European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2000:T070696.20000119 | ||||||||
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Date de la décision : | 19 Janvier 2000 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0706/96 | ||||||||
Numéro de la demande : | 90810991.1 | ||||||||
Classe de la CIB : | A23C 1/12 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Procédé de préparation d'un produit laitier évaporé | ||||||||
Nom du demandeur : | SOCIETE DES PRODUITS NESTLE S.A. | ||||||||
Nom de l'opposant : | Stichting Behartiging Octrooibelangen | ||||||||
Chambre : | 3.3.04 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Requête principale et requête subsidiaire - Nouveauté (oui) Activité inventive (non) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le présent recours a été formé contre la décision de la Division d'opposition par laquelle l'opposition formée contre le brevet européen n 0 435 822 intitulé "Procédé de préparation d'un produit laitier évaporé" a été rejetée.
II. La revendication principale du brevet tel qu'il a été délivré s'énonce comme suit :
"Procédé de préparation d'un produit laitier évaporé contenant la matière grasse stable à l'entreposage et exempt d'additifs non-lactiques, dans lequel on traite thermiquement un produit laitier dont le rapport pondéral matière grasse : matière sèche non grasse est 0,1:1 à 1,2:1, on le concentre par évaporation jusqu'à une teneur en matière sèche de 20 à 40 % en poids puis on stérilise le concentrat, caractérisé par le fait que l'on ajoute au produit laitier de départ ou au concentrat, un babeurre doux, un babeurre de matière grasse lactique anhydre provenant de la fabrication de l'huile de beurre, une fraction de babeurre doux décaséinée et délactosée, une fraction de babeurre de matière grasse lactique anhydre délactosée, une fraction de petit-lait de fromage à pâte cuite enrichie en lipides polaires ou un mélange de telles fractions, on traite thermiquement le mélange avant de le concentrer et l'on traite thermiquement puis homogénéise le concentrat avant de le stériliser et que le produit laitier évaporé final contient 0,1 à 1 % en poids de phospholipides du lait."
III. Les documents suivants ont été cités :
(1) Edith E. Hardy et al., Heat stability of concentrated milk: enhancement of initial heat stability by incorporation of food grade lecithin, Journal of Food Technology (1985) 20, 97-105
(2) H. Mulder and P. Walstra, The milk fat globule, Commonwealth Agricultural Bureaux, Farnham Royal, Bucks., England, 1974, page 30
(3) MILK the vital force, Proceedings of the XXII International Dairy Congress, The Hague, September 29 - October 3, 1986, edited by Organizing Committee of the XXII International Dairy Congress, D. Reidel Publishing Company, Dordrecht, pages 251-257
(4) R.B. Maxcy and H.H. Sommer, Fat Separation in Evaporated Milk. III. Gravity Separation and Heat Stability, J. Dairy Sci, 37 (1954) 1061-1070
(6) Newstead DF et al., International Dairy Congress, (1982), p. 49
(7) Dr. Ir. J. Koops, "De Bereiding van Gebottelde Gesteriliseerde Koffieroom", Nizo Nieuws, (1964), 10e serie, nr V, (translation into english)
(8) Dr. Ir. J. Koops, "De Bereiding en Eigenschappen Van Stromend gesteriliseerde, Aseptisch verpakte Koffieroom", Nizo Nieuws, (1968), 14e serie, nr VIII, (translation into english)
(10) US-A-2860057
IV. Les principaux motifs de la décision contestée sont, pour l'essentiel, les suivants :
L'objet des revendications 1 et 5 (et par conséquent aussi l'objet des revendications dépendantes 2 à 4) était nouveau (article 54 CBE) vis-à-vis du document (4) car, même si dans ce document les étapes du procédé revendiqué étaient mentionnées à la page 1067 en relation avec la procédure générale décrite aux pages 1062 à 1063, l'utilisation d'additifs non lactiques n'était pas à exclure.
Le brevet litigieux tel qu'il a été délivré impliquait aussi une activité inventive (article 56 CBE) parce que le remplacement de la totalité de la lécithine de soja du document (4) par la poudre de babeurre du document (3) n'était pas évident pour l'homme du métier. En effet, le procédé du document (4) qui utilisait la lécithine de soja donnait une solution aux problèmes i) de séparation de matière grasse et ii) de stabilité thermique. Rien ne pouvait garantir à l'homme du métier que par le remplacement de la totalité de la lécithine de soja dans le procédé du document (4) par la poudre de babeurre (voir document (3)), le problème de séparation de matière grasse (en plus du problème de stabilité thermique) serait résolu de la même façon qu'avec la lécithine de soja (le problème de séparation de matière grasse n'est pas mentionné dans le document (3)). Bien au contraire, ledit remplacement aurait représenté pour l'homme du métier le risque de ne pas résoudre le problème de séparation de matière grasse. En plus, rien n'indiquait à l'homme du métier que (avec ou sans remplacement de la lécithine de soja par la poudre de babeurre) le problème de la résistance à l'acidité du café serait résolu. L'utilisation des sels de correction serait évitée.
Les mêmes arguments étaient valables pour la combinaison des documents (1) et (3). De plus, aucune référence aux étapes du traitement thermique avant concentration et du traitement thermique et puis de l'homogénéisation du concentrat avant stérilisation n'était faite dans le document (1) (lesdites étapes étant essentielles pour résoudre le problème posé).
V. Le requérant (opposant) a déposé un mémoire exposant les motifs du recours, auquel l'intimée (titulaire du brevet) n'a pas répondu. Une notification exposant l'avis provisoire de la Chambre de recours a été envoyée aux parties, après quoi l'intimée a déposé une réponse écrite, à laquelle le requérant a répondu ultérieurement.
VI. Une procédure orale s'est tenue le 19 janvier 2000. L'intimée a présenté une requête subsidiaire comportant quatre revendications, la revendication de procédé 1 s'énonçant comme suit :
"Procédé de préparation d'un produit laitier évaporé contenant la matière grasse stable à l'entreposage et exempt d'additifs non-lactiques, dans lequel on traite thermiquement un produit laitier dont le rapport pondéral matière grasse : matière sèche non grasse est 0,1:1 à 1,2:1, on le concentre par évaporation jusqu'à une teneur en matière sèche de 20 à 40 % en poids puis on stérilise le concentrat, caractérisé par le fait que l'on utilise comme produit laitier de départ un lait entier, que l'on ajoute au lait entier ou au concentrat, un babeurre doux, un babeurre de matière grasse lactique anhydre provenant de la fabrication de l'huile de beurre, une fraction de babeurre doux décaséinée et délactosée, une fraction de babeurre de matière grasse lactique anhydre délactosée, une fraction de petit-lait de fromage à pâte cuite enrichie en lipides polaires ou un mélange de telles fractions, on traite thermiquement le mélange avant de le concentrer et l'on traite thermiquement puis homogénéise le concentrat avant de le stériliser et que le produit laitier évaporé final contient 0,15 à 0,35 % en poids de phospholipides du lait."
Les revendications 2 et 3 dépendent de la revendication 1. La revendication 4 porte sur un produit obtenu via un procédé selon les revendications 1 à 3.
VII. Au cours de la procédure orale, le requérant a principalement fait valoir les arguments suivants :
Requête principale
Nouveauté
L'expression "exempt d'additifs non lactiques" figurant à la revendication 1 ne se fonde sur aucune des caractéristiques divulguées dans le document (4), et constitue par conséquent un "disclaimer" inadmissible, qui doit être ignoré. La description du document (4) à la page 1067 relative à l'effet de la lécithine de soja sur la séparation et l'homogénéisation des graisses dans un mélange contenant de l'huile de beurre et de la lécithine de soja, associée à la divulgation du rapport matières grasses/matière non grasses solides et d'étapes de procédé générales dans la procédure expérimentale de la page 1062, affectent l'objection de nouveauté soulevée à l'encontre de l'objet de la revendication 1.
Activité inventive
Deux attaques ont été menées contre l'activité inventive de l'objet revendiqué :
a) La première débute avec le document (1), où il est fait référence au document (4) étayé par les documents (7), (8) et (10). Les divulgations de ces documents établissent que le problème que se propose de résoudre le brevet litigieux était connu de l'état de la technique. Les documents (1) et (4) divulguent les problèmes posés par la stabilité à la chaleur et à l'entreposage d'un lait évaporé, tandis que les documents (7) et (8) traitent de la stabilité à la chaleur que doit avoir une crème à café, et mettent les deux problèmes en rapport. Dans le document (7), au paragraphe 2 de la page 1, il est dit que "la floculation des protéines dans la crème ressemble à certains égards à l'instabilité au chauffage du lait évaporé et du lait condensé". Ainsi, le document (1), à la page 97, comporte un résumé faisant allusion à l'amélioration de la stabilité thermique du lait entier évaporé grâce à l'adjonction de lécithine de soja, et il est précisé à la page 104 que la lécithine porte la stabilité thermique à un niveau suffisant, même en l'absence totale de phosphates. Alors que les documents (1) et (4) spécifient conjointement toutes les étapes de procédé, le document (10), avec les revendications 1 et 2, divulgue la suite précise d'étapes de procédé du brevet litigieux, démontrant ainsi que le procédé revendiqué de la sorte est purement classique. En outre, à la page 1067 du document (4), il est conseillé de remplacer la lécithine de soja par une lécithine dérivée du lait car "les phospholipides du lait, grâce à leurs propriétés émulsifiantes, peuvent influer sur la stabilité thermique", comme le prouve le document (3) aux pages 352 et 255, où il est divulgué que la stabilité thermique (a) du lait évaporé et (b) du lait évaporé recombiné, est améliorée par du babeurre doux en poudre ayant une teneur relativement élevée en phospholipides.
b) La seconde attaque repose sur la combinaison des documents (4) et (3). La divulgation à la page 1067 du premier des documents précités porte à la connaissance de l'homme du métier les étapes de procédé suivantes : chauffer et condenser le lait, puis ajouter l'huile de beurre et la lécithine de soja, ensuite chauffer, homogénéiser et finaliser par des procédés généraux bien connus de l'état de la technique. A la page 1067 du document (4), il est suggéré à l'homme du métier que les phospholipides de la lécithine dérivée du lait influent favorablement sur la stabilité thermique du lait condensé, et qu'ils peuvent, de toute évidence, être utilisés avec des chances raisonnables de succès. Ceci est confirmé par le document (3), aux pages 252 et 255, selon lequel 10 à 15 % de babeurre doux en poudre améliorent la stabilité thermique du lait évaporé et du lait évaporé recombiné, le document (10) divulguant, aux revendications 1 et 2, les étapes de procédé à suivre.
Requête subsidiaire
Clarté
Un doute existe sur la question de savoir si la nouvelle revendication englobe l'utilisation de lait écrémé pour obtenir le lait évaporé, et il y a un manque de clarté au niveau du libellé de la revendication 4 portant sur un produit résultant du procédé, au cas où il est question de lait évaporé recombiné.
Nouveauté
Aucune objection n'a été soulevée eu égard à la nouveauté de l'objet revendiqué.
Activité inventive
Cette requête est née des deux limitations apportées à la revendication 1 de la requête principale. Ces restrictions se limitaient toutefois au fait de n'employer que du "lait entier" et au fait que la teneur en poids de phospholipides lactiques dans le lait évaporé doit se situer dans les 0,15-0,35 %, ce qui correspond à la fourchette stipulée dans la revendication 2 originale.
Le document (1), à la page 98, divulgue l'utilisation de lait entier, et le document (4) fait état, à la page 1062, de "raw mixed milk", à savoir de lait entier comme produit de départ, dont le rapport matière grasse/matière solide non grasse est ajusté à 0,44 au moyen de crème contenant 19 % de graisse de beurre. Les étapes de procédé peuvent être déduites de l'état antérieur de la technique précité, la teneur en phospholipides étant calculée comme suit.
Le document (3) propose d'utiliser une poudre de babeurre à 10-15 %, la teneur en phospholipides des différents produits laitiers étant précisée à la page 30 du document (2). Ainsi, le document (2) donne 0,07 à 0,13 % de phospholipides dans le babeurre, soit une concentration de 0,8 à 1,6 % dans le babeurre en poudre. Selon ces chiffres, la quantité de phospholipides dans les additifs est de 0,08-0,24 % ce qui, ajouté aux phospholipides contenus dans le lait de départ (0,07 % d'après le brevet litigieux, colonne 2, ligne 41), donne une fourchette globale de 0,15-0,31 %, laquelle correspond presque exactement avec celle spécifiée à la revendication 1.
VIII. Les arguments avancés par l'intimée dans sa réponse écrite (cf. point V supra) et lors de la procédure orale se résument comme suit :
Requête principale
Nouveauté
La divulgation du document (4) n'a pas détruit la nouveauté de l'objet de la revendication 1 car l'huile de beurre ne correspond pas au babeurre doux ou à l'un quelconque des autres additifs spécifiés, et l'utilisation d'additifs non lactiques, comme la lécithine de soja, est exclue.
Activité inventive
Il est considéré que le document (1) représente l'état de la technique le plus proche. Ce document ne comporte pas l'étape d'homogénéisation, l'étape de stérilisation a lieu dans la canette, il n'y est pas fait mention d'un traitement thermique avant la concentration, et la lécithine dérivée du babeurre doux n'est pas divulguée. C'est le seul document concernant la préparation de lait évaporé, les autres documents ayant trait à du lait évaporé recombiné constituant un produit différent. L'huile de beurre diffère des additifs employés dans le procédé selon le brevet litigieux, et la référence figurant au document (4) à l'utilisation de phospholipides d'origine lactique est tout bonnement insuffisante pour y encourager l'homme du métier malgré les divulgations des documents (7) et (8), et, de toute façon, à l'instar du document (4) et contrairement au brevet litigieux, ces deux documents recommandent l'adjonction de phosphates pour obtenir les meilleurs résultats.
La préparation de lait évaporé et la préparation de lait évaporé recombiné sont deux préparations distinctes, dont les divulgations ne peuvent être combinées. Un procédé utilisant le lait entier comme produit de départ est plus difficile à contrôler qu'un procédé prévoyant la recombinaison de composants. De surcroît, les lécithines dérivées de graines de soja n'ont pas la même constitution que celles d'origine lactique, des différences existant au niveau de la teneur en phospholipides, en protéines et en lactose, si bien que la lécithine lactique ne fonctionne pas de la même façon que la lécithine de soja. La fonctionnalité est effectivement meilleure, ce qui fonde l'activité inventive.
La stabilité du lait évaporé face à l'acidité du café est un problème épineux et le document (6), publié plus récemment que les autres documents cités, enseigne qu'il est nécessaire d'ajouter du phosphate et du babeurre en poudre pour obtenir une bonne stabilité thermique, mais stipule également que l'on peut se passer du phosphate. Il en va de même au dernier paragraphe de la page 1062 du document (4).
Requête subsidiaire
Clarté
Les modifications apportées à la revendication principale ne causent aucun manque de clarté et reposent sur la divulgation initiale de la demande de brevet européen.
Activité inventive
Le requérant procède à une analyse a posteriori afin de prouver le manque d'activité inventive. Il n'y a aucune raison de supposer que l'homme du métier, confronté au problème résolu par le brevet litigieux, aurait déduit les détails spécifiques du procédé de l'état de la technique pertinent.
IX. Le requérant demande l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen n 0 435 822.
X. L'intimée demande le rejet du recours ou, à titre de requête subsidiaire, l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base des revendications 1 à 4 présentées au cours de la procédure orale comme requête subsidiaire.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
Requête principale
2. Nouveauté
Le seul document cité est le document (4), notamment les pages 1062 et 1067, qui utilise un mélange d'huile de beurre et de lécithine de soja pour préparer un produit laitier évaporé. Le procédé selon le brevet attaqué n'utilise aucun de ces deux ingrédients. En outre, dans le contexte du brevet attaqué, l'expression "exempt d'additifs non lactiques" doit plutôt être considérée comme une caractéristique positive définissant le procédé par exclusion de certains additifs jugés superflus. Par conséquent, la Chambre n'est pas d'accord avec l'affirmation du requérant selon laquelle ladite expression constitue un "disclaimer" vis-à-vis de la divulgation du document (4). L'objet des revendications de la requête principale est donc nouveau.
3. Activité inventive, article 56 CBE
3.1. Etat de la technique le plus proche
Le document (1) fait référence au document (4) (cf. page 98), qui peut se lire en même temps puisque les deux documents traitent de la stabilité à la chaleur et à l'entreposage des laits évaporés. Le document (1) décrit un procédé utilisant des étapes de procédé classiques pour préparer du lait évaporé stable thermiquement et à l'entreposage, mentionne la nature fortement polaire de la lécithine de soja et décrit la stabilité thermique satisfaisante du lait évaporé lorsque l'on utilise de la lécithine à 0,4 % en poids en l'absence de stabilisateurs aux phosphates, et spécifie la stabilité à l'entreposage obtenue par 0,2 % de lécithine, à savoir stabilité pendant un an sans séparation des graisses. Par conséquent, il s'agit là de l'état de la technique le plus proche.
3.2. Problème à résoudre
Si l'on se réfère au document (1), le problème que se propose de résoudre le brevet litigieux est de fournir un nouveau procédé pour préparer un produit laitier évaporé stable à la chaleur et à l'entreposage.
3.3. Solution apportée
La solution au problème se trouve à la revendication 1, laquelle propose un procédé comprenant une série d'étapes opérationnelles devant être effectuées moyennant l'utilisation comme additifs de certaines fractions laitières, mais en excluant les additifs non lactiques.
3.4. Evaluation de l'activité inventive
3.4.1. La question qui se pose est de savoir si l'homme du métier aurait trouvé évident de combiner (a) la suite d'étapes de procédé revendiquée par le brevet attaqué, (b) l'utilisation de phospholipides polaires tirés du lait, (c) en l'absence d'additifs non-lactiques, afin d'améliorer la stabilité à la chaleur et à l'entreposage du lait évaporé.
3.4.2. En ce qui concerne (a) :
Bien que le procédé revendiqué comprenne plusieurs étapes de procédé, celles-ci ne sortent pas de l'ordinaire et sont de nature classique. En règle générale, elles sont connues en vertu des documents (1) et (4). La suite d'étapes individuelles à la base du procédé est décrite, par exemple, dans le document (10) lorsque les revendications 1 et 2 sont prises conjointement. Il ne peut pas y avoir d'activité inventive sur la seule base d'un procédé constitué à ce point d'étapes de procédé conventionnelles, comme c'est le cas du procédé revendiqué.
Il a été dit que le procédé consistant à produire directement du lait évaporé à partir du lait est plus difficilement contrôlable qu'un procédé prenant pour produits de départ des composants qui sont recombinés. Ceci n'est pas prouvé dans la description du brevet litigieux, et la revendication de procédé ne mentionne aucun détail, aucune température, pression ou condition de traitement de l'une quelconque des étapes de procédé, qu'il conviendrait de respecter pour mener à bien une préparation difficile. Par conséquent, force est de constater que la suite d'étapes de procédé est conventionnelle.
L'intimée n'a pas estimé que les documents où il est question de lait évaporé recombiné sont pertinents ou en rapport avec les documents concernant du lait évaporé produit directement à partir de lait. Toutefois, il ne fait aucun doute que les étapes suivies pour conférer une stabilité à la chaleur et à l'entreposage au lait évaporé préparé à partir de lait sont les mêmes que celles qui peuvent être suivies pour le lait évaporé recombiné, cf. document (1), page 98, lignes 17 à 23, et document (3), page 252, avant-dernier paragraphe, et page 255, paragraphe 5, où il est dit que la poudre de babeurre améliore la stabilité thermique des deux types de lait évaporé.
3.4.3. Concernant (b):
Le document (1) apprend à l'homme du métier que la stabilité à la chaleur et à l'entreposage (et aussi la stabilité dans le café chaud, voir le document (7)) du lait évaporé est améliorée par l'adjonction d'une lécithine de soja fortement polaire à des teneurs pondérales de 0,2-0,4 % (cf. page 98, paragraphe 2 et 3, page 99, résultats, et notamment le paragraphe 1 de la page 102).
La Chambre n'est pas d'accord avec l'intimée quand celle-ci affirme que la référence au document (4), page 1067, selon laquelle "les phospholipides lactiques, grâce à leurs propriétés émulsifiantes, pourraient influer sur la stabilité thermique", ne suffit pas à inciter l'homme du métier à ajouter de tels phospholipides au mélange de préparation. Le passage en question fait savoir à l'homme du métier que l'utilisation desdits phospholipides promet une amélioration ou un avantage. Dès lors, cette action est évidente, l'avantage éventuel ayant été prévu au document (4). Ceci est confirmé par le document (3) (cf. références ci-dessus), aux pages 10 et 11 du document (7), et à la page 8 du document (8), ces documents démontrant qu'en ajoutant du babeurre, on améliore la stabilité thermique du lait évaporé. Peu importe que la teneur en phospholipides, en protéines ou en lactose varie d'un produit laitier à l'autre puisque le procédé du brevet attaqué exige seulement que l'additif dérivé du lait contienne une certaine quantité de phospholipides polaires.
3.4.4. Concernant (c):
La Chambre s'inscrit en faux contre l'argument de l'intimée selon lequel il ressortirait des documents de l'état antérieur de la technique qu'un agent stabilisateur, p. ex. un phosphate, doit forcément être présent pour que des niveaux de stabilité suffisants soient atteints, car le document (1), à la page 102, divulgue spécifiquement que la stabilité thermique pendant la stérilisation est assurée par l'adjonction uniquement de lécithine à 0,4 % en poids. Le document (4) fait aussi état d'une fourchette de 0 à 10. onces d'un stabilisateur phosphate, au bas de la page 1062, ce qui indique que la présence d'un stabilisateur n'est pas obligatoire.
De surcroît, il est dit au document (4), à la page 1067, que les phospholipides lactiques, par leurs propriétés émulsifiantes, pourraient avoir une incidence sur la stabilité thermique du lait évaporé. Il s'agit donc là d'un encouragement direct à ajouter de tels phospholipides à n'importe quel lait évaporé connu afin d'obtenir un tel résultat.
3.4.5. Par conséquent, l'homme du métier arriverait au procédé de la revendication 1 et au produit dudit procédé sans faire preuve d'inventivité car (a) les étapes de procédé, (b) les produits de départ et l'additif dérivé du lait contenant des phospholipides polaires, (c) le fait que des stabilisateurs soient superflus, et les rapports entre ces éléments et les stabilités à la chaleur, à l'entreposage et dans le café chaud, découlent tous de façon évidente de l'état de la technique.
3.4.6. La solution au problème énoncé ci-dessus ressort donc de façon évidente de l'état antérieur de la technique. Par conséquent, il n'est pas satisfait aux exigences de l'article 56 CBE.
Cette conclusion est conforme à la jurisprudence des chambres de recours de l'OEB, et notamment aux décisions T 2/83 (JO 1984, 265, point 7 des motifs) et T 60/89 (JO 1992, 268, point 3.2.5 des motifs).
4. Requête subsidiaire
4.1. Article 123(2) et (3) CBE
Cette requête, où la revendication 1 constitue essentiellement une combinaison des revendications 1 et 2. de la requête principale, a été discutée par les parties, et il a été convenu que le remplacement du terme "lait frais" par "lait entier" est fondé dans la divulgation de la demande européenne telle que déposée et que la portée des revendications ne s'en trouve pas étendue. La Chambre estime qu'il est satisfait aux exigences de l'article précité.
4.2. Nouveauté
L'objet des revendications est nouveau pour les mêmes raisons que celles qui sont énoncées dans la requête principale (cf. point 2 supra).
4.3. Activité inventive
De l'avis de la Chambre, les autres caractéristiques qui différencient l'objet de la revendication 1 de la revendication 1 selon la requête principale, à savoir le "lait entier" et une teneur finale en phospholipides de 0,15 à 0,35 %, ne contribuent pas à impliquer une activité inventive, ces deux caractéristiques pouvant être déduites de l'état antérieur de la technique. Quant à l'utilisation de "lait entier", elle est divulguée dans l'expérience décrite à la page 1062 du document (4) où le lait évaporé est préparé à partir de lait frais ayant un rapport matière grasse/matière solide non grasse de 0,44. Quant à la fourchette de 0,15 à 0,35 % en poids de phospholipides lactiques dans le produit laitier, cette caractéristique n'est pas inventive, le requérant ayant démontré, calculs à l'appui (cf. point VII ci-dessus), que les quantités mentionnées sont classiques.
La Chambre concorde avec les calculs de la teneur en phospholipides lactiques faits par le requérant. L'intimée n'a donné aucune raison de considérer l'intervalle de valeur en question comme impliquant une activité inventive. Cet intervalle semble résulter d'une optimalisation évidente et, par conséquent, l'intervalle limité à 0,15-0,35 % n'est pas non plus synonyme d'activité inventive pour le procédé selon la présente requête. L'objection d'analyse a posteriori soulevée par l'intimée manque de pertinence.
Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire ne satisfait pas aux exigences de l'article 56 CBE.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. La décision contestée est annulée.
2. Le brevet est révoqué.