T 0196/10 () of 6.12.2012

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2012:T019610.20121206
Date de la décision : 06 Décembre 2012
Numéro de l'affaire : T 0196/10
Numéro de la demande : 00400776.1
Classe de la CIB : F17C13/06
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Capotage pour robinet de bouteille de gaz et bouteille de gaz équipée d'un tel ensemble robinet capoté
Nom du demandeur : L'Air Liquide, Société Anonyme pour l'Etude
et l'Exploitation des Procédés Georges Claude
Nom de l'opposant : Air Products and Chemicals, Inc.
GCE Holding AB
Chambre : 3.2.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 75(3)
European Patent Convention 1973 Art 76
European Patent Convention 1973 Art 76(1)
European Patent Convention 1973 Art 75(1)
European Patent Convention 1973 R 68(2)
European Patent Convention 1973 R 25
Mot-clé : Demande divisionnaire via un office national
Demande divisionnaire - statut en tant que demande divisionnaire
Demande divisionnaire - oui
Vice de procédure et remboursement de la taxe de recours - oui
Vice substantiel de procédure - motivation insuffisante
Vice substantiel de procédure - oui
Remboursement de la taxe de recours - oui
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0001/05
J 0018/86
T 0600/08
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 1878/14

Exposé des faits et conclusions

I. La requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre la décision de la division d'opposition par laquelle le brevet européen n° EP-A-1 026 438(ci-après le brevet en cause) a été révoqué.

II. Deux oppositions (opposantes 01 et 02) ont été formées contre le brevet dans son ensemble et toutes deux sont fondées sur l'article 100 a) CBE 1973 (manque de nouveauté, article 54 CBE 1973, et manque d'activité inventive, article 56 CBE 1973) et sur l'article 100 c) CBE 1973.

III. Dans son acte d'opposition, l'opposante 01 a, entre autres, soulevé la question de la validité du brevet en cause issu de la demande divisionnaire. Elle a estimé que le brevet en cause issu de la demande divisionnaire déposée le 21 mars 2000 à l'Institut National de la Propriété Industrielle à Paris (ci-après "INPI") et transmise à l'OEB ne pouvait bénéficier de la date de dépôt de la demande initiale, vu que la demande divisionnaire ne satisfaisait pas aux conditions de l'article 76(1) et 75(3) CBE 1973, lesquelles prévoient expressément le dépôt "direct" des demandes divisionnaires auprès de l'OEB.

IV. La division d'opposition a fait sienne cette objection et a décidé que "la demande fondant le brevet en objet n'[était] pas une demande divisionnaire et que le 21.03.2000 [était] considéré comme date de dépôt de la demande." Par voie de conséquence, tout document ayant une date comprise entre la date de dépôt de la demande initiale (3 juin 1996) et la nouvelle date de dépôt attribuée par la division d'opposition "est considéré comme compris dans l'état de la technique". Elle a conclu à la révocation du brevet en cause pour défaut de nouveauté au regard du document D14 qui est la demande de brevet européen initiale (= EP-A-0 747 796) rendue accessible au public par voie de publication le 11 décembre 1996.

V. La procédure orale devant la chambre de recours s'est tenue le 6 décembre 2012 en l'absence de l'intimée II (opposante 02) qui avait été dûment citée. Conformément à la règle 115 (2) CBE, la procédure fut poursuivie en son absence.

VI. La requérante (titulaire du brevet) a demandé l'annulation de la décision contestée et le renvoi de l'affaire en première instance, avec en tant que requête principale le maintien du brevet tel que délivré et en tant que requêtes subsidiaires, le maintien du brevet sous une forme modifiée sur la base d'une des requêtes auxiliaires 1 à 7 discutées le 11 novembre 2009 au cours de la procédure orale devant la division d'opposition et annexées à la décision contestée. D'autre part, elle a demandé le remboursement de la taxe de recours.

L'intimée I (opposante 01) a demandé le rejet du recours et, à titre subsidiaire, au cas où la Chambre décidait d'annuler la décision attaquée, le renvoi de l'affaire en première instance et, au cas où la division d'opposition n'aurait pas la compétence de modifier la décision de délivrance, que cette affaire soit renvoyée devant la division d'examen.

L'intimée II (opposante O2) ne s'est pas exprimée par écrit au cours de la procédure de recours.

VII. Les arguments de la requérante, présentéspar écritet au cours de la procédure orale, peuvent être résumés comme suit :

Le dépôt auprès de l'INPI de la demande divisionnaire à l'origine du brevet en cause est une irrégularité mineure qui devient caduque dès que la demande parvient à l'OEB et au plus tard dès que le brevet est délivré. Comme l'INPI a immédiatement transmis la demande divisionnaire à l'OEB et que celle-ci est parvenue à l'OEB dans les conditions fixées par la règle 25(1) CBE 1973 applicable en l'espèce, son statut en tant que demande divisionnaire est valide.

La décision de la division d'opposition n'est pas suffisamment motivée, parce que tous les faits de l'espèce n'ont pas été pris en compte. Il y a donc un vice substantiel de procédure qui justifie le remboursement de la taxe de recours.

VIII. Les arguments de l'intimée O1, présentés par écritet au cours de la procédure orale, peuvent être résumés comme suit :

Le statut en tant que demande divisionnaire de la demande de brevet à l'origine du brevet en cause est contesté. Un office national n'est pas un simple service de poste, de transmission de courrier ou de livraison de pièces et par conséquent, sa tâche de faire suivre une demande de brevet à l'OEB diffère de façon substantielle d'un tel service, notamment en délivrant un numéro à la demande déposée et en apposant sur les pièces de la demande une date de réception.

La condition de l'article 76(1) CBE 1973 selon laquelle "une demande divisionnaire de brevet européen doit être déposée directement auprès de l'Office européen des brevets à Munich ou de son département à La Haye" n'a donc pas été satisfaite. Le libellé de cette disposition ("?doit être déposée directement?") est sans équivoque. Le fait que la case 35 "la demande est une demande divisionnaire" du formulaire 1001 ait été cochée ne constitue qu'une requête que l'OEB, à savoir la section de dépôt, doit rejeter si les conditions pour une demande divisionnaire ne sont pas satisfaites. Dans le cas présent, l'indication à la case 35 du formulaire 1001 qu'il s'agirait d'une demande divisionnaire n'est pas appropriée pour une demande de brevet (non-divisionnaire) déposée auprès de l'INPI et à laquelle l'INPI a attribué expressément un numéro de dépôt comme à toute demande de brevet (non-divisionnaire). Par conséquent, lorsque l'INPI a transmis la demande en cause à l'OEB, ce ne peut être qu'en tant que demande de brevet (non-divisionnaire).

La demanderesse, représentée par un mandataire agréé, sait qu'elle peut déposer une demande de brevet non-divisionnaire auprès de l'INPI et doit déposer une demande divisionnaire directement auprès de l'OEB. L'OEB ne peut pas corriger une erreur commise par la demanderesse.

Le brevet en cause est donc issu de la demande 00400776.1 (non-divisionnaire) déposée auprès de l'INPI le 21 mars 2000 à laquelle doit être attribuée la date de dépôt du 21 mars 2000, sachant qu'à cette date l'ensemble des conditions pour l'attribution d'une date de dépôt étaient remplies.

La décision de la division d'opposition est suffisamment motivée, puisqu'il apparaît clairement qu'en l'espèce, il s'agit d'un dépôt d'une demande (non-divisionnaire) auprès de l'INPI. Il y a donc pas de vice de procédure.

Motifs de la décision

1. Statut de la demande de brevet à l'origine du brevet en cause

1.1 Demande divisionnaire et lieu de dépôt - Article 75 CBE 1973 (applicable en l'espèce):

"(1) La demande de brevet européen peut être déposée :

a) soit auprès de l'Office européen des brevets à Munich ou de son département à La Haye;

b) soit, si la législation d'un État contractant le permet, auprès du service central de la propriété industrielle ou des autres services compétents de cet État. Une demande ainsi déposée a les mêmes effets que si elle avait été déposée à la même date à l'Office européen des brevets.

(2) ...

(3) Aucun État contractant ne peut prévoir ni autoriser le dépôt d'une demande divisionnaire de brevet européen auprès d'une autorité visée au paragraphe 1, lettre b)".

Selon l'article 75(3) CBE 1973, les demandes divisionnaires doivent obligatoirement être déposées auprès de l'OEB. Les États contractants ne peuvent ni permettre ni exiger que les demandes divisionnaires soient déposées auprès de leurs administrations nationales. Si une demande divisionnaire est adressée à une administration nationale, celle-ci n'est pas tenue de la transmettre à l'OEB. Cependant, si elle la transmet en application des principes de bonne coopération entre les autorités administratives, cette demande aura comme date de réception la date à laquelle celle-ci parvient à l'OEB. En d'autres termes, ce n'est qu'à partir du moment où des documents constituant une demande divisionnaire sont reçus à l'OEB, qu'ils sont traités comme dépôt d'une demande divisionnaire. Cette conclusion est d'ailleurs inscrite dans les Directives relatives à l'examen, partie A, chapitre IV, point 1.3.1.

Des travaux préparatoires de la CBE 1973, il ressort que ce n'est qu'à la conférence intergouvernementale pour l'institution d'un système européen des brevets en novembre 1971 qu'il a été décidé de prévoir expressément dans le texte de la CBE que les demandes divisionnaires ne peuvent être déposées qu'auprès de l'OEB et d'exclure par voie de conséquence leur dépôt auprès des administrations nationales ("?Le Groupe, après délibération, a préféré retenir une solution consistant à prévoir que le dépôt des demandes divisionnaires ne peut intervenir qu'auprès de l'Office européen des brevets et qu'aucun Etat ne pourra donc prévoir ou autoriser le dépôt de telles demandes auprès du service central de la propriété industrielle."). Des considérations liées à l'examen de la demande initiale par l'office national au regard des dispositions nationales concernant la mise au secret, la transmission de la demande initiale et de la demande divisionnaire à l'OEB et, le cas échéant, à l'effet juridique produit si la demande divisionnaire devait être déposée auprès de l'administration nationale (la demande divisionnaire comme la demande de brevet initiale aurait été réputée retirée, article 77(5) CBE 1973 en cas de non-transmission) ont amené le législateur, par souci de clarté, à interdire le dépôt de demandes divisionnaires auprès des administrations nationales. Voir document BR/144/71 en date du 16 décembre 1971, point 18.

1.2 Dans la présente espèce, la demande de brevet à l'origine du brevet en cause a été déposée, comme l'atteste le formulaire 1001, à l'INPI le 21 mars 2000 (tampon sur le formulaire 1001.6), laquelle a été transmise par l' INPI à l'OEB qui l'a reçue le 30 mars 2000 (tampon dans la case 3 du formulaire 1001.1). À la rubrique 35 du formulaire 1001 il est clairement indiqué par la case cochée que la demande de brevet européen déposée constitue une demande divisionnaire; le numéro indiqué à cette rubrique (N° 96 401 179.5) est celui de la demande initiale. À la rubrique 25 du formulaire 1001, la priorité revendiquée est celle de la demande initiale. À la rubrique 32 du formulaire 1001, les États contractants désignés sont ceux de la demande initiale; il y a, d'autre part, identité de demandeur (voir rubriques 7 à 9 du formulaire 1001).

1.3 De l'ensemble de ces informations, il ne peut être que conclu d'une manière objective que la demande de brevet à l'origine du brevet en cause est une demande divisionnaire qui, par erreur, a été déposée auprès d'une administration nationale - première erreur - et à laquelle l'administration, en l'espèce l'INPI, a attribué un numéro de demande de brevet au sens de l'article 75(1) b) CBE 1973 (N° 00 400 776.1)- deuxième erreur -laquelle attribution n'a pas été expressément rectifiée ou annulée par voie de notification par la section de dépôt - troisième erreur -.

1.4 Du dossier, il ressort toutefois clairement que la section de dépôt, qui a la compétence exclusive pour l'attribution de la date de dépôt (voir en ce sens J 18/86, JO OEB 1988, 165), a, dès réception de la demande de brevet européen, attribué à cette demande, reçue à l'OEB le 30 mars 2000 comme date de dépôt, la date de dépôt de la demande initiale soit le 3 juin 1996 et indiqué sur la page de garde de la demande telle que publiée (fascicule A1) l'information selon laquelle la demande de brevet européen est une demande divisionnaire.

1.5 La chambre de recours souscrit à l'allégation de l'intimée I (opposante O1), selon laquelle la date "21 - 03 - 2000" indiquée sous l'entête "Remarques" de la publication EP 1 026 438 A1 comme date de dépôt est incorrecte - quatrième erreur -. Il aurait du être mentionnée le 30 mars 2000, date de réception de la demande divisionnaire auprès de l'OEB. Selon la chambre, il ne s'agit toutefois que d'une erreur de date. De la page de garde de la demande telle que publiée, il apparaît toutefin clairement que la section de dépôt a traité cette demande comme une demande divisionnaire.

1.6 Demande divisionnaire et demande initiale en instance - règle 25 CBE 1973

Pour qu'une demande divisionnaire puisse être traitée comme demande divisionnaire, il faut que celle-ci soit déposée tant que la demande initiale est encore en instance. En l'espèce, la règle 25 CBE 1973 s'applique, dont le libellé est le suivant:

Règle 25 CBE 1973 "Dépôt et conditions de la demande divisionnaire européenne

(1) Le demandeur peut déposer une demande divisionnaire relative à toute demande de brevet européen antérieure encore en instance."

La notification établie conformément à la règle 51(4) CBE 1973 pour la demande initiale antérieure N° 96 401 179.5 porte la date du 30 mars 2001 et la mention de la délivrance a été publiée le 17 octobre 2001. L'envoi des documents via l'INPI a eu pour effet de reporter la date de réception à l'OEB du 21 mars 2000, date de réception à l'INPI (tampon sur le formulaire 1001.6), au 30 mars 2000. La demande initiale antérieure était donc encore en instance le 30 mars 2000, date à laquelle la demande divisionnaire a été reçue à l'OEB.

La Chambre note que ce point n'est d'ailleurs pas contesté par l'intimée I (opposante O1) (Lettre du 15 mai 2010, page 2, lignes 4 et 5).

1.7 La Chambre ne peut, de ce fait, que conclure, comme la section de dépôt, que la présente demande satisfait aux conditions énoncées à l'article 76(1), première phrase CBE 1973, ensemble la règle 25(1) CBE 1973. La demande de brevet à l'origine du brevet en cause est donc une demande divisionnaire.

Pour les éléments qui ne s'étendent pas au-delà du contenu de la demande antérieure telle que déposée, elle est considérée comme déposée à la date de dépôt de la demande initiale et bénéficie du droit de priorité (article 76(1), deuxième phrase CBE 1973).

Le brevet en cause étant considéré comme déposé à la date de dépôt de la demande initiale antérieure, celle-ci (document D14 = EP-A-0 747 796) ne fait pas partie de l'état de la technique pour le brevet en cause.

Au vu de ce qui précède, la décision de la division d'opposition doit donc être annulée.

1.8 De façon superfétatoire, la Chambre souligne qu'une demande déposée comme demande divisionnaire peut soit être traitée comme demande divisionnaire soit ne pas être traitée comme demande divisionnaire. Dans ce dernier cas, une procédure en vue de la délivrance d'un brevet ne peut avoir lieu. L'attribution ultérieure de la date de réception de la demande divisionnaire comme date de dépôt d'une nouvelle demande n'est pas prévue par le législateur. Voir en ce sens G 1/05, JO OEB 2007, 362, motifs de la décision no 11.1; T 600/08 du 17 novembre 2011, motifs de la décision no 2.3). Même si la section de dépôt lors de l'examen quant aux formes, voire la division d'examen lors de l'examen quant au fond avait traité à tort la demande en cause comme demande divisionnaire et que la délivrance du brevet en fut suivi, la division d'opposition n'a compétence à réexaminer le bien-fondé de la délivrance du brevet européen que dans le cadre très strict des motifs d'opposition limitativement fixés à l'article 100 CBE 1973.

2. Remboursement de la taxe de recours - règle 67 CBE 1973 (applicable en l'espèce)

Selon la Chambre de recours, la décision rendue par la division d'opposition est insuffisamment motivée et par conséquent, ne satisfait pas aux conditions exigées par la règle 68(2) CBE 1973 applicable en l'espèce. La division d'opposition s'est limitée à réciter certaines dispositions juridiques applicables sans tenir compte des circonstances et de l'ensemble des faits objectifs de la présente espèce. Ainsi, par exemple, elle n'a pas pris en considération l'éventuelle erreur du demandeur lors du dépôt de la demande divisionnaire auprès de l'administration nationale, le contexte de la transmission de la demande de brevet en cause par l'INPI considérée comme demande divisionnaire ou demande initiale, l'indication claire et non équivoque de l'ensemble des rubriques du formulaire 1001 et notamment de la rubrique 35 concernant le renvoi explicite à la demande initiale. Une décision suffisamment motivée tenant compte de l'ensemble des faits de la cause aurait permis à la requérante et à la Chambre de recours de comprendre pour quels motifs la division d'opposition a pu décider de ne pas traiter la demande en cause comme demande divisionnaire. Le non-respect de la condition de la suffisance de la motivation, prescrit à la règle 68(2) CBE 1973, constitue un vice substantiel de procédure qui justifie - les autres conditions de la règle 67 CBE 1973 applicable en l'espèce étant également remplies - le remboursement de la taxe de recours, l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de l'affaire à la première instance (article 111(1) CBE 1973).

Dispositif

Par ces motifs, il est statué comme suit

1. La décision attaquée est annulée.

2. Le brevet en cause est issu de la demande divisionnaire 00400776.1 et est considéré comme déposé à la date de dépôt de la demande initiale.

3. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de poursuivre la procédure.

4. Il est fait droit au remboursement de la taxe de recours

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