European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1994:T109692.19940316 | ||||||||
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Date de la décision : | 16 Mars 1994 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1096/92 | ||||||||
Numéro de la demande : | 87420006.6 | ||||||||
Classe de la CIB : | C08L 83/04 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | C | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Composition organopolysiloxane élastomère vulcanisable à chaud, à résistance à la réversion et à la tenue aux huiles améliorées | ||||||||
Nom du demandeur : | Rhône-Poulenc Chimie | ||||||||
Nom de l'opposant : | Bayer AG | ||||||||
Chambre : | 3.3.03 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive - analyse ex post facto Inventive step - ex post facto analysis Inventive step - indicia - suprising effect |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n 87 420 006.6 déposée le 8. janvier 1987, pour laquelle a été revendiquée la priorité du 9 janvier 1986 fondée sur un dépôt antérieur en France, a donné lieu le 7 novembre 1990 à la délivrance du brevet européen n 235 048 sur la base de neuf revendications.
La revendication 1 s'énonce comme suit :
"Composition élastomère organopolysiloxane vulcanisable à chaud, caractérisée en ce qu'elle comporte :
A. 100 parties d'au moins une gomme diorganopolysiloxane ayant une viscosité supérieure à 1 000 000 mPa.s à 25 C formée d'un enchaînement de motifs de formule R2SiO,bloquée à chaque extrémité de sa chaîne par un motif de formule R2SiO0,5 et/ou un radical de formule OR', les symboles R, identiques ou différents, représentant des radicaux méthyle, éthyle, n-propyle, phényle, vinyle et trifluoro-3,3,3 propyle, au moins 60 % en nombre de ces radicaux étant des radicaux méthyle, et au plus 3 % molaire des motifs siloxy étant des motifs organovinylsiloxy, le symbole R' représentant un atome d'hydrogène, un radical alkyle ayant de 1 à 4 atomes de carbone, le radical betaméthoxy-éthyle.
B. 5 à 150 parties d'une charge renforçante.
C. 0,1 à 7 parties d'un peroxyde organique.
D. 0,01 à 5 parties d'un composé organosilicique comportant, relié à l'atome de silicium, au moins un groupe acryloxyalkyle ou méthacryloxyalkyle.
E. 0,1 à 20 parties d'au moins un produit choisi parmi les oxydes et les hydroxydes d'un métal alcalino- terreux."
Les revendications 2 à 8 sont des revendications dépendantes concernant des compositions préférées selon la revendication 1. La revendication 9 vise un article moulé fabriqué à partir d'une composition selon l'une quelconque des revendications 1 à 8.
II. Le 13 juin 1991, une opposition a été formée à l'encontre du brevet délivré au motif que l'objet des revendications 1 à 9 n'impliquait pas d'activité inventive (article 100a) CBE). Cette objection s'appuyait sur les deux documents suivants :
(1) DE-A-2 504 535, et
(2) DE-A-2 934 202.
III. Par décision signifiée le 2 novembre 1992, la division d'opposition a rejeté l'opposition, estimant que le motif invoqué ne s'opposait pas au maintien du brevet européen tel que délivré. Tout en reconnaissant que les compositions revendiquées semblaient résulter, à première vue, d'une simple combinaison des enseignements des documents (1) et (2), lesquels décrivaient des compositions comprenant respectivement les constituants A, B, C, E, et A, B, C, D selon le brevet attaqué, la division d'opposition constatait que la présence simultanée des additifs D et E améliorait non seulement les propriétés mécaniques, mais également la tenue aux huiles chaudes. Cette amélioration dépassant en amplitude dans les deux cas l'effet que l'homme du métier était en droit d'attendre sur la base d'une simple addition des effets individuels, la division d'opposition concluait à l'existence d'un effet de synergie et, par conséquent, d'une activité inventive.
IV. Le 11 décembre 1992, la requérante (opposante) a formé un recours à l'encontre de cette décision, en acquittant simultanément la taxe prescrite et en exposant les motifs du recours dans un mémoire déposé le 18 février 1993. Les arguments présentés dans ce mémoire, puis au cours de la procédure orale qui s'est tenue le 16 mars 1994, visaient à démontrer (i) que l'amélioration des propriétés des élastomères n'avait pas été objectivement établie, et (ii) qu'en l'absence d'effet technique, les compositions revendiquées ne pouvaient prétendre résoudre aucun problème technique. En particulier, une comparaison entre les propriétés des compositions revendiquées et les propriétés des compositions selon l'exemple du document (1), qui représentaient l'état de la technique le plus proche, n'avait pas été faite.
V. L'intimée (titulaire du brevet) a fait valoir en riposte que la combinaison des compositions décrites dans les documents (1) et (2) n'était pas évidente. En effet, alors que le composé vinyltrialkoxysilane D' mis en oeuvre facultativement dans le document (1) permettait d'accroître la résistance à la rupture à la traction, les (méth)acryloxyalkylalkoxysilanes D avaient pour fonction dans le document (2) de conférer à un élastomère fortement chargé la même résistance à la rupture qu'un élastomère faiblement chargé ; l'homme du métier ne pouvait donc en tirer aucune information exploitable dans la perspective d'améliorer la tenue aux huiles chaudes. L'amélioration simultanée des propriétés mécaniques obtenue par addition du seul composé D était inattendue, car rien ne laissait entrevoir qu'un composé destiné à améliorer un effet mesuré dans l'air pouvait être également responsable de l'amélioration d'un effet mesuré dans l'huile.
Le 9 mars 1994, l'intimée a déposée à titre de requête subsidiaire un jeu de quatre revendications, dans lesquelles les compositions étaient définies de manière plus spécifique.
VI. La requérante conclut à l'annulation de la décision attaquée et à la révocation du brevet.
L'intimée conclut au rejet du recours ou, à titre de requête subsidiaire, au maintien du brevet sur la base des revendications 1 à 4 déposées le 9 mars 1994.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106 à 108 ainsi qu'à la règle 64 CBE ; il est recevable.
2. Après examen des documents cités par la requérante, la chambre est parvenue à la conclusion que l'objet du brevet attaqué tel que défini dans la revendication 1 est nouveau. L'objection de défaut de nouveauté n'étant pas soulevée dans le mémoire de recours, il n'y a pas lieu d'approfondir cette question.
3. Le brevet attaqué concerne une composition organopolysiloxane élastomère vulcanisable à chaud, à résistance à la réversion et à la tenue aux huiles améliorées. De telles compositions sont décrites dans le document (1) que la chambre, comme la division d'opposition, considère comme l'état de la technique le plus proche. Ces compositions, qui sont vulcanisables à chaud, comprennent (a) 100 parties d'un organopolysiloxane ayant une viscosité de 106 à 2 x 108 Pa.s à 25 C, (b) 0,1 à 10 parties d'un peroxyde organique, (c) 25 à 60 parties d'une silice choisie parmi les silices fumées, les silices de précipitation et leurs mélanges, (d) 5 à 80 parties d'une charge minérale, et (e) 0,1 à 15 parties d'oxyde de magnésium (revendication 1), ce qui correspond aux constituants A, B, C et E selon le brevet attaqué. Selon une modalité de mise en oeuvre particulière, un vinyltrialkoxysilane D' peut être ajouté en vue d'accroître la résistance à la rupture (page 18, paragraphe 4 ; page 22, exemple). Malgré cette amélioration, les propriétés mécaniques des compositions ABCD'E restent insuffisantes ; de plus, leur tenue aux huiles chaudes laisse également à désirer.
A la lumière de cet art antérieur, le problème technique à résoudre peut être vu dans la mise à disposition de compositions organopolysiloxaniques ayant à la fois des propriétés mécaniques et une tenue aux huiles chaudes améliorées.
Selon le brevet attaqué, ce problème est résolu en utilisant comme constituant D un composé organosilicique comportant, relié à l'atome de silicium, au moins un groupe (méth)acryloxyalkyle.
4. La question de savoir si ce double objectif était effectivement atteint a été au centre des débats lors de la procédure orale.
4.1. En effet, la requérante s'est appuyée sur le fait que l'intimée n'avait produit aucun exemple permettant une comparaison directe entre les compositions ABCD'E selon l'exemple du document (1) et les compositions revendiquées, ni dans le brevet attaqué, ni dans ses mémoires de réponse déposés au cours des procédures d'opposition et de recours. De plus, elle a évoqué ses propres essais de laboratoire, sans toutefois en fournir les résultats, selon lesquels les améliorations visées ne seraient pas obtenues.
De son côté, l'intimée a fait valoir que les compositions ABCD'E étaient peu intéressantes en pratique et qu'une comparaison avec les compositions ABCE, qui correspondaient à l'enseignement général du document (1) et étaient plus représentatives de l'état de la technique, était bien plus probante. Quant aux essais effectués par la requérante, il convenait d'en accueillir les résultats avec réserve en raison des valeurs fluctuantes des mesures prises à la limite de la résistance des matériaux.
4.2. Pour sa part, la chambre estime que la question ne peut être tranchée qu'en procédant par recoupements sur la base d'éléments de comparaison qui n'ont été contestés ni par l'une, ni par l'autre des parties.
Le rapport d'essais accompagnant le mémoire de réponse de l'intimée déposée le 14 juin 1993 met clairement en évidence que les additifs D et E renforcent mutuellement leurs effets. Il ressort en particulier des essais 2 à 4, qui ont été réalisés avec des compositions comprenant respectivement les constituants ABCD, ABCE et ABCDE, que la présence conjointe de D et E se traduit par une amélioration simultanée des propriétés mécaniques et de la tenue aux huiles chaudes dépassant en amplitude le niveau que l'homme du métier était en droit d'attendre sur la base des effets individuels.
Par contre, rien dans le document (1) ne suggère que la composition particulière ABCD'E présente une tenue aux huiles chaudes améliorée par rapport aux compositions de base ABCE, autrement dit que la présence de D' renforce l'action de E.
De plus, selon l'introduction du document (2) (page 3, paragraphe 3 à page 5, paragraphe 3), qui sera discuté ci-dessous, les compositions ABCD possèdent une résistance à la rupture supérieure aux compositions ABCD'.
Il n'est donc pas douteux que la composition ABCDE est effectivement supérieure, aussi bien en ce qui concerne les propriétés mécaniques que la tenue aux huiles chaudes, à la composition ABCD'E.
4.3. Ceci établit que la mise en oeuvre du constituant D, tel que défini dans le brevet attaqué, permet effectivement de résoudre le problème technique ci-dessus.
5. Il reste à examiner si l'objet du brevet attaqué implique une activité inventive, en particulier si cet objet découle de manière évidente des documents considérés.
5.1. Même si le document (1) envisage diverses modifications des propriétés des compositions de base ABCE par incorporation d'additifs appropriés (page 15, paragraphes 2 et 3), rien ne suggère une amélioration des propriétés mécaniques allant au-delà de celle obtenue par addition de D' (page 18, paragraphe 4 ; page 22, exemple) ; de même, la possibilité d'améliorer la tenue aux huiles, qui est normalement assurée par la présence simultanée de silice, d'une charge minérale inerte et d'oxyde de magnésium (page 4, paragraphe 2 ; page 5, paragraphe 3 ; page 7, paragraphe 1, dernière phrase ; page 13, paragraphe 2), n'est pas évoquée.
Il est donc évident que ce document n'est pas susceptible de fournir par lui-même à l'homme du métier les éléments lui permettant de résoudre le problème technique défini ci-dessus.
5.2. Les compositions organopolysiloxanes décrites dans le document (2) représentent en quelque sorte le pendant des mélanges élastomères selon le document (1), en ce sens qu'elles contiennent un additif D censé conférer une bonne résistance à la rupture, mais pas de constituant équivalent à E. Elles contiennent, en effet, (a) 100 parties en poids d'un organopolysiloxane et d'une silice renforçante ayant une surface spécifique de 150 à 400 m2/g, (b) 25 à 300 parties en poids d'une charge minérale contenant du silicium, dont la dimension moyenne des particules est inférieure à 25 µm et la surface spécifique est inférieure à 50 m2/g, (c) 0,1 à 5 parties en poids d'un peroxyde organique, et (d) 0,08 à 0,3 parties en poids d'un composé organosilicique porteur d'un groupe (méth)acryloxyalkyle (revendication 1 et page 8, paragraphe 3, lignes 1 à 5), ce qui correspond aux constituants A, B, C et D selon le brevet attaqué. Parmi d'autres propriétés, la tenue aux huiles peut être améliorée par incorporation d'additifs appropriés (page 9, paragraphe 4). Cette mention peut tout au plus conduire l'homme du métier à adopter une solution conventionnelle pour résoudre une seule des composantes du problème technique défini ci-dessus. Quant à l'autre composante, à savoir l'amélioration des propriétés mécaniques, ce document ne fournit aucune indication permettant d'aller au-delà du niveau conféré par D.
5.3. Même si formellement les compositions selon le brevet attaqué semblent résulter d'une simple combinaison des compositions ABCD'E ou ABCE selon le document (1) et des compositions ABCD selon le document (2), un tel argument ne peut être avancé à l'encontre de la brevetabilité de la revendication 1 sans la connaissance de l'objet du brevet attaqué. En effet, la combinaison de ces enseignements n'est pas évidente dans la perspective du problème à résoudre, car celui-ci ne se réduit pas à la seule amélioration des propriétés mécaniques des compositions ABCD'E selon le document (1), pour laquelle le document (2) offrirait effectivement une solution prometteuse, mais comprend en plus l'amélioration de la tenue aux huiles chaudes, pour laquelle l'art antérieur ne propose aucun élément de solution.
Comme l'a fait valoir l'intimée au cours de la procédure orale, l'homme du métier n'avait pas de raison d'attendre de la présence conjointe de D et de E à la fois des propriétés mécaniques supérieures à celles obtenues par addition du seul constituant D et une teneur aux huiles chaudes supérieure à celle obtenue par addition du seul constituant E. L'incorporation d'un silane porteur d'un groupe (méth)acryloxyalkyle dans les compositions divulguées dans le document (1) conduit donc à un résultat technique inattendu qui, selon la jurisprudence des chambres, est révélateur d'une activité inventive (voir décisions T 4/83, OJ EPO 1983, 493, point 7 ; T 39/82, OJ EPO 1982, 419, point 7.2.3 ; et T 301/90 du 23. juillet 1990, point 3.7, non publiée).
5.4. Pour ces diverses raisons, la chambre conclut que l'objet de la revendication 1 ne découle pas d'une manière évidente des documents cités et que, par conséquent, il implique une activité inventive.
6. La revendication 1 étant acceptable, il en est de même des revendications dépendantes 2 à 8, qui concernent des compositions préférées selon la revendication 1, et de la revendication 9, qui vise un article moulé fabriqué à partir d'une composition selon l'une quelconque des revendications 1 à 8, et qui sont donc toutes basées sur le même concept inventif.
7. Comme il a été fait droit à la requête principale de l'intimée, il n'y a pas lieu de considérer sa requête subsidiaire.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.