T 0280/96 () of 23.5.1997

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1997:T028096.19970523
Date de la décision : 23 Mai 1997
Numéro de l'affaire : T 0280/96
Numéro de la demande : 89402575.8
Classe de la CIB : A47B 13/08
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Plateau de table de tennis de table
Nom du demandeur : C. Cornilleau, Société dite:
Nom de l'opposant : Chiodi Roberto & C. snc, ER. ROVERA srl
Sponeta GmbH
Chambre : 3.2.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0109/82
T 0002/83
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La requérante (titulaire du brevet) a formé un recours, reçu le 21 mars 1996, contre la décision de la division d'opposition, notifiée le 26 janvier 1996, révoquant le brevet européen n° 0 362 025.

La taxe de recours a été acquittée le 21 mars 1996 et le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 21. mai 1996.

II. L'opposition, formée contre le brevet dans son ensemble par deux opposantes, était fondée sur l'absence de nouveauté et/ou d'activité inventive (article100a) CBE) de l'objet revendiqué au vu notamment des documents suivants :

- D1 : US-A-3 567 222 et

- E8 : Produkt-Information 3M - Scotch VHB, et de plusieurs usages publics antérieurs de tables supposées conformes à l'invention.

Pour prouver les usages publics antérieurs allégués, les intimées (opposantes I et II) se sont référées notamment aux documents suivants :

- RD3 : Catalogue "Rovera" de 1980.

- RD9 et RD10 : Déclaration de M. Ciusani du 16.06.1988 avec sa traduction.

Au cours de la procédure de recours, la requérante a encore cité le document D3: "Pratique du collage industriel" E.H. Schindel-Bidinelli - Technique et documentation - Lavoisier, 1992, Paris.

III. Dans son mémoire de recours la requérante a notamment fait valoir que le type de panneau utilisé pour la fabrication de la table selon D1 ne comporte pas de gauchissement structurel et que D3 enseigne de dégauchir les surfaces en contact avant de les coller pour ne pas soumettre les assemblages à des contraintes autres que le cisaillement et la compression. Selon la requérante, se servir du collage pour dégauchir les panneaux irait à l'encontre d'un préjugé technique.

La requérante a aussi estimé que RD9 et RD10 ne devaient pas être pris en considération au titre de l'état de la technique du fait des nombreuses incertitudes qui accompagnent ces documents et elle a fait remarquer que E8 se contentait de citer des exemples généraux d'application d'un ruban adhésif sans faire référence ni aux tables de tennis de table, ni à des panneaux voilés, ni à une éventuelle fonction de dégauchissage susceptible d'être exercée par le ruban. Par contre, la requérante a demandé à ce que RD9 (RD10), bien que n'appartenant pas à l'état de la technique, ne soit pas totalement ignoré car ce document exprimerait l'avis d'un expert en faveur de l'invention revendiquée.

D'après les intimées, la fonction de dégauchissage prêtée au mode de collage selon l'invention ne serait que l'effet résultant de l'assemblage du plateau déformé sur une structure de raidissage parfaitement plane, quel que soit le mode de fixation utilisé. Les intimées ont encore fait valoir que E8 divulguait les propriétés et les multiples utilisations possibles d'un ruban adhésif double face correspondant notamment à celle prévue selon l'invention. Il n'y aurait donc pas d'activité inventive à utiliser un tel ruban dans l'assemblage des tables de tennis de table.

IV. Une procédure orale a eu lieu le 23 mai 1997.

La requérante a déposé à titre principal et subsidiaire deux nouvelles revendications 1 et a fait valoir que le domaine technique de l'invention s'étendait aux tables utilisables à l'extérieur dont le plateau stratifié n'est pas à base de bois et sort gauchi de fabrication alors que D1 ne concernerait que des tables d'intérieur munies de plateaux en contreplaqué ou composés de particules de bois agglomérées qui ne sortent pas gauchis de fabrication. Le problème que l'invention a résolu ne se poserait donc pas avec les tables décrites dans D1.

D'autre part, la requérante a reconnu qu'une table d'extérieur modèle "4/B E-Eterno" ayant un panneau stratifié en Formica était déjà à la disposition du public avant la date de dépôt de la demande du brevet en cause, et que la seule différence entre cet état de la technique et le plateau selon la revendication 1 consistait en la fixation du panneau sur la structure rigide métallique.

Les deux intimées ont aussi considéré que le modèle "4/B E-Eterno" divulgué à la page 13 de RD3 représentait l'état de la technique le plus proche de l'invention et ont reconnu que ce document était muet à propos de la fixation du panneau sur la structure raidisseuse.

Au cours de la procédure orale l'intimée I a présenté une nouvelle brochure 3M-NA 87/01 publiée en janvier 1987 (document D4) concernant les "Very High Bond (VHB) Scotch Tapes"et une traduction partielle en anglais, ladite brochure étant une version plus ancienne de celle déposée le 11 février 1991 (cf. annexe 6 à la lettre du 7. février 1991) au titre de l'article 115(1) CBE.

Selon les intimées, D4 apporterait la preuve qu'à la date de priorité il était déjà connu d'utiliser un adhésif double face en remplacement de vis ou de rivets partout où un assemblage simplifié capable d'absorber des différences de dilatation était recherché.

V. La requérante (titulaire) a requis l'annulation de la décision entreprise et le maintien du brevet selon les requêtes principale et subsidiaire présentées au cours de la procédure orale.

Les intimées (opposantes I et II) ont requis le rejet du recours.

VI. Les revendications 1 s'énoncent comme suit :

- Requête principale : "Plateau pour table de tennis de table, destiné à être associé à un piètement, comportant un panneau (1) stratifié d'épaisseur inférieure à 12 mm et une structure rigide métallique (4) en forme de cadre au moins partiel, fixée à l'une (5) des faces du panneau (1) le long d'au moins trois de ses côtés, le panneau et la structure ayant des coefficients de dilatation différents, caractérisé en ce que le panneau (1) présentant, de fabrication, un gauchissement du fait de sa faible épaisseur, le moyen de sa fixation sur la structure est constitué par une matière (6) adhésive souple à l'état final, la structure et la matière adhésive constituant un moyen de dégauchissement du panneau."

- Requête subsidiaire : "Plateau pour table de tennis de table, destiné à être associé à un piètement, comportant un panneau (1) stratifié d'épaisseur inférieure à 12 mm et une structure rigide métallique (4) en forme de cadre au moins partiel, fixée à l'une (5) des faces du panneau (1) le long d'au moins trois de ses côtés, le panneau et la structure ayant des coefficients de dilatation différents, caractérisé en ce que le panneau (1) présentant, de fabrication, un gauchissement du fait de sa faible épaisseur, le moyen de sa fixation sur la structure est constitué par une matière (6) adhésive en forme de ruban adhésif double-face souple à l'état final, la structure et la matière adhésive constituant un moyen de dégauchissement du panneau."

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours :

Le recours est recevable.

2. Interprétation des revendications indépendantes :

2.1. Aux dires mêmes du requérant, l'expression : "panneau stratifié" incorporée dans les nouvelles revendications 1 doit être interprété comme désignant au sens de l'invention un panneau du type de celui décrit à la colonne 3, lignes 2 à 9 du fascicule du brevet, autrement dit un panneau feuilleté qui ne soit pas du contreplaqué à base de bois.

2.2. L'expression "souple à l'état final" (cf. colonne 5, lignes 31, 32 du fascicule de brevet) doit être interprétée à la lumière de la description comme signifiant que la matière constituant l'adhésif permet aux éléments collés "de jouer l'un par rapport à l'autre" (cf. colonne 2, lignes 30 à 35), autrement dit qu'elle conserve à l'état final la faculté de se déformer pour absorber les différences de dilatation ou de contraction entre le panneau et sa structure porteuse (cf. colonne 4, lignes 1 à 6), ladite matière conservant toutefois suffisamment de résistance à la déformation pour assurer le dégauchissage du panneau.

3. Etat de la technique le plus proche de l'invention

3.1. En accord avec les parties, la Chambre considère que l'état de la technique le plus proche de l'invention est constitué par le plateau de la table modèle 4/B E-Eterno décrit à la page 13 de RD3.

Ce plateau connu est conçu pour être utilisé à l'extérieur et se compose d'un panneau stratifié de 10. mm d'épaisseur fixé sur une armature métallique.

Dans l'éventualité où le panneau stratifié présenterait un gauchissement de fabrication, il se trouverait dégauchi par le fait d'être fixé sur une structure raidisseuse plane, l'ampleur du dégauchissage dépendant de la planéité de la structure elle-même et de la résistance à l'arrachement du moyen de fixation.

La Chambre considère donc que la "fonction de dégauchissage" attribuée dans les revendications 1 à la structure raidisseuse et à l'adhésif n'est pas une caractéristique de l'invention mais le résultat de l'assemblage étroit entre le panneau et ladite structure.

3.2. Le panneau selon l'invention ne se distingue donc de cet état de la technique le plus proche que par son mode de fixation sur la structure, la fixation utilisée sur le modèle de table "4/B E-Eterno" selon RD3 n'étant pas précisée.

4. Problème et solution

4.1. A partir de cet état de la technique le plus proche, et compte tenu des différences relevées ci-dessus, le problème que l'invention se propose de résoudre apparaît consister dans le choix, pour une table destinée à une utilisation en plein air comportant un plateau mince suffisamment léger et résistant aux intempéries (cf le fascicule du brevet : colonne 1, lignes 22 à 32 et colonne 2, lignes 12 à 16), d'un moyen de fixation dudit plateau sur sa structure porteuse métallique qui puisse à la fois absorber les différences de dilatation entre ceux-ci et les maintenir en contact étroit pour assurer la planéité (cf. le fascicule : colonne 2, lignes 24 à 35. et colonne 4, lignes 1 à 6).

4.2. La Chambre est convaincue que les moyens préconisés dans les revendications 1 apportent effectivement une solution à ce problème.

5. Activité inventive (art. 56 CBE)

5.1. Selon une jurisprudence constante des Chambres de recours de l'OEB (cf. notamment la décision T 109/82, JO OEB 1984, 473) un problème posé nouveau ne peut pas contribuer à conférer une valeur inventive à sa solution lorsque le problème consiste à remédier aux inconvénients qu'un produit révèle à l'usage, ce qui est manifestement le cas dans cette affaire.

En effet, partant de la table modèle "4/B E-Eterno" de RD3 dont le plateau stratifié est de faible épaisseur (10 mm) et fixé sur une armature métallique tubulaire, l'homme du métier constatera à l'usage qu'un moyen de fixation du plateau différent des moyens classiques s'avère nécessaire d'une part du fait de l'épaisseur réduite du plateau qui entraîne son gauchissement et rend le vissage précaire et d'autre part du fait des différences de dilatation importantes existant entre ledit plateau et la structure métallique.

5.2. En ce qui concerne la solution elle-même et pour apprécier l'activité inventive de celle-ci, il convient de déterminer si, partant de l'état de la technique le plus proche avec l'intention d'éliminer les inconvénients qu'il a constatés à l'usage, l'homme du métier aurait trouvé dans le même domaine technique ou dans des domaines voisins non seulement les moyens essentiels nécessaires à la réalisation de l'invention mais également des indications qui lui auraient permis d'escompter le perfectionnement recherché (cf. T 2/83, JO OEB 1984, 265).

Or, à la date de priorité du brevet, les moyens connus de manière certaine pour fixer les panneaux des tables de tennis de table sur les structures raidisseuses semblent se limiter aux moyens classiques tels que les vis et les rivets utilisés par exemple, d'après l'intimée II, sur les tables de tennis de table "ROVERA" (RD3), et aux colles fortes telles que la résine epoxy mis en oeuvre dans l'assemblage des plateaux de tables destinées à être utilisées à l'intérieur (cf. D1 : colonne 2, lignes 60 et 61). Toutefois, par l'intermédiaire de D4, l'homme du métier connaissait aussi l'existence d'un moyen de collage constitué d'un ruban adhésif double face très puissant (Scotch 3M VHB) utilisé pour des assemblages soumis à des contraintes sévères tel que, par exemple, la fixation des volets d'aile d'avion, des revêtements pour satellites, des éléments de panneaux routiers ou publicitaires, etc....

Ayant appris à l'usage quels étaient les inconvénients des fixations par vis et rivets lorsqu'ils étaient employés pour fixer des panneaux peu épais destinés à être utilisés en plein air, l'homme du métier était tout naturellement amenée à préférer le collage déjà expérimenté sur des tables de tennis de table d'intérieur (cf. D1).

Comme, en outre, elle avait trouvé dans D4 des indications précises sur l'aptitude de l'adhésif Scotch VHB à remplacer efficacement les rivets et les vis et à absorber les différences d'expansion thermiques des éléments d'un assemblage constitués de matériaux de différentes natures, autrement dit des indications qui lui permette d'escompter exactement les perfectionnements recherchés, le choix de cet adhésif par l'homme du métier ne relève que de son bon sens pratique et ne va pas au delà de ce qu'on est normalement en droit d'attendre de lui dès lors qu'il s'est posé le problème.

5.3. La Chambre en tire la conclusion que le perfectionnement revendiqué conformément à l'invention découle manifestement et logiquement de l'état de la technique et que l'objet des revendications 1 principale et subsidiaire n'implique pas une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

5.4. La Chambre considère que la déclaration de Monsieur Ciusani (RD9 et RD10) ainsi que l'interprétation qu'en fait la requérante (cf. section III ci-dessus) ne peuvent avoir une influence sur l'appréciation de l'activité inventive présentée ci-dessus. Le fait que le résultat obtenu grâce à l'invention soit considéré comme remarquable ne peut masquer le fait que des indications suggérant les solutions revendiquées pouvaient être trouvées aisément dans l'état de la technique comme indiqué ci-dessus.

6. En conséquence, les motifs d'opposition présentés par les intimées s'opposent effectivement au maintien du brevet européen n° 362 025 (article 102(1) CBE) et le recours du requérant doit être rejeté.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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