T 0182/88 (Jeu distinct de revendications) of 3.11.1988

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1988:T018288.19881103
Date de la décision : 03 Novembre 1988
Numéro de l'affaire : T 0182/88
Numéro de la demande : 83303996.9
Classe de la CIB : A61K 39/385
Langue de la procédure : EN
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Titre de la demande : -
Nom du demandeur : University of California
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.01
Sommaire : Lorsqu'une décision relève d'un pouvoir d'appréciation (en l'espèce: jeu, de revendications séparé pour l'Autriche depose après l'envoi de la notification établie conformement à la règle 51(4) CBE, ancienne version), il convient d'en exposer les motifs et, ce faisant, de tenir compte des facteurs qui, dans l'affaire en question, sont pertinents au regard du droit, sans se borner à examiner si les faits sont absolument identiques à ceux d'une affaire dans laquelle une décision a déjà été rendue (en l'occurrence, décision T 166/86 - 3.3.2, "Jeu distinct de revendications/HENKEL", en date du 25 septembre 1986, JO OEB 1987, 372). C'est la finalité de ce pouvoir d'appréciation dans son contexte et dans celui de la CBE en général qui permet de déterminer quels sont ces facteurs (en l'espèce, mise en balance des intérêts respectifs de l'Office et des demandeurs, l'Office désirant notamment une conclusion rapide de la procédure alors que le demandeur tient à obtenir un brevet valable dans tous les Etats contractants).
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 123(1)
European Patent Convention 1973 Art 167(2)(a)
European Patent Convention 1973 R 51(4)
European Patent Convention 1973 R 86(3)
Mot-clé : Jeu de revendications séparé pour l'Autriche
Modification proposée déposée après l'envoi de la notification établie conformément à la règle 51(4) CBE (ancienne version)
Principes régissant l'exercice du pouvoir d'appréciation prévu à la règle 86(3) CBE
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0183/89
T 0375/90
T 0860/91
T 0237/96
T 0569/96
T 0755/96
T 0142/97
T 0951/97
T 0989/99
T 0749/02
T 0497/03
T 1837/07

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 83 303 996.9, dans laquelle huit Etats contractants, dont l'Autriche étaient désignés, a été déposée le 8 juillet 1983. Le 1er octobre 1985, la division d'examen a émis une notification à laquelle le demandeur a répondu par une lettre en date du 17 janvier 1986, en déposant une version modifiée de la description et des revendications afin de tenir compte des points soulevés dans la notification ; le demandeur terminait sa lettre en indiquant qu'il attendait l'avis annonçant l'envoi de la notification visée à la règle 51(4) CBE.

II.L'avis en question a été envoyé le 4 mars 1986, suivi de la notification proprement dite, le 11 juin 1986. Par lettre datée du 21 août 1986, le demandeur a produit une traduction des revendications du texte proposé pour la délivrance, et indiqué que les taxes de délivrance et d'impression avaient été acquittées.

III. Dans une lettre en date du 1er septembre 1986, le demandeur a déclaré qu'il n'approuvait plus le texte proposé pour la délivrance, au motif que celui-ci ne contenait pas de revendications de procédé spécifiquement adaptées à l'Autriche ; il a joint à cette lettre des revendications pour l'Autriche. Le demandeur sollicitait en outre l'indulgence de la division d'examen, en vue d'être autorisé à modifier le texte pour l'Autriche à ce stade de la procédure.

IV. Dans une notification, datée du 27 février 1987, la division d'examen a indiqué que la modification proposée n'était pas recevable en vertu de la règle 86(3) CBE, du fait que la notification prévue à la règle 51(4) CBE avait déjà été envoyée et que les motifs invoqués n'étaient pas suffisants pour autoriser une modification de ce type à ce stade de la procédure.

Dans sa réponse en date du 16 avril 1987, le demandeur a entre autres fait valoir que la modification proposée ne portait pas sur le fond et que seule sa conformité avec l'article 123(2) CBE nécessitait d'être examinée ; il a en outre suggéré que, dans cette affaire, la considération principale devant guider l'OEB était de préserver sa réputation d'ouverture envers les demandeurs, aucune disposition de la CBE n'interdisant de procéder à la modification demandée.

Après un nouvel échange de lettres au sujet notamment de l'application de la décision T 166/86, "Jeu distinct de revendications", JO OEB 1987, 372, la division d'examen a rendu le 16 février 1988 une décision dans laquelle, distinguant les faits de la présente espèce de ceux sur lesquels se fondait la décision T 166/86, elle a considéré qu'elle ne pouvait statuer de la même façon. Le demandeur n'approuvant plus le texte proposé pour la délivrance, la demande de brevet européen a été rejetée dans son intégralité.

V. Le 25 février 1988, le demandeur a formé un recours contre cette décision et déposé un mémoire exposant les motifs du recours ; il a acquitté la taxe correspondante. Il a entre autres déclaré qu'il y avait lieu selon lui d'appliquer le principe énoncé dans la décision T 166/86.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable

2. La règle 86(3) CBE prévoit qu'après avoir répondu à la première notification de la division d'examen (dans la présente espèce, par la lettre datée du 17 janvier 1986), le demandeur ne peut modifier sa demande de brevet européen sans l'autorisation de la division d'examen, qui a donc tout pouvoir d'appréciation en la matière. Après l'envoi de la notification prévue à la règle 51(4) CBE, et avant l'entrée en vigueur de la décision de délivrer le brevet, toute modification reste soumise à l'appréciation de la division d'examen.

3. En tout état de cause, lorsque la CBE confère un pouvoir d'appréciation à une instance de l'OEB pour statuer sur une question dans une procédure, ce pouvoir doit, conformément aux principes généraux du droit, être exercé compte dûment tenu des facteurs qui ont rapport à cette question. C'est alors la finalité de ce pouvoir d'appréciation dans son contexte et dans celui de la CBE en général qui permettra de déterminer quels sont ces facteurs. Lorsqu'une modification proposée par un demandeur consistera par exemple à déposer un jeu de revendications séparé pour un Etat contractant particulier, il conviendra de se reporter à la décision T 166/86, tout spécialement au point 7 des motifs, où sont exposés les facteurs principaux déterminant la recevabilité d'une telle modification à un stade avancé de la procédure d'examen (notamment après l'envoi de la notification visée à la règle 51(4) CBE). Il va de soi que ce pouvoir d'appréciation doit toujours être exercé cas par cas, en fonction des circonstances de l'affaire.

Au point 7 de la décision T 166/86, la chambre de recours fait en particulier allusion aux "intérêts respectifs de l'Office et des demandeurs, l'Office désirant notamment une conclusion rapide de la procédure alors que le demandeur tient à obtenir un brevet valable dans tous les Etats contractants".

Dans tous les cas de ce type impliquant une requête en modification au titre de la règle 86(3) CBE, la division d'examen doit manifestement mettre en balance ces facteurs et prendre en considération tous les autres facteurs pertinents avant de se prononcer sur la suite à donner à cette requête.

4. Lorsque la CBE confère un pouvoir d'appréciation à une instance de l'OEB dans le cadre d'une procédure au premier degré, ce pouvoir sera normalement exercé au mieux par cette instance, vu que c'est elle qui conduit alors la procédure et qu'elle est censée connaître tous les facteurs pertinents pour l'exercice de ce pouvoir. En outre, une fois que la première instance a fait usage de ce pouvoir pour rendre une décision, toute chambre saisie d'un recours contre une telle décision sera en principe peu disposée à statuer différemment, à moins que la décision attaquée ne s'appuie sur un raisonnement dont la base, de toute évidence, est elle-même fausse.

5. Dans la présente affaire, le raisonnement qui conduit la division d'examen à décider de rejeter la modification demandée consiste uniquement à distinguer les faits de ceux sur lesquels se fondait spécifiquement la décision T 166/86. Ce faisant, la division d'examen déclare à la fin de sa décision que, "en conséquence, il ne peut être tiré dans la présente espèce la même conclusion que pour l'affaire T 166/86".

D'après la Chambre, l'on ne peut pas s'appuyer sur un tel raisonnement pour décider dans quel sens exercer le pouvoir d'appréciation prévu à la règle 86(3) CBE. Comme cela est mentionné au point 3 ci-avant, les principaux facteurs entrant en ligne de compte dans l'exercice de ce pouvoir sont clairement énoncés au point 7 de la décision T 166/86 ; or ces facteurs n'ont, semble-t-il, pas du tout été pris en considération par la division d'examen dans la présente affaire.

6. De l'avis de la Chambre, la division d'examen a peut-être mal compris le rôle qui devait être le sien dans la présente affaire, rôle qui, loin de se limiter à examiner si les faits étaient absolument identiques à ceux d'une affaire antérieure dans laquelle une chambre de recours avait tranché en faveur du demandeur, devait consister à statuer sur la requête du demandeur en tenant compte des facteurs pertinents, comme cela a été exposé au point 3 ci-avant.

Dans ces conditions, la Chambre estime qu'il s'agit là d'un cas où elle doit s'opposer à la décision de la division d'examen et l'annuler, en statuant elle-même sur la question du pouvoir d'appréciation (en vertu de la compétence que lui confère l'article 111(1) CBE).

7. Si, dans la présente espèce, le nouveau jeu de revendications de procédé prévu pour l'Autriche devait être autorisé, il faudrait tout d'abord s'assurer, comme cela a été souligné dans la décision attaquée, que ces revendications sont admissibles au regard de l'article 123(2) CBE, vu que la demande telle que déposée ne comportait aucune revendication de procédé. Cet examen complémentaire ne devrait prendre en principe que quelques minutes ; il aurait certainement nécessité moins de temps que la rédaction de la décision. Si l'on compare donc l'intérêt de l'Office à aboutir à "une conclusion rapide de la procédure" (ce qui correspond également à l'intérêt du public) à celui du requérant, qui tient à obtenir une protection valable en Autriche, la Chambre estime que la balance penche nettement en faveur de ce dernier.

Rien, dans la décision attaquée, ne montre que cette mise en balance a été faite.

Comme le souligne cette décision, il est également vrai que dans la présente espèce, à la différence de l'affaire traitée dans la décision T 166/86, le seul point à examiner avant la délivrance est de savoir si le nouveau jeu de revendications est admissible au regard de l'article 123(2) CBE ; il s'agit cependant ici d'un facteur tout à fait secondaire, comparé aux considérations énoncées ci-dessus.

Il ressort du dossier que le requérant n'a pas déposé plus tôt de jeu de revendications séparé pour l'Autriche en raison d'une erreur commise par lui ou par une personne agissant en son nom. Cette erreur a toutefois été découverte, et un jeu de revendications séparé déposé avant que le brevet ne soit délivré. Il n'était donc pas trop tard pour présenter une requête en modification ni pour autoriser la modification demandée, ce qui, de plus, n'aurait pas nui aux intérêts du public vu que la CBE prévoit clairement la possibilité de modifier une demande avant la délivrance du brevet.

L'un des arguments avancés par le requérant est que la considération principale qui doit guider l'OEB en autorisant la modification est de préserver sa réputation d'ouverture envers les demandeurs. De l'avis de la Chambre, lorsque l'OEB exerce un pouvoir d'appréciation pour trancher une question, loin de considérer des facteurs de cette nature, il doit agir en toute impartialité, en tenant compte uniquement des facteurs pertinents au regard du droit. La Chambre estime qu'il ne faut pas confondre le fait de ménager les parties devant l'OEB, et l'exercice proprement dit du pouvoir d'appréciation conformément aux principes du droit.

8. Lorsqu'il exerce un tel pouvoir, que ce soit en faveur ou à l'encontre d'une partie, l'OEB doit indiquer les motifs de son choix. Dans la présente espèce, les motifs amenant la Chambre à exercer ce pouvoir en faveur du requérant sont exposés au point 7 ci-dessus ; ils sont en accord avec les principes analysés et appliqués dans la décision T 166/86.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit:

1. Il est fait droit au recours et la décision de la division d'examen en date du 16 février 1988 est annulée.

2. L'affaire est renvoyée devant la division d'examen pour qu'elle poursuive l'examen de la demande en tenant compte du eu distinct de revendications pour l'Autriche.

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