T 0904/91 (Craquage de charges lourdes / TOTAL) of 18.1.1995

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1995:T090491.19950118
Date de la décision : 18 Janvier 1995
Numéro de l'affaire : T 0904/91
Numéro de la demande : 86401464.2
Classe de la CIB : C10G 11/18
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Procédé et dispositif pour le craquage catalytique de charges d'hydrocarbures, avec contrôle de la température de réaction
Nom du demandeur : Compagnie de raffinage et de distribution Total France
Nom de l'opposant : Mobil Oil Corporation
Chambre : 3.3.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54(2)
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 113(1)
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 123(3)
European Patent Convention 1973 R 67
Mot-clé : Nouveauté - divulgation implicite (non)
Activité inventive (oui) - solution non évidente
Vice substantiel de procédure - issue du recours
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0219/83
T 0035/85
T 0298/90
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0446/95
T 0019/97

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n 86 401 464.2 a donné lieu à la délivrance du brevet européen 0 208 609.

II. La requérante (opposante) a fait opposition à ce brevet et a requis sa révocation pour défaut de nouveauté et d'activité inventive.

Parmi les documents mentionnés au cours de la procédure d'opposition, seuls les trois documents suivants ont une importance pour la présente décision :

(1) US-A-3 894 932,

(3) US-A-4 218 306, et

(11) Modern Petroleum Technology (1980), pages 648-651.

III. Par décision signifiée le 16 septembre 1991, la division d'opposition a estimé que les revendications telles que modifiées au cours de la procédure d'opposition remplissaient les dispositions de l'article 123 (2) et (3) CBE et les exigences de nouveauté et d'activité inventive étaient satisfaites.

Plus particulièrement, le procédé était censé se distinguer des procédés connus par le fait que 1) la température d'équilibre résultant de la mise en contact du catalyseur et de la charge lourde d'hydrocarbures vaporisée était au moins supérieure de 40 à 100°C à la température finale de réaction en fin de colonne, cette température étant toutefois supérieure au point de rosée des hydrocarbures présents les plus lourds, et 2) la température du mélange de la charge vaporisée et des particules du catalyseur était abaissée d'environ 10 à 70°C par l'injection d'un fluide auxiliaire.

De plus, le procédé revendiqué ne découlait pas d'une manière évidente des documents considérés, étant donné qu'il n'était pas suggéré de limiter la formation de coke dans le craquage thermique de charges lourdes d'hydrocarbures par une mise en contact d'une telle charge avec un catalyseur à une température supérieure de 40. à 100°C à la température finale de réaction et d'abaisser la température de ce mélange d'environ 10 à 70°C par injection en aval de la zone de mélange d'un fluide auxiliaire.

Le dispositif revendiqué permettant la mise en oeuvre du procédé revendiqué était également considéré remplir les conditions de brevetabilité.

IV. La requérante a formé un recours contre cette décision et a, en substance, fait valoir que les revendications ne remplissaient pas les conditions de nouveauté et d'activité inventive.

V. Lors de la procédure orale, qui a eu lieu le 18. janvier 1995, l'intimée (titulaire du brevet) a déposé un jeu de revendications modifiées (voir point VII ci-dessous), ainsi qu'une description et des dessins adaptés.

Quant aux nouvelles revendications, la requérante a maintenu que la définition "une charge lourde d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possède un point d'ébullition supérieur à 500°C" n'excluait pas les gazoles et qu'il était implicite dans un procédé FCC (Fluid Catalytic Cracking) que la température finale de réaction reste supérieure au point de rosée des hydrocarbures présents les plus lourds et que la différence de température entre le point de mélange de l'hydrocarbure avec le catalyseur et la fin de la colonne ainsi que l'abaissement de la température par injection d'un fluide auxiliaire représentaient des valeurs normales. Par conséquent, toutes les caractéristiques du procédé et du dispositif revendiqués étaient décrites de façon explicite ou implicite dans les documents (1) à (3).

En outre, elle considérait que le problème à résoudre par le procédé revendiqué n'était pas de réduire la formation de coke, mais d'améliorer la vaporisation de la charge lourde pour éviter un surcraquage et que ce problème était résolu par un contrôle de la température obtenu par injection d'un liquide auxiliaire.

Etant donné que des procédés FCC pour des charges lourdes étaient déjà connus et que le contrôle de la température de craquage par injection d'un liquide auxiliaire était également connu, le procédé revendiqué ne pouvait pas être considéré comme inventif.

Finalement, la requérante a estimé que la division d'opposition n'aurait pas dû faire référence au document (11) sans avoir donné à l'opposante la possibilité de prendre position au préalable et que, par conséquent, la Chambre devrait reconnaître qu'un vice substantiel de procédure avait été commis.

VI. Selon l'intimée, une charge définie comme étant "une charge lourde d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possède un point d'ébullition supérieur à 500°C" n'était pas assimilable à une charge pétrolière dite gazole. En outre, le procédé revendiqué concernait une combinaison d'un thermocraquage d'une charge lourde d'hydrocarbures conforme à la définition donnée et d'un craquage catalytique après injection d'un fluide auxiliaire ; un tel procédé n'était ni décrit, ni suggéré dans l'état de la technique. De plus, le dispositif revendiqué pour la mise en oeuvre de ce procédé se distinguait des dispositifs connus au moins par les moyens de régulation du débit du fluide auxiliaire.

Par ailleurs, le but de l'invention revendiquée n'était pas seulement d'améliorer la vaporisation de la charge lourde afin d'éviter un surcraquage, mais de réduire la formation de coke sur le catalyseur ; ceci était obtenu en limitant fortement la durée du thermocraquage des charges lourdes effectué au départ et en continuant par un craquage catalytique des hydrocarbures plus légers dans des conditions plus douces. Une telle séquence d'opérations ne pouvait se déduire de l'état de la technique cité par la requérante.

VII. Les deux revendications indépendantes 1 et 5 s'énoncent comme suit :

"1. Procédé de craquage catalytique d'une charge lourde d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possède un point d'ébullition supérieur à 500°C, ce procédé comprenant une phase de mise en contact en lit fluidisé dilué et à court temps de contact à flux ascendant ou descendant dans une colonne, dans des conditions de craquage, de ladite charge et de particules d'un catalyseur de craquage, une phase de séparation de catalyseur usé et de la charge craquée en aval de la zone d'injection de ladite charge, au moins une phase de strippage du catalyseur usé, puis une phase de régénération dudit catalyseur dans des conditions de combustion du coke déposé sur celui-ci et, enfin, une phase de recyclage du catalyseur régénéré à l'alimentation de ladite colonne, ce procédé étant caractérisé en ce que l'on injecte dans ladite colonne du catalyseur régénéré dans des conditions telles que la température d'équilibre résultant du mélange de la charge vaporisée et du catalyseur soit au moins supérieure à 500°C et au moins supérieure de 40 à 100°C à la température finale de réaction en fin de colonne, et en ce que l'on injecte en aval de cette zone de mélange, mais en amont de la phase de séparation, un fluide auxiliaire vaporisable dans les conditions de l'injection, de façon telle que la température du mélange de la charge vaporisée et des particules du catalyseur soit abaissée d'environ 10 à 70°C par rapport à la température initiale qui résulte de la mise en contact du catalyseur et de la charge, de manière à permettre à la réaction de craquage catalytique de s'effectuer dans des conditions plus douces et indépendantes de ladite température initiale, la température finale de réaction étant toutefois supérieure au point de rosée des hydrocarbures présents les plus lourds, l'injection du fluide auxiliaire étant effectuée à une distance telle de l'injection de la charge que l'abaissement de température en résultant a lieu moins d'une seconde après l'injection de la charge et de préférence moins d'une demi-seconde après cette injection."

"5. Dispositif pour la mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1, ce dispositif comprenant une colonne de craquage à flux ascendant (2) ou descendant (20), des moyens (4, 22 ; 1, 26) pour alimenter sous pression ladite colonne avec une charge d'hydrocarbures et des particules d'un catalyseur de craquage régénéré, un moyen de séparation des produits de la charge craquée et des particules de catalyseur usé, au moins un moyen de strippage (7) par au moins un fluide des particules de catalyseur usé, au moins une unité de régénération dudit catalyseur par combustion du coke déposé sur celui-ci, des moyens de recyclage du catalyseur régénéré auxdits moyens d'alimentation et, en aval de la zone de mélange dans ladite colonne de la charge d'hydrocarbures et des particules du catalyseur régénéré, au moins un moyen d'injection (9, 26) d'un fluide auxiliaire dans des conditions de débit, de température et de pression telles que l'injection de ce fluide auxiliaire diminue la température de la zone réactionnelle située immédiatement en aval de façon indépendante de la température de mélange, ce dispositif étant caractérisé en ce qu'il comporte des moyens (10, 12 ; 27, 29) de régulation du débit dudit fluide auxiliaire aptes à maintenir la température de la zone réactionnelle en aval de l'injection du fluide auxiliaire à une valeur de consigne qui est adaptée à la nature de la charge à craquer, au type de catalyseur utilisé et à son mode de régénération."

VIII. La requérante conclut à l'annulation de la décision attaquée et à la révocation du brevet.

L'intimée conclut au maintien du brevet sur la base du jeu de revendications déposé lors de la procédure orale.

IX. A l'issue de la procédure orale le maintien du brevet, sous la forme telle que modifiée pendant la procédure orale, a été prononcé.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Modifications

2.1. La revendication 1 diffère de la revendication initiale 1 en ce qu'elle précise les conditions de température au moment de l'injection du fluide auxiliaire ainsi que l'importance de l'abaissement de température résultant de cette injection, conformément à ce qu'est décrit dans la demande initiale (voir page 6, ligne 27 ; page 7, lignes 5 à 8 et 12 à 17 ; page 11, lignes 7 à 10 ; et les revendications 3 et 4).

Les revendications 2 et 3 ne sont rien d'autre que des combinaisons des revendications initiales 5 et 6, respectivement 7 et 8 (voir aussi page 6, ligne 26 et page 9, lignes 29 à 33, respectivement page 6, ligne 27 et page 9, ligne 34 jusqu'à la page 10, ligne 3) et la revendication 4 correspond à la revendication initiale 9.

La revendication 5 concerne un dispositif pour la mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1 résultant de la combinaison des caractéristiques décrites dans les revendications initiales 10 et 12, tandis que la revendication 6 correspond essentiellement à la revendication initiale 13.

2.2. Les signes de référence 11, 15 et 28 dans les figures 1, 2. et 3 et les revendications 12 et 13 telles que déposées, ne figurent plus dans les revendications 5 et 6 ainsi que dans les figures 1, 2 et 3 soumises à la procédure orale. Une telle modification n'a cependant aucune influence sur l'étendue de la protection.

2.3. Par conséquent, les revendications produites pendant la procédure orale remplissent les conditions énoncées dans l'article 123 (2) et (3) CBE, ce qui n'a d'ailleurs pas été contesté par la requérante.

3. Nouveauté

3.1. Par le terme "une charge lourde d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possède un point d'ébullition supérieur à 500°C" le procédé revendiqué est clairement limité à un procédé de craquage dans lequel le catalyseur est mis en contact avec une charge d'hydrocarbures dont 10. % en poids de la totalité a obligatoirement un point d'ébullition supérieur à 500°C.

En l'absence de preuve du contraire, la Chambre considère que, compte tenu de la quantité d'hydrocarbures ayant un point d'ébullition élevé (c'est-à-dire difficiles à vaporiser dans les conditions usuelles d'injection - voir colonne 2, lignes 26-33 du brevet attaqué) dans une telle charge, l'homme du métier dispose de suffisamment d'éléments d'information permettant de faire la distinction entre une charge telle que définie dans le procédé revendiqué et un gazole lourd (c'est-à-dire une coupe de distillation comprenant au plus des traces de produits résiduaires, comme asphaltes et soufre), conformément à la définition donnée dans le document (11), page 648, deuxième paragraphe (voir T 219/83, JO OEB, 1986, 211).

Le procédé de craquage revendiqué selon la revendication 1 du brevet attaqué est donc défini à la fois par la nature de la charge obligatoirement utilisée dans ce procédé et par les différentes étapes a) de craquage, b) de séparation, c) de strippage, d) de régénération et e) de recyclage, ainsi que par l'ensemble des conditions de craquage indiquées, dont les plus caractéristiques sont les suivantes : i) une température d'équilibre initiale supérieure à 500°C, ii) une injection d'un fluide auxiliaire vaporisable conduisant à un abaissement de la température d'environ 10 à 70°C moins d'une seconde après le mélange de la charge avec le catalyseur, et iii) une température finale de réaction en fin de colonne de 40 à 100°C inférieure à la température initiale.

3.2. Selon la requérante, le document (1) décrit une température initiale de 1000°F (537.7°C) (voir la colonne 3, ligne 20), une durée de conversion totale de 1 à 12 secondes (voir la colonne 2, ligne 29) et une injection d'un fluide auxiliaire. Bien que ce document ne contienne aucune information permettant de connaître soit l'abaissement de température résultant de l'injection du fluide auxiliaire, soit la différence entre la température initiale et la température finale de réaction, la requérante a fait valoir que ces caractéristiques ne représentent en fait que les connaissances ordinaires de l'homme du métier et que, par conséquent, ces caractéristiques sont à considérer comme étant décrites de façon implicite. De plus, elle a avancé que des charges lourdes conformes à celles définies dans la revendication 1 sont déjà connues (colonne 5, lignes 44 à 49) et que l'homme du métier, en considérant la durée de conversion totale de 1 à 12 secondes, interpréterait la représentation partielle de la conduite pénétrant dans la base du "riser" (élévateur) dans la figure I comme indication que le fluide auxiliaire a été injecté à une distance telle que l'abaissement de température résultant de cette injection est effectué en moins d'une seconde à partir du moment du mélange de la charge avec le catalyseur.

La requérante a fait valoir en outre que toutes les caractéristiques du procédé revendiqué sont également connues du document (3) et, plus particulièrement, de l'essai "MCCR" du Tableau 2.

3.3. Selon la jurisprudence constante des Chambres de recours de l'OEB, une antériorité ne peut détruire la nouveauté que lorsque l'objet revendiqué en dérive immédiatement et sans ambiguïté. Cela veut dire, dans le cas présent, qu'un document ne peut être considéré comme portant atteinte à la nouveauté que si toutes les caractéristiques du procédé revendiqué y sont décrites et que le document contient également une suggestion de combiner ces caractéristiques comme dans le procédé revendiqué.

Le document (1) concerne la conversion d'hydrocarbures riches en C3-C4 en un mélange riche en produits aromatiques par un procédé comprenant une étape de mise en contact de ces hydrocarbures avec un catalyseur spécifique suivie d'une étape de mélange avec un fluide auxiliaire dont le point d'ébullition est au moins celui d'un gazole (voir revendication 1 et colonne 2, lignes 33-48) ou une charge d'hydrocarbures plus lourde (voir colonne 5, lignes 46-50). En outre, contrairement à l'affirmation de la requérante, ce document ne contient pas la moindre indication permettant de penser que le procédé connu implique également la terminaison rapide de l'étape de craquage initial à haute température (thermocraquage) par injection d'un liquide auxiliaire moins d'une seconde après le moment de contacter la charge avec le catalyseur, résultant en un abaissement de la température du mélange d'environ 10 à 70°C. En l'absence de preuve, toute autre interprétation du contenu du document (1) serait abusive.

Le document (3) concerne un procédé de craquage dans lequel on fait réagir à une température élevée une charge d'hydrocarbures produisant peu de coke avec un catalyseur à une température de 515 à 593°C avant d'injecter une charge produisant plus de coke que de charge initiale 0.5 à 4 secondes après le début de la réaction de conversion (voir colonne 3, lignes 44-66 et colonne 4, lignes 21-31). Le procédé décrit dans ce document ne peut toutefois être considéré comme détruisant la nouveauté du procédé revendiqué puisqu'il n'a pas été montré par la requérante qu'il remplit toutes les conditions énoncées dans l'actuelle revendication 1. Ainsi, par exemple, le document (3) ne contient aucune information permettant de conclure que par l'injection d'une deuxième charge un abaissement de température se produit moins d'une seconde après l'injection de la première charge. L'essai "MCCR" ne peut pas servir à combler cette lacune étant donné que dans ce tableau ni le moment d'injection de la deuxième charge ni l'abaissement de la température résultant de cette injection n'est indiqué.

De plus, aucun des procédés discutés ci-dessus ne décrit le craquage de charges d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possèdent un point d'ébullition supérieur à 500°C.

3.4. En ce qui concerne le dispositif selon la revendication 5, la requérante n'a plus contesté la nouveauté. En effet, aucun des documents cités ne permet de mettre en cause la nouveauté du dispositif tel que revendiqué.

3.5. Par conséquent, l'objet des revendications 1 à 6 doit être considéré comme nouveau.

4. Activité inventive

4.1. Selon la description du brevet attaqué, le craquage de charges pétrolières, dont plus de 10 % en poids possèdent un point d'ébullition supérieur à 500°C, à des températures élevées a le désavantage de former des dépôts de coke importants à des températures élevées ; une solution à ce problème a été proposée dans le document

(13) US-A-4 427 537,

dans lequel la charge à craquer est pulvérisée, mais sans que l'on ait injecté par la suite un fluide auxiliaire.

Toujours selon la description, la solution préconisée dans cet état de la technique consiste à améliorer la pulvérisation de la charge dans la zone d'injection du catalyseur (voir colonne 2, lignes 26 à 49). Cette solution est dite présenter le désavantage que la mise au point de réacteurs à courts temps de séjour est nécessaire et que le contrôle de la réaction est très difficile, ce qui conduit à la formation de produits difficiles à valoriser (voir la colonne 2, ligne 50 jusqu'à la colonne 3, ligne 14).

Etant donné que le document (13) est le seul document décrivant à la fois le craquage d'une charge d'hydrocarbures ayant un point d'ébullition très élevé et les difficultés résultant de la formation de coke (voir colonne 1, lignes 10-16), la Chambre ne voit pas parmi les documents cités par la requérante un document plus proche de l'invention en cause que le document (13). Par conséquent, le document (13) est considéré comme étant le point de départ le plus pertinent pour apprécier l'activité inventive, d'autant plus que la requérante avait adopté dans son mémoire du 22 janvier 1992 la même approche.

4.2. A partir de la divulgation de (13) le problème à résoudre était celui de réduire la formation de coke sur le catalyseur pendant l'opération de craquage (voir colonne 4, lignes 3 à 9).

4.3. Selon le brevet attaqué ce problème est résolu en conduisant le craquage selon le procédé revendiqué.

Afin de démontrer qu'une réduction de formation de coke sur le catalyseur est effectivement obtenue par le procédé revendiqué des résultats comparatifs illustrant que par le procédé revendiqué effectivement moins de coke est formé (1.09 % contre 1.50 %) (voir la colonne 9, lignes 1 à 40) sont présentés dans l'exemple 1. A cette fin, l'élément de référence n'est pas le procédé selon le document (13), mais le procédé de craquage tel que décrit dans FR-A-2 574 422, qui n'est pas un état de la technique selon l'article 54(2) CBE.

Une telle base de comparaison n'est pas inappropriée pour démontrer que le procédé revendiqué conduit à une réduction du dépôt de coke, puisque, selon la jurisprudence des Chambres de recours de l'OEB, des essais comparatifs sont tout à fait pertinents si la comparaison a été faite non pas avec l'état de la technique le plus proche, mais avec une variante de cet état de la technique ayant plus de caractéristiques communes avec le procédé revendiqué et qui est donc non seulement encore plus proche de l'invention en cause, mais permet également de faire ressortir encore mieux l'effet avantageux des caractéristiques distinctives de cette dernière (voir décision T 35/85 du 16. décembre 1986, point 4, et T 298/90 du 26. octobre 1992, point 3.4, non publiées au JO OEB).

Dans le cas présent, le procédé revendiqué est comparé à un procédé qui s'en distingue uniquement par la température du mélange initiale et par l'absence d'injection de fluide auxiliaire (eau) après 1 seconde. La Chambre arrive donc à la conclusion qu'une comparaison a été faite avec un procédé ayant plus de caractéristiques en commun avec le procédé revendiqué que l'état de la technique le plus proche disponible et qu'il a été montré que la formation de coke est réduite. Compte tenu des résultats obtenus, la Chambre conclut que la solution revendiquée répond bien au problème posé et que le résultat recherché peut être effectivement obtenu par le procédé tel que revendiqué.

4.4. Il reste à examiner si la solution revendiquée implique une activité inventive.

La requérante considérait que, compte tenu des informations trouvées dans l'état de la technique, l'homme de métier aurait attendu une diminution substantielle du dépôt de coke, étant donné que a) des procédés de craquage dans lesquels un liquide auxiliaire est injecté en aval de la zone de mélange de catalyseur avec une charge d'hydrocarbures sont connus de (1) et (3), et b) la régulation de la température du procédé de craquage en choisissant la durée entre le mélange initial et l'injection est une technique bien connue.

Le document (1) concerne essentiellement un procédé de conversion non pas de charges lourdes d'hydrocarbures, mais d'un mélange d'hydrocarbures riche en C3-C4 avec un catalyseur spécifique avant ou après la mise en contact de celui-ci avec un gazole ou un produit ayant un point d'ébullition supérieur à celui du gazole, dans le but de convertir en produits aromatiques les hydrocarbures en C3-C4 introduits ou formés par contact avec le catalyseur (voir colonne 2, lignes 1 à 6 et 33 à 38, et colonne 5, lignes 44 à 49). Comme dans ce document le problème de la formation de coke n'est pas mentionné, la Chambre ne voit pas comment ce document pourrait suggérer le procédé revendiqué à l'homme du métier en l'absence de toute suggestion d'effectuer un craquage initial extrêmement court à haute température avant d'injecter une autre charge (fluide auxiliaire) afin de réaliser l'effet de trempe tel que revendiqué.

Le document (3) concerne un procédé de craquage dans lequel une charge d'hydrocarbures, comme le gazole, est mélangée avec un catalyseur à une température supérieure à 500°C et dans lequel, en outre, après 0.5 à 4 secondes une charge d'hydrocarbures produisant un taux plus élevé de coke est injectée (voir colonne 3, ligne 38 jusqu'à la colonne 4, ligne 9). Dans ce procédé de craquage, qui a le double avantage d'améliorer la conversion de gazoles en gazolines et de diminuer la formation de produits obtenus par surcraquage (voir colonne 2, lignes 10 à 20), la différence entre la températures initiale et la température finale de réaction en fin de colonne et l'abaissement de température après injection du second fluide sont définis comme dans le procédé revendiqué (voir colonne 4, ligne 48 à 64).

Toutefois, ce document, qui propose l'injection de la charge lourde d'hydrocarbures dans le procédé de craquage comme liquide auxiliaire, enseigne aussi que la mise en contact des charges lourdes avec le catalyseur au moment initial de craquage a le désavantage de conduire à la formation de coke et que ceci ne peut être évité qu'en choisissant une charge pétrolière injectée comme fluide auxiliaire ayant un point d'ébullition supérieur à 343,3°C (650°F) (voir la colonne 9, lignes 22 à 32). Comme ces deux mesures vont dans le sens contraire de ce qui est préconisé dans le procédé revendiqué, la solution du problème ci-dessus ne saurait découler de l'enseignement du document (3).

De plus, comme, d'une part, le document (1) ne concerne pas le craquage de charges lourdes d'hydrocarbures et, d'autre part, le document (3) déconseille de mettre le catalyseur en contact avec des charges lourdes d'hydrocarbures au début du procédé de craquage, la Chambre ne voit pas comment une combinaison des enseignements de ces deux documents aurait pu suggérer le procédé revendiqué.

4.5. Pour les mêmes raisons, le dispositif spécialement conçu pour la mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1 n'est pas suggéré dans l'état de la technique.

4.6. Par conséquent, le procédé revendiqué et le dispositif revendiqué ne découlent pas d'une manière évidente des enseignements des documents (1) et (3).

5. Les motifs de l'opposition ne font donc pas obstacle au maintien du brevet tel que modifié pendant la procédure orale.

6. Vice substantiel de procédure

La règle 67 CBE dispose que le remboursement de la taxe de recours est ordonné lorsqu'il est fait droit au recours par la Chambre, si un tel remboursement est équitable en raison d'un vice substantiel de procédure. Comme dans le cas d'espèce il ne peut pas être fait droit au recours, la taxe de recours ne peut pas être remboursé et par suite, la question de savoir s'il y a eu vice substantiel de la procédure ou non ne se pose pas en ces termes. A toutes fins utiles, la Chambre entend cependant faire les remarques suivantes :

Le document (11) ayant été cité par la division d'opposition pour la première fois dans sa décision de maintenir le brevet sous forme modifiée, la Chambre ne conteste pas que la requérante n'a pas eu la possibilité de connaître ce document avant la prise de décision par la première instance.

Ce document est un ouvrage standard dans le domaine technique en question et peut donc servir à illustrer les connaissances générales de l'homme du métier à une certaine date (en l'occurrence en 1980).

Les deux parties ayant donné à la division d'opposition des interprétations différentes du terme "charge lourde d'hydrocarbures, dont plus de 10 % en poids possède un point d'ébullition supérieur à 500°C" pendant la procédure écrite, la division d'opposition a expliqué comment ce terme devait être interprété et, pour justifier cette interprétation, elle a fait référence à ce document. Dans ces conditions, la Chambre n'est pas convaincue que la citation de ce document par la division d'opposition doive être considérée comme une introduction d'un nouveau motif au sens de l'article 113(1) CBE ayant pour effet un vice substantiel de procédure.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition afin de maintenir le brevet avec les revendications 1 à 6, la description et les dessins (pages 1 à 14), tels que produits à la procédure orale du 18 janvier 1995.

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