T 0272/95 (Recevabilité d'une opposition conjointe ou d'un recours) of 15.4.1999

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1999:T027295.19990415
Date de la décision : 15 Avril 1999
Numéro de l'affaire : T 0272/95
Décision de la Grande Chambre des recours G 0003/99
Numéro de la demande : 83307553.4
Classe de la CIB : C12N 15/16
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande : Clonage moléculaire et caractérisation de la séquence d'un autre gêne codant pour la relaxine humaine
Nom du demandeur : Howard Florey Institute
Nom de l'opposant : Aglietta, Amendola et al.
Fraktion der Grünen im EP
Chambre : 3.3.04
Sommaire : Les questions suivantes sont soumises à la Grande Chambre de recours :
I. Une opposition qui répond aux exigences de l'article 99 CBE et de la règle 55 CBE est-elle recevable si elle a été formée conjointement par deux personnes ou plus et qu'une seule taxe d'opposition a été acquittée ?
II. S'il est répondu par l'affirmative à la question 1 et qu'un représentant commun a été désigné conformément à la règle 100(1) CBE dans l'acte d'opposition, un recours est-il valable même s'il n'a pas été formé par cette personne ?
III. S'il est répondu par l'affirmative aux questions 1 et 2, quelles sont, le cas échéant, les autres exigences auxquelles une opposition conjointe ou un recours conjoint doivent répondre afin de sauvegarder les droits du titulaire du brevet?
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 20
European Patent Convention 1973 Art 24
European Patent Convention 1973 Art 58
European Patent Convention 1973 Art 59
European Patent Convention 1973 Art 78
European Patent Convention 1973 Art 99
European Patent Convention 1973 Art 108
European Patent Convention 1973 Art 112
European Patent Convention 1973 Art 125
European Patent Convention 1973 Art 133
European Patent Convention 1973 Art 134
European Patent Convention 1973 Art 150
European Patent Convention 1973 R 17
European Patent Convention 1973 R 26
European Patent Convention 1973 R 55
European Patent Convention 1973 R 60
European Patent Convention 1973 R 63
European Patent Convention 1973 R 64
European Patent Convention 1973 R 65
European Patent Convention 1973 R 66
European Patent Convention 1973 R 78
European Patent Convention 1973 R 81
European Patent Convention 1973 R 85
European Patent Convention 1973 R 90
European Patent Convention 1973 R 92
European Patent Convention 1973 R 100
European Patent Convention 1973 R 101
European Patent Convention 1973 R 102
European Patent Convention 1973 R 106
Patent Cooperation Treaty Art 9
Patent Cooperation Treaty R 2
Patent Cooperation Treaty R 90
Rules relating to fees Art 2
Mot-clé : Oppositions conjointes - Taxes dues - Représentant commun - Recours conjoints - Recevabilité - Question de droit d'importance fondamentale - Saisine de la Grande Chambre de recours
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0003/97
G 0004/97
J 0003/87
J 0035/92
T 0355/86
T 0371/92
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
G 0003/19
T 1018/98
T 0543/99
T 0315/03
T 1374/04
T 0080/05
T 0083/05
T 0666/05
T 1213/05

Exposé des faits et conclusions

RAPPEL

I. La présente décision intermédiaire a pour objet de soumettre à la Grande Chambre de recours des questions relatives à la recevabilité d'une opposition et d'un recours ultérieur formés conjointement par plusieurs personnes.

II. Le 10 janvier 1992, un groupe de 26 personnes physiques, se dénommant "Fraktion der Grünen im Europäischen Parlament" ("die Fraktion"), a fait opposition au brevet en litige, en acquittant une seule taxe d'opposition. Au cours de la procédure d'opposition, ce groupe a été désigné comme "opposant I". Le mandataire agréé agissant pour le compte de ce groupe a fait observer dans l'acte d'opposition qu'il n'avait pas été possible de déterminer si le groupe pouvait être considéré comme compris dans l'expression "toute personne" visée à l'article 99 CBE, car il ne pouvait pas être immatriculé en tant que personne morale, ses membres étant de nationalités différentes. C'est pourquoi, le même jour, une opposition distincte a été formée au nom du Président du groupe (l'opposant II dans la procédure d'opposition) et la taxe d'opposition correspondante acquittée.

III. A la demande de la division d'opposition, 18 personnes sur les 26 citées dans l'opposition conjointe (opposant I), ainsi que l'opposant II ont déposé un pouvoir.

IV. Dans une notification en date du 11 novembre 1992, la division d'opposition a déclaré qu'il semblait douteux que le statut de personne morale ou un statut équivalent puisse être reconnu à la "Fraktion". Elle a rappelé à l'opposant I qu'il lui appartenait d'apporter la preuve de son statut juridique. Elle s'est toutefois référée à la règle 100(1) CBE, et indiqué dans cette même notification que l'opposition pouvait être considérée comme ayant été formée en commun par toutes les personnes physiques individuelles, citées dans l'acte d'opposition.

V. La division d'opposition a conclu dans la décision entreprise que conformément à la règle 100(1) CBE, l'opposition I devait être considérée comme ayant été formée en commun par les personnes énumérées dans l'acte d'opposition, et qu'il importait peu que les personnes citées fussent ou non encore membres de la "Fraktion". L'opposition était donc recevable. Sur le fond, l'opposition a été rejetée et le brevet a été maintenu tel que délivré.

VI. Le 28 mars 1995, cinq personnes parmi le groupe ayant formé l'opposition I ont introduit un recours et acquitté la taxe de recours par le truchement d'un mandataire non agréé. L'opposant II n'a pas formé de recours.

VII. Dans une notification, la Chambre a notamment relevé les points suivants quant à la recevabilité du recours :

1) Y a-t-il recours, dans la mesure où l'acte de recours a été signé par une personne qui ne remplit pas les conditions visées à l'article 134 CBE?

2) Qui est le requérant ? La Chambre s'est demandée si les personnes formant recours pouvaient varier en nombre par rapport à celles qui avaient fait opposition. En tout état de cause, le doute est permis. La Chambre a suggéré que toutes les personnes formant le recours signent un pouvoir.

3) La Chambre a également demandé une liste de(s) nom(s) et adresse(s) du (des) requérant(s) en application de la règle 65 CBE.

VIII. En réponse à la notification de la Chambre, 17 personnes ont déposé le 13 juillet 1995 un pouvoir pour le mandataire agréé. Il a été indiqué qu'une personne était décédée depuis le prononcé de la décision entreprise. L'opposant II a produit une déclaration selon laquelle il entendait rester de droit partie à la procédure, conformément à l'article 107 CBE.

REQUETES ET ARGUMENTS

IX. L'intimé demande que la Grande Chambre de recours soit saisie des questions de savoir s'il est possible de remédier à des irrégularités après l'expiration du délai de recours, si un "groupe" peut former une opposition conjointe en acquittant une seule taxe d'opposition, et, dans l'affirmative, si tous les membres du groupe doivent ensuite être partie à la procédure de recours ultérieure ou si les personnes ayant initialement formé une seule opposition sont habilitées à former recours dans n'importe quelle combinaison, et enfin combien de taxes de recours il y a lieu d'acquitter.

X. Les requérants demandent le rejet de la requête en saisine.

XI. La position de l'intimé quant à la recevabilité d'une opposition et d'un recours formés par un groupe peut se résumer comme suit :

Toutes les parties ont droit à ce que les exigences en matière d'opposition et de recours soient claires et certaines, celles-ci ne devant pas donner lieu à des abus d'ordre financier ou procédural. On peut s'interroger sur la vraie identité de l'opposant, étant donné que les personnes concernées n'ont pas signé de véritables pouvoirs. Il est également douteux que le nombre d'opposants puisse varier de 26 à 5, dans la mesure où ceux-ci ont fait valoir qu'ensemble, ils ne formaient qu'une seule partie. Un acte de recours entaché d'irrégularité ne saurait être corrigé après l'expiration du délai de recours, soit en l'espèce après le 28 mars 1995, car en application de la règle 65(1) CBE, qui dispose qu'il doit "être remédié aux irrégularités avant l'expiration, selon le cas, de l'un ou l'autre des délais fixés à l'article 108", l'acte de recours doit satisfaire aux exigences de la règle 64 CBE dans le délai de recours. Enfin, selon la décision T 371/92, le requérant doit être identifié dans l'acte de recours, lequel ne peut être corrigé après l'expiration du délai de recours.

XII. Les requérants soutiennent que leur premier représentant a agi de bonne foi, sur les conseils que lui avait donnés l'OEB à sa demande. Un agent des formalités de l'OEB avait indiqué à ce représentant que les pouvoirs du mandataire agréé pouvaient être déposés ultérieurement. Les requérants étant fondés à se fier à cette information, leur recours doit être déclaré recevable. Ils ont en outre produit leurs noms et adresses. Il est inutile de saisir la Grande Chambre de recours, étant donné que la règle 100(1) CBE reconnaît aux personnes physiques le droit de former conjointement une opposition ou un recours. La décision T 371/92 ne s'applique pas, car dans cette affaire, seule la taxe de recours avait été acquittée, l'acte de recours proprement dit n'ayant pas été déposé.

Motifs de la décision

1. Toutes les autres conditions énoncées aux articles 99 et 108 CBE ayant été remplies, la recevabilité de l'opposition et du recours est fonction des réponses qui seront données aux objections soulevées par l'intimé. Les oppositions et recours formés en commun par plusieurs personnes seront appelés ci-après "opposition conjointe" et "recours conjoint".

RECEVABILITE D'UNE OPPOSITION CONJOINTE

2. Pratique suivie par l'OEB

2.1 La Chambre est consciente que par le passé, l'OEB a admis des oppositions conjointes ou formées en commun, telles que celle qui est décrite plus haut (point II) (cf. par exemple la procédure d'opposition en instance concernant la demande n 85 030 449.0 ("souris oncogène")).

2.2 Les réponses à la question des droits et obligations attachés aux personnes physiques qui agissent en commun devant l'OEB revêtent une importance considérable, car il arrive que des groupes de personnes, organisés ou non en sociétés, souhaitent se réunir pour faire opposition à un brevet, notamment dans certains domaines techniques litigieux qui sont largement couverts par les médias. Les titulaires de brevets et les opposants sont donc fondés à demander que soient définis les droits procéduraux que leur confère la CBE.

3. Opposants agissant en tant que prête-noms

3.1 L'intimé a fait valoir que le nombre de membres au sein de la "Fraktion" ayant varié, l'on pouvait se trouver dans une situation du type '"homme de paille", à savoir que l'opposition a été formée par un opposant agissant uniquement en tant que prête-nom, et que par conséquent, elle est irrecevable.

3.2 La Chambre ne saurait partager ce point de vue, au motif que toutes les personnes faisant partie de la "Fraktion" avaient été dès le départ nommément désignées. Personne d'autre ne s'est joint au groupe au stade du recours. La seule question qui se pose à cet égard semble donc concerner le statut des personnes désignées, et non leur identité.

3.3 Ajoutons enfin que la Grande Chambre de recours a récemment rendu les décisions G 3/97 et G 4/97, qui autorisent des parties agissant en tant que prête-noms à faire opposition, à condition qu'elles ne cherchent pas ce faisant à contourner des dispositions de la CBE. En l'espèce, rien ne permet de supposer que cela a été le cas.

3.4 La Chambre ne voit donc aucune raison, au regard de l'article 112 CBE, de saisir la Grande Chambre de recours sur ce point.

4. Définition de l'expression "toute personne" visée à l'article 99 CBE

4.1 Les principales questions auxquelles la Chambre doit répondre consistent à savoir si l'expression "toute personne" peut être interprétée comme signifiant qu'un groupe de personnes physiques dépourvu de statut juridique propre peut valablement former une opposition conjointe, et si une telle opposition est valablement formée au nom de tous les membres de ce groupe, bien qu'une seule taxe d'opposition ait été acquittée.

4.2 L'article 99 CBE est formulé de telle sorte qu'une opposition peut être formée soit par une personne physique, soit par une personne morale. Cette expression étant au singulier, l'interprétation qui vient immédiatement à l'esprit est que chaque personne, physique ou morale, qui forme opposition est également tenue de remplir toutes les conditions énoncées à l'article 99(1) CBE, à savoir payer aussi la taxe due, et inversement que plusieurs personnes formant opposition doivent chacune acquitter cette taxe.

4.3 Dans la CBE, le terme "mandataire" ou "représentant" est employé en relation avec les parties devant l'OEB aux articles 20, 24, 133 et 134, ainsi que (si l'on exclut pour le moment la règle 100 CBE) aux règles 17, 26, 55, 60, 63, 66, 78, 81, 85, 90, 92, 101, 102 et 106 du règlement d'exécution. Dans la plupart de ces dispositions, ce terme s'entend d'un tiers qui a été désigné pour représenter une partie devant l'OEB, cette personne étant parfois, mais pas toujours, un mandataire agréé. En revanche, à la règle 100 CBE, ce terme peut à la fois signifier un membre du groupe de demandeurs ou d'opposants et un tiers désigné conjointement par les membres du groupe constituant une partie. A cet égard, la règle 2 du règlement du PCT peut fournir des indications utiles sur la façon dont il convient d'interpréter la règle 100(1) CBE, puisqu'elle définit l'expression "représentant commun" comme "signifiant le déposant désigné comme représentant commun, ou considéré comme tel, en vertu de la règle 90.2" (règle 2.2bis PCT). La règle 90.2 PCT régit la situation où il y a plusieurs déposants qui n'ont pas désigné un "mandataire" pour les représenter tous. Cette disposition permet à l'un des déposants habilités à déposer une demande conformément à l'article 9 PCT d'être désigné par les autres déposants comme leur "représentant commun". En vertu de la règle 2.2 PCT, le terme "mandataire" doit être compris comme signifiant un mandataire désigné en vertu de la règle 90.1 PCT. La terminologie utilisée dans le PCT est donc bien claire. Conformément à l'article 150(2) CBE, troisième phrase, la terminologie de la CBE doit être interprétée de façon à correspondre à celle du PCT, étant entendu que les règles du PCT sont plus récentes que la CBE.

4.4 De surcroît, la première phrase de la règle 100(1) CBE semble indiquer qu'un "représentant commun" est à distinguer d'un "représentant" ou d'un "mandataire agréé". Selon cette disposition, qui porte sur le dépôt d'une demande de brevet par plusieurs demandeurs, le demandeur cité en premier lieu dans la demande de brevet est réputé être le représentant commun, s'il n'en a été désigné aucun. Il s'ensuit que le "représentant commun" est une personne choisie parmi le groupe de personnes qui constitue la partie en question. Ce serait donc la personne avec laquelle l'OEB correspond, à savoir le destinataire au sens de la règle 81 CBE qui reçoit cette correspondance, y répond et s'exprime d'une manière générale au nom de la partie en question. En ce cas, la Chambre préfère cependant parler de "porte-parole", car le terme "représentant" peut aisément prêter à confusion avec la désignation d'un tiers, la question des mandataires agréés et les dispositions des articles 133 et 134 CBE.

4.5 A l'origine, la règle 100(1) CBE devait uniquement s'appliquer aux déposants d'un brevet conjoint (cf. document BR/67 f/70 dd en ce qui concerne l'article 66 à l'époque). Si deux inventeurs ou plus demandent un brevet, ils se trouvent dans une situation juridique où ils sont tenus d'agir conjointement (ce que l'on appelle en allemand "notwendige Streitgenossenschaft"). Le droit français n'a probablement pas de terme équivalent, vu qu'il n'est pas permis de "plaider par procureur" (cf. point 6.4 ci-après).

4.6 L'article 58 CBE confère aux personnes physiques et morales les mêmes droits pour déposer une demande de brevet européen. Référence est faite au droit national en ce qui concerne les sociétés assimilées à une personne morale. La CBE dispose expressément à l'article 59 qu'une demande de brevet européen peut être déposée conjointement par deux demandeurs ou plus, mais ne contient aucune disposition correspondante pour les opposants. Cette différence s'explique peut-être par le fait que les codemandeurs sont tenus d'agir conjointement (cf. supra), tandis que les opposants ne le sont pas.

4.7 Bien que le champ d'application de la règle 100(1) CBE ait été initialement limité, la possibilité pour les opposants de désigner un représentant commun a été ajoutée ultérieurement lors de l'élaboration des dispositions régissant la procédure d'opposition ; cf. le règlement d'exécution révisé, article 102(1) dans le document BR/185/72, qui contient la phrase supplémentaire suivante : "Ces dispositions sont applicables à des tiers intervenant conjointement pour former une opposition". La Chambre n'a pas été en mesure d'établir ce qui a motivé cet ajout. Toutefois, en matière d'opposition, il n'a pas été adopté de disposition correspondant à l'article 59 CBE relatif aux demandes conjointes. Alors que, comme expliqué plus haut, les demandeurs sont tenus d'agir conjointement (cf. décision J 35/92 en date du 17 mars 1994, dans laquelle la chambre a déclaré non valable une action engagée par un seul des titulaires), les opposants n'ont pas d'autre intérêt commun que d'obtenir la révocation en tout ou partie du brevet. Ils peuvent avoir des intérêts divergents quant aux raisons pour lesquelles le brevet devrait être révoqué. De telles raisons ne sont pas sans importance, vu que pour un opposant, il peut être essentiel qu'un brevet soit révoqué au motif que son objet est contraire aux dispositions de l'article 53a) CBE, tandis qu'un autre opposant attachera davantage d'importance aux questions relatives à la nouveauté et à l'activité inventive.

4.8 Même si la règle 100(1) CBE autorise par analogie des opposants à désigner parmi eux un représentant commun, on ne saurait, semble-t-il, en tirer la moindre conclusion quant à l'obligation d'acquitter une ou plusieurs taxes, d'abord et avant tout parce qu'il ne semble pas raisonnable qu'une règle d'application régisse, et ce uniquement de manière implicite, un acte aussi important que le paiement d'une taxe, qui est une condition préalable à remplir en vertu des articles 99(1) et 108 CBE pour que l'opposition ou le recours soit réputé formé. L'obligation de payer des taxes est régie par plusieurs dispositions de la CBE, à commencer par l'article 78. Le règlement relatif aux taxes (RRT) précise que la plupart des taxes sont régies par la CBE elle-même, cf. la liste des taxes à l'article 2 RRT.

4.9. Il conviendrait en outre de prendre en considération l'objet des taxes, autrement dit de savoir si elles ont pour but d'éviter des oppositions ou des recours inutiles, ou bien de couvrir les ressources nécessaires à l'OEB pour traiter les oppositions et les recours jusqu'à ce qu'une décision finale soit rendue. Pour donner juste un exemple sur ce dernier point, on pourrait très bien concevoir que plusieurs opposants désignent le même représentant pour des raisons économiques, mais lui donnent des instructions séparées, par exemple sur les preuves à produire ou les arguments à faire valoir contre le brevet. Dans ce cas, le paiement d'une seule taxe ne serait pas satisfaisant, si l'on part du principe que l'OEB est censé s'autofinancer.

4.10 De surcroît, si des personnes physiques sont autorisées à former une opposition conjointe, il doit en être de même pour les personnes morales. Ainsi, des sociétés, par exemple plusieurs concurrents, seraient en mesure de se réunir pour former une seule opposition et payer une seule taxe d'opposition.

5. De la personnalité juridique et du droit des sociétés

5.1 Le régime relatif à la personnalité juridique détermine le droit pour une personne d'être reconnue en tant que titulaire de droits et d'obligations, de comparaître en tant que partie devant des autorités, etc. Avoir la personnalité juridique comprend également le droit d'engager une action en justice. Les personnes physiques et les personnes morales forment les deux catégories de personnalité. Se reporter par exemple à Halsbury's Laws of England, vol. 9(2), Corporations, page 567 s. (cité sous le nom de "Halsbury"), et M. Dauses, Handbuch des EU Wirtschaftsrechts, Verlag C. H. Beck, Munich 1993, E. III. Gesellschaftsrecht (cité sous le nom de "Dauses"). S'agissant des caractéristiques essentielles de la constitution d'une société en droit anglais, cf. Halsbury's, page 596. Selon Singer (The European Patent Convention, Revised English Edition by R. Lunzer, Sweet and Maxwell, 1995), le droit allemand autorise un plus grand nombre de types de sociétés que le droit anglais, cf. points 58.03 et 58.04 sous article 58.

5.2 En vertu du droit des sociétés, pour qu'une personne morale soit reconnue en tant que telle, elle doit être immatriculée auprès d'une autorité habilitée à recevoir de telles demandes et à examiner si l'entité en question satisfait aux exigences juridiques prescrites avant de l'immatriculer. Ces exigences peuvent varier selon le type de société créée. La constitution d'une personne morale obéit pour l'essentiel à deux motifs : 1) limiter la responsabilité des personnes physiques qui la composent, et 2) permettre à une entreprise, par exemple, d'agir sur le marché, de négocier et de conclure des contrats avec d'autres personnes morales ou autres, et d'engager des actions en justice en tant qu'entité unique, et ce indépendamment des personnes physiques qui en sont propriétaires ou qui y sont employées.

5.3 Il arrive fréquemment que des systèmes juridiques nationaux ne reconnaissent pas à un groupe de personnes la personnalité juridique, à moins qu'il ne soit formé conformément au droit national, à savoir qu'il remplit les conditions prescrites, ce qui signifie en général qu'il doit être immatriculé en tant que personne morale. La raison en est tout simplement qu'en étant formellement reconnu en tant que personne morale, il est assujetti à certaines dispositions et réglementations dans l'intérêt de la société, afin par exemple de garantir son identité et de permettre à des tiers avec lesquels il souhaite entrer en affaires de trouver son siège, d'enquêter sur sa situation et de demander réparation à l'amiable ou dans le cadre d'une procédure judiciaire.

5.4 La question de savoir si "Die Fraktion" peut être considérée comme une personne morale a été examinée devant la division d'opposition. Au regard de ce qui précède, "die Fraktion" n'a pas, aux fins de la présente opposition, une personnalité juridique distincte de celle des membres du groupe. Elle n'est donc pas une personne morale, mais un groupe de personnes physiques ayant formé une opposition conjointe. On notera incidemment que ce groupe aurait dû pouvoir être immatriculé en vertu du droit national d'un Etat de l'UE, même si ses membres sont de nationalités différentes, étant donné qu'en vertu des dispositions de l'UE, le droit national doit prévoir la possibilité d'immatriculer une personne morale lorsque les personnes physiques qui la composent ne sont pas toutes de la même nationalité (cf. Dauses, pages 2 à 4). La seule condition à remplir est de choisir un seul Etat où la future personne morale sera immatriculée en vertu du droit des sociétés de cet Etat. Une telle société selon le droit national est alors reconnue, conformément aux articles 52 et 58 du Traité CE, en tant que personne morale dans toute l'Union. Si tel avait été le cas, la personne morale ainsi créée aurait pu former auprès de l'OEB une opposition en son nom propre, car elle aurait été comprise dans l'expression "toute personne" au sens de l'article 99 CBE. Ses membres auraient pu alors varier, sans que cela n'affecte sa qualité d'opposant habilité à conduire l'opposition.

6. Droit national

6.1 Il serait également intéressant de savoir, au niveau européen, si les Etats membres admettent des actions en justice conjointes. La Chambre a donc examiné les systèmes nationaux du Royaume-Uni, de l'Allemagne, de la France, de l'Espagne et de la Suède.

6.2 Au Royaume-Uni, il est permis d'engager des actions en justice conjointes, à condition que tous les membres aient un intérêt et un grief communs, et que tous puissent bénéficier de la réparation recherchée. De telles actions sont appelées "representative actions". La juridiction s'assure que toutes les conditions attachées à une telle action sont remplies, et elle est pleinement habilitée à la rejeter, par exemple si les différentes parties n'ont pas les mêmes droits. Le demandeur qui introduit l'instance conduit la procédure. Les autres membres ne sont pas parties à part entière et ne peuvent pas en principe être condamnés aux frais et dépens. Si le représentant ne souhaite pas poursuivre la procédure, d'autres peuvent demander à être partie à part entière. Une décision obtenue par un tel groupe lie toutes les personnes représentées, ce qui signifie qu'aucun des membres représentés ne peut interjeter appel contre cette décision. Un tel membre peut cependant demander à être défendeur. Par ailleurs, plusieurs personnes peuvent également se réunir en tant que codemandeurs dans le cadre d'une seule action, soit avec l'autorisation de la juridiction, soit lorsqu'une question de droit ou de fait commune se pose dans toutes les actions. Dans ces circonstances, un ou plusieurs codemandeurs peuvent interjeter appel, même si les autres refusent d'y participer. Les codemandeurs ou parties conjointes doivent avoir le même "solicitor" et "counsel", et ne doivent pas diviser l'action ou prendre des mesures contradictoires, autrement dit ils ne peuvent pas formuler des allégations contraires à celles des autres codemandeurs. Dans un tel cas de figure, la juridiction peut exclure l'un d'eux de la procédure et l'ajouter en tant que défendeur, ou l'autoriser à engager sa propre procédure.

6.3 En Allemagne, les questions de la qualité de partie (Parteifähigkeit) et de la capacité d'ester en justice (Prozessfähigkeit) sont régies dans des dispositions générales du code de procédure civile (Zivilprozessordnung, ZPO), à savoir aux articles 50 s. L'article 59 s. en particulier porte sur le cas où plusieurs personnes engagent en commun une action en justice. Ils agissent en tant que "Streitgenossen". S'agissant des actions en annulation, le Bundesgerichtshof (BGH) a déclaré que de telles actions n'étaient pas irrecevables du fait qu'un club n'a pas la qualité de partie (BGH I ZR 149/56, Mitteilungen der deutschen Patentanwälte 1961, 199). Les noms des membres du club peuvent être indiqués à tout moment au cours de la procédure. En outre, le nombre de membres peut varier pendant la procédure sans incidence aucune sur la recevabilité. Une action en annulation donne lieu au paiement d'une taxe (art. 81(6) de la Loi sur les brevets (PatG)). Le fait qu'une action a été engagée par plusieurs demandeurs et que ceux-ci n'ont acquitté qu'une seule taxe n'affecte pas la recevabilité de cette action, à condition que les demandeurs soient représentés par la même personne, aient introduit la même requête et aient fondé leur demande sur le même motif (BGH X ZR 87/84, Mitteilungen der deutschen Patentanwälte 1987, 71; BPatG 2 Ni 34/90, GRUR 1992, 435). Quant aux procédures de recours sur opposition donnant lieu au paiement d'une taxe, le BGH a décidé que lorsque plusieurs opposants réunis au sein d'une communauté de droit ("Rechtsgemeinschaft") déposent un recours et acquittent une seule taxe de recours, et que le paiement de la taxe unique ne peut être attribué ni à la communauté ni à l'un des opposants dans le délai de recours, le recours est réputé non formé (BGH X ZB 19/82, GRUR 1984, 36). Toutefois, dans la décision X ZR 87/84 (loc. cit.), le BGH a exprimé l'avis qu'il faudra peut-être réexaminer cette conclusion à l'avenir.

6.4 En vertu du droit français, plusieurs personnes agissant conjointement peuvent habiliter l'une d'entre elles à agir en leur nom, mais elles doivent être nommément citées conformément au principe selon lequel nul ne plaide par procureur. Un groupe de personnes dépourvu de la personnalité juridique ne peut pas comparaître devant un tribunal en tant que tel. Chaque membre du groupe est partie à la procédure. Les sociétés auxquelles la personnalité juridique n'est pas reconnue ne peuvent pas interjeter appel. En principe, chaque membre de la société doit comparaître dans la procédure, même si un représentant commun a été désigné. La question de savoir si chacun doit acquitter une taxe ne se pose pas en France, étant donné que les procédures devant les juridictions judiciaires ou administratives ne donnent pas lieu au paiement de taxes.

6.5 Lorsqu'une requête est présentée par écrit auprès d'un organisme administratif en Espagne, toute notification et tout acte de procédure sont portés à la connaissance du représentant commun ou de l'une des personnes intéressées désignée à cette fin ou encore, s'il n'a été désigné personne, de la première personne citée. Notons ici que le "représentant commun" désigne un tiers, et non un "porte-parole". Chaque demandeur est habilité à agir devant l'organisme administratif, mais doit avoir la capacité juridique et la capacité d'ester en justice. Chaque demandeur peut également produire individuellement des moyens, à condition de passer par le représentant commun ou la personne désignée comme porte-parole. Enfin, chaque demandeur peut former individuellement un recours contre la décision rendue en première instance.

6.6 Selon le droit suédois, une opposition conjointe formée par plusieurs personnes physiques est traitée comme une opposition unique. La signification sera effectuée, s'il y a lieu, à chaque personne citée dans l'acte d'opposition. Chacun est habilité à interjeter appel séparément contre la décision de la première instance. Le système suédois ne prévoit pas de taxe d'opposition ni de taxe de recours.

6.7 Il ressort de ce bref tour d'horizon effectué dans seulement cinq Etats parties à la CBE que les différents droits nationaux ne sont pas uniformes. Il ne semble donc pas possible de tirer du droit national la moindre conclusion aux fins d'interpréter la CBE, comme le prévoit l'article 125 CBE.

RECEVABILITE DU RECOURS

7. Correction des irrégularités en vertu de la règle 65(1) CBE

7.1 L'intimé a tort lorsqu'il affirme qu'en vertu de la règle 65(1) CBE, tous les actes de procédure nécessaires doivent être accomplis avant l'expiration du délai de recours. Le recours et la taxe de recours doivent avoir été reçus dans le délai de deux mois prévu à l'article 108 CBE. La décision attaquée et la mesure dans laquelle elle est remise en cause doivent être indiquées dans ce même délai. S'il n'est pas satisfait à l'une de ces conditions spécifiques, le recours est irrecevable (règle 65(1) CBE ensemble la règle 64b) CBE). Par contre, les informations concernant le(s) requérant(s), telles que visées à la règle 64a) CBE, peuvent être complétées dans les conditions prévues à la règle 65(2) CBE, et ce dans un délai fixé par la chambre. Le recours ne peut être rejeté comme irrecevable que si le requérant ne remédie pas à ces irrégularités dans le délai qui lui est imparti.

7.2 En conséquence, toutes les informations relatives à l'identité du requérant peuvent être valablement fournies après l'expiration du délai de recours, ce qui signifie que le recours ne saurait être rejeté comme irrecevable pour ce seul motif. La Chambre en conclut que des irrégularités afférentes aux noms et adresses des requérants ne soulèvent aucune question de droit d'importance fondamentale qui exigerait une saisine de la Grande Chambre de recours en application de l'article 112 CBE.

7.3 La décision T 371/92 (JO OEB 1995, 324) portait uniquement sur le dépôt de l'acte de recours et le paiement de la taxe de recours. Pour qu'un recours soit considéré comme formé, chacun de ces actes doit avoir été accompli dans le délai de deux mois prévu à l'article 108 CBE (cf. point 3.1). Aussi la chambre compétente a-t-elle conclu dans cette affaire que la communication du greffe indiquant le numéro du dossier et la chambre compétente pour statuer sur l'affaire ne constituait pas une décision au titre de la règle 69(2) CBE selon laquelle un recours avait été valablement formé. Dans la présente espèce, contrairement à l'affaire T 371/92, l'acte de recours a été déposé et la taxe de recours acquittée avant l'expiration du délai en question.

7.4 La seule question qui reste à trancher en l'espèce est donc de savoir si le recours peut être considéré comme ayant été valablement formé, même s'il a été signé par un représentant non qualifié, à savoir par une personne qui n'est pas inscrite sur la liste des mandataires agréés conformément à l'article 134(1) CBE.

8. Effets d'une opposition conjointe sur le présent recours

8.1 Si l'on admet que la règle 100(1) CBE autorise une opposition formée en commun par deux personnes ou plus, et que dans ce cas, une seule taxe est due, il se pose en l'espèce le problème suivant au stade du recours.

8.2 Toutes les personnes qui se sont regroupées pour faire opposition devant la première instance sont-elles tenues d'agir conjointement pour former recours? Dans l'affirmative, toute personne qui n'a pas signé le recours ou le pouvoir donné au mandataire devra alors être invitée à préciser si elle soutient le recours et accepte d'être représentée par les cinq requérants, ou au contraire si elle n'a plus d'intérêt à former recours. En second lieu, si l'une d'elles a précédemment été désignée comme porte-parole, mais ne forme pas recours, la question se pose de savoir si la personne qui est citée après elle peut valablement former le recours.

8.3 Ces questions nécessitent une saisine de la Grande Chambre de recours.

9. Représentation

9.1 L'intimé a également soulevé la question de savoir si un recours peut être valablement formé par une personne qui n'est pas mandataire agréé près l'OEB et qui n'est pas habilitée comme avocat à agir devant les autorités nationales en qualité de mandataire en matière de brevets d'invention.

9.2 En accord avec l'intimé, la Chambre tend à considérer qu'un recours entaché dans son essence d'une irrégularité ne saurait être valablement régularisé après l'expiration du délai de recours, à moins que la jurisprudence des chambres de recours ne l'autorise sur la base d'une disposition pertinente de la CBE permettant une telle interprétation. La Chambre convient également que l'absence de représentation valable pourrait constituer une telle irrégularité, puisque la représentation par un mandataire agréé qualifié pour agir devant l'OEB constitue, pour les parties choisissant de se faire représenter, une condition fondamentale de la CBE. A cet égard, les dispositions de la CBE sont également très détaillées, ce qui montre l'importance que les auteurs de la CBE ont attachée à cette question. Ainsi, la règle 101(4) CBE dispose qu'à l'exception du dépôt d'une demande de brevet européen, les actes accomplis par le mandataire sont réputés non avenus, à moins qu'un pouvoir n'ait été déposé dans les délais (cf. également la décision T 355/86 en date du 14 avril 1987, selon laquelle une opposition a été déclarée irrecevable, au motif que le mandataire n'avait pas produit le pouvoir requis dans le délai imparti par l'OEB).

9.3 En l'espèce, l'OEB a établi que le représentant qui a formé le recours n'était pas habilité à exercer devant les autorités nationales. Les membres du groupe ayant formé l'opposition étant tous ressortissants d'Etats membres de l'OEB, ils ne sont pas tenus de se faire représenter par un mandataire agréé (article 133(1) CBE). Toutefois, dans la mesure où ils étaient représentés, mais par un mandataire qui n'était pas agréé aux fins de l'article 134 CBE, il semblerait que le recours ne soit pas recevable. Sinon, chacun aurait dû signer et former individuellement un recours avant l'expiration du délai de recours.

9.4 Or, le représentant non qualifié soutient qu'il a été conseillé par des agents des formalités de la division d'opposition de l'OEB et par des greffes des chambres de recours, dont le nom était cité dans une lettre reçue le 13 juillet 1995. Ces agents lui avaient dit qu'il pouvait toujours signer l'acte d'opposition/de recours en attendant que soit désigné un nouveau mandataire agréé. Ce conseil semble conforme à l'article premier, paragraphe 2 de la décision du Président de l'OEB en date du 19 juillet 1991 relative au dépôt de pouvoirs (JO OEB 1991, 489), selon lequel le nouveau mandataire est tenu de déposer un pouvoir particulier dans un délai imparti par l'OEB. La décision est muette sur les effets que peut avoir, le cas échéant , sur la procédure un recours formé par un mandataire non agréé. En outre, ainsi que la Chambre le leur avait suggéré dans sa notification (cf. point 2.3), les requérants ont signé un recours individuel et donné pouvoir à un mandataire agréé conformément à la CBE.

9.5 A la lumière de ces considérations, la Chambre est d'avis que si un recours introduit par un mandataire non agréé devait être réputé non formé, la jurisprudence des chambres de recours relative à la bonne foi s'applique alors en l'espèce. Selon cette jurisprudence, si une partie ne peut exiger de l'OEB qu'il lui donne des conseils, elle doit néanmoins pouvoir se fier aux conseils donnés, cf. par exemple la décision J 3/87 (JO OEB 1989, 3). Ainsi, elle ne saurait être lésée du fait qu'elle a suivi des conseils équivoques, et l'on doit considérer qu'elle a satisfait à l'exigence juridique en question. Par analogie, le présent recours pourrait encore être réputé avoir été formé en temps voulu, même s'il n'a été confirmé qu'à une date ultérieure par un mandataire agréé.

9.6 Ainsi qu'il a été constaté ci-dessus et conformément à la pratique actuelle en matière de bonne foi, il pourrait être remédié à une irrégularité entachant un recours après l'expiration du délai de recours, si la partie concernée avait légitimement tout lieu de penser qu'elle était autorisée à le faire en vertu de la CBE.

9.7 La question se pose alors de savoir si la règle 101(4) CBE (cf. point 9.2 supra), qui dispose que les actes accomplis par le mandataire, à l'exception du dépôt d'une demande de brevet européen, sont réputés non avenus si le pouvoir n'est pas déposé dans les délais, prime ou non toute attente légitime.

10. Recevabilité du recours lorsqu'une seule personne physique agit en tant que requérant

10.1 Enfin, la Chambre a également examiné si le problème qui se pose en l'espèce ne pourrait pas être résolu en demandant simplement aux requérants de désigner une personne au nom de laquelle l'opposition et le recours seraient poursuivis. Selon cette approche, l'opposition et le recours seraient valablement formés et les taxes correspondantes valablement acquittées.

10.2 Une telle approche serait également corroborée par les décisions G 3/97 et G 4/97 qui ont été récemment rendues sur la question de "l'homme de paille". La Grande Chambre de recours ayant constaté qu'une opposition n'est pas irrecevable du seul fait qu'elle a été formée pour le compte d'un tiers (réponse 1a)), il semble que l'objection soulevée en l'espèce par le titulaire du brevet, selon laquelle il a le droit de savoir qui sont les opposants et qu'en conséquence, les membres du groupe ne peuvent varier, soit moins pertinente.

10.3 Toutefois, ces décisions de la Grande Chambre de recours traitant exclusivement des opposants qui agissent en tant que prête-noms, elles ne répondent pas à toutes les questions qui se posent quant à la qualité et aux droits des parties à la procédure d'opposition. Ainsi, il y a lieu d'examiner la façon dont il convient d'organiser la représentation commune, afin d'assurer au titulaire du brevet de véritables garanties procédurales, les éventuelles restrictions auxquelles seraient soumis les opposants, ainsi que l'obligation de payer une ou plusieurs taxes d'opposition. La Grande Chambre de recours n'était pas en mesure de prévoir la présente situation dans ses décisions G 3/97 et G 4/97.

10.4 En outre, toute variation dans la composition d'un groupe d'opposants agissant conjointement pourrait équivaloir à un changement de "personnalité", notamment dans les circonstances de la présente espèce où le nombre d'opposants/requérants est passé de 26 à 18, puis à 5 et à 17.

11. Saisine en application de l'article 112 CBE

11.1 Il ressort de l'examen qui précède que les problèmes liés aux oppositions et aux recours conjoints soulèvent des questions de droit d'importance fondamentale qui, selon la Chambre, exigent une saisine de la Grande Chambre de recours en vertu de l'article 112 CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Les questions suivantes sont soumises à la Grande Chambre de recours :

1. Une opposition qui répond aux exigences de l'article 99 CBE et de la règle 55 CBE est-elle recevable si elle a été formée conjointement par deux personnes ou plus et qu'une seule taxe d'opposition a été acquittée ?

2. S'il est répondu par l'affirmative à la question 1 et qu'un représentant commun a été désigné conformément à la règle 100(1) CBE dans l'acte d'opposition, un recours est-il valable même s'il n'a pas été formé par cette personne ?

3. S'il est répondu par l'affirmative aux questions 1 et 2, quelles sont, le cas échéant, les autres exigences auxquelles une opposition conjointe ou un recours conjoint doivent répondre afin de sauvegarder les droits du titulaire du brevet?

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