T 1127/10 (Procédé de traitement capillaire et utilisation du procédé pour le … of 14.5.2013

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2013:T112710.20130514
Date de la décision : 14 Mai 2013
Numéro de l'affaire : T 1127/10
Numéro de la demande : 04290947.3
Classe de la CIB : A61K 8/68
A61Q 5/06
A61Q 5/12
Langue de la procédure : FR
Distribution : D
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Procédé de traitement capillaire et utilisation du procédé pour le lissage des cheveux
Nom du demandeur : L'Oréal
Nom de l'opposant : Kao Germany GmbH
Chambre : 3.3.07
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention Art 56
Mot-clé : Activité inventive, toutes les requêtes (non) : tests comparatifs non reproductibles et non significatifs
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0826/11
T 1962/12
T 0383/13
T 2304/16
T 1240/19

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n( 1 468 667 a été délivré sur la base de la demande européenne n( 04 290 947.3.

Le brevet a été délivré avec 16 revendications.

Le libellé de la revendication indépendante 1 s’énonce comme suit :

"1. Procédé de traitement capillaire comprenant les étapes consistant à :

appliquer sur les cheveux une composition contenant au moins un céramide dans un véhicule cosmétiquement acceptable,

élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC, et à rincer éventuellement les cheveux,

ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer."

II. L'intimée (opposante) a fait opposition à la délivrance de ce brevet européen et demande sa révocation en application de l'article 100 a) CBE, pour absence d’activité inventive.

III. Les documents suivants, cités au cours des procédures d’opposition et/ou de recours, restent pertinents pour la présente décision :

(1) JP-A-2000-256146

(2) Traduction anglaise du document (1)

(3) JP-A-9-132515

(4) Traduction anglaise du document (2)

(5) US-B-6 303 110

(6) DE-A-197 25 004

(7) Rapport d'essais comparatifs déposés par la requérante.

IV. Par la décision prononcée à la clôture de la procédure orale du 02 février 2010, la division d'opposition a révoqué le brevet (article 101(3)(b) CBE). Cette décision était basée sur le jeu de revendications du brevet tel que délivré pour la requête principale et des jeux de revendications des requêtes subsidiaires 1 et 2 déposés par la lettre datée du 4 janvier 2010.

La division d'opposition a considéré qu'aucune des requêtes ne répondait aux exigences de l'article 56 CBE.

Selon la division d'opposition, le problème posé par le brevet opposé était l'obtention de propriétés capillaires durables comme un excellent lissage des cheveux, une tonicité et une régénération de la fibre capillaire, une corporisation (ou texturisation) de la fibre et de bons résultats de démêlage et de douceur.

Le document (5) avait été considéré comme l'état de la technique le plus proche.

La différence entre l'objet de la revendication 1 du brevet opposé et le document (5) était l'application d'un fer plat ou rond pour élever la température des cheveux, ce fer chauffant à plus de 60ºC.

Selon la division d'opposition, les avantages invoqués par la titulaire concernant l'amélioration des propriétés de lissage avaient été étayés par des preuves suffisantes, sous la forme du rapport d'essais (7). L'application d'un fer chauffant à 60-220ºC était cependant connue des documents (2) et (4).

En ce qui concerne la requête subsidiaire 1, l'objet de la revendication 1 différait par le fait que la température à laquelle les cheveux sont soumis au moyen d'un fer chauffant était comprise entre 120 et 200ºC. La division d'opposition arrivait à la conclusion qu'il était évident pour l'homme du métier de modifier le procédé décrit dans le document (5) et d'y appliquer les températures décrites dans les documents (2) et (4).

En ce qui concerne la requête subsidiaire 2, la différence entre l'objet de la revendication 1 et le document (5) était l'utilisation d'une température comprise entre 120 et 200ºC et la présence d'une étape de pré-séchage des cheveux. La division d'opposition soulignait qu'aucun effet particulier n'était attaché à l'étape supplémentaire de pré-séchage. De surcroît, les documents (2) et (4) suggéraient également une telle étape.

V. La titulaire du brevet (requérante) a formé un recours contre cette décision.

VI. Le mémoire exposant les motifs du recours daté du 31 juillet 2010, était accompagné des requêtes subsidiaires 1, 2 et 3, ainsi que d'un rapport d'essais comparatifs, déjà déposé préalablement pendant la procédure d'opposition en première instance (document (7)). La requête principale correspondait aux revendications telles que délivrées.

VII. Par sa lettre datée du 11 février 2011, l'opposante (intimée) a fourni des arguments quant à l'activité inventive.

VIII. Par une lettre datée du 11 février 2013, la requérante a déposé de nouvelle requêtes subsidiaires 1 et 4. Les requêtes subsidiaires 1 et 2 déposées avec le mémoire de recours deviennent respectivement les requêtes subsidiaires 2 et 3.

Le libellé des revendications indépendantes des requêtes subsidiaires s’énonce comme suit, les différences par rapport à la requête principale étant mises en évidence :

a) Requête subsidiaire 1 :

"1. Procédé de traitement capillaire comprenant les étapes consistant à :

appliquer sur les cheveux une composition contenant au moins un céramide dans un véhicule cosmétiquement acceptable,

élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC, et à rincer éventuellement les cheveux,

ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer, et la température est comprise entre 60 et 220ºC"

b) Requête subsidiaire 2 :

"1. Procédé de traitement capillaire comprenant les étapes consistant à :

appliquer sur les cheveux une composition contenant au moins un céramide dans un véhicule cosmétiquement acceptable,

élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC, et à rincer éventuellement les cheveux,

ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer, et la température est comprise entre 120 et 200ºC"

c) Requête subsidiaire 3 :

"1. Procédé de traitement capillaire comprenant les étapes consistant à :

appliquer sur les cheveux une composition contenant au moins un céramide dans un véhicule cosmétiquement acceptable,

élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC, et à rincer éventuellement les cheveux,

ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer,

la température est comprise entre 120 et 200ºC, et

en ce qu'il comprend une étape supplémentaire de pré-séchage des cheveux avec un séchoir avant l'utilisation du fer"

d) Requête subsidiaire 4 :

"1. Procédé de traitement capillaire comprenant les étapes consistant à :

appliquer sur les cheveux une composition contenant au moins un céramide dans un véhicule cosmétiquement acceptable,

élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat [deleted: ou rond ], chauffant à plus de 60ºC, et à rincer éventuellement les cheveux,

ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer."

IX. Aux fins de la préparation de la procédure orale, la Chambre a envoyé une notification datée du 25 avril 2013. Dans cette notification, la Chambre a exprimé son avis préliminaire.

X. La procédure orale s'est tenue le 14 mai 2013.

XI. Les arguments suivants ont été avancés par la requérante :

L'invention se rapporte à un procédé de traitement capillaire, permettant d'améliorer les propriétés cosmétiques, en particulier le lissage des cheveux. Les essais comparatifs du document (7) montraient une amélioration respective quant au lissage des cheveux, de 22 et 12% pour les deux tests réalisés. Ces tests ont été réalisés par des testeurs ayant l'habitude de ce genre d'essais et les résultats obtenus étaient significatifs et ne pouvaient correspondre à une incertitude de mesure.

L'évaluation des résultats a été faite sur une échelle de 0 à 5, par évaluation sensorielle du lissage au toucher.

Le document (5) constituait l'état de la technique le plus proche, et se distinguait par une température de chauffage de 35 à 45ºC.

Le problème devait donc être vu comme une amélioration du lissage des cheveux et ce problème était résolu par l'objet de la revendication 1 de la requête principale.

L'étape de chauffage restait optionnelle dans le document (5) et n'était pas mentionnée dans les exemples 1 et 5 de ce document. L'homme du métier ne serait donc pas incité à augmenter la température, ni à consulter le document (2) pour y trouver la solution. Le document (5) se rapportait en effet à la formation de belles boucles (voir col. 2, l. 1-2 ou col. 3, l. 1), alors que le document (2) cherchait à raidir les cheveux frisés. La combinaison de ces deux enseignements n'était pas compatible, et il n'était pas possible d'associer ces documents.

La requérante a soutenu que l'invention cherchait à obtenir un lissage cosmétique, qui était différent d'un procédé de déformation capillaire, comme un raidissement des cheveux.

Ce lissage était obtenu par le contact direct avec le fer, alors que dans le document (5), on utilisait un casque. Ce type de fer n'était pas utilisable au-delà de 230ºC, et la limitation de la température de chauffage à cette valeur était donc intrinsèque à l'utilisation du fer.

Par ailleurs, une amélioration aurait lieu également à la température de 60ºC, car l'utilisation d'un fer permettait une action mécanique localisée, d'où une meilleure pénétration du céramide dans les cheveux.

En ce qui concerne la requête subsidiaire 1, la requérante n'a pas eu d'arguments supplémentaires.

Dans le contexte de la requête subsidiaire 2, la requérante a rappelé que le document (2) servait à défriser les cheveux et non à les lisser, et qu'il n'y avait pas d'incitation à remplacer le casque utilisé dans le document (5) par le fer utilisé dans le document (2).

Selon la requérante, l'ajout d'une étape de pré-séchage avait l'effet d'éviter les brûlures dues à l'important dégagement de vapeurs (voir par. [0032]). Le document (5) ne comportait pas cette étape de pré-séchage.

La requérante a argué que le fait d'utiliser un fer plat permettait d'améliorer encore plus le lissage des cheveux, d'où la présence d'une activité inventive pour la requête subsidiaire 4.

XII. Les arguments suivants ont été avancés par l'intimée à l'encontre du brevet attaqué :

Le document (5) devait être considéré comme l'état de la technique le plus proche, puisque se rapportant à un procédé de traitement capillaire par une composition comportant un céramide et un agent réducteur, permettant une déformation permanente des cheveux, et donc un lissage. La revendication dépendante 10 du brevet opposé se rapportait à l'ajout d'un agent réducteur dans la composition et donc au même type de composition.

Le traitement par la chaleur n'était pas optionnel dans le document (5), comme démontré par l'objet de la revendication 19, qui inclut explicitement une étape de chauffage.

Les procédés ne se différenciaient donc que par la température de chauffage utilisée.

Selon l'intimée, les tests comparatifs du document (7) ne démontraient pas que le procédé selon l'invention offrait un avantage, à des températures de l'ordre de 60ºC ou 300ºC.

Par ailleurs, l'intimée considérait que la description de la procédure et de l'évaluation des tests comparatifs étaient tels que l'homme du métier ne pourrait pas les reproduire. Le document (7) était silencieux quant aux critères de notation et à la constitution du panel de testeurs. Ce manque d'information ne permettait pas de reproduire les tests de façon valide et fiable.

Par ailleurs, les résultats des tests étaient très proches et peu représentatifs. Les résultats pouvaient très bien être compris dans l'intervalle de l'écart-type qui n'avait pas été donné.

Selon l'intimée, un test basé sur des photographies aurait été plus suggestif qu'un test réalisé par un panel de dix personnes.

L'intimée estimait également qu'il n'était pas possible de réduire l'enseignement de l'état de la technique le plus proche à une composition unique ou l'utilisation d'une température unique de 150ºC, basée sur un avantage technique prouvé d'une manière aussi incorrecte.

L'intimée était ainsi de l'opinion que le problème devait être reformulé comme la mise à disposition d'un procédé alternatif.

Cette solution était connue du document (2), que l'homme du métier associerait au document (5).

L'intimée n'avait pas d'arguments supplémentaires concernant la requête subsidiaire 1.

Pour la requête subsidiaire 3, l'intimée a rappelé que le document (2) comportait un exemple de chauffage à 180ºC.

En ce qui concerne la requête subsidiaire 3, le chauffage sous casque pouvait être considéré comme une étape de pré-séchage suivi d'un traitement par la chaleur.

L'intimée considérait qu'aucune amélioration n'avait été démontrée par l'utilisation d'un fer particulier, comme pour la requête subsidiaire 4.

XIII. Les requêtes suivantes ont été déposées :

La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet tel que délivré à titre de requête principale ou, alternativement, sous la forme de la requête subsidiaire 1 déposée par lettre du 11 février 2013, ou des requêtes subsidiaires 2 ou 3 déposées avec le mémoire de recours en tant que requêtes subsidiaires 1 et 2, ou de la requête subsidiaire 4 déposée par lettre du 11 février 2013.

L' intimée demande le rejet du recours.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Requête principale - Activité inventive

2.1 L'invention définie par l'objet revendiqué dans la requête principale concerne un procédé de traitement capillaire consistant à appliquer sur les cheveux une composition cosmétique contenant au moins un céramide et à élever la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à une température de 60ºC ou plus, ledit procédé étant caractérisé en ce que la composition n'est pas rincée avant le passage du fer.

Ce procédé permet de résoudre le problème d'altération de la qualité des cheveux dans les traitements de déformation permanente des cheveux, en particulier d'améliorer un toucher non satisfaisant (voir par. [0001]-[0006] du brevet attaqué). Ce procédé permet en particulier d'apporter des propriétés cosmétiques durables, comme un excellent lissage des cheveux, une tonicité et une régénération de la fibre capillaire, une corporisation de la fibre et de bons résultats de démêlage et de douceur (voir par. [0008] du brevet attaqué).

2.2 Le document (5) a pour objet un procédé de déformation permanente des cheveux consistant à appliquer une composition cosmétique contenant un céramide et un agent réducteur. La chevelure sur laquelle la composition réductrice a été appliquée doit ensuite subir une phase de pose, généralement entre 10 minutes et une heure, de préférence entre 20 et 40 minutes, à une température allant de 35 ºC à 45 ºC, de préférence en protégeant les cheveux d'un bonnet, de manière à donner le temps nécessaire à l'agent réducteur d'agir correctement sur les cheveux (voir col. 2, l. 3-7; col. 2, l. 64- col. 3, l. 5; col. 6, l. 59-67; col. 7, l. 44-45). Le procédé permet d'améliorer les propriétés cosmétiques des cheveux, quand ils subissent des traitements de déformation permanente.

Ce document ne divulgue donc pas une élévation de la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC.

Ce document est considéré comme constituant l'état de la technique le plus proche. Ce choix n'a été contesté ni par la requérante, ni par l'intimée.

2.3 Le problème à résoudre par la présente invention consiste à mettre au point un procédé permettant une amélioration du lissage des cheveux.

2.4 Comme solution à ce problème supposé, la revendication 1 de la requête principale propose un procédé de traitement capillaire comprenant en particulier l'élévation de la température des cheveux, au moyen d'un fer plat ou rond, chauffant à plus de 60ºC.

2.5 L'étape suivante consiste à examiner si le problème défini par rapport à l'état de la technique le plus proche a bien été résolu par l'objet revendiqué. Si tel n'est pas le cas, le problème doit être reformulé.

2.5.1 Etant donné qu'aucun des exemples du brevet contesté ne présentait des données expérimentales, la requérante a soumis à cet effet le document (7). Ce document présente deux séries d'essais comparatifs, à savoir une première série comparant le traitement par une composition selon l'invention opéré soit avec un fer chauffant à 150ºC (protocole A), soit avec un casque chauffant à 45ºC (protocole B), ainsi qu'une deuxième série comparant le traitement par une composition selon l'exemple 1 du document (5) également soit avec un fer chauffant à 150ºC (protocole A), soit avec un casque chauffant à 45ºC (protocole B).

Les résultats de la première série donnent un résultat de lissage de 3,85 dans le cas du protocole A et de 3,15 dans le cas du protocole B, sur une échelle allant de 0 à 5, d'où une amélioration de 22 % selon la requérante.

Les résultats de la deuxième série constituent une comparaison directe entre le procédé selon l'invention et le procédé selon l'enseignement du document (5), et donnent un résultat de lissage de respectivement 3,3 pour le protocole A et 2,95 pour le protocole B, sur le même système d'échelle. Selon la requérante, ce résultat permettait de constater une amélioration du lissage des cheveux de l'ordre de 12% en faveur du procédé selon l'invention pour la deuxième série.

2.5.2 La description de la procédure et de l'évaluation des tests comparatifs donnés dans le document (7) sont cependant à la fois déficients et insuffisamment significatifs pour permettre d'établir de façon crédible l'existence d'une amélioration.

Tout d'abord, tout essai comparatif présenté pour démontrer qu'une amélioration technique est obtenue par rapport à l'état de la technique le plus proche doit être reproductible sur la base des informations fournies, rendant de ce fait les résultats de tels essais directement vérifiables. La procédure pour répéter un essai doit en effet reposer sur des informations quantitatives et qualitatives permettant à l'homme du métier de reproduire lesdits essais de façon valable et fiable. Des instructions vagues et imprécises rendent l'essai inapproprié et non pertinent pour prouver l'existence de ladite amélioration technique.

En l'espèce, les informations données dans le document (7) sont lacunaires, en particulier quant aux critères de notation. Les seules indications données concernent les notes limites de 0 et de 5, soit respectivement "pas de glissant et fort contraste de douceur entre la racine et la pointe" et "glissant et mèche très homogène en toucher de la racine à la pointe". Le document ne comporte donc qu'une information limitée aux notes correspondants à 0 et 5 et aucune indication quant aux notes intermédiaires.

Ensuite, des tests comparatifs peuvent s'avérer non significatifs en cas d'absence d'informations quant à la distribution statistique des résultats sous la forme par exemple d'une analyse de l'écart-type ou de la variance, en particulier dans le cas où des résultats expérimentaux sont proches et/ou le panel de testeurs ou l'échantillon est restreint en nombre. Ce type d'information est généralement superflu dans le cas d'une différence numérique importante entre deux résultats, mais est essentiel pour comparer des valeurs proches et/ou obtenues sur un panel ou un échantillon restreint.

Dans le cas présent, les résultats expérimentaux présentés dans le document (7) ne comportent aucune information permettant de juger les résultats de façon objective, en raison de la présence de seulement un résultat global et de l'absence de toute indication quant à la répartition statistique des résultats expérimentaux.

Ainsi, dans le cas de la première série de tests, les résultats des protocoles A et B sont tous deux compris entre 3 et 4 et présentent une proximité qualitative de jugement des testeurs qu'il aurait fallu étayer par une analyse plus poussée des résultats statistiques.

Plus encore, il est impossible de conclure que les résultats présentés pour la deuxième série sur un panel de 10 testeurs, montrent une amélioration significative et réelle de 12 %, comme il a été argumenté par la requérante, en raison de la faible différence numérique du résultat final pour les protocoles A et B, en l'occurrence un résultat de respectivement 3,3 pour le protocole A et 2,95 pour le protocole B, en l'absence de toute indication quant à la répartition statistique des résultats expérimentaux.

2.5.3 La chambre note également que le test comparatif ne concerne qu'une température de chauffage de 150ºC, alors que le procédé de la revendication 1 touche une température de travail de l'ordre de 60ºC ou plus. Ces essais comparatifs ne sont donc pas en mesure de démontrer que les avantages techniques du procédé revendiqué vis-à-vis de l'état de la technique le plus proche sont obtenus sur toute la portée de la revendication 1, en particulier sur la plage inférieure de température de chauffage revendiquée.

2.5.4 Le document (7) ne constitue donc pas une preuve à l'appui de l'amélioration présumée.

En l'absence d'une preuve ou d'une argumentation technique établissant une plausibilité minimale quant à l'existence d'une amélioration, le problème technique doit être reformulé sous la forme de la mise à disposition d'un procédé alternatif permettant le lissage des cheveux.

Il est crédible que ce problème ait été résolu par le procédé de la revendication 1 de la requête principale.

2.6 La question qui se pose ensuite est de savoir si cette solution découlait à l'évidence de l'état de la technique disponible pour l'homme du métier.

Etant donné que le problème posé consiste en la mise à disposition d'un procédé alternatif, l'homme du métier modifierait le procédé existant de n'importe quelle manière de façon arbitraire, d'autant plus si cette solution était déjà connue.

Le document (2) se rapporte à des procédés de lissage des cheveux par application d'une composition de traitement capillaire comportant un agent réducteur et d'un traitement au fer porté à la température de 60-220ºC, comme par exemple 180ºC (voir par. [0023], [0033], [0040]).

Dans ces circonstances, l'homme du métier à la recherche d'une solution au problème tel que défini ci-dessus aurait été conduit par l'enseignement technique du document (2) à utiliser une température de 60ºC et plus selon la revendication 1 de la requête principale.

Il en ressort que la solution proposée par l'objet de la revendication 1 de la requête principale ne peut être considéré comme impliquant une activité inventive.

2.7 Arguments supplémentaires de la requérante

La requérante a argué du fait que les documents (5)et (2) ne pouvaient constituer des documents pertinents quant à la solution revendiquée par la revendication 1. La requérante faisait ainsi une distinction entre le lissage des cheveux, tel que revendiqué, et le raidissement des cheveux, tel que pratiqué dans l'art antérieur. Le document (2) se rapporte en effet a des procédés de traitement capillaire aboutissant au raidissement des cheveux ("hair straighthening").

Le document (5), quant à lui, avait pour objet la formation de boucles dans les cheveux (voir document (5), col. 3, lignes 1-6). Les deux documents ne pouvaient donc être associés techniquement en raison de cette différence.

La chambre ne peut pas suivre le raisonnement de la requérante selon lequel il faudrait faire une distinction entre lissage et raidissement des cheveux.

Ni l'enseignement du brevet contesté, ni celui des résultats expérimentaux du document(7) ne font en effet une distinction entre le lissage ou le raidissement des cheveux.

Par ailleurs, l'objet de la revendication 1 de la requête principale reste un procédé qui reste ouvert à des traitements capillaires complémentaires ou postérieurs, comme l'utilisation d'un agent réducteur selon la revendication dépendante 10, ou une étape supplémentaire de fixation avec un agent oxydant selon la revendication dépendante 15. Cette revendication ne peut aucunement être interprété de façon restrictive avec les seules caractéristiques qui y sont présentes.

2.8 Par conséquent, les conditions de l'article 56 CBE ne sont pas remplies pour la requête principale.

3. Requête subsidiaire 1 - Activité inventive

3.1 L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 diffère de la revendication 1 de la requête principale par la limitation en ce que "la température est comprise entre 60 et 220ºC".

Cette modification n'a aucune incidence quant au raisonnement et aux conclusions établis précédemment pour la requête principale, puisque ces plages de température étaient connues du document (2).

Les conditions de l'article 56 CBE ne sont pas remplies pour la requête subsidiaire 1.

4. Requête subsidiaire 2 - Activité inventive

L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 2 a été restreint par une plage de température plus réduite par rapport à la requête principale, à savoir "la température est comprise entre 120 et 200ºC".

La température de traitement de 180ºC étant exemplifiée dans le document (2), le raisonnement et les conclusions appliquées à la requête principale s'appliquent mutatis mutandis à la requête subsidiaire 2.

Les conditions de l'article 56 CBE ne sont pas remplies pour la requête subsidiaire 2.

5. Requête subsidiaire 3 - Activité inventive

L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 3 diffère de l'objet de la revendication 1 de la requête principale en ce que "la température est comprise entre 120 et 200ºC" et par l'ajout d'une étape, à savoir "et

en ce qu'il comprend une étape supplémentaire de pré-séchage des cheveux avec un séchoir avant l'utilisation du fer".

Le document (5) est toujours considéré comme constituant l'état de la technique le plus proche.

L'étape de pré-séchage ne modifie en rien les propriétés cosmétiques du produit et ne participe pas à une amélioration liée au lissage des cheveux. Elle a pour but d'éviter d'importants dégagements de vapeurs qui pourraient brûler les mains du coiffeur et le cuir chevelu du modèle (voir la description, par. [0032]).

Le problème consiste donc en la mise à disposition d'un procédé alternatif permettant le lissage des cheveux et d'éviter d'importants dégagements de vapeurs.

Étant donné que la plage de température revendiquée est la même que dans le document (2), la modification touchant la plage de température utilisée n'a aucune incidence sur la conclusion obtenue quant à l'activité inventive par rapport à la requête principale. Le choix de cette gamme de température est connu du document (2).

Par ailleurs, une phase de pré-séchage constitue un moyen évident pour l'homme du métier confronté à un problème d'humidification importante des cheveux et à des dégagements de vapeur excessifs lors de traitements capillaires.

Dans ces circonstances, l'homme du métier à la recherche d'une solution au problème tel que défini ci-dessus aurait été conduit par l'enseignement technique du document (2) à utiliser une température comprise entre 120 et 200ºC, et à rajouter une étape de pré-séchage selon la revendication 1 de la requête subsidiaire 3.

Il en ressort que la solution proposée par l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 3 ne peut être considéré comme impliquant une activité inventive.

Les conditions de l'article 56 CBE ne sont donc pas remplies pour la requête subsidiaire 3.

6. Requête subsidiaire 4 - Activité inventive

L'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 4 diffère de celui de la requête principale par la suppression du "fer rond" et la restriction au seul "fer plat" quant au moyen d'application de la chaleur.

L'état de la technique le plus proche reste le document (5).

Selon la requérante, l'utilisation d'un fer plat permettait d'améliorer encore plus la qualité du lissage capillaire. Aucune argumentation plausible ou preuve d'un tel effet amélioré n'a cependant été avancé, et les essais comparatifs du document (7) ne peuvent apporter aucun élément quant à un quelconque effet, puisque la nature du fer n'est pas précisée dans ce document.

Le raisonnement appliqué à la requête principale s'applique donc également à la requête subsidiaire 4.

Le problème à résoudre reste, comme pour la requête principale, la mise à disposition d'un procédé alternatif permettant le lissage des cheveux.

La solution proposée par la revendication 1 de la requête subsidiaire 4 est évidente. En effet la modification de la surface du fer constitue un choix arbitraire. Puisqu'un fer, dont la forme n'est pas indiquée, est également utilisé dans le document (2), l'utilisation de toute forme modifiée est évidente pour l'homme du métier.

Il en ressort que la solution proposée par l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 4 ne peut être considérée comme impliquant une activité inventive.

La requête subsidiaire 4 ne remplit pas les conditions de l'article 56 CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit:

Le recours est rejeté.

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