T 1244/08 (Composition de teinture/L'OREAL) of 7.7.2011

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2011:T124408.20110707
Date de la décision : 07 Juillet 2011
Numéro de l'affaire : T 1244/08
Numéro de la demande : 94402525.3
Classe de la CIB : A61K 7/13
Langue de la procédure : FR
Distribution : B
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Titre de la demande : Composition de teinture d'oxydation des fibres kératiniques comprenant un dérivé de paraphénylènediamine et un dérivé de métaphénylènediamine, et procédé de teinture utilisant une telle composition
Nom du demandeur : L'Oréal
Nom de l'opposant : Henkel AG & Co. KGaA
Wella GmbH
Bristol-Myers Squibb Company
Chambre : 3.3.10
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 113(2)
Mot-clé : Retrait du recours (oui)
Rétractation (non)
Exergue :

Une déclaration d'un requérant, propriétaire d'un brevet révoqué par une division d'opposition, de ne pas accepter le texte du brevet tel que délivré et de ne pas proposer un texte modifié est assimilable à un retrait du recours mettant immédiatement fin à la procédure de recours, la décision de révocation de la division d'opposition devenant définitive. Dès lors, une requête tendant à la rétractation de la déclaration du requérant et visant la poursuite de la procédure de recours est irrecevable.

Décisions citées :
J 0011/80
T 0073/84
T 0018/92
T 0481/96
T 1003/01
T 0053/03
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 2054/08
T 1868/11
T 0203/12
T 0789/13
T 1258/16
T 1513/16
T 2470/16
T 1161/17
T 0695/18
T 1226/18
T 2684/18
T 1310/19
T 0436/20
T 0433/21
T 1306/22

Exposé des faits et conclusions

I. Le requérant (propriétaire du brevet) a introduit un recours le 27 juin 2008 contre la décision de révocation du brevet européen nº 665 005. Dans son mémoire de recours du 4 septembre 2008, le requérant a demandé l'annulation de la décision de la division d'opposition et le maintien du brevet selon la requête principale, ou selon l'une des requêtes auxiliaires 1 à 3, jointes au mémoire.

II. Après avoir été cité à comparaitre à une procédure orale devant la Chambre fixée au 7 juillet 2011, le requérant a indiqué dans son courrier du 5 avril 2011, qu'ayant décidé d'abandonner le brevet litigieux il n'acceptait pas le brevet tel que délivré, et ne proposait pas de texte modifié et qu'en conséquence, la procédure orale du 7 juillet 2011 n'avait plus lieu d'être.

III. Le 11 avril 2011, le requérant a déclaré que contrairement à sa précédente déclaration, il n'avait pas décidé d'abandonner le brevet en référence et a demandé l'annulation de la décision de la division d'opposition et le maintien du brevet sur la base d'une de ses requêtes déposées avec le mémoire de recours.

IV. Lors de la procédure orale du 7 juillet 2011 le requérant a retiré sa requête de maintien du brevet selon la requête principale déposée avec le mémoire de recours et a demandé que la rétractation de sa déclaration du 5 avril 2011 soit admise.

V. Selon le requérant, la formulation utilisée dans la lettre du 5 avril n'était pas celle d'une déclaration de retrait du recours et n'avait donc pas d'effet juridique immédiat.

D'après les principes fondamentaux du droit processuel en vigueur dans les états contractants, principes que la Chambre doit prendre en considération dans le cas d'espèce conformément à l'Article 125 de la CBE, il ne devait y avoir aucune réserve ni aucune équivoque dans une renonciation volontaire à un droit (Décision J 11/80, JO OEB 1981, 141). Par conséquent, un retrait de recours devait être expressément formulé comme tel. Or dans la déclaration du 5 avril 2011 rien n'indiquait qu'il s'agissait d'un retrait de recours. Cette déclaration comprenait quatre parties, à savoir (1) l'intention déclarée de la société L'OREAL d'abandonner le brevet en référence, (2) de ne pas accepter le brevet tel que délivré, (3) de ne pas proposer de texte modifié et (4) de renoncer à la procédure orale, aucune de ces quatre parties n'étant assimilable à une déclaration de retrait du recours. En effet, l'OEB n'était pas compétent pour se prononcer sur un abandon du brevet. En outre, de ne pas accepter le brevet tel que délivré indiquait simplement que le maintien du brevet tel délivré n'était plus souhaité. De ne pas proposer de texte modifié à un moment donné de la procédure n'excluait pas la possibilité d'en proposer un ultérieurement. Enfin, une renonciation à une procédure orale n'était qu'un acte de procédure.

Par ailleurs, la déclaration de ne pas accepter le brevet tel que délivré et de ne pas proposer de texte modifié, impliquait que la Chambre de Recours rende une décision de révocation du brevet. Tant que cette décision de révocation du brevet n'était pas prononcée, il était parfaitement possible pour le requérant de revenir sur cette déclaration. La jurisprudence se fondant sur l'effet immédiat du retrait d'un recours n'était pas applicable puisque la déclaration du 5 avril 2011 n'était pas un retrait de recours. La décision T 73/84 (JO OEB 1985, 241) soulignait que la sécurité juridique n'était préservée que par une décision de révocation du brevet et, dans ce but, insistait sur la nécessité de clore rapidement la procédure par une décision. Dans la mesure où la sécurité juridique ne pouvait être préservée qu'après une décision de révocation du brevet, cela impliquait que le propriétaire du brevet avait la possibilité de se rétracter tant que la Chambre n'avait rendu sa décision. Le requérant était donc bien en droit de revenir sur sa déclaration du 5 avril 2011 et la Chambre devait par conséquent poursuivre la procédure de recours.

VI. Selon les intimés (opposants 1, 2 et 3), le courrier du 5 avril 2011 du requérant ne pouvait que signifier un retrait du recours mettant immédiatement fin à la procédure de recours. Par conséquent, la tentative de rétractation du requérant par la lettre du 11 avril 2011 devait rester vaine.

VII. Le requérant a demandé que la rétractation de sa déclaration du 5 avril 2011 soit admise et que la décision contestée soit annulée et que le brevet soit maintenu sur la base de l'une des requêtes auxiliaires 1 à 3 déposées avec le mémoire de recours daté du 4 septembre 2008.

Les intimés ont demandé à la Chambre de recours de prononcer la fin de la procédure de recours, auxiliairement le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Par sa lettre adressée à l´OEB le 5 avril 2011 le requérant a déclaré:

"la société L'OREAL ayant décidé d'abandonner le brevet en référence, elle n'accepte pas le brevet tel que délivré et ne propose pas de texte modifié. En conséquence, la procédure orale du 7 juillet 2011 n'a plus lieu d'être".

Avec sa lettre du 11 avril 2011, le requérant a cependant fait une requête tendant à la rétractation de cette déclaration. Les intimés sont d'avis que cette déclaration du 5 avril est assimilable à une déclaration de retrait du recours, donc irrévocable, alors que le requérant soutient que ce n'était qu'une lettre d'intention sans effet juridique immédiat.

3. Il est admis par toutes les Parties qu'une déclaration de retrait du recours est irrévocable et prend effet immédiatement. La question à trancher est donc de déterminer si la déclaration du 5 avril 2011 est une déclaration assimilable à une déclaration de retrait du recours mettant immédiatement fin à la procédure de recours.

4. Il résulte clairement et sans aucun équivoque du texte de la déclaration du 5 avril 2011 que le requérant renonçait sans aucune restriction ni aucune réserve à son brevet déjà révoqué par la division d'opposition (Article 113(2) CBE). Aucun doute ne pouvait exister sur l'intention du requérant exprimée dans sa déclaration, à savoir que son brevet demeurât définitivement révoqué et qu'il ne manifestait par conséquent plus d'intérêt dans la procédure de recours.

Selon la jurisprudence constante des Chambres de recours (T 18/92, T 481/96, T 1003/01, T 53/03, aucune publiée dans JO OEB), une déclaration d'un requérant, titulaire d'un brevet révoqué par une division d'opposition, indiquant clairement et sans ambiguïté qu'il n'a plus d'intérêt dans la poursuite de la procédure de recours est assimilable à une déclaration de retrait du recours.

En conséquence, la Chambre arrive à la conclusion que la déclaration du 5 avril 2011 est assimilable à un retrait du recours mettant immédiatement fin à la procédure de recours, la décision de révocation de la division d'opposition devenant définitive. Dès lors, une requête postérieure tendant à la rétractation de cette déclaration et visant la poursuite de la procédure de recours est irrecevable.

5. Le requérant a fait valoir que le retrait du recours devait être expressément formulé comme tel. Or rien n'indiquait dans les différentes parties de la déclaration du 5 avril qu'il s'agissait d'un retrait du recours.

Cependant, la Chambre ne saurait faire sienne d'une interprétation basée sur un découpage de la déclaration. Une déclaration n'a de sens que si elle est prise dans son intégralité. Or la déclaration montre clairement et sans ambiguïté que le requérant n'avait plus d'intérêt dans la poursuite de la procédure de recours. Une telle déclaration ne laissant subsister aucun doute sur l'intention du requérant doit donc être considérée comme équivalente à une déclaration de retrait du recours, quels que soient les termes utilisés.

Cet argument du requérant doit donc être rejeté.

6. Selon le requérant, d'après la décision T 73/84 (loc. cit.) une déclaration de ne pas proposer de texte modifié obligeait la Chambre de recours à rendre une décision. Tant que cette décision n'était pas prise, il était parfaitement possible de se rétracter.

Cependant, les circonstances de la présente espèce diffèrent fondamentalement de celles du cas sous-jacent à la décision T 73/84 cité par le requérant. Dans le cas d'espèce, le brevet a déjà été révoqué par la division d'opposition, alors que dans le cas T 73/84 la division d'opposition avait rejeté l'opposition et donc maintenu le brevet tel que délivré. Dans une situation où le brevet est maintenu par la division d'opposition, une demande par le titulaire du brevet visant à faire révoquer son brevet ne peut pas être assimilée à un retrait du recours puisque cela aurait comme conséquence le maintien du brevet, c'est-à-dire l'effet inverse de celui recherché par le requérant. La décision de la division d'opposition doit être annulée par une décision de révocation du brevet par la Chambre de recours.

Cet argument du requérant doit également être rejeté.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

La procédure de recours est terminé. Le brevet reste révoqué.

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