European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1998:T080994.19981001 | ||||||||
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Date de la décision : | 01 Octobre 1998 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0809/94 | ||||||||
Numéro de la demande : | 87402263.5 | ||||||||
Classe de la CIB : | B44F 1/12 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Objet fiduciaire de sécurité permettant une authentification visuelle ou optique | ||||||||
Nom du demandeur : | BANQUE DE FRANCE | ||||||||
Nom de l'opposant : | GAO Gesellschaft für Automation und Organisation mbH | ||||||||
Chambre : | 3.2.05 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Décision partielle - décision tranchant une partie du principal Exposé suffisamment clair et complet pour qu'un homme du métier puisse exécuter l'invention (oui) Clarté de la revendication (oui) Modification entraînant que l'objet de la demande s'étende au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non) |
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Exergue : |
Lorsqu'une expression, utilisée dans la demande telle que déposée, s'avère être connue par l'homme du métier et implique, pour ce dernier, des notions techniques clairement définies, la divulgation d'origine de l'invention doit être comprise comme englobant lesdites notions techniques. |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre la décision de la Division d'opposition datée du 12. septembre 1994 révoquant le brevet n 0 265 323.
L'opposition avait été formée contre le brevet dans son ensemble et fondée sur
- l'article 100(a) CBE en combinaison avec les articles 52(1) et 56 CBE (manque d'une activé inventive) ;
- l'article 100(b) CBE en combinaison avec l'article 83 CBE (insuffisante exposition de l'invention), et
- l'article 100(c) CBE en combinaison avec l'article 123(2, 3) CBE (addition de nouvelle matière).
La Division d'opposition a estimé que les motifs d'opposition invoqués au titre de l'article 100(c) CBE s'opposaient au maintien du brevet, eu égard à la revendication 1 telle que modifiée au cours de la procédure orale ayant eu lieu devant elle en date du 26. juillet 1994.
II. Par courrier daté du 3 octobre 1996 parvenu à l'OEB le 8. octobre 1996, la requérante a déposé deux nouvelles versions - numérotées 1 et 2 - de la revendication 1.
La version 1 se lit :
"Objet fiduciaire ou de sécurité présentant des caractéristiques optiques permettant son identification et rendant difficile sa reproduction, caractérisé en ce qu'il comporte sur au moins l'une de ses parties une matrice organique dans laquelle sont incorporées :
- une ou plusieurs matières scintillantes, et
- une ou plusieurs matières photoluminescentes à rémanence de longue durée,
ces matières formant une cascade lumineuse de sorte que : elles absorbent le rayonnement solaire pour réémettre un mélange de rayonnements à longueurs d'ondes prédéterminées, ce mélange formant une première couleur ; elles absorbent le rayonnement ultraviolet pour réémettre un mélange de rayonnements à longueurs d'ondes prédéterminées, ce mélange formant une seconde couleur ; et elles émettent après exposition à ce rayonnement ultraviolet un mélange de rayonnements à longueurs d'ondes prédéterminées, ce mélange formant une troisième couleur visible dans l'obscurité".
La version 2 diffère de la version 1 en ce que le texte suivant de la version 1 :
"...caractérisé en ce qu'il comporte sur au moins l'une de ses parties une matrice organique dans laquelle sont incorporées :
- une ou plusieurs matières scintillantes, et
- une ou plusieurs matières photoluminescentes à rémanence de longue durée,..."
a été modifié comme suit :
"...caractérisé en ce qu'il comporte sur au moins l'une de ses parties une matrice organique dans laquelle sont incorporées au moins trois matières photoluminescentes comprenant :
- une ou plusieurs matières scintillantes, et
- une ou plusieurs matières photoluminescentes à rémanence de longue durée,...".
III. Une procédure orale devant la Chambre de recours a eu lieu le 1 octobre 1998.
La requérante a demandé que la décision frappée de recours soit annulée et que le brevet soit maintenu sur la base de la revendication 1 version 1 ou sur la base de la revendication 1 version 2 telles que déposées par écrit le 8 octobre 1996 et des descriptions modifiées correspondantes déposées à la même date.
A titre subsidiaire, elle a encore demandé que :
- en application de l'article 112 CBE, la Grande Chambre de recours soit saisie des deux questions suivantes :
Question 1 :
"Lorsqu'une invention concerne une application nouvelle d'une structure connue pouvant se présenter sous différents modes de réalisation et exprimée dans la description initiale sous une forme fonctionnelle avec un nombre limité d'exemples de modes de réalisation produisant la fonction (ici une cascade lumineuse), le contenu de la description initiale doit-il être compris comme comprenant tous les modes de réalisation de la structure connue produisant la fonction, y compris les modes de réalisation connus qui ne sont pas formellement données à titre d'exemple ?"
Question 2 :
"Lorsque la description initiale contient des exemples particuliers et une définition formelle de l'invention qui n'englobe pas tous les exemples donnés, le contenu de la description initiale doit-il être compris comme comprenant une formulation rectifiée de l'invention qui couvrirait l'ensemble des exemples donnés ?" ;
- la procédure de recours soit poursuivie par écrit concernant l'activité inventive.
L'intimée (opposante) a demandé que le recours soit rejeté et que la décision frappée de recours soit confirmée.
Alors qu'à l'issue de la procédure orale la Chambre annonçait aux parties son intention de poursuivre la procédure par écrit concernant l'activité inventive, l'intimée a demandé à titre subsidiaire que :
- pour le cas ou la Chambre ferait droit aux demandes de la requérante concernant les articles 83, 84, 123(2) CBE, la procédure quant à l'activité inventive ne soit pas poursuivie sans qu'il ait eu connaissance des motifs retenus ;
- en application de l'article 112 CBE la Grande Chambre de recours soit saisie de la question suivante :
"Ist das rechtliche Gehör eines Einsprechenden verletzt, wenn sein Antrag auf Widerruf des Streitpatents wegen eines Verstoßes gegen Art. 123(2) EPÜ durch eine Zwischenentscheidung der Beschwerdekammer zurückgewiesen wurde, ohne daß ihm die Gründe für diese Entscheidung mitgeteilt werden, insbesondere dann, wenn die 1. Instanz diesem Antrag stattgegeben hat und die Begründung Rückschlüsse auf die Qualifikation des für die Beurteilung der erfinderischen Tätigkeit relevanten Fachmannes erwarten läßt?" (texte original allemand).
IV. L'argumentation de la requérante se résume de la façon suivante.
L'élément essentiel de la divulgation de l'invention telle que déposée est constitué par le fait que cette divulgation mentionne l'expression : "cascade lumineuse" (revendication 1).
Comme divulgué dans les figures 1 et 2 et dans le texte correspondant du document FR-A-2 329 736 (considéré au cours de la procédure d'examen), une "cascade lumineuse" est réalisé par deux matières photoluminescentes seulement. Cette notion est bien connue par l'homme du métier ainsi que le démontre l'extrait du document : "Luminescence of Inorganic Solids", daté de 1977, dans lequel on peut lire qu'une "cascade lumineuse" est composée par deux couches de matières phosphorescentes ou photoluminescentes, différentes entre elles en ce qui concerne leur excitabilité par des rayonnements différents ainsi que par les longueurs d'ondes des rayonnements qu'elles réémettent.
Au vu de ce qui précède, l'homme du métier lisant la revendication 1 telle que déposée se devait de comprendre que dans l'expression "une série de matières" le mot "série" n'était pas strictement et impérativement limité à la notion très restrictive de "au moins deux matières de chaque type" retenue par la Division d'opposition et ayant servi de support à toute la motivation de la décision frappée de recours, mais que ledit terme "série" impliquait aussi la notion plus générale et connue dans l'état de la technique de "au moins une matière de chaque type".
Rien, dans la divulgation de l'invention telle que déposée, n'est en contradiction avec l'interprétation du terme "série" considérée ci-dessus qui, sur la base de ses connaissances générales, s'avère la seule à laquelle un homme du métier puisse aboutir.
La revendication 1, tant dans sa version 1 que dans sa version 2, prescrit que la matrice organique soit composée par au moins une matière scintillante et au moins une matière phosphorescente à rémanence de longue durée, donc par "au moins une matière de chaque type".
Contrairement à l'avis exprimé dans la décision frappée de recours et aux allégations de l'intimée (opposante), elle satisfait en conséquence les exigences de l'article 123(2) CBE.
L'objet de la revendication 1 (dans ses versions 1 et 2) est aussi nouveau. La nouveauté, par ailleurs, n'a jamais été contesté.
V. L'intimée a essentiellement argumenté de la façon suivante.
La revendication 1 modifiée (version 1 et/ou 2) n'est pas claire aux termes de l'article 84 CBE, car les expressions "cascade lumineuse" et "matières scintillantes" ne sont pas des définitions techniques généralement acceptées. Par conséquent, l'homme du métier ne peut pas associer à ces expressions des caractéristiques techniques clairement identifiées.
Pour les raisons suivantes la revendication 1 (version 1 et/ou 2) ne divulgue pas un enseignement pouvant être réalisé par l'homme du métier sans l'apport d'autres informations non mentionnées par ladite revendication :
a) il y a une contradiction entre les définitions de "cascade lumineuse" respectivement données dans la description et dans la revendication. Selon la description, la caractéristique essentielle d'une "cascade lumineuse" est à voir dans le fait que les spectres d'émissions et d'absorption des matières utilisées soient au moins partiellement superposés (colonne 1, lignes 30 à 47), de telle façon que des lumières d'excitation de natures différentes produisent des impressions de couleur différentes. Selon la définition donnée dans la revendication, une "cascade lumineuse" se caractérise uniquement en ce qu'elle produit des impressions de couleur différentes ;
b) l'objet de la revendication 1 s'étend aussi à des modes de réalisation qui ne comprennent que deux matières, or l'effet d'une "cascade lumineuse" ne saurait être obtenu avec seulement deux matières.
La revendication 1 (version 1 et/ou 2), ne satisfait par conséquent pas les exigences de l'article 83 CBE.
Pour les raisons suivantes, la revendication 1 (version 1 et/ou 2) ne satisfait pas les exigences de l'article 123(2) CBE :
a) l'étendue de la protection recherchée par la revendication englobe aussi des modes de réalisation qui ne comprennent qu'une seule matière scintillante et une seule matière photoluminescente, alors que la demande telle que déposée ne divulgue aucunement de tels modes de réalisation ;
b) la définition de "cascade lumineuse" donnée dans la revendication s'étend aussi à des modes de réalisation dans lesquels les spectres d'émission et d'absorption des matières photoluminescentes utilisées ne seraient pas au moins partiellement superposés, alors que la demande telle que déposée ne divulgue aucunement des tels modes de réalisation.
Motifs de la décision
1. L'intimée a allégué que la revendication 1 (version 1 et/ou 2) ne serait pas claire aux termes de l'article 84 CBE ; les expressions "matières scintillantes" et "cascade lumineuse" n'étant pas des définitions techniques généralement acceptées et donc susceptibles de conduire l'homme du métier à les associer avec des caractéristiques techniques clairement définies et identifiées.
Pour les raisons suivantes, la Chambre ne peut considérer ces allégations comme bien fondées.
1.1. Concernant l'expression "matières scintillantes", la Chambre relève que :
Le dictionnaire de la langue française : "Le Petit Robert" (édition de 1978, page 1779) donne :
- pour l'adjectif "scintillant, scintillante", la définition suivante : "qui scintille, jette des éclats intermittents" et cite, comme exemple : "étoiles scintillantes" ; et
- pour une "matière scintillante" ou un "objet scintillant", la définition suivante : "ornement de clinquant pour arbre, crèche de Noël, etc" ;
ces deux définitions spécifient les caractéristiques visuelles apparentes qu'une "matière scintillante" ou un "objet scintillant" doivent présenter et, de ce fait, définissent une classe de matières ou d'objets qui, justement, présentent des telles caractéristiques.
Cette simple constatation d'un état de fait suffirait en elle même pour conclure que les exigences de l'article 84 CBE sont satisfaites par la revendication 1 (version 1 ou 2).
Il convient toutefois d'ajouter que la demande telle que déposée divulgue et indique explicitement un certain nombre de matières qu'elle dénomme "matières scintillantes" et dont elle spécifie la structure chimique, la sensibilité à des rayonnements différents, les spectres d'absorption et de réémission qu'elles présentent vis-à-vis de ces rayonnements, ainsi que les effets lumineux et/ou de couleur qu'elles sont censées produire lorsqu'elles sont comprises dans des "cascades lumineuses" selon l'invention.
La Chambre conclut, par conséquent, qu'à défaut d'une définition préexistante et généralement acceptée de l'expression "matière scintillante", la demande telle que déposée définit elle même une classe clairement délimitée de "matières scintillantes" et conduit clairement et explicitement l'homme du métier devant réaliser l'invention définie par la revendication 1 (version 1 et/ou 2), à choisir, dans la classe de matières ainsi définie, celles sûrement adéquates à produire et assurer les effets lumineux et/ou de couleur qui doivent être produits par les "matières scintillantes" indiquées dans la revendication 1, lorsqu'elles sont comprises dans des "cascades lumineuses" selon l'invention.
1.2. Pour ce qui concerne l'expression "cascade lumineuse", la Chambre retient que l'extrait du document "Luminescence of Inorganic Solids" fait apparaître qu'à la date de priorité du brevet contesté, l'expression "cascade lumineuse" était une expression généralement acceptée par l'homme du métier et qu'elle définissait complètement une structure - une "cascade lumineuse" -, au moins pour ce qui concerne ses caractéristiques techniques fondamentales. Ceci cependant seulement et pour autant qu'une telle "cascade lumineuse" ne fusse constituée que par deux couches de matières phosphorescentes ou photoluminescentes. Ce document, en effet, utilise explicitement l'expressions "the cascade (two-layer)" pour indiquer une structure présentant les effets d'une "cascade lumineuse" selon le brevet contesté, mais constitué uniquement par deux couches de matières phosphorescentes ou photoluminescentes.
2. L'intimée a encore allégué que la revendication 1 (version 1 et/ou 2) ne divulguerait pas un enseignement suffisamment clair et complet de l'invention pour qu'un homme du métier puisse la réaliser sans l'apport d'autres informations non comprises dans cette revendication.
Pour les raisons suivantes la Chambre considère cette allégation non fondée :
2.1. l'article 84 CBE dispose que :
"les revendications définissent l'objet de la protection demandée. Elles doivent être claires et concises et se fonder sur la description" ;
la Chambre en déduit que le propos d'une revendication, en particulier d'une revendication indépendante, n'est pas en soi de divulguer un enseignement ou un exposé d'une invention qui soit suffisamment clair et complet afin qu'un homme du métier puisse la réaliser sans l'apport d'autres informations non mentionnées dans ladite revendication, mais de définir l'objet de la protection demandée en termes de caractéristiques techniques essentielles de l'invention revendiquée ;
2.2. L'article 83 CBE prescrit que :
"L'invention doit être exposée dans la demande de brevet européen de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter" ;
la Chambre en déduit qu'une objection fondée sur l'article 83 CBE ne peut se référer qu'à la divulgation de l'invention dans le brevet contesté, cette divulgation étant formée par la description, les revendications et les dessins de la demande telle que déposée.
2.3. La Chambre relève par ailleurs que l'intimée n'a jamais soutenu que la divulgation de l'invention, dans le brevet contesté et dans la demande telle que déposée, ne fusse suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter. Elle a simplement allégué qu'il y aurait une contradiction entre les définitions de "cascade lumineuse" respectivement données dans la description et dans la revendication 1. Selon la description, la caractéristique essentielle d'une "cascade lumineuse" serait à voir dans le fait que les spectres d'émissions et d'absorption des matières utilisées sont au moins partiellement superposés (colonne 1, lignes 30 à 47), de telle façon que des lumières d'excitation de nature différente produisent des impressions de couleur différentes. Selon la définition donnée dans la revendication, une "cascade lumineuse" se caractériserait uniquement en ce qu'elle produit des impressions de couleur différentes.
2.4. A cet égard la Chambre note que la revendication 1, telle que figurant dans la demande de brevet européen se lit comme suit :
"Objet fiduciaire ou de sécurité présentant des caractéristiques optiques permettant son identification et rendant difficile sa reproduction , caractérisé en ce qu'il comporte sur au moins l'une de ses parties une matrice organique dans laquelle est incorporée une série de matières de dopage scintillantes et une série de matières photoluminescentes à rémanence de longue durée formant une cascade lumineuse qui :
- absorbe le rayonnement solaire pour le réémettre à une première longueur d'ondes prédéterminée ;
- absorbe le rayonnement ultraviolet pour le réémettre à une deuxième longueur d'ondes prédéterminée, et
- émet après exposition au dit rayonnement à une troisième longueur d'ondes prédéterminée".
Il en résulte que cette revendication définissait les trois couleurs mentionnées dans la revendication 1 telle que déposée à l'occasion du présent recours (version 1 et/ou 2), même si elle ne les définissait qu'en termes de longueurs d'onde des rayonnements réémis, sans spécifier expressément que lesdits rayonnements réémis aux dites longueurs d'onde représentaient en fait trois couleurs différentes.
En effet, sur la base de ses connaissances générales, tout homme du métier sait qu'un rayonnement électromagnétique dont la longueur d'onde est comprise entre environs 0,4 µm (longueur d'onde de la lumière violette) et environs 0,7 µm (longueur d'onde de la lumière rouge), correspond à l'une des couleurs du spectre visible par l'oeil humain. Il n'est donc pas nécessaire que la revendication 1 telle que déposée à l'occasion du présent recours (version 1 et/ou 2) spécifie expressément que la première, la deuxième et la troisième longueur d'ondes réémises correspondent à une première, deuxième et troisième couleur.
La contradiction alléguée par l'intimée entre les définitions de "cascade lumineuse" données respectivement par la description et par la revendication 1 (versions 1 et/ou 2) n'est qu'une différence d'énoncé non susceptible de fourvoyer l'homme du métier. Elle ne saurait de ce fait servir de fondement à une objection d'insuffisance de description.
2.5. Concernant l'allégation de l'intimée soutenant que l'effet d'une "cascade lumineuse" ne pourrait être obtenu avec seulement deux matières, l'extrait du document "Luminescence of Inorganic Solids" divulgue la possibilité d'obtenir l'effet d'une "cascade lumineuse", justement avec une structure constituée uniquement par deux couches de matières phosphorescentes ou photoluminescentes (cf : point 1.2 supra).
3. L'intimée a finalement soutenu que la revendication 1 (version 1 et/ou 2) ne satisferait pas aux exigences de l'article 123(2) CBE parce que :
a) l'étendue de la protection recherchée par la revendication engloberait aussi des modes de réalisation qui ne comprennent qu'une seule matière scintillante et une seule matière photoluminescente, alors que la demande telle que déposée ne divulgue aucunement des tels modes de réalisation, et
b) la définition de "cascade lumineuse" donnée dans la revendication s'étendrait aussi à des modes de réalisation dans lesquels les spectres d'émission et d'absorption des matières photoluminescentes utilisées ne seraient pas au moins partiellement superposés, alors que la demande telle que déposée ne divulgue aucunement des tels modes de réalisation.
3.1. En ce qui concerne l'allégation a) supra, il convient de relever que :
- la revendication 1 telle que déposée dans la demande d'origine comportait, dans son libellé, l'expression "... formant une cascade lumineuse qui ..." et que
- cette expression était connue de l'homme du métier et représentait pour ce dernier, eu égard à la divulgation faite par l'extrait du document "Luminescence of Inorganic Solids", la divulgation exhaustive d'une "cascade lumineuse" constituée seulement par deux couches de matières phosphorescentes ou photoluminescentes (cf : point 1.2 supra).
Compte tenu de ce qui précède, la Chambre considère :
- qu'un homme du métier, à la simple lecture de l'expression "cascade lumineuse", dans la revendication 1 de la demande telle que déposée et sur la base de ses connaissances générales, n'aurait pas eu la moindre hésitation à reconnaître qu'une "cascade lumineuse" du type revendiqué pouvait, à la limite, comporter seulement deux couches formées par deux matières phosphorescentes ou photoluminescentes, et, par conséquent,
- que la divulgation de l'invention telle qu'exposée dans la demande comprenait aussi des "cascades lumineuses" composées uniquement de deux matières phosphorescentes ou photoluminescentes.
La Chambre en tire qu'à la lecture de la demande telle que déposée, un homme du métier comprend que l'expression : "une matrice organique dans laquelle est incorporée une série de matières de dopage scintillantes et une série de matières photoluminescentes à rémanence de longue durée formant une cascade lumineuse", mentionnée dans la revendication 1 telle que déposée à l'origine, doit être interprétée comme signifiant : "une matrice organique dans laquelle est incorporée une cascade lumineuse comprenant au moins une matière de dopage scintillante et au moins une matière photoluminescente à rémanence de longue durée".
3.2. Concernant l'allégation b) supra, la Chambre réitère (cf : point 2.1 supra) que le but d'une revendication, en particulier d'une revendication indépendante, n'est pas en soi de divulguer un enseignement ou un exposé d'une invention qui soit suffisamment clair et complet afin qu'un homme du métier puisse la réaliser sans l'apport d'autres informations non mentionnées dans ladite revendication, mais de définir l'objet de la protection demandée en termes de caractéristiques techniques essentielles de l'invention revendiquée.
Sur la base des ses connaissances générales, telles que représentées par l'extrait du document "Luminescence of Inorganic Solids" et par les figures 1 et 2 et le texte correspondant du document FR-A-2 329 736 (considéré au cours de la procédure d'examen), tout homme du métier sait que les effets lumineux et/ou de couleur d'une "cascade lumineuse" ne peuvent être obtenus que si les spectres d'émission et d'absorption des matières photoluminescentes utilisées sont au moins partiellement superposés; cette superposition partielle constituant la condition nécessaire et suffisante pour l'obtention des effets lumineux et/ou de couleur qu'une "cascade lumineuse" est censée produire.
Comme, pour tout homme du métier, cette condition nécessaire et suffisante est déjà impérativement impliquée dans l'expression "cascade lumineuse", il n'est pas nécessaire qu'elle soit à nouveau et expressément mentionnée dans une revendication indépendante, dès lors que l'expression "cascade lumineuse" y figure elle même.
Par ailleurs, la demande telle que déposée et le brevet tel que délivré ne mentionnent aucun mode de réalisation dans lequel les spectres d'émission et d'absorption des matières photoluminescentes utilisées ne seraient au moins partiellement superposés.
3.3. Par conséquent, et contrairement à l'avis de la Division d'opposition et aux allégations de l'intimée, les versions 1 et 2 de la revendication 1, telles que déposées avec la lettre datée du 3 octobre 1996, satisfont aux exigences de l'article 123(2) CBE.
4. La Chambre considère que l'objet fiduciaire selon ladite revendication 1 (version 1 et/ou 2) est nouveau par rapport à l'état de la technique versé au dossier et que la nouveauté de cet objet est représentée par ses caractéristiques telles que mentionnées dans la partie caractérisante de la revendication 1 (version 1 et/ou 2).
La nouveauté, par ailleurs, n'a jamais été contestée.
5. Concernant les requêtes en saisine de la Grande Chambre de recours :
celles présentées par la requérante apparaissent sans objet du fait que le bien fondé de son argumentation concernant les questions qu'il aurait fallu soumettre est retenu ;
la requête présentée par l'intimée s'avère pareillement sans objet car les motifs concernant le rejet des motifs d'opposition autres que celui concernant l'activité inventive (qui reste en cause) lui sont communiqués par la présente décision partielle.
6. L'activité inventive n'ayant pas pu être discutée à l'occasion de la procédure orale, la Chambre décide de statuer sur l'ensemble des moyens examinés supra par décision partielle, c'est-à-dire par décision tranchant définitivement une partie du principal, et de poursuivre par écrit la procédure pour ce qui concerne l'activité inventive.
DISPOSITIF
Pour ces motifs il est statué comme suit :
1. La décision frappée de recours est annulée.
2. La revendication 1 selon la requête principale dénommée version 1 et la requête subsidiaire dénommée version 2 satisfont aux exigences des articles 83, 84 et 123(2) CBE.
3. Les requêtes en saisine de la Grande Chambre de recours présentées par la requérante sont rejetées.
4. La procédure devant la présente Chambre est poursuivie par écrit pour ce qui concerne l'activité inventive.
5. La requête en saisine de la Grande Chambre de recours présentée par l'intimée est rejetée.