T 0696/16 () of 30.5.2017

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2017:T069616.20170530
Date de la décision : 30 Mai 2017
Numéro de l'affaire : T 0696/16
Numéro de la demande : 10752395.3
Classe de la CIB : A47J 31/36
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Titre de la demande : DISPOSITIF POUR LA PRÉPARATION D'UNE BOISSON EXTRAITE À PARTIR D'UNE CAPSULE
Nom du demandeur : Ethical Coffee Company SA
Nom de l'opposant : NESTEC S.A./NESPRESSO FRANCE
Chambre : 3.2.04
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 100(a)
European Patent Convention Art 100(b)
European Patent Convention Art 100(c)
European Patent Convention Art 108
European Patent Convention Art 114(2)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 12(4)
Mot-clé : Recevabilité du recours - recours suffisamment motivé (oui)
Modifications - extension au-delà du contenu de la demande telle que déposée (non)
Possibilité d'exécuter l'invention - (oui)
Nouveauté - (oui)
Activité inventive - (oui)
Document produit tardivement - recevable (oui)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0015/01
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0318/14

Exposé des faits et conclusions

I. Le 17 février 2016 la requérante (opposante) a formé un recours contre la décision de la division d'opposition signifiée par voie postale le 15 mars 2016 de rejeter l'opposition. La taxe de recours a été acquittée le même jour. Le mémoire exposant les motifs du recours a été reçu le 25 juillet 2016.

II. L'opposition formée contre le brevet était fondée sur les motifs d'opposition selon l'article 100 (a) CBE combiné avec l'article 52(1), 54(1) et 56 CBE pour manque de nouveauté et d'activité inventive, selon l'article 100(b) CBE pour insuffisance de l'exposé et selon l'article 100(c) CBE pour extension de l'objet du brevet.

La division d'opposition avait estimé que les motifs d'opposition visés à l'article 100 CBE ne s'opposaient pas au maintien du brevet en considération des documents suivants inter alia :

D1: WO2009/090201 A1

D3: WO2010/092543

III. Au cours de la procédure de recours, la Chambre a en outre tenu compte des documents suivants:

D50: WO2008/037642 A2

D51: EP 1 101 430 A1

D52: EP 0 891 734 B1

D53-D57: Tests comparatifs de capsules et de force d'éjection

D59: Rapport technique sur le dimensionnement d'une cage à Capsule selon le brevet EP 2 312 978 B1

IV. Dans sa lettre du 23 décembre 2016 la requérante ayant réitéré sa requête de traitement accéléré au vu d'une audience concernant l'action en contrefaçon intentée devant la cour de Düsseldorf, une procédure orale devant la chambre de recours a eu lieu le 30 mai 2016.

V. La requérante (opposante) demande l'annulation la décision attaquée, et la révocation du brevet dans son intégralité.

L'intimée (titulaire) demande le rejet du recours, alternativement le maintien du brevet sous forme modifiée selon l'une des requêtes subsidiaires 1 à 11 déposées le 28 décembre 2015 en première instance.

VI. Les revendications 1 et 2 telles que délivrées (requête principale) ont le libellé suivant:

1. "Dispositif pour la préparation d'une boisson extraite à partir d'une capsule (1) comprenant un support de capsule (4) et une cage à capsule (5) à l'intérieur de laquelle sont disposés au moins une entrée d'eau et ces moyens de perçage de capsule, caractérisé par le fait que ladite cage (5) est dimensionnée de manière à déformer par des moyens déformants compris sur la paroi interne de la cage au moins partiellement toute capsule (1), constituée d'un matériau déformable au contact d'eau chaude, qui est disposée dans la cage (5) de manière à ce que la capsule (1) soit retenue dans la cage (5) consécutivement à son contact avec de l'eau chaude, lesdits moyens étant un relief de type harpon (11)."

2. "Procédé d'extraction d'une boisson utilisant un dispositif selon la revendication précédente, dans lequel pour une capsule constituée d'un matériau déformable au contact d'eau chaude, ladite capsule disposée dans la cage est retenue dans ladite cage consécutivement à son contact avec de l'eau chaude lorsqu'elle se ramollit et qu'une partie de sa matière se loge entre les dents de la cage."

VII. La requérante a argumenté de la façon suivante :

- Le recours est recevable car motivé.

- Concernant l'extension de l'objet du brevet, la revendication 1 définit des moyens déformants qui n'étaient pas compris dans la demande d'origine avec des moyens purement passifs comme les harpons. De plus ces moyens déformants sont définis comme étant compris sur la paroi interne, alors que le mode de réalisation en rapport avec le relief de type harpon ne prévoyait pas qu'il puisse dépasser de la surface de la paroi. La revendication 2 fait référence aux dents qui ne sont pas reliées au relief de type harpon et définissent donc des moyens additionnels non divulgués à l'origine.

- Concernant la suffisance de l'exposé, la réalisation des dents telles qu'elles sont divulguées dans les figures 19 à 24 ne permet pas la rétention de capsules déformables. L'homme du métier doit ajuster de nombreuses variables sur le matériau de capsule, son remplissage, ses dimensions, la dimension de la cage et le nombre et la taille des dents. Cela représente un effort excessif que l'homme du métier ne peut réaliser sans informations complémentaires.

- Concernant l'admission des documents D50, D51 et D52 qui sont de prime abord pertinents, ils ont été soumis au stade le plus précoce de la procédure de recours.

- Concernant la nouveauté, D51 décrit des aiguilles qui ont pour effet de déformer la paroi de la capsule, et de la retenir dans la cage. Comme la revendication 1 ne précise pas à quel moment cette rétention doit être obtenue, la cage de D51 détruit la nouveauté du dispositif défini par cette revendication.

Les documents D1 (figure 14) et D50 (canaux 25 dans les figures 1 à 4) qui montrent un décroché dans la paroi de la cage retiennent également toute capsule en matériau déformable, puisque le matériau de la capsule vient se loger dans ce décroché quand il se ramollit.

La priorité ayant déjà été revendiquée dans la demande antérieure PCT/IB2010/050632 publiée sous le N° WO 2010/092543, il y a épuisement du droit de priorité et la divulgation de D3 appartient à l'état de la technique selon l'Art 54(3) CBE, ce document détruit donc la nouveauté de l'objet des revendications 1 et 2.

- En relation avec l'activité inventive, en partant d'une cage de capsule de l'état de la technique qui n'a pas de relief de type harpon, l'homme du métier utiliserait l'enseignement de D52 pour proposer une configuration alternative pour cette cage. D52 divulgue un moyen de retenue sous forme d'une languette 19 apte selon le paragraphe 6, lignes 8 à 15 à déformer la capsule. Par la simple adaptation de cette languette sur une cage standard, l'homme du métier arrive de manière évidente à l'objet revendiqué.

VIII. L'intimée a argumenté de la façon suivante :

- La recevabilité du recours est contestée au motif qu'aucun lien de causalité clair entre la décision attaquée et le mémoire de recours ne serait exposé par la requérante, qui se borne à répéter ses arguments déjà soumis en opposition, sans contester les arguments de la décision.

- Concernant l'extension de l'objet du brevet, l'homme du métier comprend à la lecture de plusieurs passages de la demande telle que déposée, que tous les moyens proposés pour retenir la capsule sont déformants, y compris le relief de type harpon divulgué en rapport avec les figures 19 à 24 sur lequel la revendication 1 se concentre. De plus la formulation dans le texte qui précise que la paroi interne comporte un tel relief, et la formulation de la revendication 1 qui définit les moyens "sur la paroi", ont la même signification.

L'homme du métier animé de la volonté de comprendre, interprète les dents définies dans la revendication 2, comme étant les mêmes moyens de type harpon définis par référence à la revendication 1. Les dents ne constituent donc pas un moyen supplémentaire non divulgué.

- Concernant la suffisance de l'exposé, l'ensemble cage capsule présente des dimensions standards. La variation des tailles de capsules présentée par la requérante ne peut être aussi importante qu'indiqué dans ces mesures. L'homme du métier est capable de manière simple de changer les dimensions des dents, ou leur nombre pour aboutir à une rétention d'une capsule déformable après son exposition à de l'eau chaude. Il conçoit de manière évidente que la force de rétention va augmenter en fonction de la taille et du nombre de dents. Le test présenté par la requérante conduit à un échec prévisible car la cage est dimensionnée pour ne pas appliquer de précontrainte sur la capsule, ce n'est donc pas un point de départ idéal pour reproduire l'invention.

- Les documents D50, D51 et D52 auraient pu être fourni pendant la procédure d'opposition et ne devraient pas être admis sous l'Article 12(4) RPCR.

- En ce qui concerne la nouveauté, D51 ne comporte aucune information sur l'éjection de la capsule de la cage, l'homme du métier ne peut donc en déduire aucune information claire et non ambiguë que les aiguilles, montrées en position d'extraction du café, ont pour effet de retenir la capsule dans la cage consécutivement à son contact après injection de l'eau chaude comme requis par la revendication 1.

Le document D50 est destiné à l'utilisation de capsules rigides. Si comme allégué les canaux 25 venaient à se boucher par déformation d'une capsule déformable, le dispositif divulgué ne pourrait plus fonctionner. L'enseignement de D51 est donc contraire à l'objet revendiqué. Dans le document D1, le décroché visible dans la figure 14 est un artefact du dessin, car la même variante selon la figure 6 n'en montre aucun.

- En relation avec l'activité inventive, l'homme du métier n'utiliserait pas l'enseignement de D52 pour modifier une cage standard, car le type de dispositif avec porte-capsule est différent et sert au contraire à faciliter l'éjection plutôt que de retenir la capsule. En outre la languette est située sur le porte capsule; en cas d'utilisation d'un tel enseignement, l'homme du métier n'aurait aucune raison d'adapter cette languette sur une cage.

Motifs de la décision

1. Recevabilité du recours

1.1 L'intimée conteste la recevabilité du recours au motif qu'aucun lien de causalité clair entre la décision attaquée et le mémoire de recours ne serait exposé par la requérante, qui se bornerait à répéter son argumentation.

1.2 La chambre ne partage pas cette avis. Le mémoire de recours est très étoffé (51 pages), la requérante y cite explicitement des passages de la décision attaquée et conteste son raisonnement par des arguments de fait et de droit dans plusieurs parties de son mémoire. En particulier à le point 1.3.2 aux pages 6 et 7 du mémoire de recours conteste l'interprétation de "toute capsule" par la division d'opposition. En rapport avec le motif d'opposition selon l'Article 100 c) CBE, le point 4.1 aux pages 19 et 20 critique les bases des modifications trouvées par la division d'opposition, et explique en quoi ces modifications n'auraient aucune base. Au moins en rapport avec ce motif selon l'Article 100 c), est-il possible d'identifier les arguments contestés de la décision, et d'évaluer le raisonnement apporté par la requérante. Le succès d'une telle contestation serait suffisant en soi pour annuler la décision. En outre de telles contestations et contre-argumentations sont également présentées en relation avec les autres motifs d'opposition.

La chambre conclut donc que le mémoire exposant les motifs du recours déposé par la requérante lui permet de comprendre immédiatement et sans investigation pour quelle raison la décision attaquée serait erronée, et quels sont les faits sur lesquels reposent les arguments de la requérante conformément à la jurisprudence concernant la formation et la recevabilité du recours mentionnée par l'intimée (voir Jurisprudence des Chambres de Recours,8éme édition 2016 ou JdCdR ci-après, IV.E.2.6.3a, ). En conséquence, les exigences de l'art. 108, troisième phrase CBE ensemble la règle 99(2) CBE sont remplies et le recours est donc recevable.

2. Arrière plan du brevet

2.1 Le brevet concerne un dispositif pour la préparation d'une boisson extraite à partir d'une capsule. Ainsi qu'indiqué au paragraphe 6 du brevet un objectif

principal est d'éviter l'utilisation de capsules constituées d'un matériau déformable au contact d'eau chaude, car ce type de matériau pourrait induire des dysfonctionnements.

2.2 Le coeur de la solution à ce problème consiste selon la revendication 1 à dimensionner la cage de manière à déformer par des moyens déformants compris sur la paroi interne de la cage au moins partiellement toute capsule, constituée d'un matériau déformable au contact d'eau chaude, qui est disposée dans la cage, de manière à ce que celle ci soit retenue consécutivement à son contact avec de l'eau chaude, par des moyens ayant un relief de type harpon.

2.3 La revendication 2 définit un procédé d'extraction utilisant le dispositif selon la revendication 1 et précise que la capsule disposée dans la cage est retenue dans ladite cage consécutivement à son contact avec de l'eau chaude lorsqu'elle se ramollit, et qu'une partie de sa matière se loge entre les dents de la cage.

3. Extension de l'objet des revendications - article 100 c) CBE

3.1 Revendication 1

3.1.1 La revendication 1 telle que délivrée contient les modifications suivantes par rapport à la revendication 1 dans la version telle que déposée:

- La définition des moyens déformants a été ajoutée par l'expression "par des moyens déformants compris sur la paroi interne de la cage" dans la partie caractérisante.

- La précision des moyens par l'expression "lesdits moyens étant un relief de type harpon" a été rajoutée à la fin de la partie caractérisante.

La revendication 1 a donc été limitée aux moyens dans lesquels la paroi interne de la cage comprend des reliefs de type harpon définis dans la revendication 7 d'origine en relation avec le mode de réalisation visible dans les figures 19 à 24.

3.1.2 Selon la jurisprudence constante des chambres, une modification est soumise à l'interdiction impérative d'extension de l'objet énoncée à l'art. 123(2) CBE et ne pourra donc être effectuée, quel que soit son contexte, que dans les limites de ce que l'homme du métier est objectivement en mesure, à la date de dépôt, de déduire directement et sans équivoque de l'ensemble de ces documents tels qu'ils ont été déposés, en se fondant sur les connaissances générales dans le domaine considéré. Cette possibilité de déduction inclut également des caractéristiques implicites c'est à dire un objet qui n'a pas été explicitement dévoilé en soi dans la demande telle que déposée, mais qui est néanmoins déduit directement et sans ambiguïté de son contenu (voir JdCdR II.E.1.2.1 et 1.2.2, ).

3.1.3 L'homme du métier animé de la volonté de comprendre techniquement l'invention telle que décrite dans la demande d'origine constate que l'effet recherché de retenir la capsule dans la cage est obtenu par différents moyens décrit dans cinq variantes selon les figures 1 à 6, 7 à 12, 13 à 18, 19 à 24 et 25 à 28. Tous ces moyens alternatifs - O-ring, palette, ressort, relief dentelé et forme de cage en cloche -produisent une déformation de la capsule souple consécutivement à son ramollissement par l'eau chaude. Parmi tous ces moyens, la palette 10 pivotante selon la seconde variante est explicitement citée comme "élément déformant" (page 3, lignes 28 à 31). La compréhension synthétique de l'homme du métier lisant l'ensemble de toutes ces alternatives en contexte lui laisse clairement apparaître que les autres moyens sont aussi de tels moyens, même si des expressions alternatives pour les qualifier sont utilisés. Il en est ainsi pour la "paroi ... déformée" divulguée en page 3, lignes 14 à 16 en relation avec la première variante, elle-même devant fonctionner de manière similaire à la troisième variante décrite en page 3, lignes 22-23. Une déformation importante est également décrite en page 4 lignes 10 à 12 en relation avec la cinquième variante.

3.1.4 Tous ces moyens étant décrits comme induisant une déformation quelconque de la capsule, le qualificatif "déformant" s'applique. Dans ce contexte il importe peu de savoir si le caractère "déformant" est obtenu de manière active par une force élastique sur la capsule comme dans les variantes 1, 2 ou 3, ou bien si au contraire c'est l'action passive de la forme de la paroi qui induit une réaction comme dans le cas de la quatrième variante ou encore dans la cinquième variante. Contrairement à l'avis de la requérante le qualificatif "déformant" dans le sens de provoquer une déformation inclut ces deux possibilités, actives ou passives, pour l'ensemble de ces variantes.

Cela est en particulier valable pour la quatrième variante revendiquée dans le brevet délivré. L'homme du métier apprend à la page 4, lignes 1 à 2 que les moyens à relief dentelé en forme de harpon fonctionne de manière à ce que le même ramollissement de la capsule aboutit à ce qu'une partie de sa matière se loge dans le creux des dents. Avec la compréhension technique de l'homme du métier, cela revient à ce que le relief en forme de harpon déforme la matière par réaction. La caractéristique "déformant" pour qualifier les moyens à relief de type harpon apparaît donc de manière claire et non ambiguë également pour cette variante, et n'introduit pas la possibilité de prévoir un nouveau moyen alternatif, défini par une nouvelle fonction.

3.1.5 Pour la chambre, l'indication de la présence de ces moyens déformant "compris sur la paroi interne" n'introduit pas non plus de nouvelle information par rapport à la divulgation dans la demande d'origine. En effet le passage à la page 3, lignes 36 à 37 indique que la paroi interne de cage comporte le relief dentelé de type harpon revendiqué. Contrairement à l'opinion de la requérante, l'homme du métier, donnant aux termes leur signification usuelle, ne reconnaît dans la définition directe des moyens déformants "compris sur la paroi", aucune différence avec la description inverse d'une paroi qui "comporte" ces moyens. En effet les moyens en l'occurrence en forme de harpon doivent dans les deux cas être présents de manière quelconque sur la paroi, il importe peu que l'on définisse la relation paroi/moyens à partir de la paroi qui comporte de tels moyens ou au contraire à partir des moyens qui sont compris "sur la paroi". En particulier, le fait que la paroi comporte un relief ne signifie pas qu'il doit être rapporté sur la surface de la paroi et donc s'étendre au delà de sa surface, cette expression est neutre sur le mode de réalisation du relief et sur sa disposition spatiale par rapport à la surface de la cage dépourvue d'un tel relief.

3.2 Revendication 2

La revendication 2 définit en relation avec le procédé, l'étape selon laquelle la capsule est retenue dans la cage consécutivement à son contact avec de l'eau chaude lorsqu'elle se ramollit, et qu'une partie de sa matière se loge entre les dents de la cage. La requérante soumet à juste titre que "les dents" n'ont aucun antécédent dans cette revendication, ou dans la revendication 1 qui décrit le dispositif utilisé dans le procédé. Néanmoins la chambre ne peut convenir que cette apparente incohérence inclurait la possibilité, que les dents de la cage soient des moyens complémentaires de ceux définis par les moyens du type harpon dans la revendication 1. L'homme du métier confronté à de telles incohérences cherche toujours sur la base du libellé complet des revendications, prises ensembles, lorsqu'elles sont reliées par une dépendance, une interprétation qui fasse sens techniquement, et soit supporté par la divulgation du brevet.

Comme exposé ci-dessus la revendication 2 définit explicitement l'utilisation dans un procédé du dispositif selon la revendication 1; toutes les caractéristiques de ce dispositif sont donc incluses. En l'absence d'antécédent pour le terme "dents" l'homme du métier recherche leur fonction. Elles participent à la rétention de la capsule, qui est au coeur de l'invention, et elles ont donc la même fonction que les moyens déformants avec un relief de type harpon du dispositif. L'homme du métier identifie donc avec la même volonté de compréhension technique que ces dents correspondent aux reliefs déjà prévus à l'origine, et exclut donc l'interprétation proposée par la requérante comme quoi elles seraient supplémentaires.

3.3 Au vu de qui précède la chambre confirme donc la conclusion de la décision attaquée, comme quoi l'objet des revendications 1 et 2 du brevet délivré n'a pas été étendu au delà du contenu de la demande telle que déposée.

4. Suffisance de l'exposé de l'invention - article 100b) CBE

4.1 La question soulevée en rapport avec ce motif concerne le fait de savoir si le brevet délivré décrit suffisamment le dimensionnement de la cage et notamment les paramètres qui permettent de réaliser un relief de type harpon qui puisse atteindre l'effet de rétention de toute capsule en matériau déformable.

Concernant la partie structurelle du relief, l'homme du métier dispose des informations contenues dans le paragraphe 15 du brevet qui divulgue un relief dentelé en forme de harpon, sur une paroi interne de la cage, et des dents correspondantes à ce relief. En relation avec la représentation du mode de réalisation spécifique des figures 19 à 24, l'homme du métier distingue une paroi interne de cage, équipée d'une série de cinq portions annulaires à section dentelée, s'étendant sur toute la circonférence interne de la cage. Il peut donc réaliser une cage comportant sur sa paroi interne cinq anneaux en relief chacun de section dentelée asymétrique.

Concernant le mode de fonctionnement, l'effet recherché de rétention repose sur un principe technique simple. L'eau chaude à température usuelle pour l'extraction de café doit ramollir le matériau de la paroi de capsule, qui par définition est déformable à cette température, qui viendra épouser la forme du relief dentelé et, au moment de l'éjection, retenir la capsule par effet anti-retour ou harpon. C'est précisément cet effet qui est décrit brièvement dans le paragraphe 15 du brevet.

L'homme du métier n'a aucune difficulté à concevoir que ce principe de fonctionnement est parfaitement capable de produire l'effet de rétention revendiqué, et conçoit qu'une simple adaptation de la taille ou du nombre des dents permet d'influencer l'effet de rétention à obtenir.

Pour cette raison le brevet divulgue un mode de réalisation à cinq dents, donnant un point de départ à l'homme du métier pour réaliser le concept de la revendication 1 selon la JdCdR, II.C.4.2,: indication d'au moins un mode de réalisation. En outre il contient des informations suffisantes concernant l'effet technique sous-jacent à la rétention de la capsule nécessaire pour adapter ce mode de réalisation.

4.2 La requérante soumet notamment au vu du manque de précision de la variante revendiquée, que l'homme du métier se trouverait confronté à une situation dans laquelle il doit sélectionner une multitude de paramètres concernant les dimensions de la cage, des capsules, leur matériau et leur remplissage en café, la taille des dents de type harpon. En l'absence d'indication précise sur tous ces paramètres, il ferait donc face à une feuille blanche pour réaliser l'invention. Pour appuyer cet argument, la requérante se base sur des résultats de tests D54 qui, selon elle, malgré une réalisation de la cage conforme aux figures 19 à 24 du brevet, ne parviendrait pas à réaliser l'effet de rétention recherché. Elle invoque en outre le reversement de la charge de la preuve au vu de cet échec, preuve d'un manque évident de divulgation.

La chambre ne peut suivre l'opinion de la requérante en ce qui concerne la multitude des paramètres à ajuster par l'homme du métier. Dans le cas présent le dispositif revendiqué est destiné à fonctionner avec toutes les capsules mises à disposition dans le commerce. Il doit retenir celles en matériaux qui se ramollissent à la chaleur, tandis que les autres fonctionnent normalement. Cela doit se faire par un relief supplémentaire de type harpon, qui est ajouté dans la cage. Les autres dimensions de la cage ne sont donc pas à modifier de manière extensive, tout au plus à ajuster de manière marginale.

La dimension des capsules ne varie pas non plus de manière significative. En admettant que les mesures de capsules de la requérante proposées dans D53 soient précises, ce dont la chambre doute, une variation de 1mm sur le diamètre de capsule de 25mm ne représente qu'une plage de ±2% par rapport à la taille moyenne des capsules, il ne peut donc s'agir d'un paramètre à forte amplitude de variation.

Les matériaux de capsules disponibles sont également en nombre limité, et ceux qui se ramollissent à la température de fonctionnement d'un dispositif d'extraction de café encore plus. L'homme du métier ne se trouve donc pas en face d'une feuille blanche pour mettre en oeuvre l'invention mais au contraire dispose de dimensions standardisées de l'ensemble cage/capsule ainsi que d'une liste limitée de matériaux. Parmi les variables à adapter restent donc uniquement le nombre et la taille des reliefs de type harpon. Comme l'homme du métier n'a, en outre, aucune raison de douter qu'une série de cinq anneaux en forme de harpon ne puisse fonctionner, il n'a juste que la taille de ces harpons à ajuster. Une telle modification est tout à fait à sa portée en procédant à des essais de routine.

L'échec obtenu par la requérante dans ses essais n'est pas non plus de nature à faire douter la chambre sur la reproductibilité de l'invention. En effet les essais présentés dans D54 ont été réalisés, de l'aveu la requérante (voir également D54, Point 3 capsule cage design), en se basant sur des dimensions relatives de la cage et des dents déduites des figures. Or ces figures sont par nature des représentations schématiques et non des dessins de construction à l'échelle (voir Jurisprudence des Chambres de Recours, 8éme édition 2016, I.C.4.6, ). Même en admettant qu'elles puissent donner des ordres de grandeur relatifs, la réalisation de la cage et des dents sur la base de mesures déduites et relatives sur l'ensemble de ces dimensions déduites et relatives rendent un échec possible, d'autant plus qu'il s'agit de réaliser un jeu étroit entre la capsule et la paroi dentelée de la cage. L'échec présenté dans le test D54 (Point 8 "tests results-force measurement"; pages 22-24), ne permet donc pas à la chambre de douter de la reproductibilité de l'invention. En effet la jurisprudence constante permet un nombre raisonnable de tâtonnements et des échecs occasionnels, voir la JdCdR, II.C.5.6.1 et 2, et la reproductibilité n'est pas compromise lorsque la sélection de valeurs pour différents paramètres ne constitue qu'une mesure de routine, JdCdR, II.C.5.6.3. De l'avis de la chambre c'est le cas actuel, et elle ne voit donc aucune raison de renverser la charge de la preuve. Cela est d'autant plus vrai que la requérante n'a pas proposé de tests avec des variantes de la cage ou des dents dans le but d'obtenir un succès.

4.3 Pour ces raisons la chambre confirme la conclusion de la division d'opposition que le brevet divulgue l'invention revendiquée de façon suffisamment claire et complète pour que l'homme du métier puisse l'exécuter, Article 100b) CBE.

5. Nouveauté

5.1 Admission des documents présentés avec le recours

5.1.1 L'intimée conteste formellement l'admission des documents D50 et D51 ainsi selon les dispositions de l'Article 12(4) RPCR car ceux ci auraient du être fournis devant la division d'opposition.

5.1.2 La chambre constate néanmoins que ces documents ont été fournis avec le mémoire de recours au stade le plus précoce de la procédure de recours. De plus ils sont à première vue pertinents, puisque D1 se réfère explicitement à D50, qui vient préciser d'autre aspects de sa divulgation. D51 présente également une cage avec des aiguilles qui, a priori, apparaissent apte à retenir une capsule dans certaines conditions.

5.1.3 Pour ces raisons la chambre décide d'admettre les documents D50 et D51 selon L'article 114(2) CBE et 12(4) RPCR.

5.2 Nouveauté par rapport à D1.

La demande internationale D1 publiée le 23 juillet 2009 à une date identique à la date de priorité du présent brevet et appartient à l'état de la technique selon l'Article 54(3) CBE. D1 montre un mode de réalisation dans la figure 14 qui représente un épaulement du piston de fermeture 20 au niveau du joint à la base 19 de la cage. La description de la figure 14 à la page 7 précise qu'il s'agit d'une variante de joint d'étanchéité par rapport au dispositif de la figure 6. La figure 6 ne montre aucun épaulement, mais au contraire deux parois alignées, séparées par un vide annulaire. Il y a donc incohérence entre ces deux variantes d'une même cage, qui ne devraient différer que par leur joint d'étanchéité. Cela induit une ambiguïté sur la coopération exacte de la base de la cage 19 par rapport au piston 20 de cette cage, d'autant plus que la cage de la figure 14 n'est pas représentée en position fermée.

Devant cette ambiguïté et le manque d'information sur la position de fermeture pour la figure 14, l'homme du métier ne peut donc dériver un enseignement direct et non ambiguë sur le fait que cet épaulement existe et puisse être éventuellement déformant, et en combinaison avec une capsule déformable soit donc adapté à la retenir. Ceci est d'autant plus vrai que la chambre porte joint située entre le piston 20 et la base 19 est destinée à recevoir du liquide sous pression. Or ce liquide devrait exercer une force centripète sur la capsule et ainsi contrarier l'expansion de matière sur cet épaulement.

5.3 Nouveauté par rapport à D50.

Les mêmes conclusions s'imposent pour la divulgation de D50. Cette divulgation basée sur la figure 6 est similaire à celle de D1, en ce qu'un "évidement" 25 est représenté entre le piston 20 et la base de la cage 19. Selon la requérante les "évidements" 25 produiraient également le même effet de rétention lorsqu'une capsule déformable est utilisée. Pour les mêmes raisons qu'évoqué ci-dessus, l'homme du métier ne peut donc dériver aucun information directe et non ambiguë sur le comportement d'une capsule en matériau déformable utilisé dans ce dispositif.

5.4 Nouveauté par rapport à D51.

Selon la requérante les aiguilles d'injection et d'extraction de liquide représentées dans la figure 5 de D51 ont pour effet de déformer la paroi de la capsule et de la retenir dans la cage. Comme la revendication 1 ne précise pas à quel moment cette rétention doit être obtenue, la cage de D51 détruit la nouveauté du dispositif défini par cette revendication.

La chambre n'est pas convaincue par un tel argument. Même en considérant le perçage par les aiguilles comme une déformation de la capsule, ces aiguilles ne peuvent pas représenter des moyens déformants au sens de la revendication 1. En effet, elles ne peuvent pas être considérées comme étant du type harpon.

En outre la partie caractérisante de la revendication requiert que les moyens ne soient déformants, et n'opèrent donc la rétention que "consécutivement" à l'injection d'eau chaude, ce qui n'est pas le cas pour des aiguilles qui percent la capsule avant l'injection. Pour cette raison la chambre ne peut donc suivre l'interprétation de la requérante, qui considère que la revendication est silencieuse quant au moment où la rétention de la capsule doit être obtenue. Cette rétention doit être consécutive à l'injection d'eau chaude et donc se produire à la suite, et en conséquence à cette injection. Comme D51 ne comporte aucune indication sur la situation après l'extraction, aucune information claire et non ambiguë sur la déformation et donc la rétention par les aiguilles consécutivement à l'injection d'eau chaude n'est donc dérivable.

5.5 La requérante a également fait valoir par écrit que D3 possède la même priorité que celle revendiquée pour le brevet attaqué, qu'il y a donc épuisement du droit de priorité, et que le document D3 serait donc destructeur de nouveauté pour l'objet des revendications 1 et 2. La décision T15/01 (JO 2006, 153) a conclu que le même droit de priorité peut être valablement revendiqué dans plusieurs demandes de brevet européen et qu'il n'y a pas d'épuisement des droits de priorité (voir en particulier le point 41 de cette décision). Cette jurisprudence (suivie par cette chambre) s'applique au cas actuel où D3 correspond à une demande EP. Il s'ensuit que le document D3 ne fait pas partie de l'état de la technique selon l'article 54(3) CBE.

5.6 Pour ces raisons la chambre conclut que l'objet des revendications 1 et 2 est nouveau par rapport aux documents cités.

6. Activité inventive

6.1 En partant d'une cage de capsule bien connue de l'état de la technique qui n'a pas de relief de type harpon, la requérante a soumis que l'homme du métier utiliserait l'enseignement de D52 pour proposer une configuration de cage alternative. D52 divulgue un moyen de retenue sous forme d'une languette 19 apte selon le paragraphe 6, lignes 8 à 15 à déformer la capsule. Par la simple adaptation de cette languette comme moyen déformant du type harpon sur une cage de capsule standard, l'homme du métier arriverait de manière évidente à l'objet revendiqué.

6.2 La chambre ne peut suivre un tel raisonnement. D52 (sans préjuger de son admissibilité contestée) de prime abord concerne un dispositif d'extraction avec un porte-capsule amovible 13 servant à la manutention de la capsule (paragraphe 0001). Le paragraphe 0006, lignes 18 à 21 indique qu'après l'extraction du café la capsule est coincée dans une cage, avant qu'elle soit éjecté de la cage 1 en retirant la porte-capsule 13 (voir figures 1 et 2). Contrairement au brevet attaqué, D52 cherche à éviter la rétention de la capsule dans la cage. Même en partant du problème technique proposé par la requérante de simplement proposer une structure de cage alternative, l'homme du métier ne rechercherait a priori pas une solution dans D52 car celui-ci poursuit un effet technique et donc un but opposé.

La mise en oeuvre des moyens de rétention dans le porte capsule est également différente. La languette 19 de rétention est située sur le porte capsule, et facilite l'éjection de la capsule en dehors de la cage (paragraphe 6, lignes 21 à 23). La languette 19 du porte capsule ne retient pas la capsule lors du renversement (paragraphe 6, lignes 24-28). La déformation plastique de la capsule mentionnée dans le paragraphe 6, lignes 11-16 et avancée par la requérante pour soutenir que la languette serait également un moyen déformant au sens de la revendication 1, n'opère que par déformation mécanique due à la force d'insertion exercée sur le bord de la capsule au passage de la languette 19; elle est donc sans relation avec un ramollissement de celle-ci au contact d'eau chaude. En conséquence, D52 ne fournit aucune incitation à prévoir des moyens de rétention dans une cage, et la languette déformante -dans certains cas- proposée comme moyen de type harpon, ne l'est pas suite à l'injection d'eau chaude.

La chambre conclut donc que l'homme du métier cherchant à modifier une cage standard pour retenir certains types de capsules, ne chercherait pas de solution dans D52. S'il considérait néanmoins cet enseignement, il n'aurait aucune incitation à l'adapter dans une cage, puisque la languette est sur un porte capsule et ne permet pas l'étanchéité nécessaire à l'injection d'eau chaude.

6.3 Pour ces raisons la chambre conclut que l'objet de la revendication 1 implique une activité inventive.

7. Comme aucun des motifs soumis par la requérante ne s'oppose au maintient du brevet délivrée, elle confirme la décision de la division d'opposition.

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

Le recours est rejeté

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