T 0396/86 () of 13.6.1989

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:1989:T039686.19890613
Date de la décision : 13 Juin 1989
Numéro de l'affaire : T 0396/86
Numéro de la demande : 83201293.4
Classe de la CIB : H04N 7/16
Langue de la procédure : FR
Distribution :
Téléchargement et informations
complémentaires :
Texte de la décision en FR (PDF, 580 KB)
Les documents concernant la procédure de recours sont disponibles dans le Registre
Informations bibliographiques disponibles en : FR
Versions : Unpublished
Titre de la demande : Procédé de brouillage d'images de télévision et dispositif de déchiffrage d'images ainsi brouillées
Nom du demandeur : La Radiotechnique
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.5.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (non)
inventive step (no)
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0294/90
T 0345/90

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n° 83 201 293.4, déposée le 7 septembre 1983 en revendiquant la priorité du dépôt antérieur n° 8 215 533, effectué en France le 14 septembre 1982, et publiée sous le n° 0 103 339, a été rejetée par décision de la Division d'examen datée du 4 juin 1986.

La décision a été rendue sur la base de trois revendications reçues le 22 mars 1986, le motif invoqué étant que l'objet de ces revendications ne peut, eu égard à l'état de la technique révélé par le document FR-A-2 431 809, être crédité d'une activité inventive.

II. Par courrier reçu le 15 juillet 1986, la requérante a formé un recours contre cette décision et, simultanément, acquitté la taxe correspondante. Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 29 septembre 1986.

III. Suite à la réception d'une notification envoyée au nom de la Chambre, le mandataire de la requérante a pris contact par téléphone avec le rapporteur et proposé de recourir à la procédure orale. Cette requête a été confirmée par lettre du 7 février 1989.

IV. Lors de la procédure orale tenue le 13 juin 1989, la requérante a sollicité la délivrance d'un brevet européen sur la base de trois nouvelles revendications remises au cours de l'audience et rédigées comme suit :

"1. Procédé de brouillage ou de déchiffrement d'un signal de télévision dans lequel il est prévu, pour les signaux vidéo des lignes de balayage, d'opérer dans les périodes situées entre les périodes de synchronisation ligne un fractionnement dont la position est définie de façon pseudoaléatoire et un changement de l'ordre de fractions du signal vidéo ainsi constituées, caractérisé en ce que, pour les systèmes du type MAC, chacun des signaux de chrominance et de luminance d'une période de ligne est partagé de façon pseudoaléatoire en deux fractions consécutives (C,D ; F,G) et en ce que, relativement à la position temporelle du signal de synchronisation correspondant et pour chacun desdits signaux séparément, la position temporelle de la première fraction (C ou F) est retardée de la durée de la seconde fraction (D ou G) tandis que la position temporelle de la seconde fraction (D ou G) est avancée de la durée de la première fraction (C ou F), les autres paramètres temporels de ladite période de ligne n'étant pas modifiés par ce traitement de partage et de modification de positions temporelles.

2. Dispositif de déchiffrement pour la mise en oeuvre du procédé selon la revendication 1, caractérisé en ce qu'il comprend des moyens de traitement pour exécuter ledit procédé de déchiffrement d'un signal de télévision.

3. Dispositif selon la revendication 2, caractérisé en ce que lesdits moyens de traitement comprennent :

(1) des circuits d'entrée comprenant eux-mêmes :

(a) un convertisseur analogique-numérique (100) qui reçoit les signaux MAC brouillés ;

(b) un premier commutateur (10) comprenant une entrée reliée à la sortie dudit convertisseur analogique-numérique et trois sorties ;

(2) des circuits de traitement de la composante de luminance comprenant eux-mêmes :

(c) un ensemble de trois voies en parallèle (110, 120, 130) reliant respectivement lesdites trois sorties du premier commutateur à trois entrées d'un second commutateur (20), les première et deuxième voies (110, 120) comprenant respectivement une première et une deuxième mémoire (Y1, Y2) de stockage de la composante de luminance adressées alternativement par un compteur d'écriture (300) et par un premier compteur de lecture (310) à l'aide d'un troisième et d'un quatrième commutateur (30, 40), alors que la troisième voie (130) est une voie directe ;

(d) un premier convertisseur numérique-analogique (140) qui reçoit la sortie dudit second commutateur et délivre le signal de luminance déchiffré ;

(3) des circuits de traitement de la composante de chrominance comprenant eux-mêmes :

(e) un ensemble de deux voies en parallèle (210, 220) reliant respectivement à deux entrées d'un cinquième commutateur (50) les deux sorties dudit premier commutateur qui sont associées aux première et deuxième voies (110, 120) de traitement de la luminance, lesdites deux voies comprenant respectivement une troisième et une quatrième mémoire (C1, C2) de stockage de la composante de chrominance adressées alternativement par le compteur d'écriture (300) et par un deuxième compteur de lecture (320), la sortie dudit cinquième commutateur étant reliée d'une part à l'entrée d'une ligne à retard numérique (230), commandée par ledit deuxième compteur de lecture pour retarder de la durée d'une ligne la composante de chrominance, et d'autre part à la première entrée respectivement d'un sixième et d'un septième commutateur (60, 70) dont la deuxième entrée respective reçoit la sortie de ladite ligne à retard ;

(f) des deuxième et troisième convertisseurs numériques-analogiques (240, 250) qui reçoivent respectivement la sortie desdits sixième et septième commutateurs et délivrent les signaux de différence de couleur U et V respectivement ;

(4) des circuits de commande de déchiffrement comprenant eux-mêmes :

(g) un compteur (330) des lignes à l'intérieur de chaque trame ;

(h) un générateur de séquences numériques pseudoaléatoires (400) synchronisé par l'intermédiaire dudit compteur de lignes ;

(i) un circuit de contrôle d'accès (410) qui fournit audit générateur de séquences numériques pseudoaléatoires un mot de départ constituant la clé de brouillage ;

et en ce que le compteur d'écriture (300) est prévu pour adresser les mémoires en fonction des abscisses des points de fractionnement des composantes de chrominance et de luminance, ces abscisses étant déduites des séquences numériques pseudoaléatoires fournies par ledit générateur".

V. A l'appui de sa requête, la requérante a pour l'essentiel fait valoir ce qui suit :

Dans les systèmes classiques à multiplexage fréquentiel, chrominance et luminance sont présentes simultanément pendant tout l'intervalle de temps réservé à leur émission. Comme il n'est pas envisageable de les séparer à ce moment-là, la demande FR-A-2 431 809 ne saurait enseigner le brouillage séparé de ces deux composantes. L'homme du métier appliquant les enseignements de ce document couperait le signal formé par la succession des deux blocs d'information vidéo et permuterait les deux portions de signal ainsi obtenues. En effet, cela suffirait à brouiller l'émission.

Ceci étant, la demande FR-A-2 431 809 n'exclut pas la possibilité d'associer à l'information vidéo la salve de chrominance, constituée par quelques périodes d'une oscillation sinusoïdale, et même le son lorsque celui-ci est multiplexé temporellement. Le signal émis n'offre alors que peu de résistance au décryptage et il en va de même pour un signal MAC auquel a été appliqué le procédé connu du document cité. En effet, dans le signal ainsi brouillé, les signaux distincts des composantes vidéo sont facilement repérables, ce qui permet de rétablir l'ordre initial. L'invention va à contre-courant de cette pratique en ce qu'elle évite justement de déplacer les signaux repérables. Elle prévoit au contraire d'effectuer une opération de brouillage distincte sur chacune des deux composantes -multiplexées temporellement - du signal vidéo. Cette solution présente l'avantage de ne pas exiger de mémoires supplémentaires puisque, de toute façon, les émetteurs et récepteurs de signaux MAC comprennent déjà celles respectivement prévues pour assurer la compression et l'extension temporelles des deux composantes.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable - articles 106 à 108 et règle 64 CBE.

2. Nouveauté du procédé revendiqué.

La demande de brevet FR-A-2 431 809 a trait à un procédé de brouillage ou de déchiffrement d'un signal de télévision dans lequel il est prévu, pour chacune des lignes de balayage, d'opérer un fractionnement d'un signal qualifié d'utile et de changer l'ordre des fractions de ce signal ainsi constituées, la position de la coupure étant définie de façon pseudoaléatoire - voir page 2, lignes 6 à 16. Il y est par ailleurs précisé que, suivant l'exemple donné à titre explicatif, l'émission relative à une ligne de balayage comprend, successivement, une impulsion de synchronisation, un palier de suppression, une salve de chrominance et le susdit signal utile - voir page 4, lignes 21 à 23. Ce dernier n'est donc pas distinct du signal vidéo des lignes de balayage dont fait état la présente demande. On en conclut que le document précité divulgue un procédé conforme au préambule de la revendication 1.

Le traitement de signaux MAC n'y étant pas envisagé, la demande FR-A-2 431 809 ne révèle pas le partage séparé de deux blocs d'information vidéo multiplexés temporellement dans l'intervalle de temps correspondant au balayage d'une ligne, non plus que le réarrangement des portions de blocs ainsi obtenues que préconise la partie caractérisante de la revendication 1. La Chambre estime en conséquence que l'objet de la revendication 1 est nouveau et que le libellé de cette dernière satisfait aux exigences de la règle 29(1) CBE.

3. Activité inventive.

3.1. Le principe de la transmission télévisuelle par signaux MAC a été révélé au public par le rapport n° 116/81 de Independent Broadcasting Authority, mentionné dans le préambule de la demande en cause et publié en 1981. Il est donc plausible que les auteurs de la demande FR-A-2 431 809, déposée le 20 juillet 1978, ne pouvaient avoir connaissance dudit principe et, par suite, avaient pour objectif le brouillage des signaux utilisés à cette époque, c'est-à-dire à multiplexage fréquentiel des informations de chrominance et de luminance. La validité de cette hypothèse est corroborée par les références implicites aux standards antérieurs que contient ce deuxième document, notamment les mentions de la salve de chrominance et du palier de suppression.

La demande FR-A-2 431 809 ne revèle cependant pas la moindre information quant aux particularités du signal vidéo, lequel est qualifié de "signal utile". Or, il est évident que la portion d'un signal MAC formée par les blocs de chrominance et de luminance constitue un tel signal utile. La Chambre estime en conséquence que les enseignements du document FR-A-2 431 809 doivent être considérés comme pertinents dans le cas présent.

3.2. Suivant l'une des méthodes de brouillage connues de la demande FR-A-2 431 809, il est suggéré d'opérer une permutation circulaire sur un signal comprenant, outre le signal utile proprement dit, la salve de chrominance et/ou le signal audio - voir revendications 3 et 8. L'on sait toutefois que le décodage d'un signal permuté circulairement n'exige que l'identification d'un élément dont la position dans le signal d'origine est connue. Pour qui dispose du décodeur, cet élément est le premier échantillon du signal brouillé, mais l'homme du métier sait que la salve de chrominance ou le signal audio, dont la détection n'exige pas de décodeur, font aussi bien l'affaire. Il ne lui faut donc pas exercer d'activité inventive pour conclure que la méthode en question n'offre pas de sécurité. De fait, il est significatif que, dans le document cité, rien ne tend à faire croire que cette méthode soit préférée, ni même recommandée.

Pour les mêmes raisons, il est aussi évident pour l'homme du métier que la permutation circulaire n'offre de sécurité que dans la mesure o" elle n'affecte que les échantillons d'un signal émis de façon continue pendant un intervalle de temps compris dans la période correspondant au balayage d'une ligne.

3.3. La recherche des solutions d'un problème technique est une activité industrielle et, à ce titre, soumise à des impératifs économiques. De ce fait, lorsqu'un problème connu se pose à lui dans un domaine nouveau, l'homme du métier soucieux d'efficacité commence d'abord par examiner si, parmi les solutions apportées à ce problème dans des domaines voisins, il n'en existe pas qui convienne, au besoin sous réserve d'aménagements adéquats.

Pour les raisons exposées au point 3.2 de la présente décision, toutefois, l'homme du métier reconnaît sans peine que la permutation circulaire des échantillons d'un signal utile comprenant les deux blocs analogiques d'un signal MAC n'offre pas grande garantie contre un décryptage illicite.

En effet, il serait facile d'identifier la période de référence (cf. clamping) qui sépare les deux blocs et, à partir de là, de reconstituer le signal d'origine. Dans ces conditions, ledit homme du métier perçoit sans effort qu'un brouillage efficace ne sera obtenu qu'en permutant circulairement les échantillons de l'un des deux blocs. Enfin, chacun sait qu'en multipliant les mesures de sécurité, il devient plus difficile de frauder. En particulier, il est de pratique courante de doubler les serrures pour mieux se prémunir contre les effractions. Il ne faut donc pas davantage fournir d'effort créatif pour soumettre chacune des composantes analogiques d'un signal MAC à une permutation circulaire, ce qui conduit à la définition du procédé revendiqué.

3.4. Le fait que la demande FR-A-2 431 809 n'enseigne pas de brouiller séparément les composantes de chrominance et de luminance ne suffit pas à établir la présence d'une activité inventive. En effet, en s'abstenant de fournir toute précision quant aux particularités du signal utile, les auteurs de ce document ont clairement manifesté leur désir de conserver à leur invention le caractère le plus général possible. De ce fait, l'homme du métier lisant la susdite demande ne peut conclure qu'à l'intérêt de permuter circulairement les échantillons d'un signal émis sans discontinuité pendant une période de durée finie. Enfin, il est à noter que le libellé de la revendication 1 n'implique pas que les deux fractionnements pseudoaléatoires soient nécessairement indépendants l'un de l'autre.

3.5. Que la mise en oeuvre du procédé revendiqué n'exige pas de mémoires supplémentaires ne suffit pas davantage à établir l'existence d'une activité inventive. La Chambre estime en effet que, si la recherche d'un effet particulier - dans le cas présent, une difficulté accrue du décryptage illicite - permet de parvenir à une invention sans avoir à fournir d'effort créatif, l'obtention d'avantages fortuits ne détruit pas l'évidence de ladite invention.

3.6. Eu égard à ce qui précède, le procédé selon la revendication 1 ne peut être crédité d'une activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

3.7. La définition du dispositif de déchiffrement couvert par la revendication 3 découle de la mise en oeuvre rationnelle du procédé suivant la revendication 1.

Une séquence numérique pseudoaléatoire est une suite de nombres entiers définie par une loi arithmétique idoine et dont les propriétés, pour une application donnée, s'approchent suffisamment de celles d'une séquence numérique aléatoire. Il est donc évident qu'il faut prévoir, dans un circuit adapté à la mise en oeuvre du procédé revendiqué, des moyens (410) de stockage de la loi de génération des nombres pseudo-aléatoires, des moyens (330) déterminant le rang de la ligne à ré-ordonner et des moyens (400) élaborant, à partir des informations reçues des précédents, les deux nombres pseudoaléatoires qui déterminent les positions des coupures dans ladite ligne. Enfin, il faut des moyens (300) qui, en fonction de ces nombres, activent les éléments du circuit chargés de restituer le signal d'origine.

Ceci étant, la demande FR-A-2 431 809 enseigne la nécessité de procéder à un échantillonnage des signaux analogiques pour obtenir un calage temporel précis de leurs portions avant d'en modifier l'ordre. Il est donc nécessaire de prévoir au moins un convertisseur analogique-numérique (100) à l'entrée du circuit de remise en ordre et, pour ne pas aller au-delà de ce nombre, un premier moyen de commutation (10) à une entrée recevant le signal échantillonné et le distribuant sur une pluralité de sorties. Etant donné que le signal reçu comporte deux blocs d'informations dont chacun est divisé en deux portions devant être lues dans un ordre inversé par rapport à celui d'arrivée, il convient de prévoir deux mémoires (Y1, Y2) pour le décryptage de la luminance et deux mémoires (C1, C2) pour celui de la chrominance. Lors de l'inscription, il est logique d'adresser ces mémoires par le biais des moyens (300) et, pour effectuer la lecture, il convient de prévoir des compteurs appropriés (310, 320) ainsi que des moyens de commutation (40, 50). En effet, chacun des circuits traitant les signaux de chrominance et de luminance comprend deux mémoires mais n'a besoin que d'un seul compteur de lecture.

La présence de la ligne à retard (230) ainsi que des commutateurs (60, 70) est imposée par la transmission alternée des signaux de différence de couleurs (u) et (v). Enfin, il convient de prévoir sur chaque sortie un convertisseur numérique-analogique (140, 240, 250) pour restituer aux signaux (Y, U, V) leur caractère initial.

A ce stade, il ne reste à considérer que la liaison établie par les commutateurs (10, 20) et la voie directe (130). Cette liaision sert à la transmission du mot de synchronisation (a), qu'il est logique d'effectuer par le même chemin que celle du signal de luminance. Compte tenu de cette dernière observation, l'on voit que la conception du dispositif selon la revendication 3 n'exige pas d'activité inventive de la part de l'homme du métier.

L'objet de la revendication 3 n'implique pas d'activité inventive et il en va de même pour celui de la revendication 2 puisqu'il en représente un mode particulier de réalisation - article 56 CBE.

4. Leur objet se révélant dépourvu d'activité inventive, aucune des revendications remises au cours de la procédure orale du 13 juin 1989 n'est recevable - article 52(1) CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

Quick Navigation