T 1847/16 (Entité électronique - OBERTHUR / GIESECKE & DEVRIENT) of 12.7.2021

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2021:T184716.20210712
Date de la décision : 12 Juillet 2021
Numéro de l'affaire : T 1847/16
Numéro de la demande : 06778905.7
Classe de la CIB : G06K 19/07
G06K 19/073
G06K 19/077
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : ENTITE ELECTRONIQUE AVEC MOYENS DE COMMUNICATION PAR CONTACT ET A DISTANCE
Nom du demandeur : Oberthur Technologies
Nom de l'opposant : Giesecke & Devrient GmbH
Chambre : 3.4.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 54
European Patent Convention Art 56
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 12(4)
Rules of procedure of the Boards of Appeal 2020 Art 025
Mot-clé : Nouveauté - (oui),
Arguments produits tardivement recevables (oui)
Objection soumise tardivement - recevable (non),
Exergue :

-

Décisions citées :
T 1794/12
T 1914/12
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours déposé par la requérante (opposante) fait suite à la décision de la division d'opposition de maintenir le brevet EP 1 907 993 sous forme modifiée.

II. La division d'opposition a estimé que les modifications introduites dans la revendication 1 du brevet délivré, que l'on retrouve dans la revendication 1 du brevet tel que maintenu selon la seconde requête subsidiaire, découlent directement et sans ambiguïté du contenu de la demande initiale. La division d'opposition a conclu que les conditions de l'article 123(2) CBE étaient remplies.

III. De même, elle a estimé que les modifications apportées à la revendication 1 du brevet tel que maintenu ne conduisaient pas à une extension de la protection conférée par le brevet, conformément aux dispositions de l'article 123(3) CBE.

IV. La division d'opposition a, en outre, également jugé que l'objet des revendications 1 et 4 du brevet tel que maintenu était inventif compte tenu de l'enseignement du document :

D1: EP-A-1 258 831.

V. La requérante sollicite l'annulation de cette décision et la révocation du brevet. Elle requiert en outre le remboursement de la taxe de recours.

VI. À l'appui de son recours, la requérante a initialement fait valoir:

- que l'objet du brevet tel que maintenu n'est pas nouveau compte tenu du document D1, et

- que, s'il en était néanmoins jugé différemment, celui-ci serait alors dépourvu d'activité inventive compte tenu de ce même document.

VII. Dans un second courrier, postérieur au dépôt du mémoire de recours, la requérante a invoqué une extension inadmissible de l'objet revendiqué au-delà du contenu de la demande initiale (article 123(2) CBE), ainsi qu'un manque de clarté des revendications (article 84 CBE).

VIII. Ni le mémoire de recours, ni le second courrier produit par la requérante, ne font état des motifs invoqués à l'appui de la requête de remboursement de la taxe de recours.

IX. L'intimée (brevetée) demande, à titre principal, que le recours soit rejeté et le brevet maintenu sous la forme modifiée, acceptée par la division d'opposition.

X. La revendication 1 selon la requête principale de l'intimée s'énonce comme suit :

Entité électronique comprenant :

- des moyens de communication par contact (4 ; 14);

- des moyens de communication sans contact (6 ; 16);

- une mémoire non-volatile réinscriptible dans laquelle est mémorisée une information d'activation à une valeur pour laquelle une communication sans contact est inhibée ;

caractérisée par :

- des moyens de mise à une valeur prédéterminée de l'information d'activation à réception d'une instruction d'activation à travers les moyens de communication par contact ;

- des moyens (12) pour autoriser un échange de certaines données au moins à travers les moyens de communication sans contact seulement en présence de la valeur prédéterminée de ladite information d'activation.

XI. La requérante demande, à titre subsidiaire, dans un second courrier postérieur à la réponse au mémoire de recours, que le brevet soit maintenu sur la base des requêtes subsidiaires 1 et 2, jointes au susdit courrier. Lesdites requêtes 1 et 2 correspondent aux requêtes 3 et 4 présentées au cours de la procédure d'opposition.

XII. L'intimée conteste quant au fond les arguments de la requérante, relatifs au manque de nouveauté et d'activité inventive de l'objet du brevet tel que maintenu. Elle requiert, en outre, que les arguments ayant trait à une extension de l'objet revendiqué et au manque de clarté des revendications soient déclarés irrecevables (article 12(4) RPCR 2007) ou inadmissibles (article 13(1) RPCR 2020).

XIII. Dans son avis provisoire, émis en vertu de l'article 15(1) RPCR, la chambre constatait que les objections d'extension du contenu de la demande initiale et de manque de clarté n'avaient pas été soulevées au cours de la procédure d'opposition et ne l'avaient pas davantage été lors du dépôt du mémoire de recours. Par conséquent, la chambre faisait part de son intention de considérer ces nouveaux motifs comme irrecevables. De même, la chambre faisait alors part de son intention de ne pas admettre les requêtes subsidiaires 1 et 2 de l'intimée produites dans le second courrier de réponse aux arguments de la requérante.

XIV. En ce qui concerne les conditions de nouveauté et d'activité inventive, la chambre observait que rien dans D1 n'établissait que l'information d'activation ne soit modifiée à réception d'une instruction transmise à travers les moyens de communication par contact. En outre, l'homme du métier n'avait aucune incitation à modifier l'information d'activation de l'interface sans contact (les valeurs des bits B1 et B2) par le biais d'une instruction générée à travers les moyens de communication par contact. Le même constat s'appliquait si l'on retenait l'interprétation nouvelle du procédé selon D1 mise en avant par l'opposante.

XV. Au cours de la procédure orale devant la chambre, les parties ont confirmé leurs requêtes respectives. L'intimée a en outre, fait valoir, à titre subsidiaire que le recours devait être rejeté comme irrecevable.

Motifs de la décision

Recevabilité du recours - Recevabilité des nouveaux arguments présentés par la requérante

1. Le mémoire exposant les motifs du recours évoque aux points 1.2 et 2 les raisons qui, selon la requérante, démontrent respectivement que l'objet revendiqué est dépourvu de nouveauté, ou tout au moins, ne résulte pas d'une activité inventive. L'argumentation de la requérante repose, pour l'essentiel, sur une interprétation nouvelle du contenu de D1 qui n'avait précédemment jamais été développée par la requérante.

2. L'argumentation désormais mise en avant constitue, selon l'intimée, une modification des moyens non admissible dans le cadre de la procédure de recours. En l'absence de toute argumentation tendant à démontrer que les arguments retenus par la division d'opposition pour justifier le maintien du brevet sous forme modifiée ne sont pas convaincants, le recours n'est pas suffisamment motivé. Il doit donc être déclaré irrecevable.

3. Les conditions de la recevabilité du recours doivent être appréciées à la lumière des dispositions en vigueur lorsque celui-ci fut déposé, c'est-à-dire, en l'espèce, en août 2016. En l'occurrence, la règle 99(2) CBE relative à son contenu, en vigueur à cette date stipule :

Dans le mémoire exposant les motifs du recours, le requérant doit présenter les motifs pour lesquels il y a lieu d'annuler la décision attaquée ou la mesure dans laquelle elle doit être modifiée, ainsi que les faits et les preuves sur lesquels le recours est fondé.

4. Les motifs exposés aux points 1.2 et 2 du mémoire ont trait aux raisons qui, selon la requérante, démontrent que les conditions de nouveauté, ou tout au moins, d'activité inventive, ne sont pas remplies compte tenu de D1. Les arguments avancés le sont de façon structurée et compréhensible, ne laissant aucun doute sur leur signification et leur objet.

5. Par conséquent, les conditions de la règle 99(2) CBE sont satisfaites. Le recours est donc motivé et recevable.

6. Indépendamment de la question de la recevabilité du recours, la chambre doit se prononcer sur la recevabilité des nouveaux arguments. En l'occurrence, l'article 25 RPCR 2020 stipule que les dispositions des articles 12(4) à 12(6) RPCR 2020 relatifs à la modification des moyens ne sont pas applicables lorsque le mémoire de recours a été déposé avant leur entrée en vigueur, c'est-à-dire avant le 1er janvier 2020. L'admissibilité des nouveaux arguments de la requérante doit donc être appréciée sur la base de l'article 12(4) RPCR 2007.

7. La chambre note que les nouveaux arguments développés dans le mémoire de recours constituent une réaction directe à la motivation retenue par la division d'opposition pour justifier sa décision de maintien sous forme modifiée du brevet. La requérante prend ainsi acte du fait que les arguments présentés alors n'ont pas convaincu la division d'opposition, et estime qu'une approche différente est plus à même d'aboutir. La chambre estime que les arguments nouveaux sont recevables (cf. décisions T 1794/12; T 1914/12).

Motifs tardifs (Articles 123(2) CBE, 84 CBE)

8. Selon la requérante, la caractéristique relative à une mémoire non-volatile réinscriptible dans laquelle est mémorisée une information d'activation, présente dans la revendication 1 de la requête principale, à laquelle il a été ajouté, au cours de la procédure d'opposition, la précision selon laquelle cette information d'activation serait "à une valeur pour laquelle une communication sans contact est inhibée", constituerait une extension inadmissible du contenu de la demande initiale. En effet, cette caractéristique fait référence, dans la demande telle que déposée, à une valeur initiale de l'information d'activation, ce que la revendication modifiée ne fait pas apparaître. Si cette caractéristique était néanmoins interprétée dans le sens de la demande telle que déposée, c'est-à-dire comme faisant référence à une information initiale susceptible d'être modifiée, il conviendrait alors de conclure au manque de clarté de la revendication 1 dans la mesure où, une fois modifiée, la condition spécifiée ne serait plus vérifiable.

9. La chambre observe que la requérante n'a à aucun moment fait état de ces objections devant la division d'opposition (cf. procès-verbal de la procédure orale devant la division d'opposition) et qu'elles n'ont pas davantage été soulevées lors du dépôt du mémoire de recours. En outre, la chambre observe que les objections soulevées ne sont pas de prime abord pertinentes.

10. Pour ces raisons, la chambre, dans l'exercice du pouvoir d'appréciation que lui confère l'article 13(1) RPCR 2020, décide de ne pas admettre ces arguments et motifs nouveaux dans la procédure de recours.

Nouveauté - article 54 CBE

11. D1 décrit une entité électronique comprenant des moyens de communication par contact (106a) et des moyens de communication sans contact (106b), ainsi qu'une mémoire non-volatile réinscriptible (EEPROM 101) apte à mémoriser une information d'activation (cf. paragraphes [0059], [0060]). La sélection d'un moyen de communication dépend dans D1 des conditions de communication : en l'occurrence, des conditions quant aux permissions d'utilisation de chaque interface ou de recommandation, prédéfinies par la valeur des bits B1 et B2.

12. L'entité électronique décrite dans D1 comprend également des moyens de mise à une valeur prédéterminée de l'information d'activation exprimée par la valeur des bits B1 et B2, ainsi que des moyens permettant un échange de certaines données au moins à travers les moyens de communication sans contact et ceci seulement en présence de la valeur prédéterminée de ladite information d'activation (cf. paragraphes [0048], [0049], [0053] et [0054]).

13. Dans la mesure où la mise à une valeur prédéterminée de l'information d'activation requiert, comme le souligne la division d'opposition, une instruction à cet effet, l'entité revendiquée se distingue de celle de D1 en ce que l'information d'activation est mise à une valeur prédéterminée à réception d'une instruction au travers des moyens de communication par contact. Cette distinction établit la nouveauté de l'objet revendiqué vis-à-vis du dispositif divulgué dans D1 et du procédé qui y est mis en ½uvre.

14. Ce point n'est pas contesté par la requérante. Celle-ci estime néanmoins qu'une autre lecture de D1 conduit à la conclusion que l'entité électronique revendiquée n'est pas nouvelle.

15. Selon la requérante, les commandes disponibles, susceptibles d'être mises en ½uvre lors des échanges entre la carte et le dispositif de lecture externe (cf. Figure 13), génèrent des "informations d'activation" qui définissent, à l'émission et à la réception, si les deux interfaces de communication sont utilisables ou, au contraire, si seule l'interface de communication par contact est disponible.

16. L'interprétation nouvelle de D1, développée par la requérante, se heurte, là encore, au constat que rien dans D1 n'établit que cette information d'activation est modifiée à réception d'une instruction transmise à travers les moyens de communication par contact. Le contexte général défini par D1 suggère au contraire, comme le retient l'intimée, que ces informations d'activation sont définies une fois pour toutes, lors de la mise en service de la carte en fonction de la vulnérabilité des commandes susceptibles d'être mises en ½uvre.

17. Faisant plus spécifiquement référence à la figure 13 de D1 et aux différentes commandes effectivement mises en ½uvre dans l'entité électronique de D1, la requérante soutient que celle-ci doit nécessairement comprendre des moyens de mise à une valeur prédéterminée de l'information d'activation à réception d'une instruction d'activation à travers les moyens de communication par contact. La requérante fait, par exemple, référence à la succession des commandes GET CHALLENGE et EXTERNAL ANTHENTICATE.

18. La séquence de ces commandes, telle que décrite au paragraphe [0099] requiert en effet qu'une instruction soit émise en direction des moyens de gestion de la communication et que cette instruction modifie, d'une façon ou d'une autre, lors de l'opération d'authentification qui fait suite à la commande GET CHALLENGE, les modalités d'échange des données transmises. En effet, si la commande ne constitue pas en tant que telle une information sensible, il n'en est pas de même du nombre aléatoire qui sera généré et transmis en retour aux fins d'authentification. Bien que cet aspect ne soit pas abordé dans D1, la modification des modalités de communication aura nécessairement pour effet de modifier un élément interne aux circuits ou mémoires de l'entité électronique.

19. En l'absence, cependant, de toute précision quant aux mécanismes et aux moyens de gestion de cette instruction et de conservation de l'information d'activation qui en résulte, rien ne permet d'établir que cette information d'activation réside dans une mémoire non-volatile réinscriptible comme le requiert l'intitulé de la revendication.

20. Il se peut, par exemple, que cette information d'activation se traduise par l'état de l'interrupteur 105 de la figure 1, permettant une communication soit par le biais des moyens par contact (106a), soit par le biais des moyens sans contact (106b). Cette interprétation de D1 rejoindrait alors celle que l'opposante avait initialement développée devant la division d'opposition. Comme l'avait alors justement remarqué celle-ci, rien n'indique que l'interrupteur 105 conserve sa valeur lorsqu'il n'est plus alimenté.

21. Par conséquent, l'objection de manque de nouveauté n'est pas convaincante. L'entité électronique de la revendication 1 est donc nouvelle au sens de l'article 54 CBE.

Activité inventive - article 56 CBE

22. La chambre rejoint la division d'opposition dans son analyse et sa conclusion selon lesquelles il n'y aurait aucune incitation à modifier l'information d'activation de l'interface sans contact (les valeurs des bits B1 et B2) par le biais d'une instruction générée à travers les moyens de communication par contact.

23. Le même constat reste valable pour ce qui concerne la nouvelle interprétation de D1 mise an avant par la requérante. Là encore, rien n'incite l'homme du métier à modifier les informations d'activation associées aux différentes commandes du tableau de la figure 13 de D1 par le biais d'une instruction transmise à travers les moyens de communication par contact.

24. Comme le suggère la description (paragraphes [0003], [0022]) les conditions d'utilisation des interfaces de communication avec ou sans contact sont définies, pour chaque fonctionnalité mise en ½uvre par l'entité électronique, dans les mémoires de type EEPROM.

Ce type de mémoire est en effet tout à fait adapté aux commandes évoquées à la figure 13 de D1. Les conditions d'échanges d'informations pour les différentes commandes mises en ½uvre n'ont en effet pas vocation à évoluer. Elle définissent, pour une fonctionnalité (application) donnée de l'entité électronique, un cadre d'échange fixé une fois pour toute. Aussi, n'y a-t-il aucune raison de procéder à une quelconque mise à jour des informations d'activation qu'elles définissent.

25. La nouvelle interprétation de D1 proposée par la requérante n'est pas davantage convaincante. Lorsque les conditions d'échange évoluent en raison de la séquence de commandes effectivement mises en ½uvre, comme, par exemple, quand la commande EXTERNAL AUTHENTICATE fait suite à l'instruction GET CHALLENGE, l'information d'activation, qui traduira cette évolution, n'a aucune raison d'être mémorisée de façon permanente. En effet, la décision quant aux interfaces utilisables étant prise sur la base des seules données associées à chaque commande, conservées dans les mémoires EEPROM, la prise en compte de l'information d'activation relative à la commande précédente s'avère dépourvue de toute signification technique.

26. L'entité électronique revendiquée ne résulte donc pas d'une modification évidente de l'entité électronique connue de D1. L'objet de la revendication 1 de la requête principale est inventif au sens de l'article 56 CBE.

Remboursement de la taxe de recours

27. La requérante s'est bornée à demander le remboursement de la taxe de recours sans produire d'éléments à l'appui de sa requête.

28. En outre, la règle 103(1)a) CBE prévoit un remboursement intégral de la taxe de recours

en cas de révision préjudicielle ou lorsque la chambre de recours fait droit au recours, si le remboursement est équitable en raison d'un vice substantiel de procédure.

29. La chambre ne faisant pas droit au recours, la requête de remboursement est donc rejetée, sans que la chambre n'ait à statuer sur l'existence d'un éventuel vice substantiel de procédure.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté.

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