigence imposée à l'agent pour la protection du bois, l'innocuité vis-à-vis de l'environnement se juge d'après la concentration en fongicide nécessaire et suffisante pour protéger le bois malgré l'exposition à l'eau et simultanément au vent. Si les valeurs mesurées de l'essai particulier se révèlent différentes, la quantité qui doit être utilisée en pratique correspond à la valeur supérieure, c'est-à-dire à la plus mauvaise, parce que celle-ci dicte la quantité minimale satisfaisant aux deux conditions (principe du maillon le plus faible d'une chaîne).

Ces considérations permettent de déterminer si le problème technique précédemment défini a été résolu. Elles conduisent essentiellement à la conclusion suivante :

S'il est important pour un produit qu'une propriété soit constante dans des conditions différentes, la supériorité de l'invention tient à ce que cette propriété est améliorée dans toutes les conditions revêtant une grande importance dans la pratique, notamment dans les différentes conditions ménagées pour les essais. Si des essais comparatifs sont présentés pour mettre en évidence cette supériorité, les résultats de ces essais doivent être considérés dans leur ensemble. Le point déterminant à cet égard est celui de savoir si l'invention est globalement supérieure à la substance de référence, compte tenu des différents essais, même si cette dernière substance se révèle meilleure dans tel essai particulier.

Si l'on applique le principe ci-dessus exposé à la présente espèce, il apparaît qu'il faut comparer pour la combinaison B la valeur limite supérieure la plus mauvaise pour le dichlofluanide (6,6 dans la condition c) avec la valeur limite supérieure la plus mauvaise pour le tolylfluanide (6,0 dans la condition b) et pour la combinaison C à nouveau la valeur limite supérieure la plus mauvaise pour le dichlofluanide (5,1 dans la condition b) avec la valeur limite supérieure la plus mauvaise pour le tolylfluanide (2,5 dans la condition c), avec pour résultat une amélioration, c'est-à-dire une diminution de la quantité de produit actif nécessaire, d'environ 10 et 50 % respectivement. Si l'on tient également compte de la combinaison A, dans laquelle on ne peut déceler aucune amélioration, on obtient toujours en moyenne une amélioration de 20 %, donc importante ; en effet, selon l'explication non contestée fournie par la requérante dans la procédure orale, une amélioration de 10 à 15 % doit déjà être considérée comme significative.

7.2.5. Une comparaison approximative des valeurs susdites avec celles qui avaient été obtenues selon la méthode de Sutter (voir les essais comparatifs présentés le 1er juillet 1982) n'apporte aucune contradiction et conduit à des résultats qualitativement semblables. Dans les conditions b et c, le problème existant est donc résolu de façon convaincante.

7.3. Au demeurant, la Chambre est d'avis que la comparaison des deux agents de protection du bois dans la condition a, c'est-à-dire sans simulation d'influences des intempéries, n'est pas non plus dénuée de valeur probante, car elle reflète les conditions de protection du bois à l'intérieur. Ces valeurs (voir l'essai comparatif du 18 novembre 1985) dénotent elles aussi une amélioration d'environ 55 % pour la combinaison A, une amélioration de 10 % pour B, des valeurs identiques pour C, donc là encore en moyenne une amélioration d'environ 20 %. Le problème technique existant est donc résolu sur toute la ligne.

8. La solution revendiquée ne peut se déduire d'aucun des documents antérieurs cités ; elle est donc incontestablement nouvelle.

9. Quant à l'activité inventive, il convient de rechercher si les autres antériorités auraient rendu la solution revendiquée évidente pour l'homme du métier qui, partant du document (6), se serait posé le problème défini plus haut.

9.1. Le document (1) décrit sous les mots-clés correspondants les propriétés du dichlofluanide et du tolylfluanide en relation avec la lutte contre les maladies causées à certaines plantes vivantes par des champignons. Il n'est pas possible en tout cas de déduire du seul document (1) une indication sur l'utilisation des substances mentionnées dans des agents d'imprégnation du bois (par conséquent pour la protection de matériaux inertes). Il peut très bien se faire qu'un homme du métier qui recherche simplement un autre produit actif pour agent d'imprégnation du bois, et qui a pris connaissance du document (6) sur l'aptitude du dichlofluanide en tant que composant pour la protection du bois, soit incité par la lecture du document (1) à des essais avec le tolylfluanide, de structure très voisine ; toutefois, vu le problème qui consiste ici à fournir un composant amélioré pour agent de protection du bois, de tels essais ne peuvent pas sembler très prometteurs, eu égard au principe fondé sur l'expérience, selon lequel des composés de structures proches ne procurent normalement que des activités comparables.

9.2. D'après le document (2) le tolylfluanide présente, par rapport au dichlofluanide, une activité renforcée contre l'oïdium (voir page 194, deuxième et troisième lignes après la deuxième formule). Cette indication est donc limitée à une utilisation spécifique dans le domaine de la protection des plantes.

L'intimée a elle-même admis (mémoire du 7 décembre 1984, page 1, alinéa premier) qu'on ne peut faire à partir de là aucune prévision sur une éventuelle amélioration de l'activité contre d'autres types de champignons et qui plus est dans un autre domaine, celui de la protection du bois ; elle pense toutefois que l'indication contenue dans le document (2) inciterait l'homme du métier à faire des essais à ce sujet. La Chambre ne partage pas ce point de vue.

9.2.1. On ne saurait affirmer que de tels essais sont évidents sans fournir une justification détaillée qui devrait définir l'homme du métier compétent en l'occurrence et préciser en vertu de quel raisonnement les essais paraissent évidents à ce dernier.

9.2.2. Lorsque l'intimée estime que, sur la base de l'indication contenu dans le document (2) - activité supérieure contre l'oïdium -, il est évident pour "l'homme du métier" de rechercher si le tolylfluanide est beaucoup plus efficace que le dichlofluanide même contre des champignons nuisibles pour le bois, elle présume alors tacitement que l'homme du métier qui s'occupe de la lutte contre les champignons nuisibles pour le bois est le même que celui qui se consacre à la lutte contre les maladies causées à des plantes utiles par des champignons. Même en admettant cette hypothèse, on ne pourrait pas encore conclure, à partir de la divulgation isolée de l'activité plus forte d'un fongicide déterminé contre une seule espèce de champignon (oïdium véritable), qu'il est évident de rechercher si le même fongicide est plus actif également vis-à-vis d'une ou plusieurs autres espèces (quelconques) de champignons. Il conviendrait au contraire d'examiner séparément une question de fait, à savoir quelle divulgation serait nécessaire (par exemple d'une part, activité plus forte vis-à-vis de combien d'espèces de champignons, apparentées de quelle façon, et, d'autre part, activité plus faible vis-à-vis de combien d'espèces de champignons, apparentées de quelle façon) avant de pouvoir considérer comme évidents des essais correspondants.

9.2.3. Toutefois, il n'est pas utile de s'étendre davantage là-dessus. En effet, la thèse de l'intimée néglige le fait que l'homme du métier concerné lorsqu'il s'agit d'apprécier le brevet attaqué n'est pas celui qui est compétent pour les problèmes de protection des plantes. Lors de la détermination de l'activité inventive, c'est l'homme du métier normalement chargé de la résolution du problème en cause qu'il convient de prendre en considération, c'est-à-dire en l'espèce l'homme du métier familiarisé avec le domaine de la protection du bois. Ce spécialiste évalue le résultat énoncé dans le document (2) en ce qui concerne la supériorité du tolylfluanide sur le dichlofluanide dans la lutte contre l'oïdium avec des connaissances limitées qui ne lui permettent pas d'établir un lien entre ce fait établi et la recherche, en vue de résoudre le problème posé, de composants améliorés pour agents d'imprégnation des bois, car le domaine de la protection des plantes dont traite le document (2) est beaucoup trop éloigné de son propre domaine de connaissances, qui a trait à du matériau inerte.

9.2.4. De plus, le simple fait que les organismes nuisibles mentionnés dans le document (2), tout comme ceux contre lesquels est dirigé l'objet du brevet rentrent dans la classe des champignons (à laquelle appartiennent d'ailleurs également des champignons aussi différents que les espèces de Penicillium produisant la pénicilline et l'amanite vénéneuse) n'incite pas à expérimenter une transposition - incontestablement imprévisible - de l'enseignement selon le document (2) dans le domaine de la protection du bois. Il n'y a pour ce faire - en tout cas du point de vue du spécialiste de la protection du bois - aucune relation technique entre les véritables champignons de l'oïdium et les trois champignons nuisibles pour le bois considérés comme représentatifs suivant les normes internationales. Dans ces conditions, l'homme du métier compétent en l'espèce n'aurait pas eu l'idée de procéder, sur la base du document (2), aux essais considérés comme évidents par l'intimée.

9.3. Le document (4) traite d'une substance active ayant une structure totalement différente de celle du tolylfluanide et n'est donc aucunement pertinent. De plus, ce document n'a été publié qu'en 1979, c'est-à-dire après la date de priorité valablement revendiquée.

9.4. Le document (4a) avait de l'importance dans la procédure d'opposition dans la mesure où la requérante s'appuyait sur les indications concernant la solubilité dans l'eau du dichlofluanide, d'une part, et du tolylfluanide, d'autre part, pour établir qu'il avait fallu vaincre un préjugé contre la solution selon le brevet. Etant donné qu'elle a abandonné ce point de vue et que l'existence d'un tel préjugé n'est plus nécessaire en vue de la mise à disposition d'un constituant actif amélioré utilisable dans des agents de protection du bois, il n'y a pas lieu de prendre en compte ce document.

9.5. Par conséquent, les autres documents cités ne pouvaient pas non plus rendre évident l'objet de la revendication 1, ni en eux-mêmes, ni en combinaison entre eux, ni en combinaison avec le document (6). Cet objet implique donc une activité inventive.

10. La brevetabilité de la revendication 1 s'étend aux revendications 2 et 3.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'opposition est rejetée.

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