T 0090/99 () of 4.12.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T009099.20031204
Date de la décision : 04 Décembre 2003
Numéro de l'affaire : T 0090/99
Numéro de la demande : 93901792.7
Classe de la CIB : A61K 7/11
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : LAQUE AEROSOL CAPILLAIRE
Nom du demandeur : L'OREAL
Nom de l'opposant : Wella Aktiengesellschaft
National Starch and Chemical Investement Holding Corporation
Henkel Kommanditgesellschaft auf Aktien
KPSS-Kao Professional Salon Services GmbH
Chambre : 3.3.07
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 123(3)
European Patent Convention 1973 R 57a
European Patent Convention 1973 R 64
Mot-clé : Recours recevable (oui)
Modifications - recevables - requête principale et requêtes subsidiaires 1 à 5 (non) - requêtes subsidiaires 6, 8 et 9 (oui)
Activité inventive (non) - requêtes subsidiaires 6 et 8
Renvoi (oui) - requête subsidiaire 9
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 93 901 792.7, déposée le 20. novembre 1992 comme demande internationale PCT/FR92/01081 (numéro de publication internationale WO 93/09757), revendiquant la priorité de la demande nationale FR 9114353 du 21. novembre 1991, a donné lieu à la délivrance du brevet européen n° 0 572 636 sur la base de 11 revendications. La revendication 1 s'énonçait comme suit :

"1. Composition cosmétique aqueuse sous forme d'une laque aérosol caractérisée par le fait qu'elle contient :

(a) au moins une résine filmogène synthétique,

(b) au moins un agent plastifiant en une proportion d'au moins 10 % en poids par rapport au poids de la résine,

(c) de l'eau dans laquelle ladite résine filmogène et ledit agent plastifiant sont à l'état soluble et homogène, et

(d) du diméthyléther en tant qu'agent propulseur."

Les revendications 2 à 11 portaient sur des modes particuliers de réalisation de la composition.

II. Quatre oppositions ont été formées en vue d'obtenir la révocation du brevet sur le fondement de l'article 100a) CBE, à savoir manque de nouveauté ou d'activité inventive au vu, entre autres, des documents suivants :

D21 : US-A-5 053 218

D22 : J. Guth et al, "Addressing the North American Trend Toward Low VOC Hair Sprays", SÖFW, Seifen - Öle - Fette - Wachse, vol. 117, n° 13, 28 août 1991, Augsburg, pages 462 et 464 à 467

III. La Division d'opposition a révoqué le brevet litigieux. La décision, signifiée par voie postale le 23 novembre 1998, se fondait sur un jeu de 8 revendications, en tant que seule requête déposée au cours de la procédure orale du 3. novembre 1998. La revendication 1 s'énonçait ainsi :

"1. Laque aérosol capillaire comprenant dans un récipient aérosol une composition aqueuse essentiellement constituée d'un mélange :

(a) d'au moins une résine filmogène, choisie dans le groupe constitué par :

- le terpolymère acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique,

- le copolymère N-octyl acrylamide/méthacrylate de méthyle/méthacrylate d'hydroxypropyle/acide acrylique/méthacrylate de tert-butylaminoéthyle,

- le copolymère vinylpyrrolidone/acétate de vinyle,

- le terpolymère acétate de vinyle/acide crotonique/ néodécanoate de vinyle,

- le terpolymère acide acrylique/acrylate d'éthyle/N- tert-butylacrylamide,

- le copolymère acétate de vinyle/acide crotonique,

- le polymère vinylcaprolactame/ vinylpyrrolidone/ méthacrylate de diméthylaminoéthyle et leurs mélanges,

(b) d'au moins un plastifiant en une proportion d'au moins 20 % en poids par rapport au poids de la résine, ledit plastifiant étant choisi dans le groupe constitué par :

- les éthers de glycol,

- l'huile de ricin oxyéthylénée à 40 moles d'oxyde d'éthylène,

- l'alcool benzylique,

- les citrates d'alkyle et leurs dérivés acétylés,

- le 1,3-butylène glycol,

- le carbonate de propylène,

- le diéthanolamide de l'acide laurique, et leurs mélanges

(c) d'eau en une proportion de 50 à 70 % en poids par rapport au poids total du mélange, dans laquelle ladite résine filmogène et ledit agent plastifiant sont à l'état soluble et

(d) de diméthyléther, en tant qu'agent propulseur, en une quantité telle qu'elle conduise audit mélange sous forme homogène."

Les revendications 2 à 8 portaient sur des modes particuliers de réalisation de la laque.

D'après la décision :

a) L'expression "essentiellement constituée" se fondait sur l'expression "caractérisée par le fait qu'elle contient" de la revendication 1 telle que déposée à l'origine. Par conséquent, les revendications satisfaisaient aux exigences de l'article 123(2) CBE ;

b) L'expression "essentiellement constituée" n'excluait pas d'autres composants, en particulier de l'alcool. Les revendications étaient donc claires (article 84 CBE) ;

c) Quant à l'activité inventive, l'état de la technique le plus proche résultait de D21, lequel portait sur un produit aérosol pour cheveux sans alcool présentant de bonnes propriétés de fixation. Son exemple 1 concernait un produit avec une résine shellac, 23,5 % d'un agent plastifiant, de l'eau et du diméthyléther.

L'agent plastifiant exemplifié ne tombait pas sous la définition des agents plastifiants telle que donnée dans le brevet en litige, mais il pouvait être remplacé par de l'alcool benzylique. D21 n'apportait aucun préjugé contre l'emploi des résines synthétiques.

D22 divulguant qu'une résine synthétique Amphomer avait des propriétés de fixation meilleures que celles d'une résine shellac, l'homme du métier aurait donc modifié la composition de l'exemple 1 de D21 par l'emploi de l'alcool benzylique comme agent plastifiant et d'une résine Amphomer à la place d'une résine shellac. Ce faisant, il serait arrivé à l'objet de la revendication 1 en litige, qui par conséquent manquait d'activité inventive. Le motif d'opposition s'opposait donc au maintien du brevet.

IV. Un recours a été formé par la titulaire du brevet contre cette décision, reçu le 25 janvier 1999 ; la taxe prescrite a été payée le même jour.

Dans son mémoire de recours, reçu le 1 avril 1999, la requérante a contesté la décision attaquée, en soutenant que l'objet du brevet en litige ne pouvait être évident pour un homme du métier puisque D21 dissuadait de remplacer une résine shellac par une résine synthétique. Par conséquent, la décision devait être infirmée. En outre, la requérante a déclaré qu'elle avait entrepris des études comparatives pour montrer l'importance du choix de l'agent plastifiant et que les résultats seraient remis dans un mémoire complémentaire.

Ces résultats ont été remis par lettre du 17. septembre 1999. D'autres résultats d'essais complémentaires ont été déposés successivement, pour montrer l'importance de la borne inférieure de 20 % pour l'agent plastifiant (lettres du 6 septembre 2002, du 4. novembre 2003 et du 20 novembre 2003, respectivement).

Par lettre du 20 novembre 2003, la requérante a, entre autre, remis une déclaration d'un des inventeurs portant sur une reproduction de l'exemple 1 de D21 et elle a déposé 12 nouveaux jeux de revendications à titre de requêtes principale et subsidiaires 1 à 11. La revendication 1 de la requête principale s'énonce ainsi :

"1. Composition cosmétique sous forme d'une laque aérosol, essentiellement constituée des ingrédients suivants :

(a) au moins une résine filmogène synthétique,

(b) au moins un agent plastifiant,

(c) un solvant, et

(d) un agent propulseur

dans laquelle :

ladite résine filmogène, présente en une proportion entre 3 et 10 % en poids par rapport au poids de la composition, est choisie parmi :

- les terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique,

- le copolymère N-octyl acrylamide/méthacrylate de méthyle/méthacrylate d'hydroxypropyle/acide acrylique/méthacrylate de tert-butylaminoéthyle,

- le copolymère vinylpyrrolidone/acétate de vinyle,

- le terpolymère acétate de vinyle/acide crotonique/ néodécanoate de vinyle,

- le terpolymère acide acrylique/acrylate d'éthyle/N- tert-butylacrylamide,

- le copolymère acétate de vinyle/acide crotonique,

- le polymère vinylcaprolactame/vinylpyrrolidone/ méthacrylate de diméthylaminoéthyle, et

- leurs mélanges,

ledit agent plastifiant, présent en une proportion entre 20. et 50 % en poids par rapport au poids de la résine, est choisi parmi :

- les éthers de glycol,

- l'huile de ricin oxyéthylénée à 40 moles d'oxyde d'éthylène,

- l'alcool benzylique,

- les citrates d'alkyle et leurs dérivés acétylés,

- le 1,3-butylène glycol,

- le carbonate de propylène,

- le diéthanolamide de l'acide laurique, et

- leurs mélanges

ladite résine et ledit agent plastifiant sont à l'état soluble dans ledit solvant,

ledit solvant présent dans une proportion entre 50 et 70. % en poids par rapport au poids total de la composition est l'eau, et

ledit agent propulseur est le diméthyléther présent en une proportion comprise entre 20 et 40 % en poids par rapport au poids total de la composition."

V. L'opposante 04 (intimée 04) a soutenu que le recours était incomplet sans les résultats des essais comparatifs annoncés (lettre du 9 avril 1999).

VI. L'opposante 01 (intimée 01) a contesté la recevabilité du recours (lettre du 10 juin 1999).

VII. Les opposantes 01 à 03 (intimées 01 à 03) ont contesté les conclusions de la requérante sur la pertinence du document D21 (lettres datées 10 juin 1999, 17 août 1999 et 9 août 1999, respectivement).

VIII. L'intimée 02 a remis des résultats d'essais comparatifs (Exhibits A, B et C, dans la lettre du 24 novembre 1999). Puis, elle a pris position sur les requêtes et sur les essais comparatifs de la requérante ; elle a déposé une déclaration de M. Fewkes en date du 17 juillet 2003 ; et elle annoncé que des experts participeraient à la procédure orale (lettre du 28. août 2003). Enfin, elle a remis d'autres résultats d'essais comparatifs, portant sur la borne inférieure de l'agent plastifiant (lettres du 21 et 27 novembre 2003).

IX. La procédure orale a eu lieu le 4 décembre 2003. Au cours de l'audience, la requérante a retiré les requêtes subsidiaires 7 et 11 telles que déposées par lettre du 20. novembre 2003 et elle a déposé de nouveaux jeux de revendications à titre de requêtes subsidiaires 6 et 8 à 10. Les revendications 1 des requêtes subsidiaires 6, 8 et 9 ont, respectivement, les libellés suivants :

"1. Composition cosmétique aqueuse sous forme d'une laque aérosol, caractérisée par le fait qu'elle contient :

(a) entre 3 et 10 % en poids par rapport au poids total de la composition d'au moins une résine filmogène synthétique,

(b) entre 20 et 50 % en poids par rapport au poids de la résine d'au moins un agent plastifiant,

(c) entre 50 et 70 % en poids d'eau par rapport au poids total de la composition dans laquelle ladite résine et l'agent plastifiant sont à l'état soluble et homogène,

(d) entre 20 et 40 % en poids par rapport au poids total de la composition de diméthyléther en tant qu'agent propulseur,

avec

ladite résine filmogène, étant choisie parmi :

- les terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique,

- le copolymère N-octyl acrylamide/méthacrylate de méthyle/méthacrylate d'hydroxypropyle/acide acrylique/méthacrylate de tert-butylaminoéthyle,

- le copolymère vinylpyrrolidone/acétate de vinyle,

- le terpolymère acétate de vinyle/acide crotonique/ néodécanoate de vinyle,

- le terpolymère acide acrylique/acrylate d'éthyle/N- tert-butylacrylamide,

- le copolymère acétate de vinyle/acide crotonique,

- le polymère vinylcaprolactame/vinylpyrrolidone/ méthacrylate de diméthylaminoéthyle, et

- leurs mélanges, et

ledit agent plastifiant, étant choisi parmi :

- les éthers de glycol,

- l'huile de ricin oxyéthylénée à 40 moles d'oxyde d'éthylène,

- l'alcool benzylique,

- les citrates d'alkyle et leurs dérivés acétylés,

- le 1,3-butylène glycol,

- le carbonate de propylène,

- le diéthanolamide de l'acide laurique, et

- leurs mélanges."

"1. Composition cosmétique aqueuse sous forme d'une laque aérosol, caractérisée par le fait qu'elle contient :

(a) entre 3 et 10 % en poids par rapport au poids total de la composition d'au moins une résine filmogène synthétique,

(b) entre 20 et 50 % en poids par rapport au poids de la résine d'au moins un agent plastifiant,

(c) entre 50 et 70 % en poids d'eau par rapport au poids total dans laquelle ladite résine et l'agent plastifiant sont à l'état soluble et homogène,

(d) entre 20 et 40 % en poids par rapport au poids total de la composition de diméthyléther en tant qu'agent propulseur,

avec

ladite résine filmogène, étant choisie parmi :

- les terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique,

- le copolymère N-octyl acrylamide/méthacrylate de méthyle/méthacrylate d'hydroxypropyle/acide acrylique/méthacrylate de tert-butylaminoéthyle, et

- leurs mélanges, et

ledit agent plastifiant, étant choisi parmi :

- les éthers de glycol,

- l'alcool benzylique,

- les citrates d'alkyle et leurs dérivés acétylés, et

- leurs mélanges."

"1. Composition cosmétique aqueuse sous forme d'une laque aérosol, caractérisée par le fait qu'elle contient :

(a) entre 3 et 10 % en poids par rapport au poids total de la composition d'au moins une résine filmogène synthétique,

(b) entre 20 et 50 % en poids par rapport au poids de la résine d'au moins un agent plastifiant,

(c) entre 50 et 70 % en poids d'eau par rapport au poids total de la composition dans laquelle ladite résine et l'agent plastifiant sont à l'état soluble et homogène,

(d) entre 20 et 40 % en poids par rapport au poids total de la composition de diméthyléther en tant qu'agent propulseur,

avec

ladite résine filmogène, étant choisie parmi :

- les terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique,

- leurs mélanges, et

ledit agent plastifiant, étant choisi parmi :

- les éthers de glycol,

- l'huile de ricin oxyéthylénée à 40 moles d'oxyde d'éthylène,

- l'alcool benzylique,

- les citrates d'alkyle et leurs dérivés acétylés,

- le 1,3-butylène glycol,

- le carbonate de propylène,

- le diéthanolamide de l'acide laurique, et

- leurs mélanges."

Durant la procédure orale, les résultats des essais comparatifs n'ont pas été utilisés par les parties.

X. La requérante a présenté les arguments suivants :

a) Concernant la recevabilité, la volonté de la requérante était manifeste dans l'acte de recours : annulation de la décision et, en l'absence d'autres indications, maintien du brevet sur la base de la requête ayant fait l'objet de la décision. L'acte de recours ne contenait aucune ambiguïté. Après le dépôt de l'acte de recours, plusieurs mandataires s'étaient relayés dans la présente affaire, et les modifications des revendications, qui s'imposaient, au vu des objections soulevées par les intimées, n'avaient pu être produites auparavant. Il n'y avait eu aucune intention d'abuser de la procédure, ni de laisser dans l'incertitude les parties. Par conséquent, le recours était recevable.

b) Dans la requête principale, les modifications avaient le but de caractériser la présence, la proportion et le rôle des quatre ingrédients déterminants de la composition : résine filmogène ; agent plastifiant ; solvant ; et, agent propulseur.

L'expression "essentiellement constituée" relevait d'une pratique courante dans la rédaction des brevets. De plus, elle se fondait sur l'expression d'origine "caractérisé par le fait qu'elle contient", retenue dans la décision attaquée.

La nouvelle structure de la revendication 1 ayant pour but de mettre en évidence qu'uniquement l'eau était le solvant de résines particulières, était consécutive aux motifs d'opposition. Ces modifications étaient conformes au texte tel que déposé à l'origine, qui mentionnait que le solvant était l'eau.

La revendication 1 définissant que la résine et l'agent plastifiant étaient à l'état soluble dans l'eau, la présence d'un neutralisateur des fonctions acides des résines, exemplifiée dans le brevet, n'était pas exclue. Les exemples du brevet étaient encore protégés par la nouvelle structure de la revendication 1.

Par conséquent, les modifications étaient recevables.

c) Les requêtes subsidiaires 1 à 5 avaient en vue, chacune, de retirer des résines et/ou des agents plastifiants des listes données, sur la base des exemples du brevet. Cette suppression n'aboutissant pas à des compositions particulières non divulguées à l'origine, ne pouvait appeler une objection au titre de l'article 123(2) CBE.

d) La revendication 1 selon la requête subsidiaire 6 avait la structure de la revendication 1 telle que délivrée et était donc recevable.

Le document D21, en particulier son exemple 1, représentait l'état de la technique le plus proche. Le problème à résoudre n'était pas d'obtenir un produit doté de meilleures propriétés, mais de pourvoir à une nouvelle formulation de laque aqueuse qui fixait les cheveux de manière convenable. La solution consistait en une composition comportant les ingrédients définis dans la revendication 1.

Par rapport aux laques existantes qui comportaient des résines synthétiques et plusieurs solvants, la laque revendiquée ne contenait que l'eau comme solvant de résines synthétiques particulières associées à des agents plastifiants particuliers. Le choix de l'agent plastifiant était une caractéristique importante de l'invention. La formulation revendiquée, en outre, apportait une solution au problème de solubilité de la résine synthétique, car la neutralisation des fonctions acides de la résine n'était pas suffisante pour ce but.

Il était impératif pour D21 d'obtenir une laque aérosol à caractère écologique, pas nocive, mettant en oeuvre un solvant, un propulseur et une résine. Cet objectif était atteint par le choix d'une résine naturelle Shellac, en combinaison avec de l'eau et du diméthyléther. L'exemple 1 illustrait une formulation contenant un ester en tant qu'agent plastifiant. Cet ester n'était pas couvert par les termes de la revendication 1 en litige. De plus, d'après D21, l'agent plastifiant n'apportait que de la flexibilité et n'était pas déterminant. Par ailleurs, si la résine shellac avait l'attrait d'un produit naturel, elle posait des problèmes de précipitation et de reproductibilité. D21 ne suggérait donc pas la solution revendiquée.

D22 comparait les rétentions des boucles obtenues par deux formulations aqueuses, une à base de résine shellac, l'autre à base de résine synthétique Amphomer et comportant un antimoussant (Burst RSD). La formulation avec l'amphomer avait une rétention meilleure que celle de la formulation avec la résine shellac. Néanmoins, l'homme de l'art n'était pas induit à remplacer la résine shellac de l'exemple 1 de D21 par une résine synthétique Amphomer selon D22, car l'exemple 1 de D21 différait de l'exemple de D22. Même si le choix de l'amphomer découlait de manière évidente de D22, la formulation obtenue comporterait un agent plastifiant non sélectionné par l'invention. Il fallait encore remplacer l'ester (lanatex) de l'exemple 1 de D21 par un agent plastifiant protégé par les termes de la revendication 1 en litige, tel que l'alcool benzylique, mentionné par D21, pour arriver à l'invention.

Cependant, l'agent plastifiant n'était pas décisif pour l'objectif de D21 et l'alcool benzylique était évoqué comme agent plastifiant non préféré pour la résine shellac. En conséquence, il n'y avait aucune motivation au choix de l'alcool benzylique en tant qu'agent plastifiant pour une formulation selon D21 contenant l'amphomer de D22. D21, ou D21 et D22 ne permettaient donc pas de guider l'homme de l'art à choisir les composants de la formulation telle que définie dans la revendication 1 en litige.

Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 6 impliquait une activité inventive.

e) Les modifications de la revendication 1 de la requête subsidiaire 8 ne portaient pas sur une nouvelle sélection mais sur une limitation, un choix entre deux résines et trois agents plastifiants, parmi ceux nommés, qui n'allait pas au delà du contenu de la demande d'origine. Les exemples du brevet en litige illustraient certaines combinaisons, par exemple la première résine avec le premier agent plastifiant. Par ailleurs, les exemples d'un brevet ne devaient pas illustrer tous les modes de réalisation. Donc, les modifications étaient recevables.

Quant à l'activité inventive, par rapport à la requête subsidiaire 6, la revendication 1 comportait un nombre réduit de combinaisons, qui donnaient des laques intéressantes. Le problème restait le même, formuler une laque ayant des propriétés intéressantes. Les exemples prouvaient la performance des compositions contenant l'une ou l'autre des résines avec l'un ou l'autre des agents plastifiants. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 impliquait une activité inventive.

f) Aucune objection de recevabilité ne pouvait être soulevée contre la revendication 1 de la requête subsidiaire 9, puisqu'elle portait sur le choix de la résine préférée, tel que mentionné à l'origine.

L'emploi de la résine synthétique préférée aboutissait à des laques particulièrement satisfaisantes, exemplifiées dans le brevet en litige. Cette résine n'était pas divulguée par D21, ni suggérée par D22. Elle était connue, tel que mentionné dans le brevet, mais elle avait été utilisée pour la première fois dans une composition aqueuse avec des propriétés satisfaisantes, illustrées dans les exemples 1, 5 et 6. du brevet en litige. En particulier, l'exemple 1 montrait des propriétés excellentes par rapport aux propriétés de fixation des autres polymères connus.

Le document divulguant la résine préférée, mentionné dans le brevet en litige, portait sur la matière première en tant que telle pour des compositions cosmétiques. Par ailleurs, la revendication 1 correspondant à la revendication 5 telle que délivrée, toute objection basée sur ce document était tardive et devait être rejetée. L'objet de la revendication 1 étant inventif, le brevet devait donc être maintenu.

XI. Les arguments des intimées peuvent se résumer ainsi :

a) L'acte de recours ne contenait aucune indication de la mesure dans laquelle la décision attaquée devait être annulée ou reformée et ne pouvait donc satisfaire aux exigences de la règle 64b) CBE. L'interprétation des moyens produits en recours - en particulier des nouvelles revendications déposées trois ans et demi après l'acte de recours et qui se distinguaient bien de celles faisant l'objet de la décision contestée - montrait que la réelle volonté de la requérante ne pouvait être déduite de l'acte de recours. La justification selon laquelle plusieurs mandataires s'étaient relayés dans l'affaire n'était pas suffisante. D'ailleurs, seulement les documents D21 et D22 avaient été utilisés par les intimées dans leurs objections. Par conséquent, le recours n'était pas recevable et la requérante avait abusé de la procédure de recours.

b) Les revendications 1 de la requête principale et des requêtes subsidiaires 1 à 5 comportaient entre autre une nouvelle structure par rapport à la revendication 1 telle que délivrée. Si la nouvelle structure n'avait que les mêmes implications que celle telle que délivrée, alors les modifications contreviendraient aux exigences de la règle 57bis CBE et ne seraient pas recevables. En fait, les modifications engendraient de nouvelles implications, vu que l'expression "le solvant, à savoir l'eau", dans la demande d'origine, n'était pas limitative ; que le terme "homogène", dans l'expression "à l'état soluble et homogène" de la revendication 1 telle que délivrée, avait été supprimé ; que la nouvelle expression "essentiellement constituée", dans la revendication 1, n'était pas claire, n'excluait pas d'autres composants essentiels et n'avait aucune relation avec le brevet en litige ; que les exemples du brevet mentionnaient des composants essentiels qui n'étaient pas mentionnés dans les revendications 1, à savoir les composants ayant le but de neutraliser les fonctions acides des résines, donc d'influencer leur solubilité, notamment une alcanolamine ; et que, comme l'expression "soluble et homogène" dans la revendication 1 n'impliquait pas la présence d'un neutralisateur, notamment d'une alcanolamine exemplifiée dans le brevet en litige, les exemples du brevet en litige n'étaient plus protégés par les termes de la revendication 1.

Par conséquent, les modifications contrevenaient aux exigences de l'article 123(2) CBE.

c) Aucune objection de recevabilité n'était soulevée à l'encontre de la requête subsidiaire 6.

L'exemple 1 de D21 représentait l'état de la technique le plus proche et divulguait une laque ayant toutes les caractéristiques de la revendication en litige, sauf la résine synthétique.

Les exemples du brevet en litige portaient sur l'emploi de plusieurs résines synthétiques avec plusieurs agents plastifiants et ils ne montraient pas d'amélioration par rapport aux compositions connues. Des laques exemplifiées, comprises dans la définition de la revendication 1 en litige, n'étaient donc pas dotées de meilleures propriétés par rapport aux produits connus.

Par conséquent, le problème consistait à pourvoir à une laque alternative, une laque aérosol aqueuse contenant de différents polymères et assurant une bonne fixation.

Des systèmes stables sans alcool étaient connus avant la date de priorité du brevet en litige. D21 divulguait de tels systèmes. Il mentionnait 9 agents plastifiants, dont quatre étaient protégés par la revendication 1 en litige, entre autres l'alcool benzylique. La revendication 3 de D21 mentionnait la proportion préférée d'agent plastifiant ; la revendication 4 mentionnait l'alcool benzylique ; et l'exemple 1 portait sur une composition comportant une proportion d'un agent plastifiant dans la gamme telle que revendiquée. Par conséquent, la présence d'un agent plastifiant n'était pas facultative dans D21.

Si l'agent plastifiant de l'exemple 1 de D21 (lanatex) était un ester non compris dans la définition de la revendication 1, sa substitution par l'alcool benzylique, mentionné par D21 en tant qu'agent plastifiant, était à la portée de l'homme de l'art, comme confirmé par une déclaration de la requérante dans son mémoire de recours.

D'ailleurs, la substitution d'une résine shellac par une résine Amphomer était suggérée par D22, lequel montrait qu'une résine Amphomer apportait une meilleure tenue des boucles par rapport à une résine shellac. Les problèmes posés par une résine naturelle, mentionnés par la requérante, renforçaient une telle substitution. En conclusion, D22 suggérait une solution au problème de pourvoir à une laque alternative ayant une bonne rétention de boucles.

Par conséquent, l'objet de la revendication 1 n'impliquait pas d'activité inventive.

d) La revendication 1 selon la requête subsidiaire 8 comportait une nouvelle liste d'ingrédients qui impliquait des combinaisons non individualisées à l'origine, comme en particulier la combinaison des agents plastifiants avec la résine du type Amphomer. Par exemple, la combinaison d'une résine Amphomer avec un citrate en tant qu'agent plastifiant n'avait pas été divulguée.

Par ailleurs, les mêmes arguments utilisés pour la requête subsidiaire 6 s'appliquaient à la présente requête. Par rapport à celle de D21, la composition revendiquée se distinguait par une résine Amphomer. Les exemples ne montraient aucun effet surprenant et cette solution n'impliquait pas d'activité inventive.

e) Aucune objection formelle n'était soulevée à l'encontre des modifications des revendications de la requête subsidiaire 9.

D21 représentait l'état de la technique le plus proche. D22 suggérait des résines synthétiques apportant une meilleure tenue des boucles. La résine synthétique contenue dans la laque faisant l'objet de la revendication 1 était connue du document tel que mentionné dans le brevet en litige. S'agissant encore d'une substitution de résine dans le cadre d'une alternative, par analogie avec la décision sur la requête subsidiaire 6, l'objet tel que revendiqué ne pouvait impliquer une activité inventive.

XII. La requérante (titulaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de la requête principale, à défaut sur la base d'un des jeux de revendications selon les requêtes subsidiaires 1 à 5 telles que soumises par lettre du 20 novembre 2003, ou, alternativement, selon les requêtes subsidiaires 6, 8 à 10 telles que modifiées et soumises au cours de l'audience.

XIII. Les intimées (opposantes) ont demandé le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours

1.1. L'acte de recours du 25 janvier 1999 contient la déclaration suivante : "la Société déposante forme par la présente recours à l'encontre de la décision de révocation du brevet ..., conformément à l'article 106(1) CBE".

1.2. Cette déclaration n'indique pas expressément dans quelle mesure la décision attaquée doit être reformée ou annulée. Néanmoins, l'acte de recours doit être interprété pour établir si une indication de la mesure peut être déduite de l'ensemble des moyens présentés.

1.3. Afin de déterminer le contenu de l'acte de recours, l'interprétation doit se faire dans le contexte de l'acte considéré dans son ensemble et à sa date. Par contre, l'interprétation sur la base de moyens produits ultérieurement, tels que les nouvelles requêtes déposées quelques années après l'acte de recours, comme le fait l'intimée 01, peut donner lieu à des conclusions spéculatives, donc non acceptables.

1.4. D'ailleurs, la requérante n'est pas liée aux requêtes présentées dans son acte de recours, puisqu'il n'y a jamais de certitude que la procédure puisse continuer avec ces requêtes, qui peuvent être modifiées pour contrer des objections. Les requêtes finales peuvent même n'avoir aucun lien avec les requêtes du mémoire de recours.

1.5. La décision attaquée révoquait le brevet litigieux selon la seule requête qui était en instance. Les termes de la déclaration contenue dans l'acte de recours ne peuvent être interprétés que comme ayant pour objet l'annulation de la décision attaquée dans son ensemble, et, faute d'autres indications, le maintien du brevet sur la base des revendications formant la seule requête sur laquelle portait la décision.

1.6. Par conséquent, une indication de la mesure dans laquelle la décision attaquée devait être annulée peut être déduite en interprétant l'acte de recours selon son contenu objectif, conformément à la pratique établie (Jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, 4ème édition 2001, VII.D.7.4.1b).

1.7. Les exigences de la règle 64b) CBE étant satisfaites, le recours est par conséquent recevable.

Requête principale

2. Modifications

2.1. La revendication 1 selon la requête principale telle que déposée le 20 novembre 2003, comporte, par rapport à la revendication 1 telle que délivrée, entre autres modifications, une nouvelle structure, c'est-à-dire une nouvelle définition générale des ingrédients considérés essentiels, une nouvelle expression, à savoir "essentiellement constituée des ingrédients suivants", ainsi qu'une nouvelle précision des dits ingrédients essentiels et de leurs proportions.

2.2. Le changement de structure a été justifié par le désir de limiter la composition de la revendication 1 aux quatre composants déterminants et, plus particulièrement, pour préciser que l'eau constitue le seul solvant de résines particulières.

2.3. Cela revient à dire que le remaniement de la définition de l'agent propulseur, par rapport à celle telle que délivrée, n'était pas nécessaire pour surmonter un motif d'opposition.

2.4. La nouvelle expression "essentiellement constituée des ingrédients suivants", vise à mettre en évidence les composants essentiels de la composition (résine filmogène synthétique, agent plastifiant, solvant et agent propulseur) et à exclure tout autre ingrédient non essentiel de la composition.

Ainsi tout autre composant nécessaire à assurer la neutralisation, partielle ou totale, des motifs acides des résines synthétiques, et par conséquent la solubilisation des dites résines dans l'eau est exclu. Des neutralisateurs, importants pour la solubilisation des résines synthétiques, sont mentionnés et exemplifiés dans le brevet en litige.

2.5. A cet égard, la requérante a soutenu que l'expression de la revendication 1 "ladite résine et ledit agent plastifiant sont à l'état soluble" implique la neutralisation des motifs acides des résines, donc leur solubilisation dans l'eau, et donc par conséquent l'emploi de neutralisateurs.

2.6. En d'autres termes, l'interprétation de la revendication 1 montrerait que d'autres composants importants ne sont pas exclus par l'expression "essentiellement constituée" ayant le but d'exclure les composants non essentiels non définis dans la revendication.

2.7. Que cette interprétation soit correcte ou non, la Chambre note que la dite expression n'est pas appropriée pour obtenir la limitation souhaitée. De plus, cette modification nécessite une interprétation de la revendication pour établir si les exemples sont encore protégés ou non, ce qui n'était pas nécessaire avec la revendication 1 telle que délivrée.

2.8. L'introduction de caractéristiques limitatives ne nécessitant pas la restructuration de la revendication et l'expression "essentiellement constituée" n'étant pas appropriée pour obtenir la limitation souhaitée, les modifications apportées à la revendication 1 ne sont pas nécessaires pour répondre aux motifs d'opposition et ne peuvent être conformes aux exigences de la règle 57bis CBE.

Par conséquent, la requête principale n'est pas recevable.

2.9. Il s'ensuit que la Chambre ne doit pas décider si les modifications introduites dans cette requête sont conformes aux exigences de l'article 84, clarté et concision, et 123, paragraphes 2 et 3, CBE.

Requêtes subsidiaires 1 à 5

3. La revendication 1 de chacune des requêtes subsidiaires 1 à 5, comme la revendication 1 de la requête principale, comporte le changement de structure évoqué aux points 2 supra et l'expression "essentiellement constituée". Par conséquent, les conclusions sur la recevabilité de la requête principale s'appliquent mutatis mutandis.

Les requêtes subsidiaires 1 à 5 ne sont donc pas recevables (règle 57bis CBE).

Requête subsidiaire 6

4. Modifications

4.1. Par rapport à la revendication 1 telle que délivrée, la revendication 1 selon la requête subsidiaire 6 comporte les modifications suivantes :

a) les proportion en poids de la résine synthétique, de l'agent plastifiant, de l'eau et du diméthyléther ;

b) une liste de résines synthétiques possibles ; et,

c) une liste d'agents plastifiants possibles.

4.2. Les proportions en poids des ingrédients se fondent sur les parties suivantes de la demande d'origine :

a) résine synthétique : page 2, ligne 7 ;

b) agent plastifiant : revendication 6 ;

c) eau : page 4, ligne 6 ;

d) diméthyléther : revendication 10.

4.3. La liste des résines synthétiques possibles se fonde sur la revendication 3 d'origine.

4.4. La liste des agents plastifiants possibles se fonde sur la revendication 7 d'origine.

4.5. Les revendications 3, 6, 7 et 10 d'origine étaient rattachées à la revendication 1 d'origine. Les revendications d'origine comportaient également des revendications, 2 et 9, portant, respectivement, sur des proportions en poids générales de résine synthétique et d'eau. Par conséquent, la combinaison des caractéristiques dans la revendication 1 se fonde sur une combinaison divulguée dans la demande d'origine.

4.6. Concernant les revendications 2, 3, 6, 7, 9 et 10 telles que délivrées, elles ont été supprimées ; les revendications 4, 5, 8 et 11 telles que délivrées sont devenues les revendications 2 à 5.

4.7. Par conséquent, les revendications du brevet en litige selon la requête subsidiaire 6 n'ont pas été modifiées de manière à ce que leur objet s'étende au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée ni de façon à étendre la protection (article 123, paragraphes 2 et 3, CBE). Par ailleurs, les dites modifications, sont occasionnées par les motifs d'opposition et sont donc conformes aux exigences de la règle 57bis CBE.

4.8. Il s'ensuit que la requête subsidiaire 6 est recevable.

5. Nouveauté

5.1. La nouveauté de l'objet de la revendication 1 n'a pas été contestée. La Chambre ne voit aucune raison pour prendre une position différente à cet égard.

6. Activité inventive

6.1. Le brevet en litige porte sur une laque aérosol capillaire.

6.2. Plus particulièrement, le brevet en litige a pour objet une laque capillaire aérosol aqueuse présentant un pouvoir laquant élevé (page 2, lignes 3 et 4).

6.3. De telles laques sont connues, notamment de l'enseignement du document D21, qui, d'après toutes les parties, représente l'état de la technique le plus proche pour l'appréciation de l'activité inventive.

6.4. Le document D21 divulgue une laque aérosol pressurisée, sans alcool, ininflammable et bénigne pour l'environnement, sans carcinogènes, en une seule phase liquide, consistant essentiellement en

a) une résine shellac en une proportion d'environ 7,5 à 9,5 % en poids par rapport au poids total de la composition ;

b) un neutralisateur pour la résine shellac en une proportion d'environ 1,4 à 3 % en poids par rapport au poids total de la composition ;

c) du diméthyléther en une proportion d'environ 30 à 38 % en poids par rapport au poids total ;

d) un agent plastifiant en une proportion d'environ 0,5 à 5 % en poids par rapport au poids total de la composition ; et,

e) de l'eau en une proportion correspondant au reste du poids de la composition,

telle que les cheveux se maintiennent humides, l'applicateur et le client ne subissent pas d'irritation respiratoire, et l'air reste inchangée (revendication 3).

L'agent plastifiant est choisi dans le groupe comprenant, entre autres, des éthers de glycols (polyéthylène, polypropylène, dérivés), des esters de citrates, l'alcool benzylique et leurs mélanges (revendication 4). L'agent plastifiant est préférablement présent en une proportion d'environ 1 à 3 % en poids par rapport au poids total de la composition (revendication 5).

Dans lesdites revendications de D21, la proportion de l'agent plastifiant se fonde sur le poids total de la composition. Par contre, dans la revendication 1 en litige, la proportion d'agent plastifiant se rapporte au poids de la résine synthétique. Bien que la définition soit différente, les proportions de l'agent plastifiant selon les deux définitions sont les mêmes ou se chevauchent amplement. D21 divulgue, pour l'agent plastifiant, par rapport au poids de résine, une proportion générale allant de 6,7 à 52,7 % en poids (soit, de 0,5/7,5 à 5/9,5 % en poids), et une proportion préférée allant de 13,3 à 31,6 % (soit de 1/7,5 à 3/9.5 % en poids). Par conséquent, la proportion entre 20. et 50 % en poids par rapport au poids de la résine, telle que définie dans la revendication 1 en litige, couvre une grande partie de la gamme 6,7 à 52,7 % et se chevauche avec la proportion préférée allant de 13,3 à 31,6 %. Elle ne saurait donc représenter une sélection. La valeur de la proportion d'agent plastifiant par rapport au poids de la résine shellac dans l'exemple 1 de D21, soit 23,5 %, retenue dans la décision attaquée, confirme cette interprétation.

6.5. La laque faisant l'objet de la revendication 1 se distingue donc de la laque faisant l'objet de la revendication 4 de D21 par la présence d'une résine filmogène synthétique, choisie parmi les polymères tels que définis dans la revendication.

6.6. La laque aérosol divulguée par D21, grâce à ses propriétés (phase aqueuse unique, absence d'alcool et de carcinogènes, emploi d'une résine naturelle, composition non polluante et ininflammable) a l'attrait d'un produit écologique mais la résine naturelle comporte les problèmes typiques des produits naturels, tels que la reproductibilité et la précipitation.

6.7. La requérante a déclaré que l'objectif du brevet n'était pas d'obtenir un produit doté de meilleures propriétés, mais une nouvelle formulation de laque aqueuse fixant les cheveux de manière convenable. Par conséquent, l'invention se propose de pourvoir à des laques aérosols aqueuses pour cheveux présentant un bon pouvoir laquant par association d'autres ingrédients que ceux de D21. Cela est conforme au brevet en litige (page 2, lignes 3 à 24).

6.8. Les exemples du brevet en litige montrent que de telles laques peuvent être produites par le choix de résines filmogène synthétiques et d'agents plastifiants dans les listes données dans la revendication 1 en litige. En particulier, la composition selon l'exemple 1 atteint un excellent pouvoir laquant. Il est plausible, et cela n'est pas contesté, que les autres compositions exemplifiées atteignent également un bon pouvoir laquant. Donc, le problème a été effectivement résolu.

6.9. D21 divulgue que les laques pour cheveux contiennent normalement les ingrédients suivants : résine filmogène, agent plastifiant, solvant, agent propulseur, parfum et autres additifs. La résine, l'agent plastifiant et l'agent propulseur peuvent comprendre des mélanges (colonne 1, lignes 15 à 19). D21 mentionne également que des résines filmogènes synthétiques, entres autres les copolymères vinylpyrrolidone/acétate de vinyle et acétate de vinyle/acide crotonique, avaient déjà été employées dans les laques. En particulier, afin de rendre les résines plus solubles dans l'eau et plus bénin leur emploi, les groupes acides de toutes ces résines filmogènes étaient neutralisés, entre autres par des alcanolamines (colonne 2, lignes 14 à 31). Néanmoins, D21 est axé sur le choix d'une résine naturelle dans une laque écologique, sans résine filmogènes synthétiques et sans alcool (colonne 3, lignes 62 à 64). Par conséquent, D21, à lui seul, ne suggère pas une laque aqueuse ayant la composition telle que définie dans le brevet en litige.

6.10. Le document D22 adresse le problème de la réduction de l'emploi des solvants volatils organiques présents dans les laques aérosols. Il exemplifie des compositions ayant un contenu réduit (80 % ou 55 %) de solvants organiques volatils, ainsi qu'une composition sans alcool contenant 33 % de solvants organiques volatils et comportant les ingrédients suivants (tableau 10) :

Amphomer LV-71............5 %

AMP.......................0,96 %

Burst RSD.................0,50 %

Eau distillée.............60,54 %

Diméthyléther.............33,00 %

Conservant................q.s.

Dans cette composition l'Amphomer LV-71 représente la résine filmogène synthétique, c'est-à-dire un polymère acrylate/acrylamide/methacrylate tel que mentionné dans le brevet en litige (exemple 2), neutralisé par une alcanolamine telle que l'AMP (D22, page 467, tableau 10 ; page 465, colonne de gauche, avant-dernier paragraphe). La composition est aqueuse et l'agent propulseur est le diméthyléther. Quant au Burst RSD, il s'agit d'un silylate de diméthicone.

Cette composition cosmétique présente un pouvoir laquant, exemplifié par le pourcentage de rétention des boucles, supérieur à celui d'une composition contenant une résine shellac (figure 4, page 467 de D22).

Par conséquent, D22 montre que l'emploi d'une résine filmogène synthétique du type Amphomer LV-71, en substitution à une résine shellac, conduit à des laques aérosols aqueuses, pressurisées par le diméthyléther, ayant un contenu réduit de solvants organiques volatils, donc écologiques, et présentant un pouvoir laquant supérieur à celui obtenu par l'emploi d'une résine shellac.

6.11. Cet enseignement correspond pour l'essentiel à la caractéristique distinctive de la revendication 1 en litige par rapport à l'enseignement de D21.

6.12. Pour l'homme de l'art guidé par l'objectif de pourvoir à d'autres laques aérosols aqueuses présentant un bon pouvoir laquant, par rapport à D21, la substitution d'une résine shellac par une résine Amphomer LV-71 était donc évidente au vu de D22.

6.13. Il s'ensuit que l'objet de la revendication 1 ne peut impliquer une activité inventive (article 56 CBE).

Requête subsidiaire 8

7.Modifications

La chambre a de fortes réserves que la suppression simultanée, dans deux listes, de 5 résines sur 7 et de 4 agents plastifiants sur 7, respectivement, puisse satisfaire aux exigences de l'article 123(2) de la CBE. En particulier, aucune composition comportant la deuxième résine et des citrates en tant que agent plastifiant n'avait été exemplifiée. Néanmoins, même si la chambre assumait, en faveur de la requérante, que la requête satisfît aux exigences de l'article 123(2) CBE, cette requête ne serait pas acceptable pour les raisons qui suivent.

8. Activité inventive

La restriction du nombre de résines et d'agents plastifiants tels que définis dans la revendication 1 ne saurait changer le problème évoqué, voir la requête subsidiaire 6 (Point 6.7, supra).

La deuxième résine de la liste de la revendication 1 correspond à la résine Amphomer LV-71 telle que mentionnée dans D22. Les trois premiers agents plastifiants sont mentionnés dans D21.

Par conséquent, par analogie avec la requête subsidiaire 6, à savoir en appliquant mutatis mutandis les mêmes arguments, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 8 n'implique pas d'activité inventive (article 56 CBE).

Il s'ensuit que la requête subsidiaire 8 n'est pas acceptable.

Requête subsidiaire 9

9. Modifications

Par rapport à la revendication 1 selon la requête subsidiaire 6, les modifications de laquelle sont recevables (point 4, supra), la revendication 1 selon la présente requête comporte, en tant que modification supplémentaire, la limitation des résines filmogènes aux terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique et leurs mélanges. En d'autres termes, les autres résines filmogènes énumérées dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 6 (ou dans la revendication 3 telle que délivrée) ont été supprimées.

La limitation à ces résines synthétiques filmogènes se fonde sur la demande d'origine : les passages de la page 2, lignes 12, 13, 29 à 31 et 38 à 39, mentionnent que, parmi les résines synthétiques énumérées, les terpolymères acétate de vinyle/tert-butylbenzoate de vinyle/acide crotonique sont celles ayant conduit à des résultats particulièrement intéressants. En s'exprimant ainsi, aucune indication de choix d'un agent plastifiant particulier n'est mentionnée. De plus, la limitation à ces résines constituait la position de repli selon la revendication 5 d'origine, bien que la définition était plus restreinte. Enfin, ces polymères sont exemplifiés dans le brevet (exemples 1, 5 et 6).

Il s'ensuit que la revendication 1 a été restreinte à la résine filmogène synthétique préférée, divulguée explicitement dans la demande d'origine.

D'ailleurs, les revendications d'origine 5 (portant sur la résine préférée) et 7 (énumérant les agents plastifiants) se rattachaient à la revendication 1 d'origine, ce qui constitue une autre base pour la combinaison entre la résine préférée et les agents plastifiants énumérés. Par conséquent, la combinaison des caractéristiques dans la revendication 1 se fonde sur une combinaison prévue dans la demande d'origine.

Les revendications 2, 3, 6, 7, 9 et 10 telles que délivrées ont été supprimées. Les revendications 4, 5, 8 et 11 telle que délivrées sont devenues les revendications 2 à 5.

Par conséquent, au vu des dites modifications occasionnées par les motifs d'opposition, donc conformes aux exigences de la règle 57bis CBE, les revendications du brevet en litige selon la requête subsidiaire 9 n'ont pas été modifiées de manière à ce que leur objet s'étende au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée, ni de façon à étendre la protection (article 123, paragraphes 2 et 3, CBE).

Il s'ensuit que la requête subsidiaire 9 est recevable.

10. Activité inventive

Le recours portait sur les documents D21 et D22. Aucun de ces documents ne divulgue la résine synthétique telle que définie dans la revendication 1. L'état de la technique le plus proche résulte encore de D21 et le problème technique ne semble pas avoir changé. Néanmoins, le document divulguant la résine synthétique revendiquée, soit FR-A-2 439 798, a été invoqué par les intimées au cours de la procédure orale sans qu'une copie ait été produite, par simple référence à la mention dans le brevet en litige. Ce document ne se trouve donc pas dans la procédure, mais sa mention change la chaîne des faits invoqués pour étayer l'attaque de l'activité inventive de l'objet du brevet en litige au vu de D21 et D22. En outre, la première instance et les parties ne se sont jamais exprimées à cet égard.

Par ailleurs, la revendication 1 selon la requête subsidiaire 9 ne constitue pas, telle quelle, une position de repli contenue dans les revendications telles que délivrées, mais elle représente une nouvelle position, qui n'a été présentée, en forme recevable, qu'au cours de l'audience.

Par conséquent, la mention par les intimées du document cité dans le brevet en litige est une réaction propre au dépôt de la requête subsidiaire 9.

Dans ces circonstances, la chambre ne peut trancher la question si l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive. Par conséquent, il est approprié de renvoyer l'affaire à l'instance du premier degré (article 111(1) CBE).

Requête subsidiaire 10

11. Au vu de la décision sur la requête subsidiaire 9, la chambre ne doit pas prendre de décision sur la requête subsidiaire 10.

12. Moyens produits tardivement

12.1. Au cours de l'audience du 4 décembre 2003, la requérante a déclaré que le problème à résoudre n'était pas d'obtenir un produit doté de meilleures propriétés, mais de pourvoir à une nouvelle formulation de laque aqueuse qui fixait les cheveux de manière convenable, avec de nouveaux produits, en l'occurence une association des 4 éléments, résine synthétique, agent plastifiant, eau et diméthyléther.

12.2. En conséquence, les résultats des essais comparatifs remis à plusieurs reprises par la requérante et par l'intimée 02, et contestés pour leur dépôt tardif et/ou leur pertinence, n'ont plus été évoqués par les parties et n'ont joués aucun rôle pour cette décision.

12.3. Par conséquent, la Chambre ne doit prendre aucune décision sur l'admissibilité dans la procédure de ces essais comparatifs.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de poursuivre la procédure.

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