European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2012:T054609.20120307 | ||||||||
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Date de la décision : | 07 Mars 2012 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 0546/09 | ||||||||
Numéro de la demande : | 03718907.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | B60N 2/70 A47C 7/18 |
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Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | D | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Matelassure en mousse souple de melamine et ses applications | ||||||||
Nom du demandeur : | J.S.O. | ||||||||
Nom de l'opposant : | METZELER SCHAUM GMBH BASF SE |
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Chambre : | 3.2.01 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Activité inventive - requête principale et subsidiaires 1 et 2 (non) Clarté - requêtes subsidiaires 3 à 6 - (non) |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Par décision rendue le 22 décembre 2008, la division d'opposition a révoqué le brevet européen nº 1 478 545 pour défaut d'activité inventive de son objet au vu de l'état de la technique représenté, entre autres, par le document suivant:
D6: Weber und Krückau, Neuer elastischer Schaumstoff auf Basis Melaminharz, Kunststoffe 75 (1985) 11
II. En date du 26 février 2009, la requérante (titulaire du brevet) a formé un recours contre cette décision et réglé simultanément la taxe de recours. Le mémoire dûment motivé a été déposé le 22 avril 2009.
III. Une procédure orale s'est tenue devant la Chambre le 7 mars 2012.
La requérante, comme elle l'avait annoncé dans sa lettre en date du 8 février 2012, n'a pas comparu. Elle a demandé par écrit l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet européen tel que délivré (requête principale et requête subsidiaire 1 formulées avec le mémoire exposant les motifs du recours), ou l'annulation de la décision attaquée et le maintien du brevet européen sous la forme modifiée selon l'une des requêtes subsidiaires 2 à 6 déposée avec le mémoire exposant les motifs du recours.
L'intimée 01 (opposante 01) a demandé le rejet du recours.
L'intimée 02 (opposante 02) n'a pas comparu, comme annoncé par téléphone au greffe le jours de la procédure orale, et a demandé par téléfax de la même date, le report de la procédure orale pour cause de maladie subite de son représentant. L'intimée 02 a demandé le rejet du recours dans ses écritures.
IV. La revendication 1 du brevet tel que délivré (requête principale et requête subsidiaire 1) se lit comme suit:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine de dureté, mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, et dite mousse souple de mélamine."
La revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 est la suivante:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine, dite mousse souple de mélamine stabilisée, de dureté mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%."
La revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 est la suivante:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine, dite mousse souple de mélamine stabilisée, de dureté mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, cette dureté étant adaptée pour pouvoir subir, après 80 000 cycles à 75 daN conformément à la norme ISO 3385, une perte de dureté inférieure à 25% -typiquement de l'ordre de 19,5%."
La revendication 1 selon la requête subsidiaire 4 est la suivante:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine, dite mousse souple de mélamine stabilisée, de dureté mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, cette mousse souple de mélamine étant adaptée pour pouvoir subir, après 80 000 cycles à 75 daN conformément à la norme ISO 3385, une perte de dureté inférieure à 25% -typiquement de l'ordre de 19,5%-."
La revendication 1 selon la requête subsidiaire 5 est la suivante:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine, dite mousse souple de mélamine stabilisée, de dureté mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, ladite mousse souple de mélamine stabilisée présente une dureté stabilisée par un processus de préfatigue consistant à la soumettre à des compressions successives, cette dureté étant ensuite sensiblement constante au cours du temps."
La revendication 1 selon la requête subsidiaire 6 est la suivante:
"Matelassure, caractérisée en ce qu'elle comprend au moins une portion de mousse formée d'une mousse de mélamine, dite mousse souple de mélamine stabilisée, de dureté mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, ladite mousse souple de mélamine stabilisée présente une dureté stabilisée par un processus de préfatigue consistant à la soumettre à des compressions successives, cette dureté étant ensuite constante."
V. Au soutien de son action, la requérante a, sur la base de ses écritures, développé pour l'essentiel l'argumentation suivante:
Requête principale
La division d'opposition a révoqué le brevet européen au vu du document D6. Or l'intimée 02 n'a communiqué en procédure d'opposition qu'une photocopie de D6 et n'a pas rapporté la preuve de la date de publication de cet article. Rien ne prouve également que D6 ait fait l'objet d'une divulgation publique, et, par exemple, n'est pas uniquement une documentation interne à la société BASF. Dans ces conditions, la chambre devrait considéré le document D6 tel que produit par l'intimée 02 comme n'appartenant pas à l'état de la technique opposable au brevet européen mis en cause, et, pour ce seul motif, devrait annuler la décision de la division d'opposition et maintenir le brevet dans sa forme délivrée (requête principale).
Requête subsidiaire 1
La division d'opposition a considéré que D6 suggère de façon explicite à l'homme du métier la possibilité d'utiliser de la mousse de mélamine comme matelassure et que, placé devant le problème de développer une telle matelassure, l'homme du métier arriverait automatiquement à réaliser des tests de préfatigue tel que décrit dans D6 pour arriver à une dureté en indentation conformes à la revendication 1.
Ce faisant, la division d'opposition a effectué une analyse rétrospective de D6 au vu de la connaissance de l'invention, objet de la revendication 1 du brevet européen en cause.
En effet, D6 porte sur une mousse élastique à base de résine de mélamine ayant une résistance élevée aux températures, un comportement au feu favorable et une grande résistance aux attaques chimiques. D6 indique que cette mousse à alvéoles ouvertes est obtenue à partir d'une matière initiale rigide et cassante et peut être utilisée dans de nombreuses applications dans le domaine de l'isolation thermique, de l'insonorisation mais aussi comme matériau de rembourrage et d'emballage. D6 décrit en réalité le BASOTECT traditionnel (page 843 colonne de gauche, deuxième alinéa, avant-dernière ligne).
D6 mentionne également que l'élasticité physique de la mousse est obtenue à partir de la résine de mélamine friable, au moyen d'un traitement consécutif mécanique et thermique. Par exemple, dans les résultats montrés dans la figure 8, D6 mentionne une modification des propriétés après compression à 40 %. Ce traitement initial de compression bien connu dans l'état de la technique dans la fabrication de matériaux polymères en mousse n'a rien à voir avec le procédé de fabrication d'une mousse de mélamine conforme à la revendication 1. Il ne s'agit pas de "tests de préfatigue" comme l'indique la division d'opposition, suggérant par là une similarité avec le procédé de fabrication décrit dans la description du brevet européen. En réalité, la division d'opposition n'indique pas en quoi consisteraient les "tests de préfatigue" que l'homme du métier effectuerait de façon routinière selon elle pour obtenir la mousse selon la revendication 1, ni pourquoi l'homme du métier aurait effectué un tel procédé de préfatigue de façon routinière. Or, rien en l'état de la technique, ni surtout dans D6 ne permettent de penser qu'il était possible d'obtenir une mousse de mélamine adaptée pour présenter les caractéristiques de dureté en indentation telles que revendiquées, et pour pouvoir faire office de matelassure, ce qui suppose également que ces caractéristiques se maintiennent dans le temps avec une qualité suffisante. Ainsi, ce qui est surprenant et inattendu pour l'homme du métier n'est pas que les caractéristiques mécaniques de la mousse puissent changer après fabrication lorsqu'on la soumet à une ou plusieurs compressions, mais surtout qu'après un certain nombre de cycles de compression tels que mentionnés dans la description du brevet européen, on obtienne une mousse de mélamine suffisamment souple en indentation avec des valeurs qui restent ensuite constantes dans le temps.
Le document D6 lui-même, dans le passage cité par l'intimée 02 (page 846 colonne de gauche "Mechanische Eigenschaften"), s'interroge sur la question de savoir si la mousse de mélamine est également adaptée pour être utilisée à titre de matériau de matelassure. En effet, D6 mentionne que, après des mises au point spécialement optimisées pour ce type d'application, il est constaté des pertes d'épaisseur de 2 % à 5 % et une diminution du durcissement sous les efforts de l'ordre de 12 à 17 % après 10**(6)cycles de sollicitations entre 200 et 600 N pour un diamètre de poinçonnage de 250 mm. Ce passage n'indique en aucune manière qu'il était possible d'obtenir une mousse de mélamine ayant une dureté en indentation inférieure à 300 N mesurée selon la norme ISO 2439B ni, surtout, que ce faisant, on obtenait une mousse de propriétés mécaniques stabilisées dans le temps. Au contraire, au vu des résultats de ces essais, l'homme du métier s'attend à une absence totale de stabilisation, puisque D6 enseigne que la mousse subit encore une baisse de durcissement importante après 10**(6) cycles de sollicitations. Ainsi, ce passage de D6 dissuade l'homme du métier de la possibilité d'utiliser une mousse de mélamine comme matériau de matelassure. En outre, ce même passage indique que l'utilisation de la mousse de mélamine à titre de matériau pour matelassure pose des difficultés a priori et nécessite des mises au point et des phases d'optimisation, qu'il n'indique cependant pas. Or c'est précisément l'objet de l'invention revendiquée que d'avoir réussi, pour la première fois, à effectuer ces mises au point et optimisations.
Dans le passage intitulé "Sonstige Anwendungen" (autres applications), D6 indique que les avantages en matière de poids et le comportement favorable au feu ont donné l'idée de tester la mousse de mélamine comme rembourrage de siège pour les avions et que les résultats d'un test pratique d'une durée de trois semaines réalisé dans des avions longs courriers sont extrêmement prometteurs. Ce passage montre que l'homme du métier avait envisagé d'utiliser de la mousse de mélamine à titre de rembourrage de siège d'avion, mais qu'il y a renoncé depuis, étant donné que D6 remonte à 1985 et qu'avant l'invention du brevet européen en cause, il n'était pas parvenu à conférer à cette mousse de mélamine des propriétés en dureté en indentation suffisamment faible et compatibles avec une telle application. À ce titre, D6 n'est pas plus pertinent que les documents pris en compte dans le cadre de la procédure d'examen qui décrivaient déjà l'incorporation d'inserts de mousse de mélamine dans une garniture de siège, à titre d'éléments de rembourrage de renfort. En tout état de cause, D6 n'indique en aucune manière dans ce passage qu'il serait possible d'utiliser une mousse de mélamine modifiée de façon à lui conférer des propriétés de dureté en indentation telles que revendiquées, complètement inconnues à cette époque pour la mousse de mélamine, et compatibles avec une utilisation à titre d'élément de confort, c'est-à-dire qui restent stables dans le temps. Pour s'en convaincre, il suffit de constater que depuis la date de publication de D6, aucune application pratique d'une telle mousse de mélamine n'a pu être faite dans une matelassure à titre d'élément de confort, c'est-à-dire présentant une dureté en indentation adaptée à une telle application (alors que D6 prétend que les essais étaient très prometteurs, ce qui signifie en réalité qu'ils n'étaient pas complètement satisfaisants).
La division d'opposition mentionne aussi le passage de la page 844, colonne de gauche, lignes 8 à 15 en liaison avec la figure 8 de D6. Néanmoins, elle admet elle-même qu'il n'est pas établi que la mousse de mélamine comprimée comme décrit dans ce document devrait avoir des caractéristiques proches ou identiques de celles de la mousse de la revendication 1. En l'occurrence, des preuves certaines de la divulgation ou de l'enseignement des caractéristiques revendiquées dans l'état de la technique n'ont pas été apportées et tout doute en la matière doit bénéficier au breveté. En conséquence, le brevet européen n'aurait pas dû être révoqué comme l'a fait la division d'opposition au motif qu'il semblerait qu'un document antérieur enseigne les caractéristiques revendiquées, tout en admettant que cela n'a pas été établi de façon absolue. La démarche de la division d'opposition a été manifestement inspirée par la connaissance rétrospective de l'invention. L'homme du métier n'était en aucune façon motivé par le passage de la page 844 et la figure 8 de D6, pour considérer qu'une mousse de mélamine pouvait être assouplie et stabilisée à une valeur permettant sa réelle application à titre de matelassure. Au demeurant, tous les documents de l'état de la technique concernent en réalité la mousse de mélamine traditionnelle, et n'enseignent à l'homme du métier que le fait que cette mousse est rendue élastique après fabrication par une première compression initiale.
En conséquence, la revendication 1 du brevet européen tel que délivré implique une activité inventive au vu de D6, même en supposant qu'il soit prouvé que ce document appartienne bien à l'état de la technique.
Requête subsidiaire 2
Cette requête subsidiaire correspond à la requête subsidiaire 1 déposée devant la division d'opposition. Contrairement à ce qu'indique la division d'opposition, la revendication 1 de cette requête ne diffère pas uniquement de la requête principale par les dénominations apportées à la mousse, mais au contraire par la caractéristique selon laquelle la dureté est stabilisée à la valeur revendiquée. Comme indiqué ci-dessus en relation avec la requête principale, une telle stabilisation de la valeur de dureté n'était pas connue de l'homme du métier, et en particulier n'était en aucune manière suggérée par D6. Cette caractéristique est totalement surprenante pour l'homme du métier. Cette stabilisation ne découlait en aucune manière de façon évidente de l'état de la technique pour un homme du métier, de sorte que la revendication 1 de cette requête subsidiaire implique une activité inventive.
Requête subsidiaire 3
Cette requête subsidiaire correspond à la requête subsidiaire 2 déposée devant la division d'opposition. Là encore, la division d'opposition omet de considérer la notion de stabilisation de dureté, et se contente de constater que la perte de dureté mentionnée par D6 de l'ordre de 12 à 17 % serait comparable aux 25 % revendiqués. Or, la revendication 1 de cette requête ne revendique pas une perte de dureté de l'ordre de 25 %, mais au contraire d'une part qu'il existe une valeur de dureté inférieure à 300 N pour laquelle cette dureté est stabilisée, et, d'autre part, le fait que cette valeur de dureté stabilisée soit inférieure à 25 %, typiquement de l'ordre de 19,5 %. L'expression "cette dureté étant adaptée" indique clairement ce qui précède. Comme indiqué ci-dessus en relation avec la requête principale, D6 n'enseigne en aucune manière la possibilité d'obtenir une dureté stabilisée présentant cette valeur, de sorte que la revendication 1 de cette requête subsidiaire implique une activité inventive.
Requête subsidiaire 4
Cette requête subsidiaire correspond à la requête subsidiaire 3 ci-dessus, mais dans laquelle l'expression "cette dureté étant adaptée" a été remplacée par "cette mousse souple de mélamine étant adaptée", et ce afin de répondre à l'objection de clarté soulevée dans la décision de la division d'opposition. L'expression modifiée devrait être maintenant parfaitement claire.
Requête subsidiaire 5
Cette requête subsidiaire correspond à la requête subsidiaire 3 déposée devant la division d'opposition. Contrairement à ce qu'indique la division d'opposition, l'expression "cette dureté est ensuite sensiblement constante au cours du temps" est parfaitement claire. Tout d'abord, l'expression "sensiblement" en liaison avec une donnée quantitative dans une revendication signifie qu'il ne faut pas considérer cette donnée comme marquant une discontinuité abrupte, par exemple au début ou à la fin d'une plage revendiquée. Toutefois, cette expression ne doit pas être confondue avec l'expression "approximativement" qui pourrait effectivement apparaître indéfinie. "Sensiblement" contient au contraire une idée de précision puisque cette expression signifie que l'on ne doit pas s'écarter de façon appréciable par l'homme du métier de la caractéristique quantitative mentionnée.
Dans le cas présent, l'expression "sensiblement constante" est parfaitement claire et signifie que la dureté est suffisamment constante pour qu'un homme du métier ne constate pas de variations de dureté, même si, du point de vue strict, de telles variations peuvent effectivement se présenter.
Requête subsidiaire 6
Cette requête subsidiaire correspond à la requête subsidiaire nº 5 ci-dessus, mais dans laquelle les expressions dont la clarté est critiquée par la division d'opposition ont été supprimées.
VI. A l'appui de leur requête, les intimées ont réfuté les arguments de la requérante.
Les copies de la page de garde de l'édition complète de l'année 1985 ainsi que des pages II à IV du sommaire des articles et des auteurs ayant contribué aux différents articles de la revue spécialisée "Kunststoffe" démontrent de manière indiscutable que le document D6 est une publication qui fait partie de l'état de la technique.
Concernant la question de l'activité inventive par rapport à l'état de la technique selon D6, il est demandé à la chambre de confirmer la décision de la division d'opposition.
De même l'objet des requêtes subsidiaires 2 à 6 n'est pas brevetable, leur objet n'étant, pour les raisons déjà présentées par la division d'opposition, soit pas clair, soit n'impliquant pas une activité inventive par rapport à l'état de la technique divulgué dans le document D6.
Motifs de la décision
1. Le recours est recevable.
2. Requête principale
D'après les éléments de preuve fournis par l'intimée 01 dans sa réponse au mémoire exposant les motifs du recours, il ne fait pas de doute que le document D6 est un extrait de l'édition de novembre 1985 de la revue spécialisée "Kunststoffe" qui est une publication mensuelle bien connue des spécialistes du domaine des matières plastiques et est distribuée depuis longtemps (75**(ème) année d'existence en 1985) par un éditeur indépendant, le Carl Hanser Verlag. La requête de la requérante de ne pas considérer D6 comme état de la technique pour juger de la brevetabilité de l'objet revendiqué doit donc être rejetée.
3. Requête subsidiaire 1: Activité inventive
3.1 Il n'a pas été contesté par la requérante que le document D6 décrit une matelassure formée d'une mousse souple de mélamine. En effet le document D6 indique à la page 843 (voir "Bild 1" ainsi que texte intitulé "Morphologie - physikalische Elastifizierung") qu'il est possible de rendre élastique une mousse de mélamine, qui est normalement rigide et cassante, en modifiant sa structure alvéolaire par élargissement de la taille des alvéoles de telle sorte que leurs parois s'affinent, formant des pontets fins et flexibles, et qu'elles finissent par s'ouvrir, rendant ainsi la mousse plus poreuse, plus légère et plus élastique. Le document D6 poursuit à la page 844 en indiquant qu'un traitement mécanique et thermique supplémentaire (compression) d'une telle mousse de mélamine élastique modifie encore ses caractéristiques mécaniques de telle façon qu'elle devient plus flexible. La flexibilité étant déterminée par le degré de déformation (voir colonne de gauche, lignes 8-15 et page 843: "Bild 2"). En outre, le document D6 indique de façon explicite l'utilisation d'une telle mousse élastique de mélamine comme matelassure (page 846, colonne de gauche, lignes 24-35). La figure 8 de D6 décrit aussi une valeur de dureté mesurée selon la norme DIN 53 577 pour une telle mousse de mélamine élastique. La table 1 ("Tabelle 1" ) à la page 845 donne aussi une valeur de 0,7 N/cm**(2) pour la dureté de cette mousse, mesurée selon la norme DIN 53 577 pour un enfoncement de 40%. Ces valeurs semblent très proche des exigences de dureté de la revendication 1 du brevet tel que délivré. Cependant, en raison du paramètre spécifique utilisé dans la revendication 1 du brevet tel que délivré pour définir la dureté en indentation (norme ISO 2439 B), les intimées n'ont pas démontré de manière indubitable que la mousse selon D6 présente la dureté exigée par la revendication.
3.2 Si l'on admet que la matelassure revendiquée est nouvelle par rapport à celle du document D6, la question se pose si cette matelassure implique une activité inventive. Partant du fait que la matelassure revendiquée se distingue de celle décrite dans D6 par la caractéristique de dureté, mesurée en indentation selon la norme ISO 2439 B, qui est inférieure à 300 N pour un enfoncement de 40%, il ressort de cette caractéristique distinctive que le problème technique visé par l'invention est de développer une matelassure en mousse de mélamine qui soit optimisée pour cet usage de confort.
3.3 Pour qu'un produit revendiqué soit brevetable, il faut qu'il constitue en tant que tel une solution non évidente, par rapport à l'état de la technique, d'un problème technique propre à l'invention (voir T 219/93).
Dans le cas présent, la chambre estime que l'homme du métier, confronté au problème technique cité plus haut et compte-tenu de l'enseignement de D6 qui consiste à soumettre la mousse initiale Basotect® à un traitement de compression pour en éliminer les points durs arriverait de manière évidente, en effectuant des tests de routine sur la mousse Basotect®à une mousse souple de mélamine ayant les caractéristiques de dureté de la revendication 1. Le fait de faire subir à la mousse Basotect® une vingtaine de cycles de compressions/décompressions (voir paragraphe [0064] du fascicule du brevet mis en cause) afin d'obtenir une matelassure présentant la valeur de dureté revendiquée ne représente, de l'avis de la chambre, qu'une variante d'optimisation et de mise au point qui découle de manière évidente de l'enseignement du document D6 et n'implique pas une activité inventive.
Contrairement à l'opinion de la requérante, la chambre retrouve dans le traitement initial de compression décrit dans D6 une similarité évidente avec le procédé de fabrication d'une mousse de mélamine conforme à la revendication 1.
3.4 Par conséquent, l'objet de la revendication 1 du brevet tel que délivré (requête principale et requête subsidiaire 1) n'implique pas une activité inventive par rapport à l'état de la technique divulgué dans le document D6 (Article 56 CBE 1973).
4. Les modifications effectuées par la requérante dans la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 consistent à spécifier que la mousse souple de mélamine est une "mousse souple de mélamine stabilisée", une formulation issue de la revendication dépendante 2 telle que délivrée.
La requérante elle-même a noté que la mousse souple de mélamine selon le document D6 subit une perte de dureté de l'ordre de 12 à 17 % après une charge répétée et permanente de 10**(6)cycles de sollicitations entre 200 et 600 N pour une diamètre de poinçonnage de 250 mm (D6: page 846, colonne de gauche, "Mechanische Eigenschaften"). Ce pourcentage de perte de dureté est inférieur au pourcentage de perte de dureté mentionné au paragraphe [0065] du fascicule du brevet mis en cause, ce dernier étant de 25% après 80 000 cycles à 75 daN. Par conséquent, la chambre ne peut reconnaître dans la mousse de mélamine revendiquée selon cette requête une mousse qui soit significativement plus stable après un nombre élevé de cycle de sollicitations que la mousse du document D6.
Par conséquent, de même que l'objet de la revendication 1 selon les requêtes principale et subsidiaire 1, celui de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 ne remplit pas les critères de brevetabilité par rapport à l'état de la technique.
5. Les modifications effectuées par la requérante dans la revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 correspondent à celles de la requête subsidiaire 2 considérée par la division d'opposition. La formulation introduite dans cette revendication et qui n'est pas présente dans les revendications du brevet tel que délivré "cette dureté étant adaptée pour pouvoir subir une perte de dureté " n'est pas claire (article 84 CBE). En effet, comme l'a déjà fait remarquer la division d'opposition (point 3.2 de la décision faisant l'objet du recours), ce que l'on doit entendre par une "adaptation" de la dureté n'est pas clair. En outre, comme l'a fait remarquer l'intimée 01 notamment dans ses écritures, cette revendication ne spécifie pas par rapport à quelle valeur de référence la perte de dureté doit être calculée.
6. La formulation utilisée dans la revendication 1 selon la requête subsidiaire 4 "cette mousse souple de mélamine étant adaptée pour pouvoir subir une perte de dureté " n'est pas claire non plus. Bien qu'il n'est plus question d'adaptation de la dureté, mais de la mousse, ici aussi il n'est pas clair par rapport à quelle valeur de référence la perte de dureté doit être calculée.
7. La revendication 1 de la requeté subsidiaire 5, qui correspond à la requête subsidiaire 3 considérée par la division d'opposition, ne remplit pas la condition de clarté requise par l'article 84 CBE. Comme l'a fait remarquer la division d'opposition (point 3.3 de la décision faisant l'objet du recours), il n'est pas clair ni ce que l'on doit entendre pas "sensiblement", ni ce que l'on doit entendre par "au cours du temps". La requérante fait valoir que "cette dureté étant sensiblement constante" signifie que la dureté est suffisamment constante pour qu'un homme du métier ne constate pas de variations de dureté, même si, d'un strict point de vue, de telles variations peuvent effectivement se présenter. Cette interprétation ne concorde toutefois pas avec le paragraphe [0065] du fascicule de brevet mis en cause selon lequel le pourcentage de perte de dureté est de 25% après 80 000 cycles à 75 daN. Il s'agit ici d'une variation importante qui serait certainement constatable. Cette discordance est susceptible d'engendrer un doute quant à l'étendue de la protection et par conséquent de rendre obscure la revendication.
8. L'objection de défaut de clarté relative à la requête subsidiaire 5 s'applique également à l'expression "cette dureté étant ensuite constante" de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 6.
9. Aucune des requêtes de la requérante ne pouvant être satisfaite, la chambre ne peut que confirmer la décision de la division d'opposition et rejeter le recours.
10. Requête du mandataire de l'intimée 02 de reporter la procédure orale
La chambre a considéré cette requête sous son aspect procédural, c'est à dire comme devant prévenir toute décision négative à l'encontre de l'intimée 02 sur des motifs au sujet desquels elle n'ait pu prendre position. Comme la chambre est parvenue à la conclusion que l'ensemble des requêtes de l'intimée 02 peuvent être satisfaites, sa requête en report de la procédure orale est périmée et dénuée de tout intérêt procédural. La chambre a donc jugé inopportun de reporter la procédure orale et a prononcé la décision de rejet du recours à l'issue de la procédure orale.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
Le recours est rejeté.