T 0129/01 () of 25.6.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T012901.20030625
Date de la décision : 25 Juin 2003
Numéro de l'affaire : T 0129/01
Numéro de la demande : 96400571.4
Classe de la CIB : B23K 35/38
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Mélange gazeux de protection et procédé de soudage à l'arc de pièces en acier inoxydable
Nom du demandeur : L'air Liquide, S.A.
Nom de l'opposant : LINDE AKTIENGESELLSCHAFT
Chambre : 3.2.06
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 113(1)
European Patent Convention 1973 Art 101(2)
European Patent Convention 1973 R 78(2)
European Patent Convention 1973 R 67
European Patent Convention 1973 R 84
Mot-clé : Nouveauté - (oui, requête principale et subsidiaire)
Activité inventive (non : requête principale ; oui : requête subsidiaire)
Vice substantiel de procédure (oui, non-respect d'un délai suffisamment long pour présenter des observations sur la réponse du propriétaire à l'opposition
Exergue :

-

Décisions citées :
J 0018/84
J 0037/89
T 0275/89
T 0582/95
T 0317/96
T 0704/96
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
J 0001/13

Exposé des faits et conclusions

I. Par décision remise au service de la poste interne le 7. décembre 2000 et à la poste le 11 décembre 2000 la division d'opposition a rejeté l'opposition formée contre le brevet européen n° 0 734 810.

Elle a considéré qu'aucun des documents produits dans cette opposition ne pouvait remettre en question ni la nouveauté ni l'activité inventive de l'objet des revendications indépendantes 1 de produit et 5 de procédé d'utilisation du produit de la revendication 1.

En outre, elle a donné dans sa décision les raisons pour lesquelles elle n'accédait pas à la requête de l'opposante d'accorder un délai d'au moins quatre mois pour répondre à une éventuelle opinion préliminaire de la division d'opposition et/ou à la réponse du propriétaire.

II. Contre cette décision l'opposante a formé recours le 30. janvier 2001 et a réglé simultanément la taxe correspondante. Le mémoire dûment motivé a été fourni le 12. avril 2001.

Pour son recours, l'opposante/requérante s'est fondée sur les documents suivants produits en opposition :

E1 : Welding and metal fabrication, Vol. 62, N° 9, pages 379-382

E7 : JP-A-61 279372 et sa traduction en anglais

E8 : JP-A-61 232 087

E9 : JP-A-05 138 362

E10 : JP-A-58 093 592

III. L'opposante/requérante sollicite l'annulation de la décision contestée, la révocation intégrale du brevet en cause et le remboursement de la taxe de recours en raison d'un vice substantiel de procédure.

La propriétaire/intimée sollicite le rejet du recours, et subsidiairement le maintien du brevet dans une forme modifiée, telle que formalisée par lettre du 26. mai 2003.

Une procédure orale a eu lieu le 25 juin 2003.

IV. Le libellé de la revendication 1 indépendante de produit dans sa forme délivrée (requête principale) est le suivant :

"Mélange gazeux de protection à base d'argon pour le soudage à l'arc manuel ou automatique d'aciers inoxydables comprenant :

- de 3 à 18% d'hélium,

- de 1 à 3% d'azote,

le solde étant de l'argon."

La revendication 1 selon la requête subsidiaire s'énonce comme suit :

"Mélange gazeux de protection à base d'argon pour le soudage à l'arc manuel ou automatique d'aciers inoxydables comprenant :

- de 5 à 15% d'hélium,

- de 1,5 à 2,5% d'azote,

le solde étant de l'argon."

V. Au soutien de son recours, l'opposante/requérante développe pour l'essentiel l'argumentation suivante :

Requête principale :

La nouveauté de l'objet de la revendication 1 dans sa forme délivrée est remise en cause par le document E1 qui traite d'un gaz de soudage d'aciers inoxydables "duplex" et "super duplex", comprenant 1-1,2% (duplex) ou 2,0-2,5% (super-duplex) d'azote dans de l'argon. Selon ce document des essais ont été exécutés pour établir l'effet d'hélium sur la vitesse de soudage. Le résultat a été visualisé dans le graphique de la figure 6, donnant la relation entre la vitesse de soudage, le taux d'hélium et la tension de l'arc. Avec 20% d'hélium la vitesse de soudage augmentait d'environnement 10% par rapport à 0% d'hélium, entre 20 et 40% la vitesse n'augmentait pas proportionnellement.

Les points marqués dans ce graphique avaient une taille importante, couvrant par exemple pour 20% d'hélium la plage allant de 19 à 21%. Tenant compte, en plus, de l'imprécision de mesure des taux des composants dans un gaz et de l'inexactitude du graphique même, la valeur de 18% d'hélium faisait aisément partie de la divulgation du 20% d'hélium.

Aussi à l'aide de ce graphique, un homme du métier dérivait sans avoir à exercer de facultés inventives le taux de hélium revendiqué en faisant une interpolation entre les valeurs pour 0% et 20% d'hélium, déduisant par exemple pour 15% ou 21% d'hélium une vitesse de soudage proche de la valeur obtenue pour 20% d'hélium (approximativement 112 mm/min ou 113 mm/min).

Cet objet est en outre dépourvu d'activité inventive au vu du document E1, qui traite des gaz de soudage consistant en argon avec un faible pourcentage en azote, dans lesquels de l'argon est remplacé par 20% d'hélium. L'homme du métier, voulant économiser sur le coût important de l'hélium et sachant que l'hélium pose aussi des problèmes au vu du contrôle du bain de soudage, était incité à faire des essais avec un taux d'hélium moins élevé que 20%. En faisant cela, il arrivait au gaz revendiqué.

Est aussi à considérer l'indication à la page 381, dernière phrase de E1, selon laquelle le remplacement de l'argon par de l'hélium favorise la réduction de l'ozone résultant du soudage. Cette indication était un enseignement en soi, incitant l'homme du métier à utiliser un taux d'hélium au dessous de 20%.

Les documents E7 - E10, proposant également des gaz de soudage contenant, en dehors d'un faible pourcentage d'azote, 20% d'hélium, suggéraient à l'homme du métier d'essayer par exemple 18% et même 15% d'hélium.

Requête subsidiaire :

Le taux en hélium de 15% était si proche de celui de 20% connu du E1, qu'on devait constater que l'homme du métier allait faire aussi des essais avec 15% d'hélium dans le gaz connu, pour réduire encore plus le coût du gaz.

Remboursement de la taxe de recours :

En ayant rendu sa décision sans permettre à l'opposante/requérante de prendre position sur la réponse du propriétaire/intimée, comme requis dans la notice d'opposition la division d'opposition avait violé le droit d'être entendu (article 113(1) CBE). De plus, en contravention avec les dispositions de la Règle 84 CBE la décision contestée était intervenue le 11. décembre 2000, c. à. d. avant qu'un délai de 2 mois ne se soit écoulé depuis la date de réception présumée de la réponse du propriétaire/intimée (remise à la poste le 2 octobre 2000) (Règle 78(2) CBE).

VI. Le propriétaire/intimée a contesté l'argumentation de l'opposante/requérante.

Requête principale.

E1 enseignait des taux d'hélium (20, 40%) bien spécifiques et préférés pour des raisons bien précises. En établissant le taux d'hélium des gaz d'essai, la marge de tolérance pour un gaz avec 20% d'hélium n'allait pas jusqu'à englober 18% d'hélium. Du graphique de la figure 6 il n'était pas possible de dériver des taux d'hélium autres que les points spécifiques (représentant des valeurs discrètes) montrés dans le graphique, comme le faisait l'opposante/requérante, parce que outre ces points isolées rien n'était connu de la relation entre le taux d'hélium et la vitesse de soudage, surtout pas une relation mathématique permettant de déduire des valeurs entre 0 et 20% d'hélium.

Avec ces taux en hélium, utilisés pour déterminer l'influence sur la vitesse de soudage, n'étaient pas divulgués de taux spécifiques en azote, les problèmes résolus par ces deux composants étant bien différents : ajout d'azote dans le gaz pour compenser la perte d'azote en soudant des métaux duplex et super-duplex, ajout de l'hélium pour pouvoir souder dans toutes les positions.

Une réduction du coût du gaz n'était pas l'objet de la présente invention ; une telle réduction pourrait, en revanche, aussi être obtenue en remplaçant de l'hélium par de l'hydrogène (H2) comme proposé par E1, page 381, colonne du milieu.

Requête subsidiaire.

Concernant la réduction de l'ozone, l'enseignement du E1 était seulement d'un gaz de soudage avec 20% d'hélium et 1,1% d'azote, ayant pour effet que la composition de ce gaz ne tombait plus dans les plages revendiquées.

Remboursement de la taxe de recours

La date de réception de la réponse du propriétaire/intimée par l'opposante/requérante était la date réelle de réception de la réponse, non la date de réception réputée par la Règle 78(2) CBE. Dans le cas d'espèce, la propriétaire/intimée avait envoyé sa réponse à la fois à l'OEB et à l'opposante/requérante, par fax, le 25 septembre 2000, en envoyant, par la poste, aux mêmes destinataires la confirmation. Selon l'accusé de réception de l'OEB cette lettre avait été reçue le 27 septembre 2000, ce qui devrait être aussi le cas pour l'opposante/requérante. La décision notifiée le 11. décembre 2000 était de ce fait rendue bien après expiration du délai minimal de deux mois, comme mentionné à la Règle 84 CBE.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Requête principale - Nouveauté

2.1. La revendication 1 délivrée revendique un taux d'hélium entre 3 et 18%. E1, le document le plus proche de la matière revendiquée, ne divulgue que les valeurs spécifiques de 0%, 20% et plus. L'objet de cette revendication est de ce fait nouveau.

L'argument de l'opposante/requérante selon lequel le point marqué dans le graphique de la figure 6 pour la valeur de 20% d'hélium implique une plage de valeurs allant graphiquement d'au moins de 19 à 21%, ne peut pas être suivi par la chambre car la détermination des taux des composants d'un gaz de soudage n'est pas susceptible d'une telle approximation, les taux en azote étant par exemple exprimés en décimales. Aussi ne peut-on pas déduire de cette représentation graphique une telle plage de valeurs parce qu'il est aussi possible que la taille des points représentés soit choisie pour la seule raison de bien montrer les résultats des essais exécutés. Finalement, les valeurs mentionnées dans le texte de E1 sont bien spécifiques : 20%, 40%, etc.

2.2. Pour détruire, comme dans le cas d'espèce, la nouveauté d'une plage revendiquée, une antériorité doit, sans ambiguïté, divulguer au moins une valeur spécifique tombant dans cette plage. Ceci n'est pas le cas pour le graphique de la figure 6, car des essais avec des gaz contenant un pourcentage d'hélium entre 0 et 20% n'ont pas été exécutés. Les essais n'ont pas non plus abouti à une formule représentant par exemple la relation entre le taux d'hélium et la vitesse de soudage, de laquelle il serait possible de mathématiquement dériver d'autres valeurs spécifiques de la vitesse ou du taux d'hélium. Une discussion sur le manque de nouveauté d'une plage revendiquée par une plage divulguée dans une antériorité n'est pas judicieuse et pertinente dans le cas présent, la seule plage divulguée en E1 étant de 20 à 40%, bien en-dehors de la plage revendiquée (3 à 18%).

2.3. L'opposante/requérante avait aussi indiqué que le graphique de la figure 6 donnait à l'homme du métier l'information que pour un taux d'hélium de 15% la vitesse de soudage devrait être "approximativement" 112 mm/min.

L'opposante/requérante n'a, par contre, pas apporté de preuves qu'une relation mathématique permettant une telle déduction existait entre le taux d'hélium et la vitesse de soudage. Aussi ne peut-on pas déduire une telle valeur par l'emploi des valeurs de la vitesse de soudage pour 0 et 20% d'hélium dérivées du graphique, parce qu'une relation entre la vitesse et le taux d'hélium (si elle existe) peut graphiquement avoir différentes formes, produisant de ce fait différentes valeurs pour l'hélium.

3. Requête principale - Activité inventive

3.1. E1 est considéré l'état de la technique le plus proche pour discuter l'activité inventive, car il concerne le même objectif que le brevet en cause. Cet objectif est discuté à la page 381, colonne de droite, dernier paragraphe et page 382, premier paragraphe, indiquant que le remplacement d'une partie de l'argon par de l'hélium réduisait considérablement la concentration d'ozone, jusqu'à un niveau au-dessous du "OES" (Occupational Exposure Standard), voir la figure 7. Il est de plus dit qu'il apparaissait nécessaire d'utiliser de l'azote en faible quantité pour atteindre un bon équilibre entre les phases et de bonnes propriétés de la soudure et d'ajouter de l'hélium pour satisfaire aux conditions de santé et de sécurité.

Notamment, la figure 7 montre l'effet remarquable d'une adjonction de 20% d'hélium dans un gaz de soudage contenant 1,1% d'azote, le solde étant de l'argon, par rapport à ce gaz sans de l'hélium.

Le gaz objet de la revendication 1 délivrée se distingue de cette divulgation par un taux d'hélium moins élevé, notamment de 3-18%. Avec ce gaz, aussi une réduction des émissions d'ozone est visée (voir brevet en cause, paragraphe 0007).

3.2. Avec les indications susmentionnées dans E1, la chambre de recours est convaincue que l'homme du métier exécutera des essais avec des taux d'hélium moins élevés que 20%, pour économiser sur ce composant relativement cher et en même temps se rapprocher plus du seuil "OES", aucun raison économique ne l'obligeant à réduire l'émission d'ozone en quantité telle que montré à la figure 7 de E1. De cette façon, un pourcentage de 18% est à la portée de l'homme du métier, sans devoir appliquer des facultés inventives et sans devoir s'attendre à une réduction de l'effet positif général de l'adjonction d'hélium dans le mélange.

3.3. L'objet de la revendication 1 de la requête principale n'implique de ce fait pas d'activité inventive ; cette requête est donc à rejeter.

4. Requête subsidiaire - Modifications et Nouveauté

Comme dans la revendication 1 de cette requête la plage de l'hélium est limitée de 3-18% (version délivrée) à 5- 15% et la plage d'azote de 1-3% (version délivrée) à 1,5- 2,5%, ces plages étant divulguées dans la revendication 2. et le paragraphe 0003 de la description déposés à l'origine, les conditions de l'article 123(2) et (3) sont remplies.

La revendication 1 étant plus limitée que celle de la requête principale, la nouveauté de son objet en est également assurée.

5. Requête subsidiaire - Activité inventive

5.1. Pour l'objet de la revendication 1 selon cette requête l'état de la technique le plus proche, tenant compte de l'objectif de réduire les émissions d'ozone, n'est plus la divulgation dans E1 du gaz de soudage contenant 1,1% d'azote, mais celle d'un gaz avec 2% d'azote, 20% d'hélium, le reste étant de l'argon.

Bien que selon la chambre de recours (voir ci-dessus) l'homme du métier recherche une composition du gaz de soudage ayant pour effet une réduction des émissions d'ozone acceptable, à un prix raisonnable, il restera proche de la valeur de 20% d'hélium, pour ne pas porter préjudice aux effets bénéfiques de l'hélium. Rien dans l'état de la technique ne lui indique qu'il peut réduire le taux d'hélium dans ce gaz (pour le soudage d'aciers inoxydables "super-duplex") encore plus, à un niveau de 15%, sans risques pour la facilité de soudage dans toutes les positions.

5.2. Les documents E7 à E10 ne donnent aucune indication pour réduire le taux d'hélium jusqu'a 15% ou un pourcentage encore moins élevé.

L'objet de la revendication 1 modifiée selon la requête subsidiaire implique de ce fait une activité inventive.

Les objets des revendications 2 et 3 correspondent à des modes de réalisation préférés du procédé de la revendication 1 (Règle 29(3) CBE). L'objet de la revendication 4 est un procédé de soudage utilisant le gaz de soudage selon l'une des revendications 1 à 3. De ce fait, ces objets aussi sont-ils nouveaux et impliquent-ils une activité inventive.

Par conséquence, le brevet peut être maintenu dans la forme modifiée selon la requête subsidiaire.

6. Remboursement de la taxe de recours

6.1. La taxe de recours ne peut être remboursée que lorsqu'il est fait droit au recours (Règle 67 CBE). Cette condition se trouve toutefois vérifiée lorsque le recours est partiellement fondé (voir en ce sens les décisions J 18/84, JO OEB 1987, 215, point 2.8 et J 37/89, JO OEB 1993, 201, point 6 précisant la notion de "faire droit"). En l'espèce, la chambre en annulant la décision objet du recours et en maintenant le brevet dans une forme plus restreinte que celle dans laquelle il a été maintenu par la division d'opposition, a partiellement fait droit au recours (T 704/96, point 6.1, non publiée). La première condition est donc vérifiée.

6.2. L'opposante/requérante reproche à la division d'opposition d'avoir rendu sa décision sans lui avoir accordé le délai de quatre mois que, précisément, elle avait requis dans son acte d'opposition afin de répondre aux prises de position de la propriétaire/intimée, ou à l'opinion préliminaire de la division d'opposition.

6.3. La réponse de la propriétaire/intimée datée du 29. septembre 2000 a été transmise à l'opposante/requérante par lettre du 2 octobre 2000. Quant à la décision contestée, signée le 1er décembre 2000 par les trois membres de la division d'opposition, elle a été remise à la poste interne le 7. décembre 2000.

Il convient de préciser que la chambre ne saurait retenir comme date de réception de cette lettre une autre date que la date présumée conformément à la Règle de calcul 78(2) CBE soit le 12 octobre 2000. En effet l'argument de la propriétaire/intimée selon lequel l'opposante/requérante aurait reçu la lettre avant cette date est ici inopérant puisque d'une part,aux termes mêmes de la Règle 78(2) CBE les circonstances particulières dans lesquelles cette présomption de dix jours est écartée au profit d'une autre date de réception retenue (pas de réception du tout ou réception ultérieure), ne concernent pas la présente espèce et que, d'autre part, la date de réception avancée par la propriétaire/intimée demeure à l'état d'hypothèse.

6.4. Il est donc acquis que la décision contestée a été rendue, à l'issue d'une procédure seulement écrite, moins de deux mois après la date présumée de réception de la lettre accompagnant les dernières écritures de la propriétaire/intimée. Pour déterminer si le refus de la division d'opposition, exprimé dans sa décision, d'accorder le délai de quatre mois initialement requis par l'opposante/requérante, constitue une vice substantiel de procédure, la chambre doit considérer les deux points suivants :

- La division d'opposition était elle tenue par application d'un texte de la CBE d'accéder à une telle requête ou bien de procéder à une notification précise?

- Si tel n'était pas le cas : la division d'opposition, en rendant sa décision dans un si bref délai, sans notifier au préalable à l'opposante/requérante qu'elle ne ferait pas droit à sa requête de demande de délai, a-t-elle méconnu l'un des droits fondamentaux reconnus aux parties, soit en l'espèce le droit d'être entendu (ou le principe du contradictoire) consacré par l'article 113 CBE?.

6.4.1. Selon l'article 101(2) CBE "la division d'opposition invite les parties aussi souvent qu'il est nécessaire, à présenter dans un délai qu'elle leur impartit, leurs observations sur les notifications qu'elle leur a adressées ou sur les communications qui émanent des autres parties". Il ressort de ces termes qu'il relève de l'appréciation discrétionnaire de la division d'opposition d'inviter les parties à faire des observations dans un délai qu'elle leur impartit, ou, seulement, de leur transmettre les nouveaux éléments pour information (voir en ce sens T 582/95, point 4, non publiée). Mais il n'existe aucune obligation générale d'inviter les parties à faire des observations (voir en ce sens T 275/89, point 4, JO OEB 1992,86).

En l'espèce, la réponse de la propriétaire/intimée a été envoyée à l'opposante/requérante par l'OEB avec en-tête "brève notification" et pour objet "Avec prière d'en prendre connaissance".Il s'agit donc d'une simple transmission pour information sans nécessité pour la division d'opposition d'impartir le délai prévu par l'article 101 CBE, la partie destinataire étant seule juge de l'opportunité de répondre ou pas. Il s'ensuit par ailleurs que la Règle 84 CBE sur le délai minimum de deux mois n'a pas davantage vocation à s'appliquer.

Enfin, les conseils de l'OEB aux parties en procédure d'opposition (voir JO OEB 1989, 417) mentionnent au point 5 que lorsqu'il n'a pas été demandé de procédure orale et que l'affaire est parfaitement claire, une décision peut être rendue dès l'expiration du délai imparti au propriétaire.

Néanmoins cette faculté suppose d'être exercée dans le respect des droits procéduraux des parties et en particulier celui consacré par l'article 113(1) OEB. Aux termes de cet article les décisions de l'OEB ne peuvent être fondées que sur des motifs au sujet desquels les parties ont pu prendre position.

6.4.2. Reste en conséquence à considérer si dans le cas d'espèce l'opposante/requérante a pu exercer pleinement ce droit, puisqu'elle prétend qu'elle n'a pu correctement préparer sa défense faute de temps.

La chambre relève qu'ayant sollicité dès l'introduction de l'opposition un délai de quatre mois pour ses éventuelles observations, l'opposante/requérante ayant pour référence les conseils (voir point 6.4.1. ci- dessus) donnés par l'Office aux parties en procédure d'opposition dans la version allemande (puisque l'opposante allemande n'était pas tenue de se reporter à la version dans les autres langues de l'Office mentionnant un délai de deux mois, voir en ce sens T 317/96, point 9) laquelle indique, point 3B(d), que dans le cas où le propriétaire n'a pas produit de pièces modifiées et/ou une procédure orale n'a pas été requise ni par le propriétaire, ni par l'opposant, sa réponse est transmise pour information à l'opposant, qui est invité en même temps à présenter ses observations dans un délai déterminé (quatre mois normalement), a légitimement pu s'attendre à ce que cette pratique soit suivie.

6.4.3. La division d'opposition a certes indiqué dans sa décision que le délai supplémentaire sollicité par l'opposante/requérante ne lui paraissait pas opportun parce que, à son avis, l'opposante/requérante avait pu soumettre ses arguments et qu'il ne restait aucun doute sur la teneur de ceux-ci. Toutefois, cette motivation repose sur un préjugement de la part de la division d'opposition qui a présumé que l'opposante/requérante n'avait plus rien à ajouter à ce qu'elle avait développé dans son acte d'opposition. Ce préjugement a pu être d'autant plus lourd de conséquences, que l'opposante/requérante n'avait pas requis de procédure orale pour éventuellement compléter ses arguments.

La Chambre ne peut bien sûr pas à son tour préjuger de ce qu'aurait été la décision de la division d'opposition si cette dernière avait donné à l'opposante/requérante le délai nécessaire pour commenter les dernières écritures de la propriétaire/intimée, ni conclure que l'opposante/requérante aurait pu faire l'économie d'un recours.

Il n'en demeure pas moins, dans les principes, que l'opposante/requérante a subi un grief : elle a été privée d'un délai qu'elle avait requis et qu'elle s'attendait normalement, conformément à ce qu'elle savait des conseils de l'OEB ci-dessus mentionnés (points 6.4.1 et 6.4.2), à obtenir dans le cours de la pratique courante et ce sans qu'aucune raison spéciale ne lui ait été fournie par la division d'opposition, autre que la présomption que tout avait été dit, alors au surplus qu'en l'absence de procédure orale demandée ni fixée, elle n'avait aucune possibilité de faire valoir de nouveaux arguments.

L'enchaînement de ces circonstances caractérise une violation de son droit d'être entendue. D'ailleurs l'issue du recours, encore une fois, sans porter de préjugement sur ce qu'aurait été la suite de la procédure si la division d'opposition avait accédé à la requête de demande de délai, tend à démontrer que l'opposante/requérante avait des éléments à faire valoir.

A tout le moins la division d'opposition aurait elle dû notifier à l'opposante/requérante, puisqu'il n'y avait pas de procédure orale demandée, qu'elle n'entendait pas lui accorder le délai dans la mesure requise. En ne le faisant point elle a causé un grief à l'opposante/requérante en la mettant devant le fait accompli.

Les circonstances ayant entouré cette décision et l'effet de surprise qui s'en est suivi pour l'opposante/requérante caractérisent un vice substantiel de procédure rendant équitable le remboursement de la taxe de recours.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. la décision attaquée est annulée,

2. la requête principale est rejetée,

3. l'affaire est renvoyée devant l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet en cause sur la base des documents suivants :

revendications 1 à 4 et colonnes 1 et 2 de la description soumises par lettre du 26 mai 2003

4.la taxe de recours est remboursée.

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