European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:1981:T001981.19810729 | ||||||||
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Date de la décision : | 29 Juillet 1981 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0019/81 | ||||||||
Numéro de la demande : | 78100869.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | - | ||||||||
Langue de la procédure : | DE | ||||||||
Distribution : | |||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | - | ||||||||
Nom du demandeur : | Roehm | ||||||||
Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | 3.2.02 | ||||||||
Sommaire : | Lorsqu'il est fait usage d'un fascicule de brevet pour faire valoir un préjugé, il faut tenir compte du fait que les indications contenues dans un brevet et portant sur un contexte technique sont susceptibles d'être conditionnées par des circonstances particulières ou par l'opinion de l'auteur. En conséquence, la validité universelle de telles indications ne peut souvent être reconnue qu'après que de nouvelles preuves aient été apportées, même si le brevet a été délivré par un office de brevets pratiquant l'examen quant au fond. Et ce, en particulier, lorsque les indications contenues dans le fascicule de brevet ne sont pas nécessairement compatibles avec ce que l'on est en droit d'attendre que l'homme du métier déduise couramment de l'état de la technique. | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive - absence de Profilé extrudé creux Préjugé de l'homme du métier Justification |
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Exergue : |
- |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La demande de brevet européen n° 78 100 869.3, déposée le 12 septembre 1978 et publiée le 13 juin 1979, pour laquelle est revendiquée une priorité du 29 novembre 1977 fondée sur un dépôt antérieur en République fédérale d'Allemagne, a été rejetée par la Division d'examen 093 de l'Office européen des brevets par décision du 1er avril 1981. Cette décision se fondait sur les revendications 1 à 5, déposées le 14 novembre 1980, concernant un procédé et un dispositif permettant la mise en oeuvre du procédé.
La première revendication portant sur le procédé et la première revendication portant sur le dispositif s'énoncent comme suit:
"1. Procédé de fabrication par extrusion à l'état thermoplastique d'un profilé creux en matière plastique, revêtu d'une pellicule; application d'une pellicule sur le profilé thermoplastique à sa sortie de l'extrudeuse et passage du profilé revêtu de la pellicule dans un canal de moulage; ce procédé est caractérisé en ce que le film est amené au contact du profilé creux à l'entrée du canal de moulage et pénètre avec lui à l'intérieur de celui-ci; en raison de la dépression qui y règne, le profilé est plaqué contre la paroi intérieure du canal et refroidi jusqu'à une température inférieure à celle de ramollissement.
4. Dispositif permettant la mise en oeuvre du procédé défini aux revendications 1 à 3 et se composant d'une extrudeuse équipée d'une filière (1) et d'un canal de moulage (2); ce dispositif est caractérisé par la présence entre la filière (1) et l'entrée du canal de mise en forme (2) d'une étroite fente (6) destinée à laisser passer le film à appliquer, et en ce que le canal de moulage (2) est conçu comme un canal de moulage par vide."
Pour le contenu des autres revendications, se reporter au dossier.
II. La demande a été rejetée au motif que ni l'objet des revendications 1 et 4, ni l'objet des revendications visant à associer les caractéristiques exposées dans les revendications 2 et 4 et dans l'une des revendications qui s'y réfèrent n'impliquent une activité inventive.
La Division d'examen a notamment fondé sa décision sur le motif que la "Auslegeschrift" allemande 1 193 666 enseigne déjà à utiliser, lors de la fabrication d'un profilé extrudé creux revêtu, le canal servant à donner sa forme définitive au produit fini également pour assembler le profilé creux et son revêtement. Pour l'homme du métier, le recours à cet enseignement s'impose de manière évidente lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre le procédé décrit dans la "Offenlegungsschrift" 2 605 466, s'il veut éviter d'avoir à effectuer une opération particulière pour appliquer la pellicule de revêtement sur le profilé creux. La mise en contact immédiate du film avec le profilé creux à l'entrée du canal de moulage découle d'une manière évidente de la "Offenlegungsschrift" allemande 2 312 541, qui relève du même domaine. L'évidence de l'objet de la revendication subsiste nonobstant le fait que, dans le procédé objet de la demande, le plaquage du profilé contre la paroi interne du canal ne résulte pas d'une surpression, mais d'une dépression. Ce choix ne peut être qualifié d'inventif, car il représente une décision courante pour l'homme du métier. En conséquence, la revendication 1 n'est pas admissible.
Pour l'introduction d'un lubrifiant entre la paroi intérieure du canal de moulage et le profilé creux (revendication 3), se reporter aux fascicules de brevets 2 512 844 et 2 597 553 (Etats-Unis).
Les indications relatives à la construction figurant dans la revendication 4 étaient déjà contenues en partie dans la "Offenlegungsschrift" allemande 2 312 541 et en partie dans la "Auslegeschrift" allemande 1 162 067. Leur association en découle d'une manière évidente. En conséquence, la revendication 4 relative à un dispositif permettant la mise en oeuvre du procédé qui fait l'objet de la demande n'est pas non plus admissible.
III. La requérante a formé un recours motivé contre cette décision le 27 mai 1981 et acquitté la taxe de recours. Elle allègue que le point de vue de la Division d'examen sur la question de savoir si le procédé exposé à la revendication 1 découle de manière évidente de l'état de la technique ne concorde pas avec l'opinion de l'homme du métier. En effet, comme le montre le fascicule de brevet britannique 1 383 923, l'inventeur du procédé décrit - au demeurant très proche du procédé faisant l'objet de la demande - est d'avis que le profilé creux ne peut pas être maintenu dans le canal de moulage par vide lorsque la dépression n'agit pas directement sur la surface du profilé. Que le profilé creux soit maintenu dans le canal de moulage constitue un résultat surprenant par rapport à l'enseignement du brevet britannique 1 383 923.
La requérante demande l'annulation de la décision attaquée et la délivrance du brevet européen.
Motifs de la décision
1. Le recours répond aux conditions énoncées aux articles 106, 107 et 108, ainsi qu'à la règle 64 de la CBE; il est donc recevable.
2. La requérante maintient sans modifications les revendications 1 à 5 sur lesquelles se fonde la décision de rejet. Ces revendications s'appuyant sur le contenu des documents initialement déposés, elles ne donnent lieu à aucune objection à cet égard.
3. Le procédé défini à la revendication 1 vise, de toute évidence, à permettre l'application d'une pellicule en rendant inutile le recours à un appareillage supplémentaire pour produire la pression nécessaire à l'opération.
4. Parmi les documents sur lesquels se fonde la décision attaquée, seule la "Offenlegungsschrift" allemande 2 605 466 a pour objet un procédé de fabrication, par extrusion de la matière plastique à l'état thermoplastique, d'un profilé creux en matière plastique revêtu d'une pellicule, procédé selon lequel le profilé revêtu de la pellicule passe à l'intérieur d'un canal de moulage. Le procédé sur lequel porte la revendication 1 se distingue déjà du procédé connu par le fait que, dans l'objet de la demande, la pellicule est amenée au contact du profilé creux dès l'entrée dans le canal de moulage. Cette caractéristique n'apparaît pas non plus dans le procédé de fabrication par extrusion de la matière plastique à l'état thermoplastique, d'un profilé creux en matière plastique revêtu d'une pellicule, tel que décrit dans la "Offenlegungsschrift" allemande 2 337 677. Or, bien que n'ayant pas été cité comme antériorité par la Division d'examen, ce document est mentionné dans la description initiale de même que dans le rapport de recherche.
Le procédé conforme à la revendication 1 est donc nouveau par rapport à l'état de la technique considéré.
5. Il convient encore d'examiner si ce procédé implique une activité inventive.
5.1. La requérante allègue que la réponse négative donnée à cette question dans la décision attaquée résulte d'un point de vue qui, s'il apparaît plausible au premier abord, ne concorde cependant pas avec l'opinion de l'homme du métier, et elle appuie son argumentation sur le fascicule de brevet britannique 1 383 923. Au regard des indications portées à la page 2, lignes 21 à 37 de cette antériorité, il ressort de l'opinion de l'homme du métier, telle qu'exprimée avant la date de priorité revendiquée par le requérant, que le profilé creux ne peut pas être maintenu dans le canal de moulage, c'est-à-dire qu'il s'affaisse, lorsque la dépression n'agit pas directement sur sa surface. A la lumière de cet enseignement, le résultat obtenu avec le procédé décrit à la revendication 1 doit être considéré comme surprenant.
5.2. Dans le passage cité du fascicule de brevet britannique 1 383 923, on trouve l'indication selon laquelle la pellicule qui passe avec le profilé creux dans le canal de moulage doit être conçue de façon à être perméable à l'air lorsqu'elle recouvre un ou plusieurs côtés du profile creux extrudé, cela afin d'éviter une réduction sensible de l'effet de la dépression dans le canal. Toutefois, le fascicule de brevet passe sous silence la raison pour laquelle une pellicule non perméable à l'air aurait cet effet préjudiciable.
5.3. La Chambre ne saurait se rallier à l'opinion selon laquelle l'indication invoquée refléterait l'opinion de l'homme du métier quant à l'effet de la dépression créée dans le canal de moulage sur le profilé creux revêtu d'une pellicule traversant ledit canal. Une telle affirmation reflète l'opinion du seul auteur du fascicule de brevet. Il est possible que celle-ci se fonde sur des conditions particulières, non mentionnées dans l'antériorité, propres au procédé proposé par son auteur. Faute d'autres preuves, il ne peut, en conséquence, être accordée une validité universelle à cette déclaration. On ne peut donc pas en déduire que l'homme du métier était convaincu qu'en créant une dépression dans le canal de moulage utilisé dans le procédé présenté dans la "Offenlegungsschrift" allemande 2 605 466, le profilé creux ne serait pas plaqué contre la paroi intérieure du canal de moulage conjointement avec la pellicule en raison de la non-perméabilité de celle-ci à l'air, et donc que la requérante a surmonté un préjugé erroné de l'homme du métier.
L'effet de la dépression, considéré comme surprenant par la requérante, ne doit avoir, bien au contraire, rien d'étonnant pour l'homme du métier. Il doit normalement savoir que, par suite de la création d'une dépression dans une enceinte dans laquelle se trouve un corps creux fermé et constitué de deux couches superposées, les parois du corps creux, à condition d'être suffisamment déformables, sont plaquées contre les parois de l'enceinte par suite de la pression, supérieure à la pression extérieure, qui règne à l'intérieur du corps creux. Le fait que les deux couches subissent, dans le procédé faisant l'objet de la demande, l'action de la dépression, ne fait que confirmer ce à quoi l'homme du métier doit normalement s'attendre. Toutefois, même si, à la lecture du fascicule de brevet britannique 1 383 923, il se prenait à douter de la justesse du fait évoqué, à savoir que les deux couches subissent ensemble l'action de la dépression appliquée à l'intérieur du canal de moulage, il pourrait rapidement vérifier, par un simple essai, si son doute est justifié ou non. La demande ne contient donc, à cet égard, rien de plus que ce à quoi il fallait normalement s'attendre.
5.4. La requérante n'a avancé aucune autre raison - et il n'en ressort d'ailleurs aucune de l'ensemble des documents considérés - s'opposant à ce que la différence de pression employée pour donner sa forme au profilé creux par plaquage de celui-ci contre la paroi du canal de moulage (voir Auslegeschrift allemande 1 193 666) soit également utilisée pour appliquer le film sur le profilé creux, ou encore s'opposant à l'établissement de cette différence de pression par la mise en oeuvre d'une dépression (procédé déjà connu de l'homme du métier en tant que solution de rechange à une surpression intérieure - voir Auslegeschrift allemande 1 162 067). La "Auslegeschrift" allemande 1 193 666, et notamment les revendications 5 et 6 qu'elle contient, avaient déjà porté à la connaissance de l'homme du métier que la pression régnant dans le canal de moulage suffit pour obtenir une adhérence suffisante de la pellicule entourant un profilé creux au corps dudit profilé.
5.5. La caractéristique mentionnée à la revendication 1, selon laquelle la pellicule est amenée au contact du profilé creux à l'entrée du canal de moulage ne donne pas non plus lieu à une appréciation positive de l'activité inventive. Cette opération est en effet une condition nécessaire au plaquage du corps creux, constitué par le profilé creux et la pellicule contre la paroi intérieure de l'enceinte.
5.6. Le procédé défini à la revendication 1 n'implique donc pas une activité inventive (article 56 de la CBE). Il s'ensuit qu'aux termes de l'article 52, paragraphe 1 de la CBE, la revendication 1 n'est pas admissible.
6. Les revendications 2 et 3 se référant à la revendication 1 qui n'est pas admissible, ne sont pas admissibles non plus.
7. La requérante n'a pas contesté les arguments contenus dans la décision attaquée à l'encontre de la revendication 4 portant sur un dispositif.
Après avoir réexaminé la demande, la Chambre est parvenue à la même conclusion que la Division d'examen, à savoir que les caractéristiques mentionnées dans cette revendication figurent déjà en partie dans la "Offenlegungsschrift" allemande 2 312 541, et en partie dans la "Auslegeschrift" allemande 1 162 067, et que leur association ne dépasse pas le cadre de ce que l'on est en droit d'attendre d'un homme du métier, sans qu'il ait à faire preuve d'une activité inventive.
En conséquence, la revendication 4 n'est pas admise.
8. La revendication 5, qui vise le perfectionnement du dispositif défini à la revendication 4 est par conséquent également inadmissible.
DISPOSITIF
9. Par ces motifs, il est statué comme suit:
Le recours est rejeté.