T 0355/19 (Additif alimentaire/PANCOSMA) of 8.4.2022

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2022:T035519.20220408
Date de la décision : 08 Avril 2022
Numéro de l'affaire : T 0355/19
Numéro de la demande : 06709242.9
Classe de la CIB : A23K 20/111
A23K 10/30
A23K 10/37
A23K 50/10
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : ADDITIF ALIMENTAIRE POUR RUMINANTS A BASE D'EUGENOL ET DE CINNAMALDEHYDE
Nom du demandeur : PANCOSMA FRANCE S.A.S.
Archer-Daniels-Midland Company
Nom de l'opposant : DSM Nutritional Products AG
Chambre : 3.3.09
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 54(2)
European Patent Convention Art 56
European Patent Convention Art 83
European Patent Convention Art 123(2)
Rules of procedure of the Boards of Appeal 2020 Art 013(2)
Mot-clé : Requête principale: matière ajoutée - (oui)
Requêtes subsidiaires 1 et 2 - recevabilité (non)
Requête subsidiaire 3 - recevabilité (oui); matière ajoutée (non); suffisance de l'exposé (oui), activité inventive (oui)
Exergue :

Modification des moyens selon l'article 13(2) RPCR ; recevabilité de requêtes dans lesquelles certaines revendications indépendantes sont supprimées ; échelonnement des requêtes subsidiaires déposées tout au long de la procédure de recours qui donne lieu à une approche "par tâtonnements" ou une tactique par élimination (tactique du "salami") (voir points 2 et 3 des motifs).

Décisions citées :
G 0001/03
T 0002/81
T 0494/18
T 2091/18
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 1114/20

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours a été déposé par l'opposante (requérante) à l'encontre de la décision par laquelle la division d'opposition a jugé que le brevet européen n° 1 843 667 B1 sous une forme modifiée sur la base de la requête subsidiaire 3, déposée au cours de la procédure orale devant la division d'opposition, satisfait aux conditions énoncées dans la CBE.

II. Il avait été fait opposition au brevet dans son ensemble sur la base des motifs visés aux articles 100a) CBE (nouveauté et activité inventive), 100b) CBE et 100c) CBE.

III. Dans sa décision, la division d'opposition a considéré entre autres que :

- les revendications de la requête subsidiaire 3 ne contreviennent pas à l'article 123(2) CBE

- qu'elles satisfont aux conditions des articles 83 et 84 CBE

- que l'objet revendiqué est nouveau par rapport aux documents D3 et de D4

- que l'objet revendiqué dans les revendications 1, 6, 9, 13 et 15 implique une activité inventive par rapport à D7 et que l'objet des revendications 14 et 16 implique une activité inventive par rapport à D4.

IV. Les revendications indépendantes 1, 6, 9, 13 14, 15 et 16 de cette requête subsidiaire 3 s'énoncent comme suit:

"1 - Utilisation d'un mélange contenant de l'eugenol et du cinnamaldehyde pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants, caractérisée en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, à l'exclusion de l'utilisation d'un tel mélange pour augmenter la production laitière par les ruminants laitiers et contenant une association d'eugenol, de cinnamaldéhyde et de thymol, mis sur support, et comportant, en poids, de 3 à 20% de thymol, de 0,7 à 4,5% d'eugenol et de 3 à 10% de cinnamaldéhyde."

"6 - Procédé pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments par un animal ruminant, à savoir pour augmenter la digestibilité des aliments par l'animal ruminant, ou pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant, ou pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant, comprenant le fait d'ajouter à la ration alimentaire de l'animal un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde en quantité appropriée pour augmenter la digestibilité de la ration alimentaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, à l'exclusion d'un tel procédé comprenant l'ajout d'un additif alimentaire pour augmenter la production laitière par les ruminants laitiers et contenant une association d'eugenol, de cinnamaldehyde et de thymol, mis sur support, et comportant, en poids, de 3 à 20% de thymol, de 0,7 à 4,5% d'eugenol et de 3 à 10 % de cinnamaldéhyde."

"9 - Additif alimentaire pour les animaux ruminants, comprenant un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde adsorbé ou absorbé sur un support solide particulaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, à l'exclusion d'un tel additif alimentaire dans lequel une composition contenant 50% en poids de silice précipitée et 50% d'un mélange de 62% d'eugenol et 38% de cinnamaldehyde est enrobée d'hydroxypropylmethylcellulose selon un pourcentage d'enrobage de 10%, la mise sur support étant effectuée dans un mélangeur tournant à 7 tours/minute, avec un axe intérieur tournant à 210 tours/minute, muni d'une buse au travers de laquelle est pulvérisé le mélange à l'état liquide, 5 kilogrammes de silice précipitée étant chargés dans le mélangeur, puis 5 kilogrammes de la solution d'eugenol à 62% et de cinnamaldéhyde à 38% étant pulvérisés à température ambiante et à débit de 75 millilitres/minute sur la silice, en mélangeant pendant toute l'opération puis en homogénéisant pendant 15 minutes supplémentaires, l'enrobage de cette composition étant réalisé en lit d'air fluidisé, la pulvérisation étant réalisée par un système de pulvérisation par le haut, le produit d'enrobage étant à base d'hydroxypropylmethylcellulose (HPMC) aqueuse et appliqué sur la silice sous forme de mélange d'hydroxypropylmethylcellulose (HPMC) (18%) et de polyéthylèneglycol 6 000 (2%), la solution d 'enrobage étant réalisée dans l'eau sous agitation vigoureuse jusqu'à l'obtention d'une dispersion homogène, puis en laissant au repos pendant 24 heures, une masse de 1000 grammes de la composition étant mise dans la cuve du lit d'air fluidisé, puis une masse de 556 grammes de la solution d'enrobage étant pulvérisée afin d'obtenir un pourcentage d'enrobage de 10%, le débit d'air de suspension dans l'appareil d'enrobage étant de 80 à 90 m3/heure, la température de la solution d'enrobage étant de 25°C, la pression d'air de pulvérisation étant de 2,5 bars, le débit de pulvérisation étant de 15 g/minute, le diamètre de la buse étant de 1 mm, le temps de séchage après pulvérisation de la solution d'enrobage étant de 5 à 10 minutes."

"13 - Utilisation d'un mélange contenant de l'eugenol et du cinnamaldehyde pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants, caractérisée en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, et en ce que le mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde est adsorbé ou absorbé sur un support solide particulaire."

"14 - Utilisation d'un mélange contenant de l'eugenol et du cinnamaldehyde pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants, caractérisée en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, en ce que le mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde est incorporé à la ration alimentaire de l'animal, et en ce que la ration alimentaire contient le mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde avec :

- au moins 50 % de céréales,

- au moins 25 % de tourteaux d'oléagineux,

- au moins 20 % de produits issus de meunerie."

"15 - Procédé pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments par un animal ruminant, à savoir pour augmenter la digestibilité des aliments par l'animal ruminant, ou pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant, ou pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant, comprenant le fait d'ajouter à la ration alimentaire de l'animal un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde en quantité appropriée pour augmenter la digestibilité de la ration alimentaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, et en ce que le mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde est adsorbé ou absorbé sur un support solide particulaire, puis le support solide particulaire contenant le mélange est ajouté à la ration alimentaire."

"16 - Additif alimentaire pour les animaux ruminants, comprenant un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde adsorbé ou absorbé sur un support solide particulaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, et en ce qu'il contient un excipient contenant, en poids, de 0,1% à 1% d'un mélange de vitamines, de 20% à 80% de sels minéraux, de 20 % à 80 % de protéines, de 20 % à 80 % de produits issus de meunerie."

V. Lors de la procédure de recours, la titulaire du brevet (intimée) a soumis la requête subsidiaire 3 susmentionnée en tant que requête principale. Avec sa réponse au mémoire exposant les motifs du recours, elle a déposé sept requêtes subsidiaires qui ont par la suite été retirées et remplacées par quatre nouvelles requêtes subsidiaires déposées avec la lettre datée du 8 mars 2022 en réponse à la notification émise par la Chambre en préparation de la procédure orale.

VI. La requête subsidiaire 1 déposée par courrier du 8 mars 2022 diffère de la requête principale essentiellement dans le libellé des revendications 1, 6 et 9, qui se lisent comme indiqué ci-dessous. Les revendications 10 à 18 sont identiques à celles de la requête principale.

"1. Utilisation d'un mélange contenant de l'eugenol et du cinnamaldehyde pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants, caractérisée en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris :

- entre 28/17 et 5 pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant,

- entre 1 et 5 pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant."

"6 - Procédé pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments par un animal ruminant, à savoir pour augmenter la digestibilité des aliments par l'animal ruminant, ou pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant, ou pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant, comprenant le fait d'ajouter à la ration alimentaire de l'animal un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde en quantité appropriée pour augmenter la digestibilité de la ration alimentaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris :

- entre 28/17 et 5 pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant,

- entre 1 et 5 pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant".

"9 - Additif alimentaire pour les animaux ruminants, comprenant un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde adsorbé ou absorbé sur un support solide particulaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 1 et 5, à l'exclusion d'un tel additif alimentaire dans lequel une composition contenant 50% en poids de silice précipitée et 50% en poids d'un mélange de 62% en poids d'eugenol et 38% en poids de cinnamaldehyde est enrobée selon un pourcentage d'enrobage de 10% en poids avec :

- un mélange d'hydroxypropylmethylcellulose et de polyethylglycol 6000, avec un rapport entre les quantités respectives en poids d'hydroxypropylmethylcellulose et de polyethylglycol 6000 de 9, ou

- une émulsion d'éthylcellulose ou

- une huile de colza hydrogéné."

VII. La requête subsidiaire 2 déposée par courrier du 8 mars 2022 diffère de la requête subsidiaire 1 essentiellement dans le libellé des revendications 1 et 6, qui se lisent comme indiqué ci-dessous. Les revendications 9 à 18 sont identiques.

"1 - Utilisation d'un mélange contenant de l'eugenol et du cinnamaldehyde pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants, caractérisée en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 28/17 et 5."

"6 - Procédé pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments par un animal ruminant, à savoir pour augmenter la digestibilité des aliments par l'animal ruminant, ou pour augmenter la production laitière de l'animal ruminant, ou pour augmenter la vitesse de croissance en poids de l'animal ruminant, comprenant le fait d'ajouter à la ration alimentaire de l'animal un mélange d'eugenol et de cinnamaldehyde en quantité appropriée pour augmenter la digestibilité de la ration alimentaire, caractérisé en ce que le rapport entre les quantités respectives en poids d'eugenol et de cinnamaldehyde est compris entre 28/17 et 5."

VIII. La requête subsidiaire 4 déposée par courrier du 8 mars 2022 diffère de la requête principale en ce que les revendications 1 à 12 ont été supprimées. Les revendications 13 à 18 sont identiques à celles de la requête principale et ont été renumérotées de 1 à 6.

IX. Au cours de la procédure orale devant la Chambre, l'intimée a déposé de nouvelles requêtes subsidiaires 1 et 2, qui diffèrent des requêtes subsidiaires 1 et 2 déposées par courrier du 8 mars 2022 en ce que la revendication 9 et les revendications qui en dépendaient ont été supprimées. La requête subsidiaire 4 déposée par courrier du 8 mars 2022 a été renumérotée et constitue désormais la requête subsidiaire 3.

X. Les arguments de la requérante qui sont pertinents pour la décision peuvent être résumés de la manière suivante :

- les revendications 1 et 9 de la requête principale ne sont pas claires ;

- l'objet revendiqué dans toutes les requêtes s'étend au-delà du contenu de la demande telle que déposée ; le rapport de "1 à 5" entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde n'est pas divulgué dans la demande, en particulier en ce qui concerne les utilisations revendiquées et en ce que ces ingrédients sont absorbés sur un support solide ou sont utilisés en une quantité de 1 à 20 ppm ; en outre, les disclaimers dans les revendications 1 et 6 ne sont pas nécessaires pour établir la nouveauté par rapport à D4 et ne satisfont pas aux exigences de l'article 123(2) CBE ;

- le droit de priorité n'est pas valide pour l'objet de certaines revendications ; D4 fait partie de l'état de la technique pour ces revendications ;

- la revendication 14 de la requête principale et les revendications correspondantes des requêtes subsidiaires contreviennent aux exigences de l'article 83 CBE, car la base de calcul des pourcentages est absente ;

- l'objet revendiqué n'implique pas d'activité inventive par rapport à D7 et à D4, qui divulguent un mélange 1:1 d'eugénol et de cinnamaldéhyde ; les tests dans le brevet ne permettent pas de conclure que la combinaison revendiquée induit les effets décrits, en particulier sur toute la portée revendiquée. Le mélange revendiqué est une alternative évidente à ceux de D4 et D7 ;

- la titulaire ne devrait pas être autorisée à déposer tardivement de nouvelles requêtes contenant des revendications dans lesquelles un disclaimer est supprimé ou dans lesquelles des revendications entières sont supprimées.

XI. Les arguments de l'intimée peuvent être résumés de la manière suivante :

- les revendications 1 et 9 de la requête principale sont claires, car ce qui est retranché par les disclaimers est clair

- la priorité de l'objet revendiqué est valide

- l'intervalle "1 à 5" est divulgué dans la demande telle que déposée ; il est également divulgué en relation avec toutes les utilisations revendiquées et en relation avec des compositions dans lesquelles les ingrédients sont absorbés sur un support solide ou sont utilisés dans une quantité de 1 à 20 ppm

- l'homme du métier est en mesure de mettre en ½uvre l'invention définie dans la revendication 14 de la requête principale et dans les revendications correspondantes des requêtes subsidiaires

- l'objet revendiqué dans toutes les requêtes implique une activité inventive par rapport à D7 et D4 ; il s'en distingue en particulier par le rapport eugénol/cinnamaldehyde ; le brevet montre qu'un mélange d'eugénol et de cinnamaldéhyde dans la proportion revendiquée est plus efficace que celui dans lequel le cinnamaldéhyde est prépondérant ; le problème posé est la mise à disposition d'une composition améliorée ; les documents cités n'incitent pas à choisir l'intervalle revendiqué

- les requêtes subsidiaires déposées par courrier du 8 mars 2022 et au cours de la procédure orale contiennent de simples modifications et répondent aux objections soulevées pour la première fois dans l'opinion provisoire de la Chambre. Elles doivent donc être admises.

Les requêtes

XII. La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet.

XIII. L'intimée a demandé le rejet du recours ou, à titre subsidiaire, le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base des requêtes subsidiaires 1 et 2, présentées au cours de la procédure orale, ou de la requête subsidiaire 3, déposée en tant que requête subsidiaire 4 par courrier du 8 mars 2022.

Motifs de la décision

Requête principale

1. Admissibilité des disclaimers dans les revendications 1 et 6 ; ajout d'éléments

1.1 Les revendications 1 et 6 contiennent deux disclaimers excluant certaines utilisations d'un mélange contenant de l'eugénol et du cinnamaldéhyde dans un rapport en poids compris entre 1 et 5.

1.2 Un disclaimer peut uniquement être employé dans le but qu'il est censé avoir et rien de plus, notamment établir la nouveauté par rapport à une demande antérieure au sens de l'article 54(3) CBE ou un état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE sous certaines conditions - voir G 1/03, point 2.6.5 des motifs.

1.3 Les disclaimers dans les revendications 1 et 6 ont été introduits pendant la procédure d'opposition avec l'intention de délimiter l'objet revendiqué par rapport à l'enseignement de D4.

1.4 D4 divulgue un additif alimentaire comprenant du timolol, de l'eugénol et du cinnamaldéhyde. En particulier, l'additif contient de 3 à 20 % en poids de thymol, de 0,7 à 4,5 % en poids d'eugénol et de 3 à 10 % en poids de cinnamaldéhyde (voir alinéa [0008]).

1.5 Toutefois, la Chambre partage l'avis de l'intimée selon lequel D4 ne divulgue pas un rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde compris entre 1 et 5. La combinaison de la valeur inférieure de l'intervalle définissant la quantité de cinnamaldéhyde (3 %) avec la valeur supérieure de l'intervalle définissant la quantité d'eugénol (4,5 %), est le résultat d'une double sélection qui n'est pas divulguée directement et sans ambiguïté dans D4. Par ailleurs, comme l'ont justement relevé l'intimée et la division d'opposition, tous les exemples donnés par D4 concernent des mélanges dans lesquels ce rapport est situé en dehors de l'intervalle revendiquée "1 à 5" - voir à cet égard les alinéas [0014] et [0021], qui divulguent des mélanges dans lesquels c'est le cinnamaldéhyde, et non l'eugénol qui est prépondérant. Par conséquent D4 ne contient aucune incitation pour l'homme du métier à choisir l'intervalle revendiqué "1 à 5" ; au contraire, D4 éloigne l'homme du métier de l'intervalle revendiqué.

1.6 Le disclaimer dans la revendication 1 ne satisfait pas aux exigences de l'article 123(2) CBE, puisqu'il s'avère que ce disclaimer n'est pas nécessaire pour rétablir la nouveauté par rapport à D4 (voir G 1/03). Le même argument s'applique au disclaimer de la revendication 6.

1.7 Pour ces raisons, l'objet des revendications 1 et 6 de la requête principale s'étend au-delà du contenu de la demande telle que déposée.

Requêtes subsidiaires 1 et 2

2. Recevabilité

2.1 Les requêtes subsidiaires 1 et 2 diffèrent des requêtes subsidiaires 1 et 2 déposées avec la lettre du 8 mars 2022 en ce que la revendication 9 et les revendications qui en dépendaient ont été supprimées. Elles ont été déposées au cours de la procédure orale devant la Chambre après l'annonce de l'opinion provisoire suivant de la Chambre :

- la revendication 9 des requêtes subsidiaires 1 à 3 déposées avec la lettre du 8 mars 2022, qui contenait un disclaimer modifié, ne remplissait pas la condition de l'"admissibilité manifeste" et ces requêtes n'étaient donc pas recevables, alors que

- la requête subsidiaire 4 (désormais requête subsidiaire 3), qui ne contenait pas cette revendication 9, était recevable.

2.2 La Chambre partage l'avis exprimé dans les décisions[deleted: ]T 2091/18 (points 4.1 et 4.2 des motifs) et T 494/18 (point 1 des motifs), selon lequel la suppression de revendications indépendantes dans une requête qui faisait déjà l'objet de la procédure de recours constitue une modification des moyens au sens de l'article 13(2) RPCR 2020.

2.3 La Chambre partage aussi l'avis exprimé dans la décision T 2091/18, point 4.2 des motifs, confirmé dans la décision T 494/18, points 1.3.2, et 1.4 des motifs, selon lequel le règlement de procédure des chambres de recours ne fournit aucune base pour soutenir l'argument selon lequel la suppression de revendications ne modifie pas les moyens présentés par une partie dans la mesure où elle n'entraîne pas une modification ou une nouvelle appréciation de la situation factuelle. Les questions concernant la suite de la procédure, la nécessité de conduire des investigations supplémentaires et de savoir si les critères énoncés à l'article 13(1) RPCR sont remplis doivent être traitées séparément de la question de savoir si les moyens présentés par une partie ont été modifiés au sens de l'article 13(2) RPCR 2020 : voir T 2091/18, point 4.2 des motifs.

2.4 La Chambre considère également que si une requête qui n'est pas admissible le devient après suppression d'une revendication et qu'en conséquence, un brevet qui devait être révoqué peut être maintenu, il y a clairement une modification des moyens invoqués. Il serait illogique de prétendre que les moyens invoqués ne sont pas changés si les résultats sont diamétralement différents.

2.5 Par conséquent, la Chambre conclut que les requêtes subsidiaires 1 et 2 doivent être considérées comme une modification des moyens de l'intimée. La recevabilité de ces requêtes est donc soumise à l'appréciation de la Chambre en vertu de l'article 13(2) RPCR 2020.

2.6 L'intimée a fait valoir que, puisque la suppression de la revendication 9 entraîne une simplification de la procédure, les requêtes subsidiaires 1 et 2 devraient être admises même à un stade très tardif, à savoir pendant la procédure orale. En outre, ces requêtes répondaient à une objection contre la revendication 9 de la requête principale soulevée pour la première fois par la Chambre dans la notification émise en préparation de la procédure orale.

2.7 La Chambre n'est pas convaincue par ces arguments.

2.8 Il peut certes y avoir des cas dans lesquels la suppression de revendications peut être admise à un stade tardif de la procédure de recours, mais cela ne signifie pas pour autant que le titulaire a toute latitude pour adapter les revendications pendant toute la procédure de recours. Cela vaut en particulier lorsque le point de départ est un jeu de revendications contenant sept revendications indépendantes et que des jeux de revendications modifiées ont été déposés à plusieurs reprises pendant la procédure de recours. Laisser cette liberté à une partie équivaudrait à lui permettre une approche "par tâtonnements" ou une tactique par élimination (tactique du "salami"), qui ne sont acceptables dans aucune procédure, et à plus forte raison dans le cadre d'une procédure judiciaire telle que la procédure de recours.

2.9 La revendication 9 de la requête principale avait déjà été attaquée dans le mémoire exposant les motifs du recours et l'intimée avait déjà répondu à cette objection en déposant des requêtes dans lesquelles la revendication 9 était modifiée ou supprimée. L'opinion provisoire de la Chambre au sujet de la revendication 9 de la requête principale concernait la clarté de certaines définitions utilisées pour formuler le disclaimer dans cette revendication (voir les points 7.3 à 7.11 de la notification). Elle était fondé sur les observations figurant au point 2.2 du mémoire exposant les motifs du recours de la requérante, tout en relevant l'insuffisance des modifications apportées jusqu'à ce moment-là pour répondre aux objections soulevées. Il n'y avait par conséquent aucune raison d'attendre l'opinion de la Chambre au cours de la procédure orale (mentionné ci-dessus au point 2.1) pour déposer des requêtes ultérieures comprenant les mêmes revendications indépendantes 1 et 6 des requêtes déposées avec la lettre du 8 mars 2022, mais dans lesquelles la revendication 9 était supprimée.

2.10 Pour ces raisons, la Chambre a décidé de ne pas admettre les requêtes subsidiaires 1 et 2 dans la procédure de recours.

Requête subsidiaire 3

3. Recevabilité

3.1 La requête subsidiaire 3 a été déposée par l'intimée en tant que requête subsidiaire 4 par courrier du 8 mars 2022 en réponse à la notification émise par la Chambre en préparation de la procédure orale. Elle diffère de la requête principale en ce que les revendications 1 à 12 ont été supprimées, laissant les revendications 13 à 18 non modifiées mais simplement renumérotées de 1 à 6.

3.2 Pour justifier le dépôt tardif de cette requête, l'intimée a fait valoir que celle-ci constituait une réaction à l'opinion provisoire exprimée par la Chambre dans sa notification au titre de l'article 15(1) RPCR soulevant de nouvelles objections contre les revendications 1, 6 et 9 de la requête principale.

3.3 La Chambre reconnaît que dans son l'opinion provisoire elle avait soulevé une objection supplémentaire concernant les disclaimers présents dans les revendications 1 et 6 de la demande principale. Il convient donc d'accepter que la suppression des revendications 1 et 6 et des revendications qui en dépendent peut constituer une réaction légitime à cette nouvelle objection.

3.4 En revanche, aucune nouvelle objection n'a été soulevée à l'encontre du disclaimer de la revendication 9. L'opinion provisoire négative quant à la revendication 9 est en effet basé sur les arguments présentés par la requérante (voir le point 2.5 ci-dessus). Cependant, la Chambre reconnaît qu'en supprimant la revendication 9 en même temps que les revendications 1 et 6, l'intimée a simplement saisi l'occasion d'éliminer toutes les revendications qui, selon l'opinion provisoire de la Chambre, ne répondaient pas aux exigences de la CBE, et ainsi optimiser sa réaction en vue du principe de l'économie de procédure.

3.5 Étant donné que les modifications ont été apportées bien avant la procédure orale et que les suppressions des revendications entraînent une simplification évidente des éléments à examiner, la Chambre considère que les circonstances particulières du cas d'espèce reviennent à des circonstances exceptionnelles justifiées par des raisons convaincantes pour admettre la requête subsidiaire 3 au vu des exigences de l'article 13(2) RPCR 2020.

4. Modifications

4.1 La requérante considère que le rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde compris entre 1 et 5 n'est pas divulgué dans la demande telle que déposée, en particulier en ce qui concerne les utilisations de la composition pour augmenter la digestibilité, la production laitière et la vitesse de croissance en poids mentionnées dans les revendications 1 et 3.

4.2 Le Chambre n'est pas convaincue par cet argument. Le rapport entre 1 et 5 découle directement et sans ambiguïté des revendications 2 et 9, de la page 2 lignes 34 à 37, de la page 4, lignes 13 à 20 et de la page 10, lignes 3 à 9 de la demande telle que déposée. Ces passages divulguent un domaine de rapports entre

0,2 et 5 et un domaine préféré plus étroit entre 1 et 1,8 inclus dans le précédent. Comme dans l'affaire T 2/81, cela révèle immédiatement deux domaines partiels possibles qui se situent, en deçà et au-delà du domaine plus étroit, à l'intérieur de l'ensemble. La simple combinaison du domaine plus étroit préféré avec l'un de ces domaines partiels, qui résulte en un rapport entre 1 et 5, peut être déduite sans ambiguïté de l'exposé de l'invention et est étayée par ce dernier.

4.3 Il ressort également de la demande telle que déposée dans son ensemble, et notamment de la revendication 1, de la page 1, lignes 5 à 8, de la page 2, lignes 8 à 11, et 19 à 20 que la composition qui comprend ce rapport d'eugénol et de cinnamaldéhyde est destinée à améliorer la digestibilité des aliments par les ruminants, ainsi que les propriétés zootechniques des animaux ruminants, notamment la vitesse de croissance en poids (page 8 lignes 1 à 3) et la production laitière (page 1, ligne 8 et page 7, lignes 8 et 9).

4.4 La revendication 3 ne porte pas non plus sur une interprétation initialement non divulguée de l'expression "augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments". Il ressort clairement des passages précités de la demande telle que déposée que l'augmentation de l'efficacité, mentionnée dans la revendication 8 et à la page 3, lignes 22 à 26 de la demande telle que déposée, se traduit par une augmentation de la digestibilité, de la production laitière et de la vitesse de croissance.

4.5 La revendication 4, qui combine la caractéristique exigeant que le rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde soit compris entre 1 et 5, que ces ingrédients soient adsorbés ou absorbés sur un support particulier solide et qu'un excipient soit présent, ne s'étend pas non plus au-delà du contenu de la demande telle que déposée. La revendication 4 combine les caractéristiques des revendications 12, 13 et 15 telles que déposées, en application de la décision T 2/81.

4.6 La requérante considère qu'une combinaison du rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde de 1 à 5 et de la plage de 1 ppm à 20 ppm (du mélange par rapport à la matière sèche) tel que défini dans les revendications 5 et 6 n'a pas été divulguée dans la demande telle que déposée.

4.7 Cet argument n'est pas non plus convaincant. La revendication 5 dépend de la revendication indépendante 2 dont elle incorpore toutes les caractéristiques. En outre, la revendication 5 combine les caractéristiques des revendications 1, 2, 3, 6 et 7 telles que déposées, en accord aussi avec la décision T 2/8l.

4.8 La revendication 6 dépend de la revendication indépendante 3 dont elle incorpore toutes les caractéristiques. En outre, la revendication 6 combine les caractéristiques des revendications 8, 9, 10 et 11 telles que déposées, en application de la décision T 2/81, et les utilisations divulguées dans les passages de la description mentionnés ci-dessus.

4.9 Pour ces raisons, les modifications apportées à la requête subsidiaire 3 ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande telle qu'elle a été déposée.

5. Suffisance de l'exposé

5.1 L'opposante fait valoir que la revendication 2 contrevient aux exigences de l'article 83 CBE au motif que la base de calcul des pourcentages des ingrédients mentionnés (poids ou volume) est absente.

5.2 Dans la description et les revendications du brevet frappé d'opposition, les pourcentages sont toujours donnés en poids : voir alinéas [0018], [0024], [0028], [0029], [0032], [0081], [0082], [0083], et revendications 2, 5, 9, 13 et 15.

5.3 Ainsi, l'homme du métier lisant le brevet dans son intégralité avec ses connaissances générales comprend qu'il faut appliquer une base de calcul "en poids". De plus, pour les éléments concernés (céréales, tourteaux d'oléagineux et produits issus de meunerie), l'homme du métier sait bien que la notion de volume n'est pas raisonnablement applicable, car elle conduit à des résultats très variables d'un lot à l'autre sans indication sur la nature et la granulométrie exactes de ces composants.

5.4 Par conséquent, l'homme du métier est en mesure de mettre en oeuvre l'invention à l'aide de ses connaissances générales et du contenu du brevet.

6. Droit de priorité

6.1 Selon la requérante, certaines revendications ne bénéficient pas du droit de priorité ; à son avis, D4, publié après la date de priorité, fait donc partie de l'état de la technique au sens de l'article 54(2) CBE pour ces revendications.

6.2 Étant donné que, comme expliqué ci-dessous, la Chambre considère que l'objet revendiqué implique une activité inventive par rapport à D4, il n'est pas nécessaire de décider quelles revendications bénéficient ou ne bénéficient pas du droit de priorité. Le raisonnement suivant relatif à l'activité inventive est développé en considérant que le droit de priorité n'est pas valable et que D4 fait partie de l'état de la technique pour l'ensemble de l'objet revendiqué.

7. Activité inventive

a) État de la technique le plus proche

7.1 L'invention concerne un mélange contenant de l'eugénol et du cinnamaldéhyde dans un rapport de 1 à 5. Le mélange peut être utilisé comme additif alimentaire pour améliorer la digestibilité des aliments par les animaux ruminants. En outre, il peut être utilisé pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments par un animal ruminant, à savoir pour augmenter la digestibilité des aliments, la production laitière et la vitesse de croissance en poids de l'animal.

7.2 La division d'opposition a considéré que D4 et D7 peuvent être considérés comme des points de départ appropriés pour évaluer l'activité inventive. La Chambre ne voit pas de raisons de s'écarter de ce choix.

7.3 D4 décrit l'utilisation d'un additif alimentaire contenant du thymol, de l'eugénol et du cinnamaldéhyde pour augmenter la production laitière des ruminants laitiers. D4 est considéré comme l'état de la technique le plus proche pour l'objet revendiqué se rapportant à l'augmentation de la production laitière.

7.4 D7 décrit différents types d'additifs alimentaires pour les ruminants et leur utilisation pour augmenter la digestibilité des fibres, améliorer la fermentation dans le rumen (ce qui implique une meilleure digestibilité), augmenter l'efficacité de l'alimentation, et prévenir la perte de poids : voir la page 1 et le tableau 1 aux pages 9 et 10. Les additifs peuvent contenir entre autres des combinaisons d'huiles essentielles. L'utilisation d'un mélange d'huile de girofle, contenant de l'eugénol, et d'huile de cannelle, contenant du cinnamaldéhyde pour augmenter l'efficacité de l'utilisation des aliments et la fermentation dans le rumen est décrite à la page 10. D7 est considéré comme l'état de la technique le plus proche pour l'objet revendiqué se rapportant à l'augmentation de la digestibilité et l'efficacité des aliments chez les ruminants.

7.5 L'objet défini dans les revendications de la requête subsidiaire 3 diffère de celui divulgué dans D4 et D7 au moins en ce que le rapport entre les quantités respectives d'eugénol et de cinnamaldéhyde est compris entre 1 et 5.

7.6 Comme déjà mentionné ci-dessus (point 1.5), D4 ne divulgue pas un mélange comprenant un rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde de 1 à 5.

D7 ne précise pas non plus les proportions d'huiles essentielles utilisées, ni les quantités d'eugénol et de cinnamaldéhyde contenues dans les mélanges d'huiles qui y sont décrites.

7.7 La requérante a fait valoir qu'une référence générique à un mélange comprenant deux ingrédients divulgue, par défaut et implicitement, leur mélange dans un rapport 1:1. Ainsi, à son avis, D4 et D7 divulguent un tel mélange et celui-ci correspond à l'objet revendiqué.

7.8 La Chambre n'est pas convaincue par cet argument. Une divulgation générique n'entraîne pas une divulgation directe et sans ambiguïté d'un mode de réalisation spécifique visé par la définition générique. Un mélange d'eugénol et de cinnamaldéhyde dans un rapport de 1:1 n'est donc pas divulgué dans D4 et D7.

7.9 Pour ces raisons, la Chambre conclut que D4 et D7 ne divulguent aucun mélange comprenant l'eugénol et le cinnamaldéhyde dans un rapport de 1 à 5.

b) Effet technique

7.10 Les résultats des tests décrits dans le brevet montrent que :

a) La combinaison d'eugénol et de cinnamaldéhyde améliore la digestibilité des fibres de luzerne déshydratée, utilisée pour l'alimentation de la vache laitière. Par contre, l'eugénol seul ou le cinnamaldéhyde seul n'améliore pas la digestibilité des fibres (Étude 1).

b) Un mélange dans lequel le cinnamaldéhyde est prépondérant induit une réduction de la consommation d'aliments et une réduction de la production laitière. Par contre, un mélange dans lequel l'eugénol est prépondérant induit une augmentation de la consommation d'aliments et de la production laitière (Étude 2).

c) Un mélange dans lequel l'eugénol est prépondérant conduit à une augmentation de la production laitière et de la croissance en poids de bovins à viande (Études 3 et 4).

d) L'administration d'au moins 1 ppm (par rapport à la matière sèche) d'un mélange dans lequel l'eugénol est prépondérant induit une augmentation de la digestibilité des rations alimentaires supérieure à celle induite par la monensine sodium (Étude 5).

7.11 Compte tenu de ces résultats, il est plausible qu'un mélange contenant de l'eugénol et du cinnamaldéhyde améliore la digestibilité des aliments chez les ruminants et augmente leur efficacité en termes de production de lait et d'augmentation de poids. De plus, cet effet est vraisemblablement plus fort si le cinnamaldéhyde n'est pas prépondérant dans le mélange ou, en d'autres termes, lorsque le rapport entre l'eugénol et le cinnamaldéhyde est de 1 à 5.

c) Le problème posé

7.12 Par conséquent, en partant de D4 ou de D7, le problème posé est celui de la mise à disposition d'un mélange amélioré induisant les effets mentionnés ci-dessus.

7.13 La requérante a fait valoir que ce problème n'a pas été résolu pour les motifs suivants :

- les résultats de l'étude 2 sont douteux au motif que les vaches ont reçu des quantités d'aliments inférieures à celles nécessaires à leur survie.

Cet argument n'est cependant pas opérant : comme l'explique l'intimé, les vaches ont été nourries à l'aide de concentrés protéiques en administrant des quantités habituellement utilisées pour ces animaux.

- L'étude 2 montre que le mélange revendiqué diminue, plutôt qu'il n'augmente, l'efficacité de l'utilisation des aliments telle que définie dans D4, à savoir la quantité d'aliments nécessaire pour produire une quantité donnée de lait.

Cet argument n'est pas non plus convaincant : le brevet ne donne pas cette définition à l'expression "efficacité de l'utilisation" lorsqu'il s'agit de production de lait ; une augmentation de la production laitière par jour est suffisante.

- L'étude 5 montre que les effets du mélange sur la digestibilité de la matière sèche des fibres ne sont pas meilleurs lorsqu'on se place à la dose de 3 mg par jour. Cette dose minimale n'est pas indiquée dans la revendication 1.

Cependant, comme l'a fait remarquer l'intimée, l'étude 5 est une comparaison avec ce qui est obtenu avec un autre élément ayant déjà lui-même un effet sur la digestibilité, à savoir la monensine. Cela signifie que l'étude 5 ne permet pas de conclure que le mélange n'est pas efficace à cette concentration. Par ailleurs, l'argument selon lequel des quantités minimales du mélange sont inefficaces est une tentative de mettre en cause l'invention en se concentrant délibérément sur des modes de réalisation qui n'ont pas de sens technique et que l'homme du métier éviterait soigneusement lors de la mise en ½uvre de l'invention en se fondant sur l'enseignement du brevet et ses connaissances générales. En tant que tel, l'argument est par conséquent à réfuter.

- Les effets visés ne peuvent pas être obtenus dans l'ensemble du champ d'application revendiqué parce que la gamme revendiquée de 1 à 5 est trop large.

Cet argument n'est pas non plus convaincant ; la requérante, qui a la charge de la preuve, n'a produit aucune preuve allant en ce sens.

7.14 Pour ces raisons, la Chambre conclut que le problème susmentionné a été résolu.

d) Non-évidence de la solution proposée

7.15 Il est également estimé que l'homme du métier confronté à ce problème ne trouverait ni dans D7 ni dans les autres documents de l'état de la technique cités une quelconque incitation à utiliser une combinaison d'eugénol et de cinnamaldéhyde dans le rapport 1 à 5 telle que revendiquée. Le fait que l'homme du métier aurait effectué des essais dans cet intervalle, puisqu'il n'aurait eu aucune raison de ne pas le faire, est insuffisant pour fonder l'absence d'activité inventive.

7.16 Pour ces raisons, le mélange contenant de l'eugénol et du cinnamaldéhyde dans le rapport revendiqué, ainsi que l'utilisation et le procédé d'utilisation d'un tel mélange tels que définis dans les revendications de la requête subsidiaire 3 impliquent une activité inventive.

8. Description

Les parties ont convenu que la description selon le fascicule du brevet est adéquate pour le maintien du brevet sur la base des revendications de la requête subsidiaire 3. La Chambre ne voit pas de raisons pour s'écarter de cette conclusion.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la division d'opposition en vue du maintien du brevet sous forme modifiée sur la base

- des revendications 1 à 6 de la requête subsidiaire 3 (déposée en tant que requête subsidiaire 4 par courrier du 8 mars 2022) et

- de la description selon le fascicule du brevet.

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