T 1307/17 () of 16.11.2021

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2021:T130717.20211116
Date de la décision : 16 Novembre 2021
Numéro de l'affaire : T 1307/17
Numéro de la demande : 13177719.5
Classe de la CIB : H02B 13/055
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : Appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension et son procédé de fabrication
Nom du demandeur : General Electric Technology GmbH
Nom de l'opposant : Solvay Fluor GmbH
ABB Power Grids Switzerland AG
Siemens Aktiengesellschaft
Chambre : 3.5.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 100(b)
European Patent Convention Art 100(a)
European Patent Convention Art 54(3)
European Patent Convention Art 54(2)
European Patent Convention Art 56
European Patent Convention Art 87(1)(b)
Mot-clé : Motifs d'opposition - exposé insuffisant (non),
Nouveauté - divulgation antérieure
Nouveauté - caractéristiques implicites (non),
Priorité - validité de la date de priorité (oui),
Activité inventive - (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 1794/12
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0598/20

Exposé des faits et conclusions

I. Les présents recours ont été formés par l'opposante 2 (ABB Power Grids Switzerland AG) et l'opposante 3 (Siemens Aktiengesellschaft) à l'encontre de la décision de la division d'opposition, postée le 4 avril 2017, par laquelle les oppositions formées à l'égard du brevet européen n° 2658054 ont été rejetées conformément aux dispositions de l'article 101(2) CBE.

L'opposante 1 (Solvay Fluor GmbH) n'a pas formé de recours et acquiert par conséquent la position d'une partie de droit selon l'article 107 CBE.

Référence est faite aux documents suivants :

D3 |US 3 185 734 |

D4 |Cahier Technique n° 188, Schneider Electric, février 2003 |

D5 |Technical Data Sheet, 3M, Novec**TM 649, publié09/2009 |

D6 |Technical Data Sheet, 3M, Novec**TM 1230, publié 04/2009 |

D8 |DE 20 2009 009305 U1 |

D9 |US 3 048 648 |

D10|US 2 853 540 |

D11|US 2008/0135817 Al |

D12|DE 100 41 508 A1 |

D13|EP 0 140 034 A2 |

D14|FR 2 930 019 A1 |

D17|DT 25 57 298 A1 |

D18|WO 2010/142353 A1 |

D19|JP 2010-171173 A |

D20|Traduction de D19 en anglais |

D21|JP11-290638 A |

D22|Traduction de D21 en anglais |

D23|Piemeontesi, M. et al., « Sorption of SF6 and SF6 decomposition products by activated alumina and molecular sieve 13X », Conference Record of the 1996 IEEE International Symposium on Electrical Insulation, Montreal, Quebec, Canada, June 16-19, 1996|

D25|Article Wikipédia: « GasisolierteSchaltanlage » |

D26|Mathe, G., « SF6 Recycling Guide, Re-use of SF6 gas in electrical power equipment and finaldisposal » Cigre 23.10 Task force, 1er août 1997 |

D27|ABB, « Instruction Manual: Insulating gas systems for ZX switchgear », mai 1998 |

D28|Koch, D., Cahier Technique n°188, « SF6 properties, and use in MV and HV switchgear »de Merlin Gerin |

D29|Norme internationale IEC 62271-1, « Appareillage à haute tension - Partie 1: Spécifications communes », Commission électrotechnique internationale |

D31|US 4 110 580 |

D33|DE 27 08 294 A1 |

D36|Article Wikipédia: « Absorption (Chemie) » |

D37|Extraits « Absorption » pages 15 et 60 à 61 de Falbe J. et al. (éditeurs), « Römpp Chemie Lexikon », 9., erweiterte und neubearbeitete Auflage |

B2 |Ditch B.D., « Thermal Decomposition Products Testing With 1,1,1,2,2,4,5,5,5 nonafluoro-4-trifluoromethyl pentan-3-one (C6 F-ketone) During Fire Extinguishing », thèse, Worcester Polytechnic Institute|

B3 |Ditch B.D. et al., « Thermal Decomposition Product Testing with C6 F-Ketone », Halon Options Technical Working Conference, 24-26 April 2001 |

I01|Saxegaard M. et al. « Low-Current Interruption in SF6-Alternatives », Paper 0614, CIRED, 24th International Conference on Electricity Distribution, Glasgow, 12-15 juin 2017, |

I02|Ponce de Leon, J., « Safety and Availability in GIS », II Jornadas Técnicas - ABB en Perù, ABB, 6 avril 2017 |

I03|ABB product catalogue 2012, « SafeLink 2 Compact ring main solution for secondary 12 kV distribution networks » |

I04|ABB brochure du produit HD4-HXA/T - HD4/T |

I05|EP 3 171 382 A1 |

I06|WO 2010/031447 A1 |

I07|WO 2010/040379 A1 |

I08|Siemens brochure « Gas-Insulated Switchgear up to 550 kV, 63 kA, 5000 A, Type 8DQ1 » |

I09|Siemens brochure « Gas-Insulated Switchgear up to 245 kV, 50 kA, 4000 A, Type 8DN9 » |

I11|Apport partiel d'actifs, 21 mars 2011 |

I12|Extrait du Registre du Commerce et des Sociétés, Changement de dénomination sociale de la société Areva T&D SAS, 24 janvier 2011 |

I13|Déclaration dans la requête PCT/EP2011/066351 Cadre n° VIII-3-1 Droit de revendiquer la priorité |

I14|Extrait Patentscope de la demande WO2012038442 |

I15|Acte de cession de quote-part simplifié aux fins d'inscription entre Alstom Grid SAS et Alstom Technology Ltd |

I16|Notification par l'OMPI de l'enregistrement d'un changement concernant la demande internationale PCT/EP2011/066351, changement de déposant de Alstom Grid SAS à Alstom Technology Ltd |

I17|Notification par l'OEB relative au transfert du brevet objet du litige à Alstom Technology Ltd |

Les motifs de la décision attaquée ont été en essence les suivants :

- les motifs d'opposition selon les articles 100 b) et 100 c) CBE ne s'opposent pas au brevet objet du litige

- l'objet de la revendication indépendante 1 telle que délivrée est nouveau par rapport au document D3 et par rapport au document D18

- la revendication de priorité du brevet objet du litige est valable et le document D18 relève de l'état de la technique selon l'article 54(3) CBE

- l'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D8 représentant l'état de la technique le plus proche en combinaison avec les documents D5 ou D6, ou en partant du document D33 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec D8, ou en partant de l'un des documents D19, D11, D5, D9, D14, D10, D12 et D13 comme état de la technique le plus proche ou en partant du document D31 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec le document D5.

II. Une procédure orale devant la Chambre a eu lieu le 16 novembre 2021.

Les requêtes finales des parties étaient les suivantes :

La requérante 1 (opposante 2, ABB Power Grids Switzerland AG) demande que

la décision attaquée soit annulée et que le brevet objet du litige soit révoqué.

La requérante 2 (opposante 3, Siemens Aktiengesellschaft) demande par écrit que

la décision attaquée soit annulée et le brevet objet du litige soit révoqué.

L'intimée (titulaire du brevet, General Electric Technology GmbH) demande que

les recours soient rejetés ou, en tant que requête subsidiaire,

que le brevet soit maintenu sur la base des revendications 1 à 8 selon la première ou deuxième requête subsidiaire, déposées le 10 janvier 2018.

La partie de droit (Solvay Fluor GmbH) n'a pas présenté de moyens de recours ni de requêtes.

Comme annoncé par lettre en date du 11 mars 2021 par la requérante 2 et par lettre en date du 21 juillet 2021 par la partie de droit, ces parties n'ont pas été représentées à la procédure orale.

III. La revendication 1 selon la requête principale (brevet tel que délivré) s'énonce comme suit :

"Appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension, qui comprend une enceinte étanche dans laquelle se trouvent des composants électriques ainsi qu'un milieu gazeux assurant l'extinction des arcs électriques susceptibles de se produire dans cette enceinte, et qui est caractérisé en ce que :

- le milieu gazeux comprend au moins une fluorocétone, seule ou en mélange avec au moins un gaz n'appartenant pas à la famille des fluorocétones ;

- la fluorocétone est présente dans l'enceinte partiellement à l'état liquide et partiellement à l'état gazeux ; et en ce que

- l'enceinte comprend de plus des moyens pour absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'ionisation que subit cette fluorocétone au cours d'un arc électrique."

La revendication 10 selon la requête principale s'énonce comme suit :

"Procédé de fabrication d'un appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension selon l'une quelconque des revendications 1 à 9, qui comprend une étape de remplissage d'une enceinte étanche, dans laquelle se trouvent des composants électriques, avec au moins une fluorocétone, seule ou en mélange avec au moins un gaz n'appartenant pas à la famille des fluorocétones, et qui est caractérisé en ce que cette étape de remplissage comprend successivement :

- la mise sous vide partiel de l'enceinte ;

- le chauffage de cette enceinte à une température theta1 supérieure à une température maximale d'utilisation de l'appareil ;

- l'injection de la fluorocétone à l'état gazeux dans l'enceinte jusqu'à ce que cette fluorocétone soit à une pression dans cette enceinte comprise entre la pression de vapeur saturante qu'elle présente à la température theta1 et la pression de vapeur saturante qu'elle présente à ladite température maximale d'utilisation de l'appareil ;

- le refroidissement de l'enceinte à une température theta2 inférieure à ladite température maximale d'utilisation de l'appareil ; et éventuellement

- l'injection du gaz n'appartenant pas à la famille des fluorocétones dans l'enceinte jusqu'à obtenir dans l'enceinte une pression totale prédéterminée."

Les revendications 2 à 9 sont des revendications dépendantes.

Au vu du dispositif de la présente décision, les libellés des revendications indépendantes selon les requêtes subsidiaires ne sont pas reproduits.

IV. Les arguments de la requérante 1 qui sont pertinents pour la présente décision peuvent se résumer comme suit :

Insuffisance de l'exposé

Le motif selon l'article 100 b) CBE s'oppose au maintien du brevet objet du litige.

Selon la revendication 1 telle que délivrée, l'appareil de coupure comprend des moyens pour absorber les espèces qui se forment après l'ionisation que subit la fluorocétone au cours d'un arc électrique. Le brevet objet du litige ne divulgue aucun exemple de tels moyens d'absorption. Les exemples divulgués dans le brevet objet du litige, à savoir les tamis moléculaires comme des zéolites, du charbon actif ou de l'alumine activée sont des moyens d'adsorption. L'adsorption, d'un point de vue chimique, est un mécanisme complètement différent de l'absorption, voir par exemple les documents D36 et D37. Il n'est pas permis de donner une interprétation aux expressions d'une revendication qui vont au-delà du sens communément accepté dans le domaine technique en espèce. La personne du métier comprendrait par conséquent que les moyens d'absorption ne comprennent pas les exemples des moyens d'adsorption divulgués. Ce point de vue est conforme au libellé de la revendication dépendante 8 telle que délivrée, selon lequel les moyens pour absorber les espèces moléculaires consistent en un ou plusieurs dispositifs comprenant de l'alumine activée, du charbon actif, un tamis moléculaire carboné et/ou une zéolite. Du fait de l'expression « comprenant », le libellé de la revendication 8 porte sur une combinaison des moyens d'absorption et, en plus, des moyens d'adsorption.

Selon la revendication 1 telle que délivrée, les moyens d'absorption doivent absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'occurrence d'un arc électrique sans pour autant absorber les molécules de fluorocétone elles-même, voir aussi l'alinéa [0025] de la description du brevet objet du litige. La personne du métier n'obtient aucune indication lui permettant de savoir quelles espèces moléculaires se forment après ionisation, bien que celles-ci soient soumises à des variations importantes, étant donné que toute la classe de fluorocétones est revendiquée. De plus, la personne du métier n'obtient aucune indication lui permettant de savoir comment les espèces moléculaire non spécifiées pourraient être piégées sélectivement par le mécanisme d'absorption. D'après le témoignage d'un expert de la requérante 1, Mr. Doiron, soumis en annexe aux mémoire de recours, l'enlèvement sélectif par absorption n'est pas connu de la personne du métier et, de surcroît, son existence est peu probable.

Défaut de nouveauté par rapport au document D18

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'est pas nouveau par rapport au document D18, la caractéristique concernant les moyens d'absorption étant divulguée dans ce document de manière explicite et implicite.

En ce qui concerne la divulgation implicite, à la page 13, lignes 4 à 9, l'invention selon D18 est particulièrement apte à des disjoncteurs de la famille ZX de la société ABB AG. Selon la page 14 du document D27, qui est une brochure dudit disjoncteur ZX de ABB, les régulations locales pour le traitement des sachets d'agent déshumidificateur contaminés des produits de décomposition du SF6 doivent être suivies. Par conséquent, le document D18 divulgue que les disjoncteurs de la famille ZX comprennent des sachets d'agent déshumidificateur, ce qui représente des moyens d'absorption. De tels moyens d'absorption absorbent des produits de décomposition de SF6, voir aussi la page 8 de D27, notamment l'HF. Celui-ci se forme aussi forcément après ionisation d'une fluorocétone par un arc électrique à cause de l'humidité résiduelle inévitable à l'intérieur des enceintes. La personne du métier comprend alors à la lecture du document D18 que les sachets d'agent déshumidificateur sont également nécessaires dans le cas des fluorocétones.

En ce qui concerne la divulgation explicite de D18, selon la page 10, ligne 27 à la page 11, ligne 3, le disjoncteur comprend de l'oxygène qui réagit avec des produits de décompositions d'une fluorocétone particulière (dodecafluoro-2-methylpentan-3-one). Si l'on admet que l'expression « moyens d'adsorption » ne vise pas l'absorption propre, mais qu'elle couvre l'adsorption, elle doit être interprétée de manière à couvrir aussi la réaction des produits de décomposition avec l'oxygène.

Invalidité de la revendication de priorité

La revendication de priorité du brevet objet du litige n'est pas valable parce que les demanderesses du brevet objet du litige, les sociétés Alstom Technology Ltd et Schneider Electric Energy France n'ont pas su établir avec une certitude suffisante qui est l'ayant cause du demandeur de la demande de priorité, à savoir la société Areva T&D SAS. Il s'ensuit que la date de dépôt du brevet objet du litige est le 20 septembre 2011 et non pas le 22 septembre 2010. Par conséquent, le document D18 relève de l'état de la technique selon l'article 54(2) et non selon l'article 54(3) CBE, et doit être pris en considération pour l'appréciation de l'activité inventive.

Défaut d'activité inventive en partant du document D19

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive au vu du document D19.

Les moyens pour absorber les espèces moléculaires après ionisation représentent la seule caractéristique distinctive. Le document D19 divulgue à l'alinéa [0001] de sa traduction D20 un disjoncteur électrique. D19 divulgue une fluorocétone comme fluide caloporteur et isolant en forme de brouillard. Le point d'ébullition mène forcément à une présence d'une phase gazeuse à des températures opératives. L'effet technique revendiqué n'est pas achevé dans toute l'étendue de la revendication, à savoir pour toutes les fluorocétones, qui ne possèdent pas toutes un impact sur l'environnement plus faible que le SF6. Le problème objectif doit par conséquent être formulé de manière moins ambitieuse comme étant de prévoir des moyens d'absorption pour quelques-unes des espèces moléculaires formées pendent l'ionisation, telles que l'HF. Selon chacun des documents D23 et D25 à D28, notamment selon D26, il relève du code de pratique des disjoncteurs isolés à gaz de les équiper des moyens d'absorption afin de piéger les espèces de décomposition formées par un arc électrique.

Défaut d'activité inventive en partant du document D8

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D8. Le document D8 divulgue que la fluorocétone est présente partiellement à la phase gazeuse: selon l'alinéa [0013] de D8, il n'est pas nécessaire que l'enceinte soit complètement remplie de fluorocétone. À cause du point d'ébullition bas des fluorocétones, les phases liquides et gazeuses coexistent forcément dans l'enceinte. Il s'ensuit que les moyens d'absorption sont la seule caractéristique distinctive. Comme il a été expliqué dans le contexte du document D19, la fourniture de moyens d'absorption est évidente.

Défaut d'activité inventive en partant du document D18

Si la Chambre considère que les moyens d'absorption représentent une caractéristique distinctive de l'objet de la revendication 1 par rapport au document D18, il est de toute façon évident de les prévoir pour les raisons avancées ci-dessus.

V. Les arguments de la requérante 2 qui sont pertinents pour la présente décision peuvent se résumer comme suit :

Insuffisance de l'exposé

Les exemples divulgués, comme le Siliporite, ne sont pas des moyens d'absorption. Il s'agit plutôt de moyens d'adsorption. Ces deux expressions possèdent des significations clairement distinctes pour la personne du métier. Il n'est par conséquent pas approprié d'interpréter la revendication de manière à ce que celle-ci couvre des moyens d'adsorption, comme des zéolites, dont un exemple est le Siliporite, ou comme le charbon actif ou l'alumine activée. Par conséquent, le brevet objet du litige ne divulgue aucun exemple de moyens d'absorption. De surcroît, il n'enseigne nullement quelles sont les espèces moléculaires qui doivent être absorbées. Puisque la revendication est censée comprendre tout le groupe Markush des fluorocétones, la revendication ne représente qu'une invitation à effectuer un programme de recherche extensif.

Même si l'on interprétait l'expression « moyens d'absorption » de manière à couvrir les exemples de moyens d'adsorption de la description, ce qui serait inapproprié, le programme de recherche à compléter pour mettre en oeuvre l'objet revendiqué serait excessif à cause du nombre effectivement infini des fluorocétones revendiquées et à cause de la nature des espèces moléculaires à absorber. Celles-ci peuvent s'avérer toxiques et nocives. La personne du métier est donc forcée de sortir du cadre des expériences standards, comme par exemple l'analyse par spectrométrie de masse, afin de trouver des moyens d'absorption appropriés.

De plus, l'un des gaz vecteurs possibles selon la revendication est le CO2. Les espèces moléculaires de décomposition par un arc doivent par conséquent remplacer le CO2 piégé dans les moyens d'absorption à cause du gaz vecteur. Or, puisque les fluorocétones comprennent le charbon et l'oxygène, le CO2 se trouve aussi parmi les espèces moléculaires qui doivent être piégées après ionisation. Ceci représente une contradiction au sein de la revendication qui mène à la conclusion d'insuffisance de l'exposé.

La revendication a pour objet « des moyens pour absorber » au pluriel. La décision attaquée est erronée lorsqu'elle affirme que « des moyens » signifieraient un seul moyen. Ceci montre que l'exposé du brevet objet du litige n'est pas suffisant.

En ce qui concerne la revendication indépendante 10 relative à un procédé, celle-ci définit à la fois une enceinte étanche mais aussi que de la fluorocétone est injectée dans ladite enceinte étanche. En raison de cette contradiction, l'exposé est insuffisant.

De plus, la revendication 10 telle que délivrée est en contradiction avec le seul exemple de la description à partir de l'alinéa [0041], selon lequel la température maximale d'utilisation de l'appareil de coupure est de 80°C et l'enceinte est chauffée à une température d'environ 40°C lors du remplissage. Or, selon la revendication 10, l'enceinte est chauffée à une température theta1 supérieure à une température maximale d'utilisation de l'appareil lors du remplissage. Cette contradiction montre que l'exposé du procédé selon la revendication 10 est insuffisant.

Défaut de nouveauté par rapport au document D3

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'est pas nouveau par rapport au document D3. Ce document divulgue à la colonne 5, lignes 41 à 44, que les fluorocétones selon l'invention de D3 se prêtent à l'utilisation dans les transformateurs électriques. Un tel transformateur représente un appareil de coupure au sens de la revendication avec une enceinte étanche dans laquelle sont logés des composants électriques. Il est connu que, lors de l'opération d'un transformateur, des arcs électriques peuvent se former. Le libellé de la revendication n'exclut pas que la phase fluide de la fluorocétone contribue également à l'extinction de l'arc électrique.

Défaut de nouveauté par rapport au document D18

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'est pas nouveau par rapport au document D18. Les moyens d'absorption sont forcément présents dans les appareils de coupure de haute tension à cause de la formation inévitable de l'HF comme espèce moléculaire après ionisation par un arc des gaz, voir par exemple les documents B2 et B3.

Validité de la revendication de priorité

La revendication de priorité du brevet objet du litige n'est pas valable pour les raisons expliquées en détail lors de la récapitulation des arguments de la requérante 1.

Défaut d'activité inventive partant de D8

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D8.

Ce document concerne un appareil de coupure de moyenne ou haute tension rempli d'un gaz appartenant aux fluorocétones, à savoir les composés revendiqués dans le brevet objet du litige, qui possèdent par conséquent les mêmes propriétés physiques et chimiques. Selon l'alinéa [0013] de D8, l'enceinte de l'appareil de coupure n'est pas forcément rempli complètement de fluorocétone. Cette divulgation, en combinaison avec les propriétés physiques telles que la vapeur de saturation et le point d'ébullition, mène à la conclusion que D8 divulgue toutes les permutations de phases homogènes, à savoir de la fluorocétone complètement fluide, complètement gazeuse, complètement solide, et des phases mixtes, partiellement fluides et gazeuses, partiellement solides et gazeuses et partiellement solides et fluides. La revendication n'exclut pas que la phase liquide contribue à éteindre l'arc électrique, ce qui signifie que le cas « phase mixte fluide et gazeuse » de D8 antériorise la caractéristique de la revendication selon laquelle la fluorocétone est présente dans l'enceinte partiellement à l'état liquide et partiellement à l'état gazeux. Les moyens d'absorption sont par conséquent la seule caractéristique distinctive. Si l'on partageait l'avis de la division d'opposition selon lequel la personne du métier pourrait, en dialogue avec des fournisseurs, choisir des moyens d'adsorption commercialisés appropriés pour chaque fluorocétone donnée et ses produits de décomposition attendus, ceci montrerait qu'en prévoyant des moyens d'absorption, la personne du métier ne ferait pas preuve d'activité inventive. Selon D8, les fluorocétones peuvent remplacer le SF6 dans les appareils de coupure connus sans aucune modification de ceux-ci. Il correspond au standard consistant à munir ces appareils des moyens d'adsorption pour le piégeage des espèces moléculaires corrosives de SF6 (voir les documents D4, D9, D10, D12, D13, D17, D19, D21 à D23, D25, D26, D33, B2 ou B3). Au moins quelques-unes des espèces moléculaires formées par ionisation de fluorocétone sont pareilles à celles formées par ionisation de SF6. Par conséquent, la personne du métier ne fait pas preuve d'activité inventive en gardant les moyens d'adsorption connus des appareils remplis de SF6 dans le même but technique dans les appareils remplis de fluorocétone.

Défaut d'activité inventive partant de D11

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D11 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec l'un quelconque des documents cités dans la procédure d'opposition. Le document D11 divulgue que la fluorocétone est présente partiellement à l'état gazeux et fluide. Ce ne sont pas les propriétés physiques et chimiques des fluorocétones mais les conditions de l'utilisation de l'appareil de coupure qui déterminent l'état de la fluorocétone. Or, comme la revendication n'est pas limitée à des conditions d'opération, la présence d'une fluorocétone partiellement à l'état liquide et gazeux ne peut pas distinguer l'objet de la revendication d'un autre appareil de coupure utilisant la même fluorocétone qui a fortiori va être présent dans le même état dans les mêmes conditions d'usage.

Défaut d'activité inventive partant de D5 ou D6

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport aux documents D5 ou D6 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec l'un des documents D9, D10, D12 ou D13.

Le document D5 divulgue à la page 1 que le produit Novec 649 de la société 3M, qui consiste en fluorocétone C6, est prévu pour remplacer le SF6 dans les appareils électroniques comme des IGBT ou des transformateurs. Il est connu que les arcs électriques peuvent s'y former. Selon D5, le Novec 649 est aussi convenable pour l'utilisation à deux phases, à savoir à l'état mixte gazeux et fluide.

Le document D6 divulgue un autre produit de la société 3M, la fluorocétone Novec 1230, qui possède une grande rigidité diélectrique de 48 kV, ce qui est très avantageux, une basse chaleur de vaporisation, ce qui entraîne une évaporation qui est 25 fois plus rapide que celle de l'eau, et un point d'ébullition d'environ 42.9°C. Cette fluorocétone est donc à l'état fluide à des températures et pressions ambiantes.

Défaut d'activité inventive partant de D9

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D9 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec l'un des documents D8, D6, D11 ou D14. Le document D9 concerne un transformateur logé dans une enceinte étanche remplie des fluoronitriles CnF2n+1CN. La caractéristique distinctive de la revendication est par conséquent que le milieu gazeux comprend des fluorocétones au lieu des fluoronitriles. Le problème à résoudre est la fourniture d'un gaz de protection alternatif. Or, les fluorocétones sont connues en tant que gaz de protection sur la base des documents D8, alinéas [0028], [0034], D6, en haut de la page 1, D11, abrégé et alinéa [0014] et D14, page 6, lignes 1 à 9.

Défaut d'activité inventive partant de D14

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D14 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec l'un des documents D9, D10, D12 ou D13. De manière analogue à D8, le document D14 ne contient pas de divulgation explicite de moyens d'absorption. Or, pour les mêmes raisons que dans le cas de D8, la fourniture de tels moyens dans des appareils de coupure est évidente pour la personne du métier.

Défaut d'activité inventive partant de D10

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D10 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec l'un des documents D8, D6, D11 ou D14. La seule caractéristique distinctive est que le milieu gazeux comprend une fluorocétone, tandis que le milieu gazeux selon D10 comprend un membre du groupe composé de C4F8, C5F10, SF6 ou C4F8O. Le problème objectif est la fourniture d'un milieu gazeux alternatif. Or, il est connu des documents sus-mentionnés que l'on peut utiliser des fluorocétones comme milieu gazeux isolant pour des appareils de coupure.

Défaut d'activité inventive partant de D12 ou D13

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D12 ou au document D13 comme état de la technique le plus proche, en combinaison avec l'un des documents D8, D6, D11 ou D14. D12 et D13 concernent, tous les deux, des appareils de coupure de haute tension isolés par un milieu gazeux de SF6 et équipés des tamis moléculaires, donc des moyens d'adsorption, pour piéger des espèces moléculaires formées par ionisation du SF6. La seule caractéristique distinctive est que le milieu gazeux comprend au moins une fluorocétone au lieu du SF6. Le problème technique est la fourniture d'un milieu gazeux alternatif. Or, il est connu des documents sus-mentionnés qu'on peut remplacer le SF6 par des fluorocétones.

Défaut d'activité inventive partant de D31

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée n'implique pas d'activité inventive par rapport au document D31 comme état de la technique le plus proche en combinaison avec le document D5. Les deux caractéristiques distinctives par rapport au D31 sont un milieu gazeux qui comprend une fluorocétone (au lieu d'un mélange de SF6 et d'hélium) et la présence des phases mixtes gazeuses et fluides. Ces caractéristiques mènent à des problèmes techniques partiels distincts. La fourniture de C6K, donc une fluorocétone, comme alternative au SF6 est suggérée dans le document D5. Étant donné les propriétés chimiques et physiques de la C6K, elle est a fortiori présente dans l'enceinte partiellement à l'état fluide et gazeux.

VI. Les arguments de l'intimée qui sont pertinents pour la présente décision peuvent se résumer comme suit :

Suffisance de l'exposé

Dans l'état de la technique du domaine des appareils électriques à isolation gazeuse, les deux termes « absorber » et « adsorber » sont utilisés sans distinction pour désigner le piégeage d'espèces moléculaires par des matériaux du type alumine activée, charbon actif, tamis moléculaire carboné ou zéolite, voir par exemple D9, D10, D28/D4, D12, D31, D33 et I01 à I07, qui sont tous des publications émanant de la requérante 1, et I08 à I09 émanant de la requérante 2.

De plus, la personne du métier est bien capable d'identifier les produits de décomposition et, par là-même, de trouver ensuite des moyens adaptés à leur élimination par absorption. La chromatographie de gaz et spectroscopie de masse ou résonance nucléaire magnétique, par exemple, sont des outils à la portée de la personne du métier adéquats pour analyser le désorbat des moyens d'absorption après ionisation d'une fluorocétone. Il n'est même pas nécessaire d'identifier des espèces moléculaires susceptibles de se former par un arc. Une fois que la personne du métier a choisi une fluorocétone particulière, elle connaît nécessairement sa formule chimique et elle n'a donc aucune difficulté à trouver, en consultant les fournisseurs de matériaux poreux du type alumine activée, charbon actif, tamis moléculaire carboné et zéolite, un matériau poreux capable de piéger uniquement des espèces moléculaires de plus petite taille que cette fluorocétone choisie. Là également, elle peut vérifier que ce matériau poreux convient bien en faisant un test analysant des échantillons du milieu gazeux présent dans une enceinte et/ou le désorbat dudit matériau poreux.

L'absorption du CO2 - qu'il soit issu de l'ionisation de la fluorocétone et/ou présent en tant que gaz vecteur - par une zéolite de type Siliporite, telle que celle qui est utilisée dans l'exemple du brevet objet du litige, ne s'oppose pas à ce que cette zéolite puisse absorber les espèces moléculaires autres que le CO2 susceptibles de se former après l'ionisation de la fluorocétone. Les inventeurs ont pu vérifier expérimentalement, en soumettant des mélanges de C5K/CO2 (comprenant majoritairement du CO2) à des décharges partielles en présence d'une zéolite de type Siliporite et en analysant le désorbat par chromatographie en phase gazeuse couplée à une spectromètre de masse (GC/MS), que cette zéolite se charge principalement en espèces moléculaires fluorocarbonées telles que l'heptafluroropropane (C3HF7) et l'hexafluoropropène (C3F6) et qu'en conséquence la présence de CO2 dans la zéolite et/ou dans le mélange gazeux C5K/CO2 n'empêche pas la zéolite d'absorber lesdites espèces moléculaires, voir le document I01.

Le fait que le terme « moyens d'absorption » soit utilisé au pluriel dans la revendication 1 telle que délivrée est sans conséquence sur la possibilité pour la personne du métier d'exécuter l'invention, puisque la description lui indique des exemples concernant lesdits moyens.

En ce qui concerne une enceinte étanche, il va de soi qu'une personne du métier de ce domaine sait immédiatement que l'enceinte de l'appareil de coupure est prévue pour être étanche une fois remplie avec la fluorocétone.

Il n'existe aucune contradiction entre la revendication 10 et l'exemple de la description du brevet objet du litige. Selon l'alinéa [0041], la température maximale de 80°C se réfère à la température au niveau de la paroi de l'enceinte. L'alinéa [0044] se réfère à la température interne de l'enceinte. Selon le document D29, la valeur moyenne de la température de l'air ambiant, mesurée sur une période de 24 heures, ne doit pas excéder 35°C pour tout appareil de coupure de tension assignée supérieure à 1000 volts en courant alternatif (c'est-à-dire de moyenne tension ou de haute tension). Ainsi, le chauffage de l'enceinte à 40°C est bien un chauffage de cette enceinte à une température theta1 supérieure à une température maximale d'utilisation de l'appareil, qui est de 35°C.

Nouveauté par rapport à D18

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée est nouveau par rapport au document D18, qui ne divulgue ni de manière explicite, ni de manière implicite des moyens pour absorber des espèces moléculaires de décomposition. Quant à la divulgation explicite alléguée, D18 divulgue que le milieu gazeux comprend de l'oxygène qui va réagir avec des espèces réactives de la fluorocétone. Or, une réaction chimique ne peut être assimilée en aucune manière ni à l'adsorption ni à l'absorption. Autant les termes « absorber » et « adsorber » sont utilisés de manière interchangeable par la communauté du domaine des appareils électriques à isolation gazeuse lorsqu'il s'agit de piéger des espèces moléculaires au moyen d'un dispositif du type tamis moléculaire ou analogue, autant le terme « réaction chimique » n'est jamais utilisé par cette communauté pour désigner un tel piégeage. De plus, la revendication 1 telle que délivré stipule que l'enceinte de l'appareil de coupure comprend un milieu gazeux et « de plus » des moyens pour absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'ionisation, ce gui signifie que ces moyens ne peuvent être constitués par le gaz auquel la fluorocétone est susceptible d'être mélangée.

Quant à la divulgation implicite alléguée, les appareils commerciaux de moyenne tension ZX de la société ABB AG mentionnés dans D18 sont des appareils remplis de SF6, dans lesquels la présence de moyens pour absorber les produits de décomposition du SF6 est justifiée par le caractère hautement corrosif et toxique de certains de ces produits de décomposition. Selon D26, dans le cas du SF6, ce sont des composés soufrés qui contribuent largement à la toxicité des produits de décomposition, qui ne peuvent pas être des produits issus de l'ionisation d'une fluorocétone telle que la C6K, qui est préférentiellement utilisée dans D18, puisqu'une telle fluorocétone est exempte de soufre. L'allégation de la présence de l'HF parmi les produits de décomposition des fluorocétones est contredite par des résultats expérimentaux obtenus par les inventeurs et en vertu desquels des fluorocétones telles que la C5K s'ionisent principalement en espèces moléculaires fluorocarbonées telles que C3HF7 et C3F6, ainsi que par D18 lui-même et par I01. Si les inventeurs de D18 avaient prévu la présence de moyens d'absorption, ils n'auraient pas en même temps envisagé d'ajouter de l'oxygène au gaz vecteur de sorte que celui-ci puisse neutraliser les produits issus de la décomposition de la fluorocétone par réaction chimique.

Validité de la revendication de priorité

La revendication de priorité du brevet objet du litige est valable. La demanderesse de la demande de brevet français 1057603, dont la priorité est revendiquée, la société Areva T&D SAS, a procédé à un apport partiel de ses actifs dont le brevet français 1057603 fait partie, en faveur de Schneider Electric Energy France par un acte ayant été signé le 21 mars 2011 mais stipulant une réalisation de cet apport partiel d'actifs au 31 décembre 2010, voir le document I11.

La société Areva T&D SAS a changé sa dénomination sociale pour devenir Alstom Grid SAS, voir le document I12.

La demande internationale PCT/EP2011/066351 dont est issu le brevet objet du litige a été déposée auprès de l'OEB le 20 septembre 2011 aux noms conjoints d'Alstom Grid SAS et de Schneider Electric Energy France. La société Alstom Grid SAS à cédé sa quote-part à la société Alstom Technology Ltd, voir le document I15.

La demande PCT/EP2011/066351 est entrée le 11 mars 2013 en phase européenne sous le n° 11 757 888.0 aux noms conjoints d'Alstom Technology Ltd et de Schneider Electric Energy France. Puis, Alstom Technology Ltd et Schneider Electric Energy France ont déposé conjointement la demande divisionnaire EP 13 177 719.5 le 24 juillet 2014. Suivant ce dépôt, Schneider Electric Energy France a cédé sa quote-part sur cette demande divisionnaire à Alstom Technology Ltd par un acte daté du 3 janvier 2014, voir le document fourni par la division d'opposition au cours de la procédure orale tenue les 7 et 8 février 2017 et annexé au procès-verbal. La cession a aussi été inscrite au Registre européen des brevets le 17 février 2014, voir le document I17. Le brevet objet du litige a été délivré le 22 octobre 2014 au seul nom d'Alstom Technology Ltd.

La société Alstom Technology Ltd était par conséquent habilitée à revendiquer la priorité de la demande française FR 1057603.

Activité inventive par rapport au document D18

Dl8 n'étant un état de la technique qu'au titre de l'article 54(3) CBE, l'objection du défaut d'activité inventive soulevée par la requérante 1 à l'encontre de l'objet de la revendication 1 doit être rejetée.

Activité inventive par rapport au document D8

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D8. Dans l'appareil selon D8, d'une part, ce n'est pas un milieu gazeux qui assure l'extinction des arcs électriques et, d'autre part, il n'est pas prévu de moyens pour absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'ionisation de la fluorocétone à l'état gazeux. Seule une extinction des arcs électriques par un milieu de remplissage liquide est envisagée dans D8, voir les alinéas [0013], [0033], [0047] et [0061]. Le document D8 ne divulgue pas de moyens d'absorption, qui ont une fonction différente de celles remplies par les absorbants présents dans les appareils électriques à isolation gazeuse de l'état de la technique, telles qu'une protection contre la corrosion ou une protection contre la toxicité des produits de dégradation du SF6. Les moyens d'absorption visent à assurer que la quantité de fluorocétone, qui est initialement présente à l'état gazeux dans l'enceinte de l'appareil de coupure, ne diminue au fur et à mesure que le nombre de coupures réalisées par cet appareil du fait que les fluorocétones n'ont pas une capacité à se recombiner analogue à celle que présente le SF6. L'objet de la revendication 1 ne découle par conséquent pas de manière évidente des combinaisons de D8 avec d'autres documents cités à la procédure.

Activité inventive par rapport au document D19

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D19. Le document D19 divulgue un disjoncteur à isolation gazeuse, mais il ne divulgue pas qu'il pourrait être de haute tension. De plus, D19 divulgue le remplissage de l'enceinte de l'appareil avec un milieu gazeux isolant composé d'air sec ou d'azote, le placement de la fluorocétone C6K sous une forme liquide dans un réservoir situé dans cette enceinte et la vaporisation, au moyen d'un générateur de vapeur (atomiseur ou oscillateur ultrasonique), de la C6K sous la forme d'un brouillard de sorte que les gouttelettes formant le brouillard se mélangent au milieu gazeux isolant. Un tel mélange de gaz et de gouttelettes liquides ne constitue pas un gaz, tandis que la revendication exige un milieu gazeux assurant l'extinction des arcs électriques susceptibles de se produire dans cette enceinte. Au surplus, il n'est à aucun moment précisé dans D19 que C6K serait utilisée à des fins d'extinction des arcs électriques et les fonctions qui s'avèrent être assignées sont des fonctions d'isolation et de refroidissement comme celles du PFC qu'elle vise à remplacer (voir les alinéas [0004], [0006] et [0007] de la traduction D20).

Selon D19, la fluorocétone C6K est prévue pour être présente dans l'enceinte de l'appareil soit sous forme liquide dans un réservoir avant vaporisation soit sous la forme d'un brouillard après vaporisation. Puisqu'un brouillard est composé de gouttelettes liquides et ne constitue pas un gaz, il n'est pas prévu que la fluorocétone C6K soit présente partiellement à l'état liquide et partiellement à l'état gazeux. De plus, D19 ne divulgue pas de moyens d'absorption.

Activité inventive par rapport au document D11

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D11. D11 est un document dont la crédibilité technique est hautement douteuse. Ce document cite 252 composés diélectriques censés pouvoir remplacer le SF6 dans des applications du type isolation électrique et/ou extinction des arcs électriques dans des appareils électriques. Or, un nombre non négligeable de composés diélectriques proposés par D11 ne remplit pas les critères censés leur permettre de remplacer le SF6. Une personne du métier réaliserait immédiatement à la lecture de ce document que la fiabilité et la crédibilité de l'enseignement de ce document sont très sérieusement affectées.

Activité inventive par rapport au document D5

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D5. L'utilisation de la fluorocétone C6K comme milieu d'extinction des arcs électriques dans un appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension n'est ni explicitement ni implicitement divulguée dans D5 pour la simple raison que les propriétés de coupure de cette fluorocétone ne sont pas évoquées dans ce document. Partant de D5, la combinaison avec les autres documents cités dans la procédure d'opposition et, notamment avec D6, ne conduit pas de manière évidente une personne du métier à concevoir un appareil de coupure tel que défini dans la revendication 1 du brevet attaqué.

Activité inventive par rapport au document D9

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D9. Ce document vise à proposer une alternative à l'utilisation du SF6 dans un appareil électrique et propose, pour ce faire, d'utiliser des perfluoroalkylnitriles. Or, les perfluoroalkylnitriles ayant un PRG plus bas que celui de SF6, une personne du métier n'a aucune raison de remplacer les perfluoroalkylnitriles proposés dans D9 par une fluorocétone. D9 ne peut donc servir de point de départ à un raisonnement de défaut d'activité inventive.

Activité inventive par rapport au document D14

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D14. Ce document se rapporte à l'utilisation de fluorocétones mais en tant que fluides caloporteurs dans un aéronef, ce qui n'a rien à voir avec l'utilisation de fluorocétones comme milieu d'extinction des arcs électriques dans un appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension. D14 ne peut donc pas servir de point de départ à un raisonnement de défaut d'activité inventive.

Activité inventive par rapport au document D10

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D10. Des remarques similaires à celles formulées ci-avant pour D9 s'appliquent à D10 puisque ce dernier enseigne les avantages de l'utilisation de mélanges comprenant de l'azote et un composé perfluoré (C3F8, C4F10, ... ) mais qui n'est pas une fluorocétone en tant que milieu d'isolation électrique dans des transformateurs.

Activité inventive par rapport au document D12 ou D13

D12 se rapporte à un tamis moléculaire destiné à piéger les produits de décomposition et l'humidité présents dans un gaz isolant d'une installation électrique à isolation gazeuse. Le seul gaz isolant cité dans ce document est SF6 (voir l'alinéa [0019] de D12), lequel est utilisé exclusivement sous forme gazeuse. À supposer qu'une personne du métier soit incitée, par exemple par D8, à remplacer SF6 par une fluorocétone, elle ne trouve aucune incitation ni dans ce document ni dans tout autre document à utiliser cette fluorocétone partiellement à l'état liquide et partiellement à l'état gazeux de sorte que la fraction de fluorocétone à l'état liquide serve de source de fluorocétone gazeuse.

Des remarques analogues s'appliquent à D13 puisque ce document se rapporte à un dispositif pour absorber les produits de décomposition et l'humidité présents dans un gaz isolant halogéné d'une installation électrique à isolation gazeuse et dont le seul exemple de gaz donné est le SF6.

Activité inventive par rapport au document D31

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D31 en combinaison avec le document D5. Le document D31 se rapporte à un appareil de coupure rempli d'un mélange d'hélium et de SF6. Le document D5 ne divulgue ni ne suggère la possibilité d'utiliser la fluorocétone C6K comme milieu d'extinction des arcs électriques dans un appareil de coupure d'un courant électrique de haute tension. La combinaison des deux documents ne conduit par conséquent pas de manière évidente une personne du métier à concevoir un appareil de coupure tel que défini dans la revendication 1.

Motifs de la décision

1. Recevabilité des recours

Les présents recours satisfont aux exigences des articles 106 et 108 CBE et de la règle 99 CBE. Ils sont donc recevables.

2. Motif d'opposition selon l'article 100 b) CBE

2.1 Le motif d'opposition selon l'article 100 b) CBE ne s'oppose pas au maintien du brevet objet du litige.

2.2 Adsorption vs. absorption

Selon la revendication 1, l'enceinte de l'appareil de coupure comprend des moyens pour absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'ionisation de la fluorocétone au cours d'un arc électrique. Selon l'alinéa [0042] de la description, un moyen d'absorption exemplaire est une zéolite du type de celles commercialisées par la société CECA sous la dénomination commerciale Siliporite. Selon la revendication dépendante 8, les moyens d'absorption comprennent de l'alumine activée, du charbon

actif, un tamis moléculaire carboné et/ou une zéolite.

Concernant les expressions « adsorption » et « absorption », la Chambre observe tout d'abord, qu'elle est en accord avec les requérantes pour autant qu'elles parlent du domaine de chimie pure. Dans ce domaine, il est correct qu'il y a une distinction bien établie entre l'adsorption et l'absorption. La Chambre est aussi en accord avec les requérantes en ce qui concerne leurs arguments concernant les règles d'interprétation des revendications. Notamment, la Chambre partage l'avis des requérantes selon lequel il n'est normalement pas permis de réinterpréter à la lumière de la description des expressions d'une revendication qui, à elles seules, ont une signification technique claire. Ceci s'applique aussi à l'examen des exigences des articles 83 CBE ou 100 b) CBE. L'intimée fait valoir à juste titre que ces deux dispositions légales concernent la description, mais l'objet de l'examen est clairement celui de la revendication. Si celui-ci est formulé de manière techniquement correcte et telle qu'il n'englobe pas des exemples de la description, alors il n'est pas permis de donner une interprétation plus large aux expressions de la revendication afin de remédier à ce défaut.

Ayant dit cela, la Chambre n'est pas en accord avec l'application par les requérantes de ces règles d'examen de base au cas d'espèce. Les requérantes ont démontré, par exemple par les documents D36 et D37, que dans le domaine de la chimie pure il existe une distinction établie entre l'absorption et l'adsorption. Or, lors de l'examen de la suffisance de l'exposé, il faut vérifier la signification des expressions dans le domaine technique de l'objet de la revendication, en l'espèce des appareils de coupure à haute tension et non pas de la chimie pure. Par contre, l'intimée a su démontrer que dans le domaine technique spécifique des appareils de coupure isolés à gaz, ces deux expressions sont utilisées sans distinction et que les tamis moléculaires, tels que les zéolites, sont communément appelés « moyens d'absorption », même si le mécanisme de piégeage sous-jacent est en fait l'adsorption et non pas l'absorption, voir les documents D4, D9, D10, D12, D31, D33, I01 à I09.

À la lecture du brevet objet du litige, la personne du métier des appareils de coupure n'a donc aucun doute sur le fait que les exemples de l'alinéa [0042] et de la revendication 8 sont englobés dans l'expression « moyens pour absorber » de la revendication 1. Au vu de ce qui précède, la Chambre n'est pas non plus convaincue que la personne du métier comprendrait la revendication 8 de manière à ce que celle-ci porte sur une combinaison des moyens d'absorption avec des moyens d'adsorption.

La requérante 1 a offert un témoin, Mr. Doiron, afin de témoigner sur l'impossibilité de l'absorption sélective (au sens de la chimie pure) des produits de décomposition des fluorocétone. La Chambre peut accepter ce témoignage tel que spécifié dans la lettre de 10 août 2017, mais étant donné qu'il est basé sur une interprétation de l'expression « absorption » dans le sens de la chimie pure, et non pas des appareils de coupure, il n'est pas susceptible de changer les conclusions de la Chambre. Il n'était donc pas nécessaire d'écouter le témoin.

2.3 « Moyens » au pluriel

Concernant la caractéristique « des moyens d'absorption » au pluriel, la Chambre n'est pas convaincue par l'argument de la requérante 2. D'un point de vue logique, cet argument est entièrement subsidiaire à l'argument principal précédent concernant l'absence complète d'exemples pour des moyens d'absorption (au sens de chimie pure). Or, une fois que l'on accepte que dans le domaine des appareils de coupure à isolation gazeuse, les exemples de l'alinéa [0042] et de la revendication 8 du brevet objet du litige sont considérées comme étant des moyens d'absorption, il est sans aucune doute à la portée de la personne du métier d'en prévoir tout nombre désiré. Ceci dit, la Chambre partage les doutes exprimés dans la décision T 1794/12, point 2.4 des motifs, concernant l'argument de la requérante 2 relatif à l'allégation d'une signification du terme « moyens » strictement au pluriel.

2.4 « Propriétés toxiques ou inflammables »

L'argument de la requérante 2 concernant les propriétés toxiques ou inflammables de certains des membres de la classe des fluorocétones n'est pas susceptible de démontrer que la personne du métier serait dans l'impossibilité de mettre en oeuvre l'objet revendiqué, mais seulement que ce dernier n'achèverait pas certains effets techniques bénéfiques, comme un impact sur l'environnement faible, dans toute sa portée. Il s'agit ici d'une question d'activité inventive mais non pas de suffisance de l'exposé.

2.5 « Saturation par le gaz vecteur »

Concernant l'adsorption de CO2 par un tamis moléculaire, non seulement la relation des tailles des molécules à adsorber et des pores d'un tamis moléculaire joue un rôle important, mais aussi l'affinité de l'adsorbat avec la surface du tamis, ce qui peut mener à des taux d'adsorption et de désorption très différents pour différentes espèces moléculaires. Le document D23 décrit par exemple à la page 831, section (2), que des tamis moléculaires absorbent les produits de décomposition de SF6 ainsi que le SF6 même, voir la figure 3, mais à cause des taux de désorption différents, ce sont les espèces de décomposition qui sont piégées à long terme et non pas le SF6 lui-même.

L'intimée a aussi fait référence à des expériences faites par elle, qui montreraient que les espèces de décomposition de la fluorocétone C5K sont adsorbées par un tamis moléculaire sans que celui-ci ne soit saturé par le gaz vecteur CO2. Bien que l'intimée n'ait pas fourni des preuves pour étayer cette assertion, la Chambre, en l'absence de tout contre-argument de la part des requérantes, n'a pas de motif, sur le plan technique, de douter de sa véracité.

La requérante 2 n'a pas offert de preuves à l'appui de son allégation selon laquelle les espèces moléculaires du gaz vecteur comme le CO2 mèneront forcément à une saturation du tamis moléculaire. Le document D23, page 831, colonne de droite, point (4) montre que cette allégation n'est pas forcément correcte. Par conséquent, elle ne convainc pas la Chambre.

2.6 La requérante 2 fait valoir que l'homme du métier ne pourrait pas exécuter l'invention quant aux moyens d'absorption parce qu'il devrait faire des efforts excessifs pour déterminer les espèces moléculaires formées après ionisation étant donné que la revendication porte sur un nombre infini de fluorocétones. L'intimée retorque que différents tamis moléculaires seraient à la disposition de l'homme du métier comme par exemple des zéolites, le charbon actif ou l'alumine activée.

Comme la Chambre l'a expliqué ci-dessus, elle est d'avis que la relation entre les tailles des espèces de décomposition et les pores du tamis moléculaire seule n'est pas suffisante pour savoir lesquelles des espèces seront piégées. La Chambre souscrit à l'argument de l'intimée selon lequel les fournisseurs des tamis moléculaires commerciaux affichent les espèces adsorbées.

2.7 « Enceinte étanche »

Concernant la caractéristique « enceinte étanche », la Chambre juge l'argument de l'intimée convaincant. Il est évident pour la personne du métier qu'une enceinte peut être étanche une fois fermée mais ouvrable afin d'être remplie. De l'avis de la Chambre, la caractéristique concernant « l'enceinte étanche » se réfère à l'évidence à son état fermé.

2.8 « Contradiction prétendue entre la revendication 10 et la description »

Concernant la contradiction alléguée par la requérante 2 entre la revendication 10 et la description au regard de la température lors du remplissage de l'enceinte, la Chambre est d'avis qu'une contradiction n'est en elle-même pas suffisante pour conclure à l'insuffisance de l'exposé même si elle concerne le seul exemple de la description. Il semble à la Chambre que la personne du métier serait bien placée pour chauffer une enceinte à une température quelconque sans qu'aucune information additionnelle soit nécessaire.

Les arguments additionnels de l'intimée sont aussi convaincants. Selon l'alinéa [0041], la température maximale de 80°C se réfère à la température au niveau de la paroi de l'enceinte. L'alinéa [0044] se réfère à la température interne de l'enceinte. Selon le document D29, la valeur moyenne de la température de l'air ambiant, mesurée sur une période de 24 heures, ne doit pas excéder 35°C pour tout appareil de coupure de tension assignée supérieure à 1000 volts en courant alternatif (c'est-à-dire de moyenne tension ou de haute tension). Ainsi, le chauffage de l'enceinte à 40°C est bien un chauffage de cette enceinte à une température theta1 supérieure à une température maximale d'utilisation de l'appareil, qui est de 35°C.

3. Motif d'opposition selon l'article 100 a) et l'article 54 CBE

3.1 Le motif d'opposition selon l'article 100 a) et l'article 54 CBE ne s'oppose pas au maintien du brevet objet du litige.

3.2 Le document D18

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée est nouveau par rapport au document D18.

Le document D18 ne divulgue ni explicitement ni implicitement des moyens pour absorber les espèces moléculaires qui se forment après l'ionisation que subit cette fluorocétone au cours d'un arc électrique.

3.2.1 La présence d'oxygène dans le gaz vecteur selon D18 ne peut pas être considérée comme étant un moyen d'absorption au sens de la revendication 1 telle que délivrée. La réaction des produits de décomposition avec l'oxygène dans l'enceinte est une réaction chimique ce qui n'est pas couverte par la caractéristique « absorption » de la revendication. Comme mis en évidence par les documents D4, D9, D10, D12, D31, D33, I01 à I09, le terme « absorption » couvre de manière très spécifique des moyens d'adsorption dans le domaine des appareils de coupure isolés à gaz. Or, ceci ne veut pas dire que ce terme pourrait être interprété comme se référant à tout moyen pour éliminer des espèces nocives du gaz isolant. Les requérantes n'ont fourni aucune preuve montrant qu'il couvrirait l'enlèvement des produits de décomposition par une réaction chimique. L'intimée a aussi fait valoir, à juste titre selon la Chambre, que la revendication exige un milieu gazeux et « de plus » des moyens d'absorption. Or, selon D18, l'oxygène fait partie du milieu gazeux. La divulgation de D18 n'antérioriserait donc pas l'objet de la revendication même si l'on considérait l'oxygène comme étant un moyen d'absorption.

3.2.2 Les requérantes font valoir que la personne du métier reconnaîtrait que l'HF se produirait après formation d'un arc dans un milieu de fluorocétone, et que, par conséquent, la personne du métier reconnaîtrait la nécessité de garder les tamis moléculaires prévus dans les appareils de la famille ZX de ABB dans le cas où le SF6 serait remplacé par de la fluorocétone.

La Chambre n'est pas convaincue par cet argument. Selon les requérantes, la personne du métier serait capable de prédire correctement l'occurrence d'HF comme produit de décomposition au moins pour les fluorocétones de D18, notamment la C6; elle prédirait correctement à la lecture de D18, et ce en dépit de son enseignement clair, que la réaction chimique avec l'oxygène ne serait pas suffisante pour éviter l'HF et, enfin, elle conclurait que les moyens d'absorption pour les produits de décomposition de SF6 de l'art antérieur doivent être gardés.

Une telle chaîne de considérations hypothétiques ne peut pas être considérée comme une divulgation implicite du document D18.

Tout d'abord, les preuves soumises par les requérantes semblent démontrer que la prédiction des produits de décomposition est une question complexe et dépend fortement des circonstances. C'est ainsi parce que les fluorocétones possèdent des atomes de charbon, oxygène et fluorine, mais non pas d'hydrogène. La formation d'HF requiert donc forcément une source extérieure d'hydrogène qui dépend des circonstances.

Les résultats du document I01, qui se rapporte à la mesure expérimentale des produits de décomposition de la fluorocétone C5K après formation d'un arc, semblent montrer que l'HF n'est pas forcément parmi les produits de décomposition détectés après ionisation. Or, la Chambre note que dans les expériences de I01, des moyens d'absorption, à savoir des tamis moléculaires zéolites, ont été employés pour enlever l'humidité résiduelle, qui, dans le cas de SF6, est une des sources d'hydrogène qui mène à la formation d'HF.

Les documents B2 et B3 se rapportent à la mesure expérimentale des produits de décomposition de la fluorocétone C6F12O (C6K) utilisée comme fluide d'extinction d'incendie. La fluorocétone C6K est utilisée pour éteindre un feu à la base d'heptane (C7H16), ce qui peut représenter une source d'hydrogène. Selon la page 352 de B3, « la heptane représente un bon choix pour un scénario de pire cas de la formation d'HF ».

Aucune des preuves soumises ne traite la formation éventuelle d'HF dans la présence d'oxygène comme divulgué dans D18. Afin de faire des prédictions correctes, il est nécessaire de connaître divers taux de réaction des produits de décomposition du milieu gazeux, entre eux, avec l'oxygène, et avec les matériaux à l'intérieur de l'enceinte, comme du cuivre ou des polymères.

Les considérations précédentes montrent que la prédiction correcte des produits de décomposition nécessite des expériences dédiées et qu'elle ne découle pas de manière évidente, pour la personne du métier, du document D18. De plus, les requérantes n'ont fourni aucune preuve ni aucun argument démontrant que l'enlèvement des produits de décomposition sur la base d'une réaction chimique avec de l'oxygène tel que proposé par D18 ne serait pas suffisant pour éviter la formation d'HF. La ligne d'argumentation étayant une divulgation implicite alléguée sur des considérations concernant la formation d'HF n'est par conséquent pas convaincante.

3.2.3 La requérante 1 a en outre fait référence aux documents D23, D25, D26 et D28 pour étayer son argument selon lequel l'équipement des appareils de coupures avec des moyens d'absorption relève du code de pratique. La Chambre note que ces documents se rapportent sans exception aux appareils de coupure remplis de SF6 et non pas de fluorocétones. Ces références ne permettent par conséquent pas de conclure à l'application de ce code de pratique préconisant la présence des moyens d'absorption dans les appareils de coupure remplis de SF6 et sans atmosphère d'oxygène à l'appareil selon D18 rempli de fluorocétone en tant que supplément à la présence d'oxygène.

Par conséquent, le document D18 ne contient pas non plus une divulgation implicite d'un appareil de coupure avec des moyens d'absorption des espèces de décomposition de la fluorocétone.

3.3 Le document D3

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée est aussi nouveau par rapport au document D3.

Ce document se rapporte à un transformateur qui ne peut pas être considéré comme un appareil de coupure, car un transformateur ne coupe pas de courant, mais transforme des tensions.

Concernant la coexistence des états liquides et gazeux des fluorocétones, la requérante 2 fait valoir que les phases liquides et gazeuses mixtes seraient présentes inévitablement sous certaines conditions ambiantes.

D'un point de vue purement thermodynamique, cet argument est probablement correct. Or, la revendication 1 prévoit « un milieux gazeux assurant l'extinction d'arc ». Cette caractéristique implique une certaine pression partielle de la fluorocétone à l'intérieur de l'enceinte pour assurer un nombre suffisant de molécules de fluorocétone autour des contacts qui sont inhérents à des appareils de coupure. Cette caractéristique implique aussi un certain volume occupé par le milieu gazeux car les contacts doivent y être immergés pour que le milieu gazeux puisse assurer l'extinction d'arc. Par exemple, selon l'alinéa [0050] du brevet objet du litige, à une température de 20°C, l'enceinte de l'appareil contient un milieu gazeux qui est soumis à une pression totale de 3,3 bars, qui est constitué d'un mélange de C6K et de CO2 dans un rapport volumique de 10/90 et dans lequel la pression partielle de C6K est de 0,33 bar, ainsi que 33 ml de C6K à l'état liquide. Par contre, il ne ressort pas de l'argumentation de la requérante 2 que la pression partielle de fluorocétone dans l'appareil selon D3 serait forcément du même ordre de grandeur à des conditions normales d'opération. Quant au volume occupé, le passage précité et l'alinéa [0041] du brevet objet du litige indiquent que le volume occupé par la phase liquide est de 33 ml sur un volume d'enceinte de 10 l. D3, au contraire, ne contient pas de divulgation sur le volume occupé par une phase gazeuse de fluorocétone fortuite. Si, par exemple dans une enceinte de 10 l, la fluorocétone à phase liquide occupe 9.8 l, il est difficile de voir comment le milieu gazeux pourrait entourer les bornes électriques à une position centrale dans l'enceinte, et ainsi assurer l'extinction de l'arc - et non pas seulement y contribuer.

La Chambre ne méconnaît pas qu'il s'agit seulement de nombres cités à titre d'exemples auxquels la revendication n'est pas limitée, mais ces nombres dans le brevet objet du litige illustrent une situation dans laquelle le milieu gazeux assure l'extinction d'un arc. La requérante 2 aurait été obligée de démontrer que si une phase gazeuse était divulguée dans D3, elle assure également l'extinction des arcs électriques. Dans ce contexte, il n'est pas suffisant de remarquer qu'il n'est pas exclu que la phase liquide y contribue, car il ne s'ensuit pas de cette observation que la phase gazeuse assure l'extinction. Ceci veut dire que même sans contribution de la phase liquide, le milieu gazeux mène à l'extinction d'arcs électriques.

4. Validité de la revendication de priorité

4.1 La priorité de la demande FR 1057603 est valablement revendiquée.

4.2 Les justificatifs I11 à I18 sont recevables. La validité de la revendication de priorité a été contestée pour la première fois lors de la procédure orale devant la division d'opposition. Ceci justifie, au vu de l'article 12(4) RPCR 2007, applicable au recours en instance en vertu de l'article 25 RPCR 2020, le dépôt des moyens de preuve I11 à I18 avec la réponse de l'intimée aux mémoires de recours en date du 10 janvier 2018.

Les requérantes avaient soulevé leurs objections concernant la validité de la priorité avant le dépôt des justificatifs I11 à I18. Elles n'ont pas présenté d'arguments additionnels en réponse.

La Chambre, en l'absence de tout contre-argument tenant compte des nouveaux justificatifs et explications, est convaincue que ceux-ci montrent que la société Alstom Technology Ltd a été l'ayant cause au sens de l'article 87(1) CBE à la date de dépôt de la première demande. Les explications de l'intimée telles que récapitulées dans l'exposé des faits et conclusions permettent d'établir la chaîne de transferts et accords sans faille.

5. Motif d'opposition selon l'article 100 a) et l'article 56 CBE

5.1 Le motif d'opposition selon l'article 100 a) et l'article 56 CBE ne s'oppose pas au maintien du brevet objet du litige.

5.2 Le document D18

L'objection de défaut d'activité inventive par rapport au document D18 doit être rejetée.

Au vu des conclusions concernant la validité de la revendication de priorité, le document D18 relève de l'état de la technique selon l'article 54(3) CBE. Selon l'article 56 CBE, ce document n'est par conséquent pas pris en considération pour l'appréciation d'activité inventive.

5.3 Le document D19

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D19.

Caractéristiques distinctives

Le document D19 ne divulgue pas un milieu gazeux de fluorocétone assurant l'extinction des arcs électriques.

Selon D19, la fluorocétone est vaporisée. La Chambre est convaincue par l'argument de l'intimée selon lequel D19, du fait par exemple de l'usage d'un « atomiseur » et de l'expression « brouillard », voir l'alinéa [0002] de la traduction D20, divulgue des gouttelettes liquides fines de fluorocétone suspendues dans le gaz vecteur (« insulation gas »). Ceci ne représente pas un milieu gazeux.

La requérante 2 fait valoir, en ce qui concerne D19, que les températures typiques d'un arc assureraient que la fluorocétone passerait de l'état liquide à l'état gazeux. Or, le libellé de la revendication 1 selon lequel l'appareil de coupure

« comprend une enceinte [...] dans laquelle se trouve un milieu gazeux assurant l'extinction des arcs électriques susceptibles de se produire »

implique une présence continue du milieu gazeux mais une occurrence occasionnelle des arcs électriques. Un milieu gazeux se formant uniquement en réaction à un arc électrique n'antériorise par conséquent pas cette caractéristique.

La requérante 2 a aussi fait valoir qu'à cause de son point bas d'ébullition, la présence d'une partie de la fluorocétone C6K à l'état gazeux est inévitable, même à une température de 30°C. Ici, les mêmes considérations que celles détaillées au cours de la discussion du document D3 s'appliquent. Selon le libellé de la caractéristique précitée, le milieu gazeux assure l'extinction des arcs électriques. Ceci implique une certaine pression partielle de fluorocétone à l'état gazeux, ainsi qu'un certain volume occupé par le milieu gazeux, au moins suffisamment grand pour entourer les contacts de l'appareil de coupure. Contrairement à ceci, le document D19 ne mentionne nulle part ni la quantité de milieu gazeux de C6K ni son volume occupé. Il n'est donc pas possible de savoir si le milieux gazeux, s'il y en a, assure l'extinction d'un arc électrique.

Le document D19 ne divulgue pas non plus des moyens d'absorption pour les espèces moléculaires qui se forment après ionisation par un arc électrique, ce qui n'a pas été contesté par la requérante 1.

Effet technique et problème à résoudre

Selon la page 3, lignes 27 à 30 du brevet objet du litige, les fluorocétones ne présentent pas, après ionisation, une capacité à se reconstituer analogue à celle que présente le SF6 et qu'en conséquence, la quantité de fluorocétones, qui est initialement présente à l'état gazeux dans un appareil de coupure d'un courant électrique, diminue au fur et à mesure que le nombre de coupures réalisées par cet appareil augmente.

La présence de la fluorocétone partiellement à l'état liquide met en place un réservoir de fluorocétone susceptible de remplacer la quantité de la fluorocétone à l'état gazeux diminuée par décomposition. À cette fin, la pression partielle de la phase gazeuse est diminuée en enlevant les produits de décomposition par les moyens d'absorption, voir la page 3, lignes 31 à 41 du brevet objet du litige.

La Chambre n'a pas de doutes sur le fait que cet effet technique est réalisé essentiellement dans toute la portée de la revendication. Le problème à résoudre est donc considéré comme étant la fourniture d'un mécanisme d'extinction durable d'arcs électriques.

La Chambre note dans ce contexte que ce problème ne se base pas sur l'effet technique d'un impact faible pour l'environnement puisque les requérantes ont réussi à convaincre la Chambre que cet effet n'est pas réalisé sur toute la portée de la revendication.

Selon la requérante 1, le problème technique consiste à enlever quelques-unes des espèces moléculaires qui se forment après ionisation par un arc électrique. Or, cette formulation du problème technique à résoudre ne tient pas compte de toutes les caractéristiques distinctives.

Examen de la solution

La solution n'est pas évidente. Le document D19 ne porte pas sur la formation des arcs ou un mécanisme assurant leur extinction durable. Il ne contient par conséquent aucune suggestion concernant l'extinction d'un arc par un milieu gazeux. L'argument de la requérante 1 ne couvre pas cette caractéristique distinctive et doit donc être rejeté.

5.4 Le document D8

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D8 comme état de la technique le plus proche.

Caractéristiques distinctives

Le document D8 divulgue un appareil de coupure pratiquement entièrement rempli de fluorocétone à l'état liquide dans des conditions normales d'opération, voir les alinéas [0047] et notamment [0061]. La Chambre a pris note de l'alinéa [0013], selon lequel le volume du médium isolant de fluorocétone peut rester en-dessous du volume de l'enceinte. Or, le document D8 ne divulgue nulle part que ce serait un milieu gazeux de fluorocétone qui assurerait l'extinction des arcs électriques. Dans ce contexte, la Chambre fait référence à ses explications énoncées lors de la discussion du document D3 ci-dessus. Cette caractéristique implique une certaine pression du milieu gazeux ainsi que le fait que le milieu gazeux entoure les contacts de l'appareil de coupure. Ces conditions implicites ne ressortent pas de manière directe et non ambiguë du fait que le volume de la phase liquide de fluorocétone peut rester en-dessous de celui de l'enceinte.

Dans ce contexte, la Chambre souhaite remarquer qu'elle n'est pas convaincue par l'argument de la requérante 2 selon lequel D8 divulguerait toutes les combinaisons des phases fluides et gazeuses envisageables. Déjà d'un point de vue logique, cette assertion n'est pas correcte, mais à plus forte raison, la présence d'une phase gazeuse ne signifie pas que c'est cette phase gazeuse qui assure l'extinction des arcs.

Les requérantes ne contestent pas que le document D8 ne divulgue pas de moyens d'absorption.

Effet technique, problème technique à résoudre

Les mêmes effets techniques que dans le cas de D19 sont produits par les caractéristiques distinctives. Or, l'extinction durable des arcs électriques semble aussi être réalisée par l'appareil de coupure selon D8.

Si l'enceinte de D8 est pratiquement entièrement remplie de fluorocétone liquide, un effet technique additionnel produit par la revendication pourrait être de consommer moins de fluorocétone tout en assurant l'extinction durable des arcs électriques.

Par conséquent, le problème objectif technique qui est résolu par l'objet de la revendication est considéré comme étant de prévoir un appareil de coupure alternative à consommation de fluorocétone réduite tout en assurant l'extinction durable des arcs électriques.

Appréciation de la solution

La solution ne découle pas de manière évidente de l'état de la technique. D8 est muet quant au problème consistant à réduire la consommation de fluorocétone et ne suggère pas de remplacer le milieu fluide par un milieu gazeux de fluorocétone prévoyant aussi un réservoir de fluorocétone liquide. Il est évident que le problème de la diminution de la quantité de fluorocétone à l'état gazeux ne se pose pas si, comme il est envisagé dans D8, essentiellement toute l'enceinte est remplie de fluorocétone à l'état fluide et si c'est la quantité de fluorocétone fluide qui assure l'extinction des arcs électriques.

Les arguments des requérantes se limitent à la question de la fourniture des moyens d'absorption et en tant que tels ne tiennent pas compte de toutes les caractéristiques distinctives et du problème objectif.

5.5 Le document D11

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D11 qui se rapporte à des compositions susceptibles d'être utilisées comme gaz d'isolation dans les appareils de coupures qui possèdent un impact faible sur l'environnement.

La Chambre partage les doutes de l'intimée quant à la fiabilité et la crédibilité de l'enseignement de ce document. Ce document mentionne plus de 250 compositions censées remplacer le SF6 et en même temps avoir un impact plus faible sur l'environnement que le SF6 sans offrir la moindre preuve et sans présenter des donnés expérimentales. On se demande pourquoi le SF6 représente de facto le standard comme gaz d'extinction d'arcs s'il existe autant d'alternatives préférables du point de vue de leur impact sur l'environnement.

Ceci dit, même si l'on accepte que la personne du métier partirait d'un tel document de l'état de la technique, la requérante 2 néglige, comme avant, dans son argument, que la revendication 1 exige que la fluorocétone soit présente à un état mixte et que c'est la phase gazeuse qui assure l'extinction d'arc. L'argument de la requérante 2 selon lequel des phases liquides et gazeuses coexisteraient forcément en fonction des conditions d'usage n'est pas correct. La fluorocétone se trouve à l'intérieur d'une enceinte étanche. La pression extérieure n'a par conséquent que peu d'influence sur la pression à l'intérieur de l'enceinte. Comme le montre la revendication 10 telle que délivrée, ce sont plutôt le vide partiel et la température à l'intérieur de l'enceinte lors du remplissage et la quantité de fluorocétone injectée qui sont importants dans ce contexte. Ces paramètres déterminent si, dans les conditions normales d'opération, les exigences de la revendication 1 sont remplies.

Cependant, le document D11 ne divulgue pas de manière directe et non ambiguë ni ne suggère que la fluorocétone est présente partiellement à l'état fluide et à l'état gazeux et que c'est le milieu gazeux qui assure l'extinction des arcs électriques.

5.6 Les documents D5 et D6

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport aux documents D5 et D6.

Il s'agit des brochures concernant des fluides caloporteurs (D5) et des fluides de protection contre les incendies (D6). Certes, ces fluides sont des fluorocétones. Or, rien dans ces documents ne semble suggérer que ces fluides seront susceptibles d'éteindre des arcs électriques. Selon le document D31, colonne 4, lignes 45 à 47, il est bien connu qu'il n'existe qu'une faible corrélation entre la capacité d'un gaz d'éteindre des arcs électriques et sa rigidité diélectrique. Les deux documents D5 et D6 sont muets quant à la capacité des fluorocétones à éteindre des arcs électriques et ne mentionnent aucunement l'application dans les appareils de coupure à haute tension. Dans ces appareils, des arcs se produisent régulièrement lors des ouvertures et fermetures des bornes électriques, tandis que dans les IGBT et transformateurs mentionnés dans D6, des arcs électriques ne se forment normalement pas sauf en cas de faute.

L'argument selon lequel la personne du métier partirait d'un fluide caloporteur ou d'un fluide protecteur contre les incendies et, au cours d'un développement soi-disant « évident », arriverait à un appareil de coupage à haute tension relève manifestement d'une analyse ex-post facto.

5.7 Le document D9

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D9.

Ce document concerne un appareil de coupure (voir la colonne 1, lignes 42 à 47 « switchgear ») logée dans une enceinte étanche remplie des fluoronitriles CnF2n+1CN. Ce document est donc un point de départ moins prometteur que, par exemple, le document D8 qui se rapporte à un appareil de coupure rempli de fluorocétone. Vu que déjà le document D8 ne divulgue ni ne suggère que la fluorocétone est présente à l'état fluide et gazeux et que c'est le milieu gazeux qui assure l'extinction d'arc électrique, la combinaison de D9 avec D8 ne mène pas à l'objet de la revendication.

La requérante 2 étaye son objection essentiellement par l'argument d'une co-existence inévitable des états fluides et gazeux. Cet argument néglige les implications résultant du fait que la revendication exige que le milieu gazeux assure l'extinction des arcs électriques, et donc une certaine pression et un certain volume occupé.

Selon la requérante 2, les documents D6, en haut de la page 1, et D14, page 6, lignes 1 à 9, inciteraient la personne du métier à remplacer la fluoronitrile de D9 par des fluorocétones. Or, la requérante 2 néglige dans son argument le fait que D6 et D14 se rapportent à des fluides caloporteurs et n'incitent pas la personne du métier à effectuer ce remplacement, voir aussi les remarques concernant l'absence de corrélation entre la rigidité diélectrique et la capacité d'éteindre les arcs électriques.

Comme expliqué ci-dessus, le document D11 ne divulgue ni ne suggère que la fluorocétone est présente partiellement à l'état fluide et à l'état gazeux et que c'est le milieu gazeux qui assure l'extinction des arcs électriques.

5.8 Le document D14

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique aussi une activité inventive par rapport au document D14 qui, de manière similaire à D5, se rapporte à l'usage d'une fluorocétone comme fluide caloporteur, dans le cas de D14 pour un moteur annexe d'aéronef. La requérante 2 néglige dans son argument le fait que les tensions dans les moteurs annexes sont plus petites que celles qui règnent dans les appareils de coupure à haute tension, et ce de deux ou trois ordres de grandeur. Il ne ressort nulle part de D14 que la fluorocétone serait susceptible d'être utilisée comme milieu assurant l'extinction des arcs électriques. Ceci ne ressort notamment pas du fait qu'elle possède une certaine rigidité diélectrique, voir le document D31. En faisant valoir que le point bas d'ébullition des fluorocétones mènerait forcément à des états mixtes fluides et gazeux, la requérante 2 néglige les implications résultant du fait que la revendication exige que le milieu gazeux assure l'extinction des arcs électriques, à savoir une certaine pression et un certain volume occupé par la phase gazeuse.

5.9 Le document D10

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D10. L'objection soulevée par la requérante 2 est totalement analogue à celle basée sur le document D9 comme point de départ. À la différence du document D9, le document D10 se rapporte à un transformateur électrique qui ne peut pas être considéré comme étant un appareil de coupure. Le document D10 est donc moins prometteur que D9. La requérante 2 n'explique pas pourquoi la personne du métier partant d'un transformateur arriverait, au cours d'un développement évident, à un appareil de coupure ou pourquoi elle combinerait le document D10 avec le document D8 qui traite d'un appareil de coupure. De surcroît, la présente objection ne convainc pas la Chambre pour les mêmes raisons que celles basées sur le document D9. Pour les raisons déjà détaillées ci-dessus, rien dans D10 ou dans les documents secondaires proposés par la requérante 2, à savoir D8, D6, D11 ou D14, ne divulgue ni ne suggère un milieu gazeux assurant l'extinction d'arc et la coexistence des états de fluorocétone fluide et gazeux.

5.10 Les documents D12 et D13

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport aux documents D12 ou D13 comme état de la technique le plus proche.

Ces documents se rapportent à des appareils de coupure de l'état de la technique remplis de SF6. Il sont donc moins prometteurs que le document D8, qui propose déjà de remplacer le SF6 par de la fluorocétone. Pour cette raison déjà, les deux présentes objections ne sauront pas convaincre la Chambre. Puisque ni les documents D12 et D13, ni le document D8 ne divulguent la coexistence des états fluides et gazeux de la fluorocétone, leur combinaison ne peut pas mener la personne du métier à l'objet de la revendication 1.

Le document D6 se rapporte à un fluide de protection contre les incendies. La requérante 2 néglige d'expliquer pourquoi une personne du métier à la recherche d'un remplacement d'un gaz avéré pour sa capacité d'éteindre des arcs électriques considérerait un fluide de protection contre l'incendie. Le fait que celui-ci possède une rigidité diélectrique de 48 kV selon le document D6 ne permet pas de conclure - sans connaissance de l'invention acquise après coup - qu'il est capable d'éteindre les arcs, voir le passage du document D31 cité ci-dessus.

La requérante 2 n'a non plus expliqué pourquoi la personne du métier envisagerait de remplacer le SF6 par un fluide caloporteur comme celui de D14. Cet argument relève aussi d'une analyse ex-post facto.

En ce qui concerne le document D11, la Chambre a déjà expliqué ses doutes quant à la fiabilité et la crédibilité de l'enseignement de ce document. De plus, elle a déjà expliqué que ce document ne divulgue ni ne suggère que la fluorocétone est présente partiellement à l'état fluide et à l'état gazeux et que c'est le milieu gazeux qui assure l'extinction des arcs électriques.

5.11 Le document D31

L'objet de la revendication 1 telle que délivrée implique une activité inventive par rapport au document D31.

Le document D31 se rapporte à un appareil de coupure rempli d'un mélange de SF6 et d'hélium. Il est donc moins prometteur comme état de la technique le plus proche que le document D8.

En outre, la requérante 2 n'a pas expliqué pourquoi la personne du métier qui cherche à remplacer le SF6 consulterait le document D5, qui porte sur un fluide caloporteur. Comme le remarque le document D31 lui-même, il n'y a qu'une corrélation faible entre la rigidité électrique et la capacité d'éteindre des arcs électriques. Ni D31 ni D5 ne suggèrent que le fluide caloporteur posséderait la capacité d'éteindre des arcs électriques nécessaire pour remplacer le SF6 selon D31.

Même si l'on combinait l'appareil de coupure selon D31 et le fluide caloporteur selon D5, cette combinaison ne mènerait pas à la solution telle que revendiquée puisqu'aucun des deux documents ne suggère que la fluorocétone soit présente à l'état fluide et gazeux et que c'est le milieu gazeux qui assure l'extinction d'arc.

6. Conclusions

6.1 La revendication indépendante 1 satisfait aux exigences des articles 54 et 56 CBE. Les revendications 2 à 9 sont dépendantes et satisfont donc aussi en tant que telles aux exigences des articles 54 et 56 CBE. La revendication indépendante 10 concerne un procédé de fabrication d'un appareil selon l'une des revendications 1 à 9 et satisfait donc aussi, pour cette raison, aux exigences des articles 54 et 56 CBE.

6.2 Il s'ensuit qu'aucun motif d'opposition ne s'oppose au maintien du brevet objet du litige. Par conséquent, la Chambre fait droit à la requête principale de l'intimée.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Les recours sont rejetés.

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