T 0489/19 () of 24.5.2022

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2022:T048919.20220524
Date de la décision : 24 Mai 2022
Numéro de l'affaire : T 0489/19
Numéro de la demande : 09799185.5
Classe de la CIB : B42D 25/00
B42D 15/00
B42D 15/04
G09F 19/14
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : DOCUMENT DE SECURITE COMPORTANT AU MOINS UNE IMAGE COMBINEE ET UN MOYEN DE REVELATION, ET PROCEDE ASSOCIE
Nom du demandeur : Oberthur Fiduciaire SAS
Nom de l'opposant : Giesecke+Devrient Currency Technology GmbH
Chambre : 3.4.03
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 52(1)
European Patent Convention Art 54(1)
European Patent Convention Art 54(2)
European Patent Convention Art 56
European Patent Convention Art 100(a)
European Patent Convention Art 111(1)
Mot-clé : Nouveauté - requêtes principale, auxiliaires 1 et 2 (non)
Activité inventive - requête auxiliaire 3 (non)
Renvoi à la première instance
Renvoi - (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 1194/97
T 1749/06
T 2720/16
T 0738/18
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours a été formé par l'opposante à l'encontre de la décision de la division d'opposition de rejeter l'opposition contre le brevet européen EP 2 367 695 B1.

II. Parmi les documents de l'état de la technique considérés par la division d'opposition, le document suivant est particulièrement pertinent pour la procédure de recours :

D5 DE 197 29 918 A1

III. La requérante demande l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet dans son ensemble.

A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de l'affaire à la division d'opposition afin de poursuivre la procédure si la requête auxiliaire 4 était à discuter.

IV. L'intimée demande le rejet du recours et le maintien du brevet tel que délivré (requête principale).

Subsidiairement, dans le cas où la chambre de recours ne rejetterait pas le recours, l'intimée requiert le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base d'une des requêtes auxiliaires 1 à 7 déposées par lettre du 24 février 2020.

Lesdites requêtes auxiliaires 1 à 7 correspondent aux requêtes auxiliaires 1 à 7 déposées en vue de la procédure orale devant la division d'opposition par lettre du 16 juillet 2018.

Dans sa lettre du 1er juillet 2022, l'intimée informe la chambre qu'elle ne serait plus intéressée "par la demande" et déciderait "de l'abandonner".

V. La revendication 1 selon le brevet tel que délivré comporte les caractéristiques techniques suivantes (la numérotation est celle utilisée par la division d'opposition) :

(C1) Document de sécurité (1)

(C2) comportant une trame de révélation (3) associée à une image combinée (2) présente sur le document (1)

(C3) ou ensemble comportant un document de sécurité (2) [sic] et un autre objet,

(C3a) le document de sécurité (1) comportant une trame de révélation (3) associée à une image combinée (2) sur l'autre objet,

(C4) l'un au moins de l'image combinée (2) et de la trame de révélation (3) figurant sur une zone du document (1) au moins partiellement transparente,

(C5) une superposition de la trame de révélation (3) et de l'image combinée (2) pouvant s'effectuer par pliage du document (1) ou par superposition du document (1) avec l'autre objet, caractérisé en ce que

(C6) l'image combinée (2) comporte au moins deux images imbriquées (2a),

(C7) la trame de révélation (3) permettant lorsque superposée au moins partiellement à l'image combinée (2) du même document (1) ou de l'autre objet d'observer successivement les images imbriquées (2a) par un déplacement relatif de la trame de révélation (3) par rapport à l'image combinée (2).

La revendication 1 de la requête auxiliaire 1 correspond à la première alternative de la revendication 1 telle que délivrée et comporte les caractéristiques techniques suivantes :

(C1) Document de sécurité (1)

(C2) comportant une trame de révélation (3) associée à une image combinée (2) présente sur le document (1),

(C4) l'un au moins de l'image combinée (2) et de la trame de révélation (3) figurant sur une zone du document (1) au moins partiellement transparente,

(C5') une superposition de la trame de révélation (3) et de l'image combinée (2) pouvant s'effectuer par pliage du document (1), caractérisé en ce que

(C6) l'image combinée (2) comporte au moins deux images imbriquées (2a),

(C7') la trame de révélation (3) permettant lorsque superposée au moins partiellement à l'image combinée (2) du même document (1) d'observer successivement les images imbriquées (2a) par un déplacement relatif de la trame de révélation (3) par rapport à l'image combinée (2).

Le revendication 1 de la requête auxiliaire 2 correspond à la revendication 1 de la requête auxiliaire 1 avec la caractéristique additionnelle :

(C8) le déplacement relatif étant une translation.

La revendication 1 de la requête auxiliaire 3 correspond à la revendication 1 de la requête auxiliaire 2 avec la caractéristique additionnelle :

(C9) les images imbriquées représentant des positions successives et/ou mouvements successifs d'un motif.

La revendication 1 de la requête auxiliaire 4 correspond à la revendication 1 de la requête auxiliaire 3 avec les caractéristique additionnelles :

(C10) le document de sécurité comportant un fil de sécurité incorporé en surface, en masse ou en fenêtre(s) dans le document de sécurité,

(C11) l'image combinée (2) et/ou la trame de révélation (3) étant portée par le fil de sécurité.

Le libellé des revendications selon les requêtes auxiliaires 5 à 7 n'est pas pertinent pour cette décision.

VI. Pour la requérante, le document D5 divulgue un document de sécurité avec toutes les caractéristiques techniques de la revendication 1 selon le brevet tel que délivré et les requêtes auxiliaires 1 et 2. La caractéristique (C9) est soit déjà connue du document D5, soit n'implique aucun effet technique et ne contribue à la solution d'aucun problème technique. Comme elle ne consiste qu'en une présentation d'information, l'objet de la revendication 1 de la requête auxiliaire 3 n'implique pas d'activité inventive.

Pour l'intimée, le document D5 ne décrit ni des images imbriquées ni une trame de révélation selon la revendication 1 du brevet tel que déposé. Dans D5, le mouvement de l'élément de vérification 2 par rapport aux éléments 10 et 11 n'est pas une translation. La caractéristique (C9) contribue à la résolution d'un problème technique et implique une activité inventive.

Pendant la procédure orale devant la chambre, la requérante et l'intimée ont exprimé leur accord avec le renvoi de l'affaire à la division d'opposition afin de poursuivre la procédure.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. L'invention concerne un document de sécurité comportant une trame de révélation associée à une image combinée qui est soit présente sur le document lui-même, soit sur un autre objet pour former ainsi un ensemble. Une superposition de la trame de révélation et de l'image combinée peut s'effectuer par pliage du document ou par superposition du document avec l'autre objet. L'image combinée comporte au moins deux images imbriquées. La trame de révélation permet lorsqu'elle est superposée au moins partiellement à l'image combinée, d'observer successivement les images imbriquées par un déplacement relatif, par exemple un mouvement de translation de la trame de révélation par rapport à l'image combinée.

3. La lettre de l'intimée du 1er juillet 2022 a été reçue après le prononcé de la décision à l'issue de la procédure orale du 24 mai 2022. Selon la jurisprudence établie des chambres de recours, une fois qu'elle a rendu sa décision, une chambre de recours n'est plus habilitée ni compétente pour accomplir d'autres actes que la rédaction de la décision, voir La Jurisprudence des Chambres de recours de l'Office européen des brevets, V.A.6.1.2. Ladite lettre de l'intimée est par conséquent dépourvu d'effet juridique.

4. Requête principale - revendication 1 telle que délivrée

4.1 La division d'opposition a décidé que le document D5 ne divulgue pas les caractéristiques (C6) et (C7), voir la décision attaquée, paragraphe II.2.5. L'exemple de la figure 2b ne montrerait pas une image combinée comportant au moins deux images imbriquées. L'exemple de la colonne 3, lignes 37 à 56 (point 3.) ne détaillerait ni la forme du réseau de lignes formant un motif constituant la caractéristique de sécurité ni l'élément de vérification. Des images imbriquées ne seraient pas divulguées. La figure 4 de D5 montrerait un autre mode de réalisation.

4.2 Selon la requérante, le document D5 divulguerait toutes les caractéristiques (C1) à (C7), voir D5, figures 2, 2a et 2b.

Les polariseurs/analyseurs 5 et 6 formeraient avec la fenêtre 2 de l'élément de vérification une « trame de révélation » (colonne 7, lignes 4 à 26 et colonne 3, ligne 57 à colonne 4, ligne 9) tandis que l'élément de sécurité 3 comporterait des images imbriquées (étoile 11, carré 10, figure 2a, colonne 7, lignes 4 à 26) d'une image combinée 3. La figure 2b montrerait le mouvement relatif de la trame de révélation 2, 5, 6 par rapport à l'élément de sécurité 3, 10, 11, ce mouvement de translation rendant observables les images 10 et 11 successivement (colonne 7, lignes 4 à 26) et provoquant un effet de mouvement (colonne 6, ligne 52,

« Bewegungseffekte ») ou un changement de motif (colonne 3, lignes 55 à 56, « Musterwechsel »).

Selon la revendication 5 et le paragraphe [0046] du brevet opposé, des polariseurs (par exemple, les polariseurs/analyseurs 5, 6 de D5) pourraient constituer une « trame de révélation » (voir D5, colonne 7, lignes 4 à 26 et colonne 3, ligne 57 à colonne 4, ligne 9). Selon les paragraphes [0024] à [0030], [0046], [0062], [0078] du brevet opposé, une trame de révélation ne serait pas limitée à une juxtaposition ou alternance de zones claires et sombres ou à un ensemble de lignes formant une succession de zones claires et sombres (voir le paragraphe [0027] du brevet opposé). Pour la requérante, une trame de révélation selon la revendication 1 ne serait définie que par sa fonction selon la caractéristique (C7). Par ailleurs, le document D5 décrirait des éléments de vérification sous forme d'un réseau linéaire

(« Linienraster », colonne 3, lignes 27 à 56, colonne 5, lignes 63 à 65, colonne 6, lignes 1 à 3, revendication 12) ou sous forme d'un ensemble de lentilles (« Linsenraster », colonne 3, lignes 12 à 36). D5 mentionnerait aussi des zones claires et sombres (colonne 4, lignes 7 à 9, « hellen und dunklen Bereiche eines Bildes »).

La requérante a mis en question l'interprétation de la division d'opposition du terme « images imbriquées ». Le brevet opposé, paragraphes [0020], [0080] à [0084] et figure 2, utiliserait le terme « imbriqué »

(« verschachtelt ») également pour des images superposées (« überlagert »). L'expression

« images imbriquées » ne serait pas limitée à des images formées de lignes (« Linienbilder ») illustrées, par exemple, par la figure 1 du brevet opposé. La revendication 1 exigerait uniquement que la trame de révélation permette de visualiser successivement les images imbriquées.

Le document D5 montrerait aussi la possibilité de vérifier l'authenticité d'un document de sécurité par une superposition avec un autre document de sécurité (revendications 21 et 22, colonne 2, lignes 42 à 45, lignes 52 à 61, colonne 8, lignes 8 à 15).

La requérante a également soutenu que l'expression

« une superposition de la trame de révélation (3) et de l'image combinée (2) pouvant s'effectuer par pliage du document (1) » impliquerait que la caractéristique (C5) serait optionnelle et que ladite « superposition » pourrait être réalisée d'une manière différente que

« par pliage ».

4.3 Pour l'intimée, les deux filtres polarisants adjacents 5 et 6 des figures 2a et 2b du document D5 ne constitueraient pas une trame de révélation, mais des

« moyens de révélation »; le paragraphe [0027] du brevet donnant une définition spécifique de « trame de révélation », à savoir un objet qui présente une juxtaposition de zones claires et de zones sombres. Une trame de révélation serait formée selon sa définition d'un écran constitué d'un support transparent quadrillé ou réticulé ayant une fonction de révélation, ici des images imbriquées successivement. La définition d'une trame de révélation donnée par la requérante serait en accord avec celle donnée par les décisions T 0738/18 et T 2720/16 dans des affaires semblables.

Le document D5 ne préciserait pas la méthode de polarisation utilisée pour le filtrage. Un filtre polarisant ne serait pas usuellement constitué d'une alternance de zones claires et sombres. La colonne 4, lignes 7 à 9 de D5 parlerait de zones claires et sombres de l'image, et non de l'élément de vérification 2, 5, 6. Les polariseurs les plus communément utilisés seraient ceux par absorption sous forme de cristaux dichroïques (tourmaline, hérapathite), tel que les films polaroïds, ou ceux à séparation de faisceau utilisant une juxtaposition de prisme dichroïque. Les polariseurs sous forme de grille métallique ne seraient appliquables que pour les micro-ondes.

La revendication 5 selon le brevet tel que délivré serait aussi en accord avec la définition selon le paragraphe [0027], les cristaux liquides qui y sont mentionnés formant les zones sombres et claires.

De plus, l'image selon D5 ne comporterait pas d'images « imbriquées », mais des images (partiellement)

« superposées » présentant des propriétés de polarisation différentes. Le terme « imbriquer » signifierait « engager quelque chose dans quelque

chose » ou « enchevêtrer ». Pour l'intimée, des images « imbriquées » ne seraient pas des images

« superposées ». Les paragraphes [0020] et [0080] à [0084] du brevet opposé indiqueraient que l'image combinée pourrait être formée par la superposition d'une certaine manière d'images imbriquées formées chacune d'un ensemble de lignes parallèles espacées entre elles et intercalées, voir les figures 1 et 2 et le paragraphe [0082] du brevet opposé. Cette image combinée devrait être observée au moyen d'une trame selon la figure 3 du brevet opposé, c'est-à-dire par une trame formée d'une alternance de lignes noires opaques et de lignes transparentes. Avec des images simplement superposées comme celles mentionnées dans D5, il ne serait pas possible de distinguer les deux images avec une telle trame de révélation. Le terme

« images imbriquées » devrait donc s'interpréter en relation avec les autres caractéristiques de la revendication 1. Les images imbriquées seraient associées entre elles pour former l'image combinée, de sorte qu'une trame de révélation se superposant à l'image combinée permettrait l'observation des différentes images combinées par déplacement relativement à l'image combinée. Les images seraient imbriquées entre elles de sorte que leur observation individuelle par un écran constitué d'un support transparent quadrillé ou réticulé soit possible.

Dans le mode de réalisation de la figure 4 de D5, une image sous forme de lettre « D » serait obtenue par la superposition de la structure de ligne 4 et d'un réseau lenticulaire (voir colonne 5, lignes 17 à 43). Un réseau lenticulaire ne serait pas une trame de révélation selon l'invention (voir le brevet opposé, page 4, lignes 1 à 7, page 11, lignes 13 à 19, page 13, lignes 5 à 7; la chambre note que ces passages indiqués par l'intimée se réfèrent au Druckexemplar). De plus, la figure 4 de D5 ne concernerait pas des images imbriquées.

Dans le mode de réalisation en colonne 3, lignes 37 à 56 et colonne 5, ligne 63 à colonne 6 ligne 7 du D5, la caractéristique de sécurité et l'élément de vérification comporteraient des lignes imprimées de sorte à générer un motif de Moiré lors de leur superposition. Par conséquent, l'image combinée ne comporterait pas d'images imbriquées rendues observables successivement par un déplacement relatif d'une trame de révélation. Les images observées seraient des images d'interférences spatiales des deux trames, celle de révélation et celle de l'image. Elles ne seraient pas des images imbriquées déjà présente dans l'image. Elles résulteraient de la combinaison des deux et n'auraient pas d'existence en l'absence de la trame de révélation. Par ailleurs, la trame employée dans cet exemple ne serait pas utilisable pour observer l'étoile et le carré du mode de réalisation des figures 2, 2a et 2b.

L'intimée a aussi présenté l'argument que la caractéristique de pliage ne serait pas facultative ou alternative, mais exprimerait une capacité du document de sécurité. La personne du métier comprendrait que le document de sécurité revendiqué serait configuré pour qu'une superposition de la trame de révélation et de l'image combinée soit possible par pliage du document de sécurité.

4.4 La chambre constate que le document D5 décrit un document de sécurité comportant un élément de vérification 2 et au moins une caractéristique de sécurité 3 vérifiable par l'élément de vérification, l'élément de vérification et la caractéristique de sécurité étant, par exemple, présents sur des parties du document de sécurité séparées, de sorte qu'ils ne se superposent que pendant la vérification (colonne 2, lignes 22 à 51).

Tout d'abord, la chambre partage l'opinion de l'intimée que dans le mode de réalisation décrit en colonne 3, lignes 37 à 56 et colonne 5, ligne 63 à colonne 6 ligne 7 du D5, n'anticipe pas l'objet de la revendication 1 telle que délivrée, même si cet exemple concerne une trame de révélation selon la définition du paragraphe [0027] du brevet opposé, comme le reconnaît aussi l'intimée. En effet, dans cet exemple, les images sont rendus successivement visibles par effet de Moiré et n'existent pas en tant qu'image combinée sur le document de sécurité. Elles n'ont donc aucune

« existence en l'absence de la trame de révélation », comme l'a exposé l'intimée. De plus, le document D5 est silencieux sur un éventuel mouvement de l'élément de vérification dans le cas de la figure 4 du document D5.

En revanche, la chambre estime que le mode de réalisation illustré par les figures 2, 2a et 2b est particulièrement pertinent pour l'objet de la revendication 1 telle que déposée.

Dans l'exemple illustré par les figures 2, 2a et 2b de D5, comme l'a aussi exposé l'intimée, la caractéristique de sécurité 3 est un vectographe ayant sur sa face recto un carré 10 dessiné à la peinture iodée (de sorte qu'il ne soit visible que lorsqu'il est superposé à un filtre 5 polarisant horizontal) et sur sa face verso une étoile 11 dessinée à la peinture iodée (de sorte qu'elle ne soit visible que lorsqu'elle est superposé à un filtre 6 polarisant vertical), voir colonne 6, ligne 48 à colonne 7, ligne 26. L'étoile et le carré sont partiellement superposés. L'élément de vérification est composé de deux filtres adjacents, l'un étant polarisant horizontalement 5 et l'autre étant polarisant verticalement 6. Ainsi, lorsque le filtre polarisant 5 se superpose à la caractéristique de sécurité, le carré seul est visible et lorsque le filtre polarisant 6 se superpose à la caractéristique de sécurité, l'étoile seule est visible.

La chambre ne partage pas l'opinion de l'intimée selon laquelle l'expression « trame de révélation » définirait un objet selon le paragraphe [0027] du brevet opposé et exclurait des polarisateurs selon D5. Aucun élément dans la revendication ne suggère à la personne du métier qu'une trame de révélation doit nécessairement présenter une juxtaposition de zones claires et de zones sombres ou encore comporter un support transparent quadrillé ou réticulé. Au contraire, la personne du métier comprend de la revendication 5 et du paragraphe [0046] du brevet opposé qu'une « trame » peut être un élément polarisant la lumière de telle sorte que l'image combinée ne soit visible que lors du pliage du document sur lui-même, c'est-à-dire après superposition de la trame et de l'image combinée, comme c'est le cas de l'image illustrée aux figures 2a et 2b du document D5. En effet, éclairée par une lumière non-polarisée, l'image combinée de D5 ne devient visible qu'après superposition avec les polarisateurs/analyseurs 5, 6. Dans le brevet ou dans la demande telle que déposée, il n'y a aucune indication que les cristaux liquides de la revendication 5 formeraient des zones claires et sombres, contrairement à l'argument de l'intimée. En d'autres mots, la personne du métier comprend qu'une trame de révélation selon la revendication 1 peut consister en un ensemble de filtres 5, 6 polarisant la lumière selon le document D5.

Dans les affaires T 0738/18 et T 2720/16, la chambre compétente a considéré le concept de « trame » comme désignant un motif périodique formé par un ensemble de bandes finement quadrillé ou réticulé, étant entendu que les bandes ne sont pas forcément rectilignes. Le qualificatif « de révélation » indique la fonction recherchée, à savoir révéler ou faire apparaître des images, c'est-à-dire les rendre « observables », voir

T 0738/18, point 2.1 des motifs ou T 2720/16, point 3.1 des motifs. La chambre compétente dans la présente affaire estime que cette définition n'est pas nécessairement applicable à la revendication telle que délivrée. Premièrement, la fonction de la « trame » est différente. Dans le cas des deux affaires T 0738/18 et T 2720/16, les trames et les images combinées sont positionnées de manière immobile sur les faces opposées d'un substrat transparent. Elles sont superposées sans aucun pliage du document de sécurité. Les images imbriquées sont rendues visibles par un changement d'angle d'observation. Un déplacement relatif selon la caractéristique (C7) ou un pliage selon la caractéristique (C5) ne sont ni prévus ni techniquement possibles. Deuxièmement, contrairement à la présente affaire, la revendication 1 dans l'affaire T 0738/18 définit une résolution et une période de la trame, voir aussi la revendication 9 dans l'affaire T 2720/16. Par conséquent, dans lesdites deux affaires, la personne du métier comprend bien qu'une trame est une entité présentant un motif périodique. Dans la présente affaire, aucune des revendications du brevet tel que délivré ne suggère que la trame présente un motif périodique. Elle n'est définie que par sa fonction selon la caractéristique (C7). Enfin, aucune des revendications (dépendantes) dans les deux affaires

T 0738/18 et T 2720/16 ne donne des indications qu'une trame pourrait avoir un effet polarisant sur la lumière, contrairement à la revendication 5 du brevet opposé dans la présente affaire.

Par conséquent, la chambre accepte l'argument de la requérante qu'une trame de révélation n'est définie que par sa fonction de rendre observables successivement au moins deux images imbriquées (ou superposées) d'une image dite combinée, une telle trame de révélation étant divulguée à la figure 2a du document D5.

La chambre estime que la figure 2a du document D5 illustre bien une « image combinée » montrant l'image d'un carré 10 et l'image d'une étoile 11, donc des images « imbriquées », les première et deuxième images 10 et 11 se trouvant sur des côtés opposés du document de sécurité. Les paragraphes [0020] et [0084] du brevet opposé définissent que généralement, l'image combinée selon la revendication 1 peut consister en une superposition d'images. La formulation de la revendication ne définit pas que des images imbriquées sont nécessairement formées chacune d'un ensemble de lignes parallèles espacées entre elles et intercalées, comme le montrent de manière exemplative les figures 1 et 2 du brevet opposé. La chambre partage l'opinion de la requérante que le carré et l'étoile partiellement superposés de la figure 2a de D5 peuvent être considérés comme des images imbriquées.

En ce qui concerne la caractéristique (C5), elle ne décrit pas une propriété facultative du document de sécurité, mais spécifie bien que le document de sécurité est pliable (ou configuré à être plié) de façon à superposer la trame de révélation et l'image combinée. Le document D5 décrit explicitement un tel pliage, voir, par exemple, colonne 2, lignes 42 à 48,

« Faltung ».

La chambre note que l'objet de la revendication 1 telle que délivrée concerne une alternative, à savoir un document de sécurité comportant une trame de révélation associée à une image combinée présente sur le document de sécurité ou un ensemble comportant un document de sécurité et un autre objet, le document de sécurité comportant une trame de révélation associée à une image combinée sur l'autre objet. La première branche de l'alternative est divulguée par les figures 2a et 2b, colonne 7, lignes 4 à 26 de D5 et la deuxième branche est également connue de D5 (revendications 21 et 22, colonne 2, lignes 42 à 48, lignes 52 à 61), l'autre objet étant, par exemple, un autre document de sécurité.

En résumé, selon le libellé de la revendication 1 du brevet tel que délivré, D5 divulgue un document de sécurité (figures 2, 2a et 2b) comportant une trame de révélation (2, 5, 6, colonne 2, ligne 68 à colonne 3, ligne 6, colonne 3, ligne 57 à colonne 4, ligne 12,

« Verifikationselement (2) », « Polarisationsfilter », colonne 6, ligne 8 à colonne 7, ligne 26) associée à une image combinée (3, 10, 11, figures 2 et 2a, colonne 7, lignes 14 à 17) présente sur le document (figure 2) ou comportant ensemble un document de sécurité et un autre objet (revendication 22, « eines anderen Dokumentes »), le document de sécurité (1) comportant une trame de révélation (5, 6, « Verifikationselement (2) ») associée à une image combinée (3) sur l'autre objet,

l'une au moins de l'image combinée (3, 10, 11) et de la trame de révélation (2, 5, 6) figurant sur une zone du document (figure 2) au moins partiellement transparente (colonne 7, lignes 4 à 10), une superposition de la trame de révélation (2, 5, 6) et de l'image combinée (3, 10, 11) pouvant s'effectuer par pliage du document (colonne 7, lignes 16 à 26) ou par superposition du document avec l'autre objet (revendication 22),

l'image combinée (3, 10, 11) comportant au moins deux images imbriquées (10, 11, col. 7, lignes 14 à 17, figure 2a),

la trame de révélation (2, 5, 6) permettant lorsque superposée au moins partiellement à l'image combinée (3, 10, 11) du même document (figures 2, 2a et 2b) ou de l'autre objet (revendication 22), d'observer successivement les images imbriquées par un déplacement relatif (colonne 7, lignes 14 à 26, « das Fenster 2 wird nur verschoben ») de la trame de révélation (2, 5, 6) par rapport à l'image combinée (3, 10, 11).

Par conséquent, l'objet de la revendication 1 manque de nouveauté (articles 100 a), 52(1) et 54(1) et (2) CBE).

5. Requêtes auxiliaire 1

La revendication 1 de la requête auxiliaire 1 est limitée à la première alternative de la revendication 1 telle que délivrée. Pour les raisons déjà invoquées, l'objet de cette revendication manque de nouveauté (articles 100 a), 52(1) et 54(1) et (2) CBE) par rapport au document D5.

6. Requête auxiliaire 2

6.1 La requérante a soutenu que la colonne 7, lignes 24 à 26 et la figure 2b du document D5 divulgueraient que le mouvement relatif de la trame de révélation 2 par rapport à l'image combinée 10, 11 serait bien un mouvement de translation sans aucune rotation

(« erspart die Drehung », « wird nur verschoben »). De plus, l'expression « translation » ne serait pas limitée à une translation le long d'une trajectoire rectiligne.

6.2 L'intimée a défini une translation comme étant le glissement d'un objet, sans rotation, retournement ni déformation de cet objet. Pendant la procédure orale devant la chambre, l'intimée a présenté l'argument que la translation selon la caractéristique (C8) ne serait pas une translation « courbe », c'est-à-dire selon une trajectoire curviligne et donc non-rectiligne.

Dans le document D5, le déplacement de l'élément de vérification impliquerait un « mouvement nécessairement légèrement rotatif » vu le positionnement des filtres polarisateurs 5, 6 et la largeur du billet. Le passage de la colonne 7, lignes 22 à 24 et surtout l'expression « erspart die Drehung » signifieraient qu'une rotation de 90° ne serait pas nécessaire; ladite rotation de 90° étant utilisée dans d'autres modes de réalisation dans D5, voir la colonne 6, lignes 44 à 56, par exemple.

6.3 La chambre est convaincue que le déplacement relatif de la trame de révélation 2, 5, 6 par rapport à l'image combinée dans l'exemple des figures 2, 2a et 2b est bien une translation rectiligne, comme ceci est explicitement illustré à la figure 2b et décrit en colonne 7, lignes 24 à 26.

Par conséquent le document D5 divulgue la caractéristique (C8) et l'objet de la revendication 1 selon la requête auxiliaire 2 manque de nouveauté (articles 100 a), 52(1) et 54(1) et (2) CBE).

7. Requête auxiliaire 3

7.1 Dans un premier temps, la requérante a présenté l'argument que le document D5 divulguerait la caractéristique (C9), voir la colonne 6, lignes 48 à 55, « Bewegungs- und Farbumschlageffekten ». La requérante mentionne aussi des changements de motifs, colonne 3, lignes 52 à 55, « Musterwechsel ».

Quant à l'activité inventive, selon la requérante, le paragraphe [0016] du brevet indiquerait que l'effet de la caractéristique (C9) ne serait qu'un effet ludique et attractif, donc purement esthétique et amusant pour l'observateur. La représentation de positions successives et/ou mouvements successifs d'un motif ne constituerait qu'une présentation d'information (voir l'article 52(2) (d) CBE) et manquerait de caractère technique (« mangelnde Technizität »). La caractéristique (C9) n'indiquerait que le contenu montré (« what is displayed ») sans spécifier comment

(« how it is displayed ») et par quels moyens techniques l'information est présentée (T 1749/06, point 4.1.3 des motifs et T 1194/97). Dans le cas présent, les caractéristiques (C6) et (C7'), déjà connues du D5, définiraient lesdits moyens techniques.

Un effet technique comme l'augmentation de la sécurité ne serait pas obtenu. La caractéristique (C9) ne pourrait pas impliquer d'activité inventive au sens de l'article 56 CBE.

7.2 Pour l'intimée, l'effet de mouvement serait de nature technique, car il permettrait d'obtenir « un effet technique de sécurisation complémentaire ».

De plus, la caractéristique ajoutée permettrait d'obtenir une nouvelle structure d'authentification du document consistant en la restitution d'images imbriquées, provoquant par exemple l'illusion d'un mouvement (paragraphe [0012] du brevet opposé), qui serait clairement un effet technique, ce qui rendrait la caractéristique (C9) d'autant plus technique. De manière additionnelle, ceci pourrait conférer un effet ludique et/ou attractif à l'utilisateur du document (paragraphe [0016] du brevet opposé, voir l'utilisation du terme « encore »). Le fait qu'un effet de mouvement soit revendiqué n'empêcherait pas qu'un effet de sécurisation du document de sécurité soit obtenu, de la même manière que les stéréogrammes holographiques présenteraient un effet de mouvement par changement d'angle d'observation et constitueraient des éléments de sécurité communément reconnus dans le domaine des documents de sécurité. La simple mention d'un effet ludique additionnel ne présumerait en rien du caractère non technique de la caractéristique, d'autant plus qu'un effet clairement technique, à savoir augmenter la sécurisation des documents de sécurité, serait obtenu.

Le document D5 serait limité à la visualisation de deux images tandis que l'invention permettrait des séquences animées plus complexes avec quatre images ou plus

(c'est-à-dire offrirait « du cinéma ») et faciliterait ainsi l'authentification d'un document tout en augmentant la sécurité.

Le problème technique qui se poserait donc à partir de D5 consisterait à proposer une structure d'authentification alternative à celle de D5.

7.3 Selon la chambre, la personne du métier comprend de l'ensemble des caractéristiques (C6), (C7') et (C9) que, lors du déplacement relatif de la trame de révélation par rapport à l'image combinée, les images imbriquées sont successivement observables de manière à ce que l'observateur voit des positions successives d'un motif et/ou les mouvements successifs d'un motif.

Dans le cas de positions successives, lors dudit déplacement relatif, l'observateur voit un même motif prendre successivement des positions différentes sur le document de sécurité. Par exemple, dans le cas de deux images imbriquées, en déplaçant la trame de révélation, un même motif (par exemple, une étoile) passe d'une première position à une deuxième position. Dans le cas de mouvements successifs, l'observateur remarque le mouvement d'un même motif sans nécessairement voir un changement de position.

Dans le mode de réalisation pertinent du document D5 (figures 2, 2a et 2b), l'observateur voit un premier motif, l'étoile 11, dans une première position et un deuxième motif, le carré 10, dans une deuxième position. La caractéristique (C9) n'est manifestement pas décrite. La chambre ne partage pas l'avis de la requérante selon lequel la colonne 6, lignes 48 à 55,

(« Bewegungs- und Farbumschlageffekten ») ou la colonne 3, lignes 52 à 55 (« Musterwechsel ») permettraient de conclure que la caractéristique (C9) serait divulguée pour l'exemple des figures 2a et 2b.

Par conséquent, l'objet de la revendication 1 diffère du document D5 par la caractéristique (C9).

La revendication 1 inclut explicitement le cas d'un document de sécurité ayant une image combinée avec exactement deux images imbriquées (comme celle du D5). Le document D5 divulgue une étoile dans une première position et un carré dans une deuxième position. La chambre n'est pas convaincue que l'authentification d'un document soit facilitée et la sécurité augmentée par le simple fait de remplacer le carré par une étoile à ladite deuxième position. Un effet de « sécurisation complémentaire » n'est pas nécessairement obtenu.

L'argument de l'intimée selon lequel l'invention permettrait des séquences animées plus complexes n'a pas convaincu non plus la chambre. L'objet de la revendication 1 n'est pas limité à des séquences de quatre images imbriquées ou plus. De plus, la chambre ne considère pas qu'un document avec quatre images imbriquées (ou plus) d'un même motif mais avec un changement de positions ou un effet de mouvement, serait nécessairement plus facile à authentifier que le document de sécurité de D5.

Ainsi, la chambre partage l'avis de la requérante selon lequel l'effet de la caractéristique (C9) n'est qu'un effet ludique et attractif, donc purement esthétique et amusant pour l'observateur. Cet effet purement psychologique et subjectif a lieu dans le cerveau de l'observateur et ne contribue à la résolution d'aucun problème technique. En particulier, la caractéristique n'aide pas l'utilisateur à effectuer une tâche technique au moyen d'un processus d'interaction homme-machine continu et/ou guidé. Tout au plus, l'effet de (C9) est d'obtenir un document de sécurité esthétiquement plus attractif pour un observateur. Dans ce sens, la représentation de positions successives et/ou mouvements successifs d'un motif ne concerne que le contenu cognitif d'une information présentée. Les moyens nécessaires pour techniquement réaliser la présentation d'information (image combinée, trame de révélation, déplacement relatif, etc.) sont déjà connus du document D5.

La caractéristique distinctive (C9) est donc dépourvue de caractère technique et ne peut impliquer une activité inventive. Il n'y a pas de contribution technique à l'état de la technique selon D5.

Ainsi, la caractéristique (C9) peut être utilisée pour la formulation du problème technique objectif, en tant qu'élément de ce qui est soumis à la personne du métier, en particulier en tant que contrainte à respecter. En se basant sur la formulation utilisée par l'intimée, le problème technique objectif consiste à proposer une structure d'authentification alternative à celle de D5 de manière à ce que les images imbriquées représentent des positions successives et/ou mouvements successifs d'un motif. Confronté à ce problème, il est évident pour la personne du métier de remplacer le carré 10 par une deuxième étoile (identique à l'étoile 11, mais dans la position du carré 10). De manière similaire, il est évident pour la personne du métier de remplacer l'étoile 11 par un deuxième carré (identique au carré 10, mais dans la position de l'étoile 11). Dans les deux cas, la personne du métier parvient sans exercer d'activité inventive à l'objet de la revendication 1 selon la requête auxiliaire 3 (articles 100 a), 52(1) et 56 CBE).

8. Requêtes auxiliaires 4 à 7

La revendication 1 des requêtes auxiliaires 4 à 7 introduit la caractéristique selon laquelle la trame de révélation et/ou l'image combinée sont portées par un même fil de sécurité ou par deux fils de sécurité.

La chambre note que la division d'opposition n'a pas pris position sur cette configuration du document de sécurité, ni dans sa citation à la procédure orale, ni pendant la procédure orale et ni dans la décision contestée.

Dans la notification selon l'article 15(1) RPCR 2020, la chambre a émis l'avis préliminaire selon lequel, dans le cas où la chambre arrivait à la conclusion que la décision de rejet de l'opposition devait être annulée et que les requêtes auxiliaires 1 à 3 ne sont pas admissibles, l'affaire serait à renvoyer à la division d'opposition pour suite à donner.

Pour les raisons invoquées plus haut, la décision de rejet de l'opposition doit être annulée et les requêtes auxiliaires 1 à 3 ne sont pas admissibles.

La requérante ayant demandé le renvoi de l'affaire à la division d'opposition afin de poursuivre la procédure si la requête auxiliaire 4 était à discuter et l'intimée ayant exprimé son accord avec cette manière de procéder, la chambre ne voit pas de raisons de modifier son avis préliminaire et fait droit à la demande de la requérante (article 111(1) CBE).

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition afin de

poursuivre la procédure.

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