European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2024:T153722.20240910 | ||||||||
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Date de la décision : | 10 Septembre 2024 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1537/22 | ||||||||
Numéro de la demande : | 17707940.7 | ||||||||
Classe de la CIB : | C22C 21/12 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | TÔLES ÉPAISSES EN ALLIAGE AL CU LI À PROPRIÉTÉS EN FATIGUE AMÉLIORÉES | ||||||||
Nom du demandeur : | Constellium Issoire | ||||||||
Nom de l'opposant : | Arconic Corporation | ||||||||
Chambre : | 3.3.05 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | - | ||||||||
Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La requérante (opposante) a formé un recours contre la décision de la division d'opposition de rejeter l'opposition contre le brevet européen 3 411 508 B1.
II. Les documents suivants, cités dans la décision, sont pertinents :
D1 |CN 102021457 B |
D1a|English translation of D1 |
D3 |WO 2015/082779 A2 |
D4 |US 2007/0181229 A1 |
D6 |US 7,229,509 B2 |
D14|E.S. Balmuth and A. Cho, "Fracture and fatigue crack growth resistance of recrystallized Al-Li alloys", Materials Science Forum Vols. 217-222, 1996, 1365-1370|
D16|Déclaration de J.R. Pickens datée du 26 mars 2015 |
D19|G. Champier et al., "4th Anternational Aluminium Lithium Conference", les éditions de physique, septembre 1987, C3-171 - C3-177 |
D20|T.H. Sanders and E.A. Starke, "Aluminum-Lithium alloys", Materials and Component Engineering Publications Ltd., 1989, 305-314 |
III. Avec les motifs du recours, la requérante a soumis la déclaration suivante :
D21|Déclaration de J. Newman datée du 12 août 2022|
IV. Avec la réponse à ces motifs, l'intimée (titulaire) a soumis le document suivant :
D26|Norme ASTM E 647-05, 2005|
V. Le libellé des revendications indépendantes de la requête principale (revendications telles que délivrées) s'énonce comme suit:
"1. Produit laminé d'épaisseur au moins 50 mm en alliage d'aluminium comprenant en % en poids 2,2 à 3,9 % de Cu, 0,7 à 1,8 % de Li, 0,1 à 0,8 % de Mg, 0,1 à 0,6 % de Mn ; 0,01 à 0,15 % de Ti, au moins un élément choisi parmi Zn et Ag, la quantité dudit élément s'il est choisi étant 0,2 à 0,8 % pour Zn et 0,1 à 0,5 % pour Ag, optionnellement au moins un élément choisi parmi Zr, Cr, Sc, Hf, et V, la quantité dudit élément s'il est choisi étant 0,04 à 0,18 % pour Zr, 0,05 à 0,3 % pour Cr et pour Sc, 0,05 à 0,5 % pour Hf et pour V, moins de 0,1 % de Fe, moins de 0,1 % de Si reste aluminium et impuretés inévitables, d'une teneur inférieure à 0,05 % chacune et 0,15% au total ; caractérisé en ce que sa structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/2 épaisseur."
"8. Procédé de fabrication d'une tôle selon une quelconque des revendications 1 à 7, comprenant :
a) la coulée d'une plaque, en alliage d'aluminium comprenant en % en poids 2,2 à 3,9 % de Cu, 0,7 à 1,8 % de Li, 0,1 à 0,8 % de Mg, 0,1 à 0,6 % de Mn ; 0,01 à 0,15 % de Ti, au moins un élément choisi parmi Zn et Ag, la quantité dudit élément s'il est choisi étant 0,2 à 0,8 % pour Zn et 0,1 à 0,5 % pour Ag, optionnellement au moins un élément choisi parmi Zr, Cr, Sc, Hf, et V, la quantité dudit élément s'il est choisi étant 0,04 à 0,18 % pour Zr, 0,05 à 0,3 % pour Cr et pour Sc, 0,05 à 0,5 % pour Hf et pour V, moins de 0,1 % de Fe, moins de 0,1 % de Si reste aluminium et impuretés inévitables, d'une teneur inférieure à 0,05 % en poids chacune et 0,15% au total ;
b) l'homogénéisation de ladite plaque à une température d'au moins 490 °C,
c) le laminage à chaud de ladite plaque pour obtenir une tôle d'au moins 50 mm d'épaisseur,
d) la mise en solution entre 490 °C et 540 °C,
e) la trempe à l'eau froide,
f) la traction contrôlée de la dite tôle avec une déformation permanente de 1 à 7 %,
g) le revenu de ladite tôle par chauffage entre 130°C et 170 °C pendant 5 à 60 heures, caractérisé en ce que la somme de la teneur [sic] des éléments Zr, Cr, Sc, Hf, et V est inférieure à 0,08 % en poids et/ou
en ce que lors de l'étape b) l'homogénéisation comprend au moins une étape dont la température est d'au moins 520 °C, la durée pendant laquelle la température est supérieure à 520 °C étant au moins 20 heures et lors de l'étape c) la température de sortie du laminage à chaud est inférieure à 390 °C."
"9. Utilisation d'une tôle selon une quelconque des revendications 1 à 7 pour la réalisation d'un longeron d'aile d'avion ou d'une nervure d'aile d'avion"
Les revendications dépendantes 2 à 7 et 10 concernent des modes de réalisation particuliers.
VI. La procédure orale a eu lieu le 10 septembre 2024 sous forme de visioconférence.
VII. Les arguments de la requérante qui sont pertinents pour la présente décision peuvent être résumés comme suit :
L'objet des revendications 1 et 8 est anticipé par l'alliage 139 de D1/D1a. Cela est confirmé par D21.
L'objet des revendications 1 et 8 est également anticipé par D3.
L'objet des revendications n'est pas inventif au vu :
- des combinaisons de l'alliage 139 de D1/D1a avec D4 ou D14,
- de la combinaison de D6 avec D4, et
- de D4
VIII. Les arguments de l'intimée (titulaire du brevet) qui sont pertinents pour la présente décision sont repris dans les motifs de la décision ci-dessous.
IX. La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen.
L'intimée a demandé que le recours soit rejeté. A titre subsidiaire, elle a demandé de maintenir le brevet tel que modifié sur la base de l'une de cinq requêtes subsidiaires, soumises avec la réponse au mémoire de recours.
Motifs de la décision
1. Nouveauté
Pour les raisons exposées ci-dessous, la requête principale satisfait aux conditions de l'article 54 CBE.
1.1 La requérante considère que l'alliage 139 figurant au tableau 1 à la page 3 de la description de D1/D1a anticipe l'objet de la revendication 8 et, par conséquent, également celui de la revendication 1.
Les parties sont d'accord sur le fait que la caractéristique des revendications 1 et 8 selon laquelle la "structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/5 épaisseur" n'est pas 1/4divulguée de manière explicite dans D1/D1a.
Il se pose donc la question de savoir si cette caractéristique est la conséquence nécessaire de la composition et du procédé de D1/D1a.
D'après le paragraphe [0017] du brevet contesté, il y a deux modes possibles pour obtenir la structure souhaitée :
- un premier mode (nommé "mode procédé" dans ce qui suit) qui se caractérise par des conditions spécifiques lors de l'homogénéisation et du laminage à chaud ;
- un deuxième mode (nommé "mode composition" dans ce qui suit) qui se caractérise par la somme spécifique des teneurs en Zr, Cr, Sc, Hf et V.
La revendication 8 du brevet contesté vise à fabriquer "une tôle selon une quelconque des revendications 1 à 7" et les deux modes possibles y répondent.
Selon l'avis de la requérante, l'alliage 139 anticipe les caractéristiques du "mode composition" de la revendication 8 : la teneur en Zr de 0,08% (tableau 1) ne peut pas être distinguée de la teneur inférieure à 0,08% revendiquée. Cr, Sc, Hf et V sont absents car ils ne sont pas mentionnés dans le tableau 1. Comme toutes les autres caractéristiques des revendications 1 et 8 sont également anticipées, la "structure granulaire ... majoritairement recristallisée" est une conséquence inévitable.
Or, ce raisonnement n'est pas convaincant. Même si l'on n'est pas d'accord avec la conclusion de la division d'opposition (page 6, point II.3.1.2, premier paragraphe de la décision contestée) selon laquelle "[l]es alliages dans D1/D1a comportent [...] inévitablement ces éléments [Zr, Cr, Sc, Hf et V]", on ne pourra du moins pas exclure que l'alliage 139 de D1 contient, en plus de 0.08% Zr, des traces de Cr, Sc, Hf et/ou V comme impureté dans les limites du paragraphe [0010]. Cela n'a pas été contesté par la requérante. Ainsi, l'aluminium du départ pourrait déjà contenir des traces de ces éléments comme impuretés.
Même la déclaration D21 ne saurait exclure une telle présence de traces de ces éléments. La question visant à savoir si ce document est pris en considération peut donc rester ouverte.
A ce propos, il est rappelé que la revendication 8 stipule que la somme de Zr, Cr, Sc et Hf est strictement inférieure à 0,08 % et non pas inférieure à 0,08 % plus les teneurs de ces éléments présents en tant qu'impuretés.
Il est précisé que dans la caractéristique g) de la revendication 8, la somme des concentrations de Zr, Cr, Sc, Hf et V est indiquée sans l'ajout de l'expression "s'il est choisi" (contrairement aux formulations indiquées dans la revendication 1 ou dans la préambule de la revendication 8). Cela couvre donc le cas où ces éléments ont été ajoutés intentionnellement et le cas où ils sont présents comme impuretés.
Contrairement à l'avis de la requérante, l'expression "la somme de la teneur [sic] des éléments Zr, Cr, Sc, Hf, et V est inférieure à 0,08 %" (caractères italiques ajoutés par la chambre) de la caractéristique g) de la revendication 8 ne se réfère pas nécessairement aux éléments correspondants de la caractéristique a) selon laquelle au moins un de ces éléments a été intentionnellement choisi ("au moins un élément choisi parmi"). Effectivement, la "somme" peut se référer aux "éléments Zr, Cr, Sc, Hf, et V" qui suivent l'expression "la somme de la teneur" sans faire allusion à la caractéristique a).
Par ailleurs, la composition de l'alliage 139 dans le tableau 1 n'est pas entièrement définie. Ainsi, le tableau 1 n'indique pas de teneur en aluminium élémentaire précise. La différence entre les teneurs des éléments indiquées et 100% peut donc bien correspondre à de l'aluminium et Cr, Sc et Hf présents comme impuretés. Il n'est pas possible de déduire du tableau 1 des teneurs maximales pour Cr, Sc et Hf.
Pour ces raisons, D1/D1a ne divulgue pas de manière directe et sans ambiguïté que la somme des concentrations en Zr, Cr, Sc, Hf et V de l'alliage 139 est inévitablement inférieure à 0,08%. Autrement dit, dans ce contexte il n'est pas suffisant qu'il soit possible que la somme des concentrations en Zr, Cr, Sc, Hf et V de l'alliage 139 soit inférieure à 0,08%. Effectivement, le fait que l'objet revendiqué a été divulgué directement et sans ambiguïté dans un document brevet ne doit faire aucun doute, et non pas simplement être de l'ordre du probable (Jurisprudence des chambres de recours, 10e édition, 2022, I.C.4.1).
De plus, les gammes concernant (a) l'épaisseur de la tôle et (b) la température d'homogénéisation se chevauchent et la zone de chevauchement est faible.
Ainsi, la revendication 8 du brevet contesté requiert une épaisseur d'au moins 50 mm tandis que le paragraphe [0011] de D1/D1a indique 10 à 80 mm.
La revendication 8 du brevet contesté requiert une température d'homogénéisation d'au moins 490°C tandis que le paragraphe [0019] de D1/D1a indique 450°C à 490°C.
Deux choix sont donc nécessaires pour arriver à l'épaisseur de la tôle et à la température d'homogénéisation de la revendication 8 du brevet contesté.
A ce propos, l'argument de la requérante selon lequel le choix de l'épaisseur de la tôle et de la température d'homogénéisation ne revenait qu'à une seule sélection ne peut pas être retenu.
Comme ni la composition de l'alliage 139 de D1/D1a ni les conditions opératoires lors de la préparation du produit ne sont inévitablement telles que revendiquées, la caractéristique "structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/2 épaisseur" n'est pas une conséquence inévitable. Pour cela, les conclusions de T 12/81 ne s'appliquent pas au cas présent.
L'objet des revendications 1 et 8 est donc nouveau par rapport à D1/D1a (article 54(1) et (2) CBE).
1.2 La requérante considère également que le passage général aux pages 4 et 5 de D3 anticipe l'objet des revendications 1 et 8.
Cependant, il y a de nombreux chevauchements entre les revendications 1 et 8 du brevet contesté et ce passage de D3 :
- Les teneurs en Cu (2,2 à 3,9 % contre 1,8 à 2,6 %).
- Dans ce passage de D3, en ce qui concerne Ag et Zn, les expressions "0-" (pour Ag) et "<" (pour Zn) sont jugées équivalentes dans ce contexte. Les explications figurant aux pages 10 et 11 de D3 par rapport à ces éléments n'indiquent pas non plus de différence à cet égard. Les teneurs de ces éléments se chevauchent donc également (0,1% à 0,5% contre 0% à 0,5% pour Ag, et 0,2% à 0,8% contre <0,2% pour Zn).
- Même en choisissant l'alternative Mn 0,1 à 0,5% dans ce passage de D3, les gammes de concentrations de Zr se chevauchent (0,04% à 0,18% contre Zr<0,05).
- Les gammes de l'épaisseur de la tôle (au moins 50 mm contre 14 mm à 100 mm) et de la température d'homogénéisation se chevauchent également (à moins 490°C contre 480°C à 540°C).
En raison de ces chevauchements multiples et comme il n'est pas proposé de travailler dans le domaine du chevauchement, on ne peut pas conclure de manière directe et non-ambiguë que la caractéristique "structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/2 épaisseur" est une conséquence nécessaire dans D3 (en analogie avec T 1516/18, motifs 5.2.3, ou T 205/20, motifs 2.3).
D3 n'anticipe donc pas l'objet des revendications 1 ou 8 (Article 54(1) et (2) EPC).
2. Activité inventive
L'invention concerne un produit laminé en alliage d'aluminium ainsi qu'un procédé pour sa fabrication.
La requérante considère que l'objet des revendications du brevet contesté n'est pas inventif au vu :
- de la combinaison de l'alliage 139 de D1/D1a avec D4 ou D14,
- de la combinaison de D6 avec D4, et
- de D4
Or, pour les raisons suivantes, le brevet contesté satisfait aux conditions de l'article 56 CBE.
2.1 Lors de la procédure orale en opposition, la requérante a confirmé que D1/D1a correspondait à l'état de la technique le plus proche (cf. le point 6 du procès-verbal).
En phase de recours, la requérante a considéré D1/D1a comme l'état de la technique le plus proche en ce qui concerne le "mode composition" des revendications du brevet contesté.
D1/D1a vise également un produit laminé en alliage d'aluminium (cf. le point 1.1 ci-dessus). L'alliage 139 (tableau 1) en particulier est un départ prometteur pour évaluer l'activité inventive.
2.1.1 D'après le brevet contesté, le problème technique à résoudre est de mettre à disposition une tôle épaisse en alliage Al-Cu-Li ayant des propriétés améliorées quant à la propagation de fissures en fatigue ainsi qu'un procédé pour sa fabrication (alinéas [0001], [0006] et [0008]).
2.1.2 Le brevet contesté propose de résoudre ce problème par le produit laminé de la revendication 1 et le procédé de la revendication 8 caractérisés du moins en ce que la "structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/2 épaisseur".
2.1.3 Il se pose la question de savoir si le problème technique a été résolu avec succès.
En faisant référence au paragraphe [0029] du brevet contesté, la requérante considère que l'épaisseur des échantillons testés était de seulement 6,35 mm et n'était donc pas représentative de l'épaisseur d'au moins 50 mm revendiquée. Par conséquent, les tests du brevet ne pouvaient pas prouver un effet quelconque.
Or, les paragraphes [0024] et [0029] du brevet contesté confirment que des échantillons d'une épaisseur de plus de 50 mm ont été testés dans le brevet contesté.
Effectivement, le paragraphe [0024] indique des épaisseurs de tôle autour de 100 mm.
Le paragraphe [0029] du brevet contesté explique que des sollicitations dans la direction L-S ont été effectuées. Dans ce cas, l'épaisseur de la tôle correspond à la largeur de l'éprouvette indiquée dans le paragraphe [0029], à savoir 100 mm.
Ce paragraphe du brevet contesté fait référence à la norme D26 dont la figure supérieure représentée à la page 15 montre effectivement que dans le cas d'une sollicitation dans la direction L-S (cf. la page 11 de la réponse au recours pour l'indication des directions L-S et LT) c'est la largeur W de l'éprouvette qui correspond à l'épaisseur de la tôle et non pas l'épaisseur B de l'éprouvette qui est de 6,35 mm d'après le paragraphe [0029] du brevet contesté.
La requérante considère également que les compositions des exemples inventifs et comparatifs du brevet contesté sont si différentes qu'aucun effet ne peut en être déduit.
Cela n'est pas convaincant. Les compositions de la tôle A (exemple inventif) et de la tôle D (exemple comparatif) sont proches. De la même façon, les compositions de la tôle C (exemple inventif) et de la tôle E (exemple comparatif) sont également proches. De plus, les compositions de toutes ces tôles se trouvent à l'intérieur des gammes revendiquées. Par ailleurs, les propriétés mécaniques Rm, Rp et K1c des tôles A et D d'une part et des tôles C et E d'autre part sont également comparables (cf. les tableaux 3 et 4 du brevet contesté).
Le tableau 5 indique que la tôle inventive "C" a un meilleur comportement en propagation de fissure en fatigue que la tôle "E" (se traduisant par des valeurs de da/dn plus faibles).
Les figures 3a (tôle inventive A) et 3b (tôle comparative D) montrent une amélioration du comportement de la propagation de fissures puisque les fissures changent moins de direction.
Par ailleurs, la personne du métier comprendra que la teneur en Zn de la tôle A dans le tableau 1 doit en réalité être inférieure (et non égale) à 0,05% puisque la tôle A est selon l'invention (paragraphe [0031]). Puisque la tôle A contient entre 0,1% et 0,5% Ag, Zn doit être une impureté dont la teneur doit être inférieure à 0,05% d'après les revendications 1 et 8.
Même si l'on ne partageait pas cet avis par rapport au dernier point, il resterait tout de même l'effet démontré par les tôles C et E dans le tableau 5.
Par ailleurs, la requérante n'a pas présenté de preuves pour contrer ces résultats.
Lors de la procédure orale en recours la requérante a en outre tenté de prouver l'absence d'un effet lié à la teneur en Zr sur le taux de recristallisation en se basant sur l'alliage H dans l'exemple 2 du brevet contesté (cf. les tableaux 6 et 7). A son avis, cet alliage a une composition selon l'invention mais conduit à un taux de recristallisation à la 1/2 épaisseur trop faible, à savoir 48%.
Or,l'alliage H n'est pas un exemple selon l'invention comme l'a fait remarquer l'intimée lors de la procédure orale. Il n'a pas été contesté qu'il ne satisfait pas aux conditions du "mode procédé" (cf. le point 1.1 ci-dessus). Effectivement, l'exemple 2 ne respecte ni la durée de l'homogénéisation ni la température finale du laminage à chaud de la revendication 8. Par ailleurs, la teneur en Zr de 0,08 % en poids est également en dehors du "mode composition" (cf. à nouveau le raisonnement du point 1.1 qu'on ne peut pas exclure la présence supplémentaire des traces de Cr, Sc, Hf et V comme impuretés).
Il n'y a donc pas de doute sur le fait que le problème technique ait été résolu avec succès.
2.1.4 Comme l'a déjà fait remarquer la division d'opposition (cf. la fin du point II.4.5.1 de la décision contestée), ni D1/D1a ni D4 ne contiennent d'enseignement indiquant qu'une structure majoritairement recristallisée améliorerait les propriétés de propagation de fissures en fatigue.
Tandis que D4 indique que le remplacement de Zr par Mn conduit à la recristallisation ce qui améliore la ténacité et les propriétés de propagation de fissures (cf. les paragraphes [0032], [0038] ainsi que le tableau 5), D4 concerne des tôles beaucoup moins épaisses, à savoir entre 0,8 mm et 12 mm (paragraphes [0029] et [0032]).
En partant de D1/D1a, la personne du métier ne considérerait donc pas l'enseignement de D4, du moins pas pour le domaine d'épaisseur revendiqué au dessus de 50 mm. Cela est confirmé par D16 (cf. la fin du point 33 à la page 24). Même la requérante semble reconnaître que des tôles minces et épaisses ont des propriétés très différentes (cf. les points 83 et 84 de son mémoire).
Pour cette raison, l'objet des revendications 1 et 8 implique une activité inventive au vu de la combinaison de D1/D1a avec D4.
2.2 La requérante a présenté une objection en combinant D1/D1a avec D14 seulement après la signification de la notification au titre de l'article 15(1) RPCR sans faire valoir des circonstances exceptionnelles.
De telles circonstances ne sont pas apparentes non plus.
Par conséquent, cette objection n'est pas prise en compte (article 13(2) RPCR).
2.3 La requérante considère D6 comme l'état de la technique le plus proche du "mode procédé" de la revendication 8. Indépendamment de la question visant à savoir si l'objection en partant de D6 en combinaison avec D4 est prise en considération, et même si l'on admettait que la seule différence entre l'alliage A1 de D6 (cf. l'exemple 1) et l'objet de la revendication 1 était que la "structure granulaire est majoritairement recristallisée entre le 1/4 et la 1/2 épaisseur", le même raisonnement que pour la combinaison de D1/D1a avec D4 s'applique puisque D4 ne concerne que des tôles minces (cf. les alinéas [0029] et [0032]).
La requérante concède que les documents D19 et D20 seraient seulement importants si le problème était reformulé comme la mise à disposition d'une alternative, ce qui n'est pas le cas (cf. les points 2.1.1 et 2.1.3 ci-dessus). La question visant à savoir si D19 et D20 sont considérés peut donc rester sans réponse.
L'objet des revendications 1 et 8 implique donc également une activité inventive par rapport à D6, même en combinaison avec D4.
2.4 Indépendamment de la question de la recevabilité de l'objection en partant de D4, ce document est moins adapté comme état de la technique le plus proche car ce document concerne des tôles minces (cf. par exemple le paragraphes [0029] et [0032]) qui ont des propriétés très différentes des tôles épaisses revendiquées (cf. la fin du point 33 à la page 24 de D16) ce que semble reconnaître même la requérante (cf. les les points 83, 84 et 111 du mémoire du recours).
2.5 Les mêmes raisonnements s'appliquent également aux autres revendications du brevet contesté. En effet, toutes ces revendications se réfèrent aux revendications 1 et 8.
Dispositif
Par ces motifs, il est statué comme suit
Le recours est rejeté.