European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2010:T119608.20101110 | ||||||||
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Date de la décision : | 10 Novembre 2010 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | T 1196/08 | ||||||||
Numéro de la demande : | 00403533.3 | ||||||||
Classe de la CIB : | A61K 9/22 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | B | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Comprimé matriciel permettant la libération prolongée de trimétazidine après administration par voie orale | ||||||||
Nom du demandeur : | Les Laboratoires Servier | ||||||||
Nom de l'opposant : | Ratiopharm GmbH Intervenant : SC Gedeon Richter Romania SA |
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Chambre : | 3.3.02 | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : | |||||||||
Mot-clé : | Recevabilité de l'intervention au titre de l'article 105(1)a) CBE sur la base d'une action en contrefaçon fondée sur un brevet roumain résultant de l'extension des effets d'un brevet européen à la Roumanie (non) Requêtes principale et subsidiaire 1 - Activité inventive (non): alternative évidente Requête subsidiaire 2 - Recevabilité (non) Requête subsidiaire 3 satisfait aux dispositions de la CBE |
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Exergue : |
1. Au sens de l'article 105(1)a) CBE le terme "ce brevet" désigne un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE, c'est-à-dire un brevet délivré pour un ou plusieurs Etats contractants en vertu de la Convention, droit commun aux Etats contractants en matière de délivrance de brevets d'invention, conformément à l'article 1er CBE. En conséquence, l'action en contrefaçon devant une juridiction nationale doit être introduite à propos d'un brevet européen qui a été délivré en vertu de la Convention pour au moins un Etat contractant afin de remplir les conditions de l'article 105(1)a) CBE. 2. Un brevet résultant de l'extension des effets d'un brevet européen au territoire d'un Etat autorisant l'extension nest pas un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE parce que l'extension et les conséquences juridiques en découlant reposent exclusivement sur le droit national de l'Etat autorisant l'extension. Il s'ensuit qu'une intervention fondée sur une action en contrefaçon, dont l'objet est un brevet obtenu par l'extension des effets d'un brevet européen au territoire d'un Etat autorisant l'extension, ne remplit pas une des conditions requises à l'article 105(1)a) CBE et est donc irrecevable. 3. Dès lors que dans un décret d´extension les références aux dispositions de la Convention sont exhaustives et que les dispositions d'un décret dextension ne se réfèrent pas aux dispositions de larticle 105 CBE, la question de l'application par analogie de l'article 105 CBE ne se pose même pas. |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. Le brevet européen nº 1 108 424 a été délivré sur la base de la demande européenne nº 00 403 533.3. La mention de la délivrance du brevet a été publiée le 1er juin 2005 au Bulletin européen des brevets 2005/22. Dans le fascicule du brevet européen, la Roumanie est désignée comme Etat autorisant l'extension.
II. Le brevet a été délivré avec 16 revendications.
Le libellé des revendications indépendantes s'énonce comme suit:
"1. Comprimé matriciel pour la libération prolongée de Trimétazidine ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptable, caractérisé en ce que la libération prolongée est contrôlée par l'utilisation d'un polymère dérivé de cellulose présent dans la matrice, choisi parmi l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxyméthylcellulose, la méthylcellulose, et l'hydroxypropylméthylcellulose.
16. Procédé de préparation dun comprimé matriciel selon l'une quelconque des revendications 1 à 13 caractérisé en ce que:
- l'on effectue une granulation humide par mélange de Trimétazidine, de polyvidone et du diluant puis mouillage de ce mélange,
- l'on mélange le granulé ainsi obtenu avec le dérivé cellulosique,
- l'on ajoute ensuite le lubrifiant et l'agent d'écoulement,
- puis l'on comprime le mélange précédent."
III. La requérante (opposante) a fait opposition à la délivrance de ce brevet européen et demande sa révocation en application de l'article 100 a) CBE 1973, pour absence de nouveauté et d'activité inventive, et de l'article 100 b) CBE 1973 pour insuffisance de l'exposé.
IV. Les documents suivants, cités au cours des procédures d'opposition et/ou de recours, restent pertinents pour la présente décision:
(1) EP-A-0 207 638
(2) EP-A-0 673 649
(11) T. Salsa, et al., Drug Development and Industrial Pharmacy (1997), 23(9), pages 929-938
(13) JP 61-212517, traduction anglaise
(14a) Hunnius, Pharmazeutisches Wörterbuch, Walter de Gruyter, Berlin-New York (1986), pages 221 et 651
(21) B. Huet de Barochez, et al., Drug Development and Industrial Pharmacy (1989), 15 (6&7), pages 1001-1020
(22) EP-A-1 195 160
V. Par décision prononcée à l'issue de la procédure orale du 1**(er) avril 2008 et signifiée le 23 avril 2008, la division d'opposition a rejeté l'opposition.
En ce qui concerne la suffisance de l'exposé, la division d'opposition a constaté que les exemples étaient compris dans la portée de l'objet revendiqué et que la description du brevet attaqué, notamment en ce qui concerne les paragraphes [0025] - [0032], contenait des informations suffisamment détaillées pour permettre à l'homme du métier de reproduire l'invention. Elle a également considéré que le document (1) n'était pas destructeur de nouveauté, vu que les caractéristiques techniques de la revendication 1 doivent être choisies à partir de plusieurs listes. Même si on définissait la liste des principes actifs dans le document (1) comme une seule liste très longue, l'objet de la revendication 1 ne découle toujours pas directement et sans équivoque dudit document (1) vu que cette liste contiendrait dans ce cas un nombre excessif d'éléments.
Enfin, la division d'opposition a estimé que l'objet de la présente revendication 1 impliquait une activité inventive. A ce sujet, le document (2) a été choisi comme état de la technique le plus proche. Selon la division d'opposition, les compositions divulguées dans ledit document se distinguaient des produits selon la revendication 1 du brevet attaqué notamment par le fait que la libération prolongée de la trimétazidine était assurée par un système réservoir. Le problème à résoudre était défini comme étant la mise au point d'un comprimé offrant en même temps un effet prolongé de la trimétazidine, tout en assurant des pics plasmatiques à chaque prise. La solution audit problème, qui consistait à utiliser des polymères dérivés de cellulose tels que définis dans la revendication 1, impliquait une activité inventive, parce que le document (2) n'offrait aucune indication qui permettrait d'arriver à la formulation revendiquée. Il en était de même pour la combinaison de l'enseignement du document (2) avec celui du document (1) ou du document (13).
VI. L'opposante (requérante) a introduit un recours contre cette décision. Le mémoire exposant les motifs du recours était accompagné de nouveaux documents, y compris le document (21).
VII. Par lettre datée du 24 février 2009, la société SC Gedeon Richter Romania SA ("société SC") a produit sa déclaration d'intervention selon l'article 105(1)a) CBE. A l'appui de cette déclaration, elle a fait valoir qu'une action en contrefaçon fondée sur le brevet RO/EP 1108424 avait été introduite le 26 novembre 2008 à son encontre en Roumanie par le titulaire du brevet (l'intimée). Elle a également présenté des documents à titre de preuve de cette action (copie de l'acte introductif d'instance et traduction de cet acte). Elle a par ailleurs produit un acte d'opposition indiquant entre autres les motifs d'opposition (article 100 a) CBE 1973, pour absence de nouveauté et d'activité inventive, et article 100 b) CBE 1973 pour insuffisance de l'exposé), ainsi que les faits et justifications invoqués à l'appui de ces motifs. Le 24 février 2009, elle a acquitté la taxe d'opposition.
VIII. Dans son courrier daté du 20 mai 2009, l'intimée a répondu aux mémoires du recours et d'intervention et produit six requêtes subsidiaires.
IX. Par lettre datée du 15 décembre 2009, la société SC a répondu aux observations de l'intimée.
X. Aux fins de préparation de la procédure orale fixée le 10 novembre 2010, la Chambre a envoyé une notification datée du 29 septembre 2010. Dans cette notification, la Chambre a exprimé son avis préliminaire sur la recevabilité de l'intervention et la pertinence du document (21).
XI. Par lettre datée du 27 octobre 2010, la société SC a présenté des arguments additionnels en ce qui concerne son intervention et son opposition. Elle a aussi bien produit des documents à titre de preuve de la suspension de la procédure de nullité devant le tribunal roumain, qu'une copie du décret du gouvernement roumain sur l'extension ("Monitorul Oficial al Românei, Anul VIII, nº 195, 21 août 1996, 2" (décret d'extension)).
XII. Le 29 octobre 2010, la société SC a produit un avis sur l'interprétation de l'article 105 CBE préparé par M. Stecher à l'appui des arguments présentés par lettre datée du 27 octobre 2010.
XIII. Dans son courrier daté du 4 novembre 2010, l'intimée a répondu aux observations présentées les 27 et 29 octobre 2010 par la société SC. L'intimée a également déposé une copie de la "WIPO Database of Intellectuel Property Legislatives Texts" (RO Patents (EPO), Ordinance, 15/08/1996, No.32, pages 1 à 6), qui constitue la traduction en anglais de l'accord de coopération dans le domaine des brevets conclu entre l'Organisation européenne des brevets et le gouvernement roumain (accord de coopération), y compris la partie de l'accord régissant l'extension des effets des demandes de brevets et des brevets européens à la Roumanie (décret d'extension).
XIV. Pendant la procédure orale devant la Chambre, la société SC a formulé des questions de droit au soutien d'une demande de saisine de la Grande Chambre de recours. Elle a également soulevé une objection au titre de la règle 106 CBE.
L'intimée a retiré sa requête principale déposée par courrier en date du 20 mai 2009. Elle a nommé la requête subsidiaire 1 déposée avec la lettre du 20 mai 2009 comme nouvelle requête principale, et a déposé les requêtes subsidiaires 1 à 4.
XV. Le libellé des revendications indépendantes s'énonce comme suit:
a) Requête principale:
"1. Comprimé matriciel pour la libération prolongée de Trimétazidine ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptable constitué d'une matrice hydrophile, caractérisé en ce que la libération prolongée est contrôlée par l'utilisation d'un polymère dérivé de cellulose présent dans la matrice, choisi parmi l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxyméthylcellulose et l'hydroxypropylméthyl-cellulose."
La revendication 16 est identique à la revendication 16 du brevet tel que délivré.
b) Requête subsidiaire 1:
"1. Comprimé matriciel pour la libération prolongée de Trimétazidine sous forme de dichlorhydrate pharmaceutiquement acceptable, caractérisé en ce que la libération prolongée est contrôlée par l'utilisation d'un polymère dérivé de cellulose présent dans la matrice, choisi parmi l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxyméthylcellulose et l'hydroxypropylméthylcellulose, la trimétazidine sous forme de dichlorhydrate étant présente dans un pourcentage compris entre 15 et 30% de la masse totale du comprimé."
La revendication 14 de la requête subsidiaire 1 ne diffère de la revendication 16 du brevet tel que délivré que par sa référence aux revendications 1 à 11 au lieu des revendications 1 à 13.
c) Requête subsidiaire 2:
"1. Comprimé matriciel pour la libération prolongée de Trimétazidine sous forme de dichlorhydrate pharmaceutiquement acceptable constitué d'une matrice hydrophile, caractérisé en ce que la libération prolongée est contrôlée par l'utilisation d'un polymère dérivé de cellulose présent dans la matrice, qui est l'hydroxypropylméthylcellulose, la trimétazidine sous forme de dichlorhydrate étant présente dans un pourcentage compris entre 15 et 30% de la masse totale du comprimé."
La revendication 15 de la requête subsidiaire 2 ne diffère de la revendication 16 du brevet tel que délivré que par sa référence aux revendications 1 à 12 au lieu des revendications 1 à 13.
d) Requête subsidiaire 3:
"1. Comprimé matriciel pour la libération prolongée de Trimétazidine sous forme de dichlorhydrate pharmaceutiquement acceptable, caractérisé en ce que la libération prolongée est contrôlée par l'utilisation d'un polymère dérivé de cellulose présent dans la matrice, choisi parmi l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxyméthylcellulose et l'hydroxypropylméthylcellulose, la trimétazidine sous forme de dichlorhydrate étant présente dans un pourcentage compris entre 15 et 30% de la masse totale du comprimé et le pourcentage de dérivé de cellulose est compris entre 25 et 50% de la masse totale du comprimé."
La revendication 13 ne diffère de la revendication 16 du brevet tel que délivré que par sa référence aux revendications 1 à 10 au lieu des revendications 1 à 13.
XVI. La société SC a présenté les arguments suivants quant à la déclaration d'intervention:
Recevabilité de l'intervention
La présente intervention remplit les conditions de l'article 105(1)a) CBE, étant donné que le brevet européen aux effets étendus n'est pas un brevet national, mais un brevet européen. En vertu de l'article 105(1)a) CBE, toute partie peut intervenir dans une procédure d'opposition à un brevet européen au cas où une action en contrefaçon est introduite contre cette partie. Ni l'article 105 CBE ni le règlement d'exécution n'imposent une quelconque restriction quant au stade auquel l'action en contrefaçon est engagée ou quant au mécanisme juridique par lequel le brevet européen a pris effet dans l'Etat concerné. Autrement dit, le fait que la Roumanie ne soit pas un Etat partie à la CBE à la date pertinente constitue une différence seulement à l'égard du fondement juridique des effets du brevet européen, mais pas sur le fait qu'il s'agisse encore d'un brevet européen.
S'il est admis qu'une intervention ne peut se fonder sur une action en contrefaçon d'un brevet national (tel qu'un brevet national français, comme dans l'affaire T 446/95), la situation est différente lorsque l'action en contrefaçon a été introduite devant une juridiction nationale à propos d'un brevet européen aux effets étendus.
En premier lieu, les effets au plan national d'un brevet européen faisant l'objet d'une extension, tels qu'énoncés au point 9 de l'accord d'extension, ne fournissent aucune base pour conclure que le brevet est un brevet national plutôt qu'un brevet européen. Notamment, le passage en question indique que le brevet européen (aux effets étendus) a les effets d'un brevet national. Toutefois, ce passage ne mentionne pas qu'un brevet européen aux effets étendus est un brevet national ou, plus important encore, qu'il n'est pas un brevet européen.
Le libellé utilisé au point 9 de l'accord d'extension se retrouve aussi dans la CBE. Ayant été délivré en application de la CBE, le brevet contesté est un brevet européen en vertu de l'article 2(1) CBE. De plus, l'article 2(2) CBE prévoit qu'il a, dans les Etats contractants pour lesquels il a été délivré, les effets d'un brevet national, à moins que la Convention n'en dispose autrement. L'article 2 CBE fait partie intégrante de la Convention depuis son origine, mais personne n'en avait, jusqu'à présent, tiré la conclusion qu'un brevet européen n'est pas vraiment un brevet européen, mais un brevet national.
L'accord d'extension est un traité entre l'Organisation européenne des brevets et l'Etat autorisant l'extension, qui prévoit justement d'appliquer les mêmes dispositions à l'Etat autorisant l'extension: dans l'Etat autorisant l'extension, le brevet européen faisant l'objet de l'extension a les mêmes effets qu'un brevet national, à moins que l'accord n'en dispose autrement (voir, par ex., les points 9, 11, 12 et 13 de l'accord). Il y a donc des dispositions parallèles dans la CBE et dans l'accord d'extension, qui énoncent que le brevet européen a les effets d'un brevet national dans l'Etat contractant et dans l'Etat autorisant l'extension, respectivement. Cela signifie que pour un Etat partie à la CBE, l'article 2(2) CBE constitue le fondement juridique de ce qu'un brevet européen a les mêmes effets qu'un brevet national, tandis que pour un Etat autorisant l'extension, qui n'est pas partie à la CBE, c'est l'accord bilatéral d'extension qui constitue ce fondement juridique (chacun en combinaison avec le droit national, tel que la loi d'introduction des traités en matière de brevet (IntPatÜG) pour l'Allemagne et le décret roumain d'extension pour la Roumanie). Peu importe que les effets d'un brevet européen soient conférés à un Etat en vertu de l'article 2(2) CBE ou en vertu d'un accord bilatéral avec cet Etat. Dans le premier cas, le brevet européen est délivré pour l'Etat considéré et dans le second cas, les effets du brevet européen sont étendus à l'Etat considéré. Mais dans les deux cas, c'est le brevet européen, tel que délivré selon l'article 2(1) CBE, qui confère les mêmes effets qu'un brevet national pour l'Etat en question. Seul le fondement juridique relatif aux effets au plan national diffère, mais pas le fait qu'il s'agisse des effets du brevet européen.
En ce qui concerne la nature juridique de l'accord d'extension, cet accord est un traité bilatéral entre l'Organisation européenne des brevets et l'Etat autorisant l'extension visant à étendre les effets des demandes de brevet européen et des demandes euro-PCT, ainsi que des brevets correspondants (voir le préambule de l'accord d'extension). Mais ce n'est pas une convention visant à opérer la transformation de brevets européens en brevets nationaux de l'Etat autorisant l'extension.
Les chambres de recours de l'OEB ont rendu plusieurs décisions (J 14/00, J 9/04, J 2/05) concernant la nature juridique des accords d'extension. Ces décisions concernaient des demandeurs qui avaient omis de payer les taxes d'extension en temps utile et qui demandaient à être rétablis dans leurs droits en vertu de l'article 122 CBE. Les recours ont été considérés comme infondés, étant donné que, pour ce qui est de la procédure d'extension, ce sont les accords/décrets d'extension qui constituent les bases juridiques et non pas la CBE. Il a ainsi été décidé que, même si les accords d'extension calquent leurs procédures sur la procédure de désignation/validation selon la CBE et contiennent également des renvois aux dispositions de la CBE, il n'en demeure pas moins que ce sont des traités entre l'Organisation européenne des brevets et des Etats non parties à la CBE et que l'OEB n'est pas habilité à appliquer des règles de la CBE à des questions d'extension (à moins que l'accord n'autorise l'OEB à procéder autrement). Cette conclusion, toutefois, ne change rien au fait que la partie nationale du brevet européen aux effets étendus continue de faire partie d'un brevet européen. Dans les décisions citées, il était clairement expliqué que les accords d'extension sont des traités bilatéraux entre l'Organisation européenne des brevets et les Etats autorisant l'extension, en vue d'étendre les effets des demandes de brevet européen et des demandes Euro-PCT, ainsi que ceux des brevets correspondants (voir, par ex., point 1.2.1 de la décision J 9/04). Cependant, rien ne permet de conclure que l'accord doit être considéré comme un traité visant à créer des brevets nationaux à partir de brevets européens.
Comme le montre déjà le libellé "extension de brevets européens"/ "brevets européens aux effets étendus", utilisé dans l'ensemble de l'accord d'extension, cet accord vise à étendre des brevets européens à l'Etat autorisant l'extension, plutôt qu'à transformer des brevets européens en quelque chose d'autre. Le préambule de l'accord d'extension dispose notamment que "[à] compter de cette date, la protection conférée par les brevets européens pourra également être étendue à la Roumanie", ce qui ne laisse aucune place à l'interprétation selon laquelle, dans le cas d'un Etat autorisant l'extension, la protection serait conférée par un brevet national plutôt que par un brevet européen. En outre, il y a plusieurs autres aspects dans l'accord d'extension indiquant que la partie nationale du brevet européen aux effets étendus relève d'un brevet européen et n'est pas un brevet national. En vertu des points 9 à 13 de l'accord, les effets nationaux produits dans l'Etat autorisant l'extension sont liés au devenir du brevet européen dans la procédure d'opposition devant l'OEB. Si le brevet européen est modifié ou révoqué devant l'OEB, cela se répercute sur ses effets au plan national dans l'Etat autorisant l'extension. Le point 10 prévoit que les dispositions de l'article 70 CBE (texte du brevet européen faisant foi) sont applicables. Dans le cas d'un brevet national, le texte faisant foi est la version en roumain et non celle dans la langue de la procédure devant l'OEB. Selon le point 11 (droits antérieurs), la disposition sur les conflits entre les demandes de brevet européen ou les brevets européens et les demandes de brevet national ou les brevets nationaux correspond aux articles 139(1) et (2) CBE et prévoit que, pour les demandes roumaines ultérieures, une demande de brevet européen antérieure s'étendant à la Roumanie est traitée du point de vue des droits antérieurs de la même manière que s'il s'agissait d'une demande nationale. Une telle disposition serait inutile si la demande de brevet européen aux effets étendus devait être considérée comme une demande nationale et non pas européenne. Selon le point 12 (double protection), lorsqu'un brevet européen aux effets étendus a la même priorité qu'un brevet national, le premier a la prééminence dans la mesure où il protège la même invention. Cette disposition paraîtrait plutôt absurde si l'on remplaçait "brevet européen aux effets étendus" par "brevet national". Il s'ensuit par conséquent qu'il existe une unité entre le brevet européen en tant qu'objet de la procédure devant l'OEB et ses effets au plan national étendus à la Roumanie.
En ce qui concerne la nature du brevet européen aux effets étendus, le décret d'extension revêt également de l'importance. Ce décret d'extension constitue le fondement, en droit national, des effets étendus du brevet européen et met en oeuvre les règles prévues par l'accord d'extension. A cet égard, l'annexe au décret présente un intérêt particulier. Le point I(2), b) et d) de l'annexe distingue clairement entre le brevet européen aux effets étendus et un brevet national. Les autres dispositions du décret correspondent aux règles convenues dans l'accord d'extension (à savoir les dispositions relatives aux exigences de traduction, aux droits antérieurs, à la double protection, à l'effet rétroactif des modifications du brevet ou de sa révocation devant l'OEB). Le libellé et la teneur de ces dispositions établissent une nette distinction entre les effets étendus du brevet européen au plan national et les brevets nationaux. En conclusion, il est manifeste que le droit national roumain considère le brevet européen aux effets étendus comme étant encore un brevet européen, et non un brevet national. Ce point de vue est confirmé quand on considère l'action en nullité engagée parallèlement contre la partie roumaine du brevet contesté en opposition. En Roumanie, tout comme dans d'autres Etats parties à la CBE tels que le Royaume-Uni (mais pas l'Allemagne), il est possible d'engager une action en nullité alors qu'une procédure d'opposition est encore pendante devant l'OEB. De fait, pour ce qui est du Royaume-Uni, les tribunaux n'hésitent pas à rendre des décisions en contradiction avec l'OEB et ne sursoient pas à statuer dans un tel cas. Toutefois, dans la procédure en nullité engagée contre la partie roumaine du brevet contesté, l'Office roumain des brevets et des marques a demandé la suspension de la procédure jusqu'à ce que l'OEB ait rendu publique sa décision concernant le brevet contesté en opposition. Si le brevet européen est révoqué devant l'OEB et/ou maintenu sous une forme modifiée et si le titulaire du brevet omet de produire la traduction roumaine des modifications, la procédure de nullité pendante serait sans objet. En conclusion, cette requête confirme que l'Office roumain des brevets et des marques considère le brevet européen aux effets étendus comme étant encore un brevet européen et non pas un brevet national. Le titulaire du brevet a lui aussi requis la suspension de la procédure, se référant également à la présente procédure de recours et faisant valoir que l'objet de l'action en nullité dépend de l'issue de la procédure devant l'OEB. En vertu de l'article 244(1) du code roumain de procédure civile, le tribunal peut surseoir à statuer lorsque le règlement de l'affaire dépend, en tout ou en partie, de l'existence ou non d'un droit qui fait l'objet d'une autre action. La Cour de Bucarest a admis les requêtes et a sursis à statuer. En raison de la procédure de recours pendante devant l'OEB, la procédure de nullité a été suspendue en vertu de l'article 244(1) du code de procédure civile. Cette décision confirme elle aussi l'unité entre le brevet européen et ses effets au plan national en Roumanie.
L'accord d'extension et la CBE prévoient des dispositions identiques selon lesquelles le brevet européen a "les mêmes effets qu'un brevet national" dans l'Etat autorisant l'extension et dans l'Etat contractant, respectivement. C'est pourquoi il n'y a pas la moindre raison de faire une différence entre un Etat autorisant l'extension et un Etat contractant pour ce qui est de l'applicabilité de l'article 105 CBE. Dans les deux cas, les procédures en contrefaçon se fondent sur les effets du brevet européen au plan national. C'est donc le brevet européen (et non un brevet national) qui fait l'objet de la contrefaçon alléguée. Le fait que les effets du brevet européen au plan national soient conférés par l'accord d'extension et non par la CBE ne fait pas du brevet européen un brevet national et, par conséquence, est sans incidence en ce qui concerne la recevabilité d'une intervention en vertu de l'article 105(1) CBE.
Le brevet roumain RO/EP 1108424 doit être considéré comme étant le même brevet que le brevet européen en cause parce que les brevets délivrés ou étendus selon le droit du brevet européen doivent être considérés comme faisant partie du même système. Pour cette raison, un brevet contenant les mêmes revendications est le même brevet au sens de toutes les dispositions de la Convention et de l'accord de coopération.
Il convient également de prendre en considération le droit supérieur pour interpréter l'article 105 CBE. Vu que la CBE est un traité adopté en vertu du droit de l'Union européenne, les principaux points d'interprétation sont les "libertés fondamentales" prévues dans le Traité de l'Union européenne ("TUE"). En particulier, il résulte de la "libre circulation des marchandises" (article 23 TUE) et de "la libre prestation de services" (article 49 TUE) que le système économique national ne doit pas faire obstacle à la mise en place et au développement d'un marché européen unique. Par ailleurs, il convient également de prendre en considération l'Accord sur les ADPIC, et notamment ses articles 41(1) et 49 aux fins d'interpréter l'article 105 CBE. L'article 41(2) de l'Accord sur les ADPIC dispose que les procédures civiles ou administratives doivent être loyales et équitables. A cet égard, le droit d'être entendu constitue l'un des éléments fondamentaux d'un procès équitable. Ce droit comprend la possibilité de soumettre toute question de droit à une juridiction ou à une administration publique au cas où l'intérêt juridique d'une partie serait affecté. L'article 49 de l'Accord sur les ADPIC prévoit quant à lui que les principes susmentionnés relatifs à l'équité de la procédure civile s'appliquent également aux procédures administratives.
La décision de ne pas admettre l'intervention porterait atteinte au droit à un procès équitable de la société SC. En l'espèce, l'intérêt juridique à intervenir de cette dernière découle clairement de l'article V(6) du décret d'extension, qui prévoit que si le brevet délivré sur la base de la demande est révoqué au cours de la procédure d´opposition devant l'OEB, la protection provisoire conférée par la demande et les effets du brevet sont réputés ne pas avoir existé dès l'origine dans les limites de la révocation. Par conséquent, si le présent brevet européen était révoqué au cours d'une procédure de recours, la juridiction roumaine devrait annuler le brevet roumain RO/EP 1108424 aux effets étendus.
Il s'ensuit que l'intervention dans la présente procédure de recours est recevable, étant donné que les autres conditions de l'article 105 et de la règle 89 CBE sont remplies.
Saisine de la Grande Chambre de recours
D'après le libellé et la teneur de l'accord d'extension, les parties à l'accord, à savoir l'Organisation européenne des brevets et l'Etat de Roumanie, voulaient étendre les effets du brevet européen à la Roumanie. Le préambule de l'accord est déjà très clair à cet égard ("la protection conférée par les brevets européens pourra également être étendue à la Roumanie"). Il en va de même pour le contenu des autres dispositions (notamment les articles 9 à 13 de l'accord d'extension). Rien ne permet de conclure que les parties auraient plutôt convenu de générer un brevet national. Si tel avait été le cas, elles auraient utilisé un libellé différent et le contenu de l'accord aurait été différent lui aussi. Au cas où la Chambre aurait l'intention d'interpréter l'accord à l'encontre de son libellé, en décidant que l'accord d'extension vise à générer des brevets nationaux plutôt qu'à étendre les effets des brevets européens, elle rendrait ce faisant une décision sur la nature de l'extension, c'est-à-dire sur ce dont les parties ont convenu dans l'accord d'extension. Il est permis de douter qu'une chambre de recours ait compétence pour rendre une telle décision sans avoir entendu les parties à l'accord (à savoir l'Organisation européenne des brevets et l'Etat de Roumanie). En tout état de cause, il est considéré que la question de savoir si, notamment en ce qui concerne l'applicabilité de l'article 105 CBE, les effets d'un brevet européen au plan national tels que prévus par l'article 2(2) CBE diffèrent des effets d'un brevet européen au plan national tels que prévus par l'accord d'extension, est une question de droit d'importance fondamentale au sens de l'article 112(1) CBE. Ni la CBE ni l'accord d'extension ne fournissent le moindre indice quant à l'existence d'une telle différence. Pour le cas où la Chambre aurait néanmoins l'intention de décider qu'il existe une telle différence, les questions de droit produites pendant la procédure orale revêtent une importance fondamentale et doivent être soumises à la Grande Chambre de recours.
Objection formulée en vertu de la règle 106 CBE
Une objection a été soulevée pour le cas où la Chambre, s'appuyant sur l'argument que la partie nationale roumaine du brevet européen aux effets étendus ne relève plus d'un brevet européen, mais doit au contraire être considérée comme un brevet national, parviendrait à une décision négative sur la recevabilité de l'intervention et refuserait également de soumettre à la Grande Chambre de recours les questions juridiques pertinentes, telles que formulées pendant la procédure orale.
En estimant que la partie nationale du brevet européen aux effets étendus ne fait plus partie d'un brevet européen, la Chambre statue sur l'interprétation de l'accord d'extension. Une telle décision a non seulement des répercussions sur la présente affaire, mais porte également sur la nature juridique du brevet européen aux effets étendus.
La nature juridique du brevet européen aux effets étendus est toutefois déterminée dans l'accord d'extension par les parties contractantes, à savoir l'Organisation européenne des brevets et l'Etat de Roumanie. Ces parties ont compétence pour convenir que le brevet européen aux effets étendus reste un brevet européen (prenant effet en Roumanie). Selon le libellé et la teneur de l'accord d'extension, c'est précisément sur ce point qu'elles se sont mises d'accord.
Pour le cas où la Chambre aurait l'intention de décider que les parties auraient au contraire convenu que le brevet européen donne naissance à un brevet roumain de nature purement nationale, référence est faite à l'article 113(1) CBE qui énonce que "Les décisions de l'Office européen des brevets ne peuvent être fondées que sur des motifs au sujet desquels les parties ont pu prendre position."
En l'espèce, les parties concernées ne sont pas seulement le titulaire du brevet et les opposants, mais aussi les parties contractantes à l'accord d'extension, à savoir l'Organisation européenne des brevets et l'Etat de Roumanie, étant donné que c'est l'interprétation de la teneur matérielle de cet accord qui est affectée par la décision. Par conséquent, en vertu de l'article 113(1) CBE, la Chambre doit leur donner la possibilité de présenter leurs observations.
C'est pourquoi l'objection est soulevée que le fait de rendre une décision sans entendre les parties contractantes à l'accord d'extension constituerait une grave violation de l'article 113(1) CBE.
XVII. L'intimée a essentiellement fait valoir les arguments suivants quant à la déclaration d'intervention:
Recevabilité de l'intervention
L'intervention de la société SC n'est pas recevable. Le brevet roumain tel qu'il résulte de l'extension n'est pas un brevet national et il n'est plus un brevet européen. Le préambule de l'accord de coopération dans le domaine des brevets conclu entre l'Organisation européenne des brevets et le gouvernement roumain (accord de coopération) dispose en effet que "la Roumanie souhaitant accéder à la Convention sur le brevet européen, souhaite, comme étape intermédiaire, avoir un système admettant que les effets du brevet européen puissent être étendus à son territoire (système d'extension)". Il est donc clair que si la Roumanie pouvait bénéficier des effets du brevet européen, elle n'était en revanche pas partie à la CBE et le brevet étendu n'est pas un brevet européen.
L'article 105 CBE porte sur le brevet européen et non sur le brevet national résultant de l'extension d'un brevet européen. La CBE ne vise que les Etats contractants, comme le rappelle son préambule, "désireux qu'une protection des inventions puisse être obtenue dans ces Etats par une procédure unique de délivrance de ces brevets et par l'établissement de certaines règles uniformes régissant les brevets ainsi délivrés".
Conformément à l'article 1er CBE, la CBE est un droit commun aux Etats contractants en matière de délivrance des brevets. La Roumanie, qui n'a adhéré à la CBE qu'à partir du 1er mars 2003, n'était pas un Etat contractant au sens de l'article 1er CBE au moment du dépôt de la demande du brevet européen en cause, mais un Etat autorisant l'extension. L'adhésion de la Roumanie à la Convention sur le brevet européen implique que la CBE est entrée en vigueur pour la Roumanie à compter du 1er mars 2003.
Les brevets délivrés en vertu de la CBE sont dénommés, conformément à l'article 2 CBE, "brevets européens". L'article 105 CBE est une disposition concernant ce droit commun et ne saurait viser de ce fait que les brevets européens délivrés en vertu de la CBE, droit commun institué entre les Etats contractants dont la Roumanie ne faisait pas partie. Il est à noter en particulier que l'article 105(1)a) CBE dans sa version française ne parle pas de même brevet mais fait référence à "ce brevet", c'est-à-dire au brevet européen.
"Ce brevet" au sens de l'article 105 CBE est donc le brevet délivré sur la base de la CBE.
Le brevet roumain résultant de l'extension ne remplit pas cette condition parce que la CBE ne s'applique pas au brevet roumain résultant de l'extension. Selon l'article X de l'annexe de l'accord de coopération (annexe), les dispositions de la CBE et de son règlement d'exécution ne s'appliquent sauf si le présent texte n'en dispose autrement. Il en résulte que les dispositions de la CBE, et notamment l'article 105 CBE relatif à l'intervention du contrefacteur présumé, ne peuvent s'appliquer automatiquement à des brevets qui ne répondent pas aux conditions visées aux articles 1er et 2 CBE, sauf dispositions contraires qui doivent être prévues par des textes spécifiques et notamment par le texte du décret d'extension ou par l'accord de coopération. A titre d'exemple, si l'article V(1) de l'annexe dispose qu'un brevet européen étendu confère, à partir de la date de la mention de la délivrance par l'OEB, les mêmes droits que ceux que lui confèrerait un brevet national en vertu de la loi sur les brevets de Roumanie, cela n'implique pas que toutes les dispositions de la CBE s'appliquent. Ainsi, étant donné que, conformément à l'article X de l'annexe, les dispositions de la CBE et du règlement d'exécution ne s'appliquent pas automatiquement, la disposition de l'article 64(2) CBE relative aux droits conférés par un brevet européen portant sur un procédé ne s'applique pas au brevet roumain résultant de l'extension. En conséquence, si le décret d'extension du brevet européen contient des dispositions que l'on retrouve dans la CBE, toutes les dispositions de la CBE ne sont pas automatiquement applicables au brevet roumain résultant de l'extension du brevet européen, conformément à l'article X de l'annexe. Cela a aussi été confirmé par le communiqué paru au Journal officiel OEB sur l'extension des effets des brevet européens à la Roumanie (voir JO OEB 1996, 601, point 15).
Les dispositions claires de l'accord, qui excluent de façon expresse l'application des dispositions de la CBE au brevet roumain résultant de l'extension du brevet européen, ne sauraient être appliquées différemment en raison du Traité de l'Union européenne et de l'Accord sur les ADPIC. Contrairement à la position soutenue par la société SC, la CBE n'est pas un traité régi par le Traité de l'Union européenne. Seule l'hypothétique Convention sur le brevet de l'Union européenne pourrait avoir un tel effet. De plus, la Roumanie ayant adhéré à l'Union européenne en 2007, des situations de droit résultant de dispositions antérieures ne sauraient être modifiées.
Le droit à un procès équitable est parfaitement préservé, dans la mesure où l'action en nullité engagée par la société SC pourra parfaitement être jugée par les juridictions roumaines.
Il est donc clair que le brevet roumain résultant de l'extension d'un brevet européen ne saurait être considéré comme étant le même brevet que ce brevet européen. Il en résulte que l'intervention doit être déclarée irrecevable sur la base de l'article 105 CBE.
Saisine de la Grande Chambre de recours
En ce qui concerne la saisine de la Grande Chambre de recours, les dispositions de la CBE et du décret d'extension sont claires. Il n'est donc pas nécessaire de soumettre à la Grande Chambre de recours les questions produites par la société SC pendant la procédure orale.
Objection formulée au titre de la règle 106 CBE
En ce qui concerne l'objection soulevée par la société SC, il est à noter que l'Organisation européenne des brevets et l'Etat de Roumanie ne sont pas parties à la présente procédure étant donné que les conditions de l'article 107 CBE ne sont pas remplies.
XVIII. Les arguments suivants ont été avancés par la requérante à l'encontre du brevet attaqué:
En ce qui concerne la suffisance de l'exposé, la description est insuffisante au motif que l'objet revendiqué porte sur l'utilisation des polymères dérivés de cellulose particuliers présents dans la matrice et que cette définition recouvre tant la participation dudit polymère dans la structure de la matrice que la présence du polymère dans la matrice sous forme dispersée ou solubilisée. Les divers composés constituant ledit comprimé matriciel doivent être rassemblés de façon à obtenir un effet désiré, à savoir une libération contrôlée, sans que les conditions structurelles pour obtenir cet effet soient connues. L'objet revendiqué comprend des caractéristiques fonctionnelles, ce qui conduit à un nombre illimité de modes de réalisation de l'invention. Etant donné que le brevet attaqué ne contient aucun enseignement sur la manière dont le contrôle de la libération peut être effectué, l'homme du métier est contraint d'exercer un nombre déraisonnable de tests pour mettre au point l'invention revendiquée. La situation est aggravée par le fait que le brevet attaqué ne comprend aucun exemple concernant la fabrication d'un comprimé comprenant une matrice dans laquelle le polymère est dispersé ou solubilisé.
De l'avis de la requérante, le document (1) est destructeur de la nouveauté de l'objet revendiqué, étant donné que l'homme du métier doit faire un seul choix dans une seule liste pour arriver à l'objet revendiqué. Pour identifier la trimétazidine, il n'est pas nécessaire de faire une double sélection, comprenant d'abord le choix de la famille des vasodilatateurs suivi par celui de la trimétazidine. Au contraire, l'homme du métier choisirait la trimétazidine directement et en une seule étape dans la liste des principes actifs aux pages 5-7. La requérante a cité à ce propos les décisions T 454/01 et T 999/01.
En outre, il ressort des exemples considérés dans leur intégralité, et notamment des exemples 1, 2, 7 et 8, que des comprimés matriciels comprenant le vasodilatateur nifédipine en tant que principe actif et un polymère dérivé de cellulose tel que revendiqué dans le brevet attaqué constituent les compositions les plus préférées du document (1). Se référant à la décision T 990/96 (JO OEB 1998, 489), la requérante a fait valoir que chacun des exemples 1, 2, 7 et 8, combiné avec le passage figurant à la page 5, lignes 21 à 22, qui identifient la trimétazidine en tant principe actif, est destructeur de la nouveauté de l'objet revendiqué.
Le document (21) a trait aux comprimés matriciels comprenant soit l'hydroxypropylméthylcellulose, soit l'hydroxyéthylcellulose et un principe actif. Bien que le document (21) n'ait pas donné le nom concret du principe actif, les divers paramètres utilisés pour le caractériser identifient la trimétazidine de façon non équivoque. Par conséquent, le document (21) est aussi destructeur de la nouveauté de l'objet revendiqué.
En ce qui concerne l'activité inventive, le document (2), qui a pour objet des compositions à libération contrôlée de trimétazidine associant au principe actif un polymère dérivé de cellulose, constitue l'état de la technique le plus proche. La seule différence entre l'objet revendiqué et les compositions du document (2), qui décrit des systèmes réservoir, est que les comprimés du brevet attaqué ont trait aux comprimés matriciels. Le problème à résoudre consiste donc en la mise au point d'un comprimé alternatif destiné à la libération contrôlée de trimétazidine. La solution, qui concerne le remplacement du système réservoir par des comprimés matriciels, est évidente à la lumière du document (21), qui enseigne que des comprimés matriciels comprenant les mêmes polymères sont très avantageux.
Le document (1) et notamment les exemples décrivant des comprimés contenant la nifédipine associée à l'hydroxypropylcellulose peuvent également être considérés en tant qu'état de la technique le plus proche. Dans ce cas, le problème à résoudre consiste en la préparation d'un comprimé matriciel alternatif, dont la solution, à savoir le remplacement de la nifédipine par la trimétazidine est évident, vu que celle-ci figure dans la liste des principes actifs énumérés dans le même document.
Le document (13) est aussi un point de départ prometteur pour l'activité inventive. L'exemple 5 concerne un comprimé pour la libération contrôlée du principe actif, comprenant l'hydrochloride de trimétazidine, le phtalate d'hydroxypropylméthylcellulose, une huile durcie, du lactose et du stéarate de magnésium. Le profil de libération de la trimétazidine est presque identique à celui de la composition F3 du brevet attaqué. Le problème à résoudre consiste donc à mettre au point un comprimé matriciel alternatif, dont la solution est évidente à la lumière du document (21), lequel enseigne que des matrices constituées par des polymères dérivés de cellulose et notamment par l'hydroxypropylméthyl-cellulose sont avantageuses.
Enfin, le document (21) peut aussi être considéré en tant qu'état de la technique le plus proche. Pour le cas où la Chambre estimerait que la trimétazidine n'est pas divulguée spécifiquement malgré le fait que les paramètres figurant au tableau 1 ne laissent aucun doute sur l'identité du principe actif, l'homme du métier, essayant d'identifier un principe actif qui remplissent tous les critères dudit tableau 1 n'aurait aucune difficulté à choisir la trimétazidine.
La requérante a soutenu que l'activité inventive devait être évaluée sur la base de l'objet tel que défini dans les revendications. Par conséquent, des caractéristiques qui ne sont pas mentionnées dans les revendications telles que la posologie ou des détails concernant la position des pics dans le profil de la libération du principe actif ne peuvent pas être prises en considération.
XIX. Les arguments suivants ont été avancés par l'intimée quant au brevet attaqué:
Quant à la suffisance de l'exposé, les documents (11) et (14a) montrent que les structures des comprimés matriciels sont parfaitement connues dans l'état de la technique. Les comprimés matriciels tels que revendiqués sont caractérisés par la présence d'un polymère dérivé de cellulose spécifique dans la matrice qui ralentit la libération du principe actif. Comme la libération ralentie est équivalente à la libération contrôlée, l'homme du métier a tous les éléments à sa disposition pour reproduire l'invention telle que revendiquée.
En ce qui concerne la nouveauté par rapport au document (1), il faut faire des choix multiples pour arriver à l'objet revendiqué. L'homme du métier doit faire un premier choix parmi les éthers de cellulose. Ensuite, pour identifier la trimétazidine, il est obligé de faire une double sélection, choisissant d'abord la famille des vasodilatateurs et puis la trimétazidine dans cette famille des vasodilatateurs. Le document (21) n'est pas pertinent non plus pour la nouveauté vu que la trimétazidine ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables n'y sont pas mentionnés.
Concernant l'activité inventive, l'intimée a souligné que l'invention du brevet attaqué concerne le traitement de la crise cardiaque, qui exige la présence ininterrompue de taux élevés du principe actif, ce qui est difficile vu que la trimétazidine est très hydrophile. Aucun des documents cités par la requérante en tant qu'état de la technique le plus proche ne se réfère aux comprimés matriciels ayant un profil de libération du principe actif qui garantit une protection continuelle. Le problème à résoudre par rapport à l'état de la technique le plus proche, soit le document (1), (2) ou (21), consiste à mettre au point une formulation solide qui permet de maintenir une protection myocardique efficace du sujet malade pendant le nycthémère et en particulier au petit matin, dont la solution n'est rendue évidente par aucun des documents précités.
XX. La société SC a demandé que soit constaté la recevabilité de son intervention et, au cas ou son intervention serait considérée comme irrecevable, que les questions de droit suivantes soient soumises pour décision à la Grande Chambre de recours, conformément à l'article 112(1)a) CBE.
"Concernant l'applicabilité de l'article 105(1) CBE, y a-t-il une différence selon que l'action visée à l'article 105(1) a) ou b) CBE se fonde sur :
- les effets au plan national d'un brevet européen tels que prévus pour un Etat contractant par les articles 2(2) et 64(1) CBE, ou
- les effets au plan national d'un brevet européen tels que prévus pour un Etat autorisant l'extension par l'accord d'extension entre l'Organisation européenne des brevets et l'Etat autorisant l'extension ensemble les articles I(1) et V(1) du décret d'extension.
Ou, pour être plus concis,
- Les effets étendus d'un brevet européen sont-ils encore, dans l'Etat autorisant l'extension, ceux d'un brevet européen?"
L'intimée a demandé que l'intervention soit déclarée irrecevable.
La requérante a demandé l'annulation de la décision contestée et la révocation du brevet européen nº 1 108 424.
L'intimée a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sous forme modifiée sur la base de la requête principale (déposée en tant que requête subsidiaire 1 par courrier en date du 20 mai 2009) ou alternativement sur la base d'une des requêtes subsidiaires 1 à 4 remises lors de la procédure orale.
Motifs de la décision
Les articles et règles de la CBE qui sont cités ci-après sans mention supplémentaire se rapportent aux dispositions du texte révisé de la Convention sur le brevet européen (CBE 2000), tel qu'entré en vigueur le 13 décembre 2007. Les articles et règles de la CBE suivis de la mention "1973" correspondent aux dispositions de la Convention sur le brevet européen telle qu'en vigueur jusqu'à la date susvisée.
1. Le recours est recevable.
2. Droit applicable
L'article 7(1) de l'Acte de révision de la Convention sur le brevet européen en date du 29 novembre 2000 prévoit des dispositions transitoires lesquelles ont fait l'objet d'une autre décision du Conseil d'administration. L'article premier de la décision du Conseil d'administration du 28 juin 2001 relative aux dispositions transitoires au titre de l'article 7 de l'acte de révision de la Convention sur le brevet européen du 29 novembre 2000 (Edition spéciale nº1 du JO OEB 2007, 197) dispose dans son point 1 que l'article 123 de la CBE révisée et dans son point 2 que les articles 99, 101, 105 et 115 de la CBE révisée sont applicables en l'espèce, parce que le brevet européen en cause était déjà délivré à la date d'entrée en vigueur du texte révisé de la Convention sur le brevet européen (13 décembre 2007).
L'article 2, première phrase de la décision du Conseil d'administration du 7 décembre 2006 modifiant le règlement d'exécution de la Convention sur le brevet européen 2000 (JO OEB 2007, 8) envisage que le règlement d'exécution de la CBE 2000 s'applique à l'ensemble des demandes de brevet européen, des brevets européens et des décisions des instances de l'OEB ainsi qu'aux demandes internationales, dans la mesure où ils sont soumis aux dispositions de la CBE 2000.
3. La déclaration d'intervention de la société SC
3.1 Recevabilité de l'intervention
3.1.1 L'article 105(1)a) et la règle 89 CBE donnent à un tiers la possibilité d'intervenir, sous certaines conditions, dans la procédure d'opposition après l'expiration du délai d'opposition, s'il apporte la preuve qu'une action en contrefaçon fondée sur ce brevet a été introduite à son encontre.
3.1.2 En l'espèce, la déclaration d'intervention a été produite dans la procédure de recours sur opposition en instance, ce qui est recevable selon la décision G 1/94 de la Grande Chambre de recours (JO OEB 1994, 787).
3.1.3 De plus, pour que l'intervention soit recevable, l'action en contrefaçon doit être fondée sur le brevet européen qui fait l'objet de la procédure dans laquelle l'intervention est sollicitée (voir T 338/89 du 10 décembre 1990, point 4.1.2 des motifs de la décision et T 446/95, point 2.1 des motifs de la décision).
3.1.4 Il convient donc dans un premier temps de clarifier ce qui fait l'objet de la procédure d'opposition européenne conformément à la Convention sur le brevet européen (ci-après dénommée "Convention").
L'article 99(1), première phrase CBE prévoit que dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la mention de la délivrance du brevet européen, toute personne peut faire opposition à ce brevet auprès de l'OEB. La Convention définit la notion de "brevet européen" à l'article 2(1) CBE 1973, lequel précise que les brevets délivrés en vertu de la Convention sont dénommés brevets européens. Conformément à l'article 3 CBE 1973, la délivrance d'un brevet européen peut être demandée pour un ou plusieurs des Etats contractants. La procédure d'opposition a donc pour objet un brevet européen qui a été délivré pour au moins un Etat contractant. En revanche, il est indifférent pour la procédure d'opposition de savoir si les effets de ce brevet ont été ou vont être étendus. Cela découle clairement du texte de la règle 84(1) CBE, selon lequel la procédure d'opposition peut seulement être poursuivie sur requête de l'opposant si le titulaire du brevet a renoncé au brevet européen dans tous les Etats contractants désignés ou si le brevet s'est éteint dans tous ces Etats.
C'est pourquoi la chambre conclut que "ce brevet" au sens de l'article 105(1)a) CBE est un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973, c'est-à-dire un brevet délivré pour un ou plusieurs Etats contractants en vertu de la Convention, laquelle est, comme l'a souligné l'intimée, un droit commun aux Etats contractants en matière de délivrance de brevets d'invention, conformément à l'article 1er CBE 1973. En conséquence, l'action en contrefaçon devant une juridiction nationale doit être introduite à propos d'un brevet européen qui a été délivré en vertu de la Convention pour au moins un Etat contractant afin de remplir les conditions de l'article 105(1)a) CBE.
3.1.5 Conformément à la preuve produite par la société SC, l'action en contrefaçon devant le tribunal roumain a pour objet le brevet roumain RO/EP 1108424 qui a été obtenu par l'extension du brevet européen en cause à la Roumanie.
3.1.6 De l'avis de la société SC, le brevet roumain résultant de l'extension d'un brevet européen doit être considéré comme étant le même brevet qu'un brevet européen délivré en vertu de la Convention, parce que le fait que la Roumanie n'était pas partie à la CBE à la date pertinente constitue une différence seulement à l'égard du fondement juridique des effets du brevet européen, et non à l'égard du fait que c'est encore un brevet européen.
La Chambre n'est pas de cet avis pour les raisons suivantes.
3.1.7 L'extension des effets des brevets européens à la Roumanie était possible à compter du 15 octobre 1996, c'est-à-dire à compter de l'entrée en vigueur de l'accord de coopération dans le domaine des brevets conclu entre l'Organisation européenne des brevets et le gouvernement roumain (accord de coopération) (voir JO OEB 1994, 746 et 1996, 601).
L'accord de coopération fait partie des traités internationaux que le Président de l'OEB était autorisé à conclure avec l'approbation du Conseil d'administration (article 33(4) CBE 1973). En tant qu'accord bilatéral, l'accord d'extension traite essentiellement - de façon exhaustive et bien distincte de la CBE - de questions liées à l'intégration, dans le droit national de l'Etat autorisant l'extension, de demandes et de titres de protection européens étendus ainsi que de leur rapport avec les demandes et les titres nationaux sur la base de la loi nationale sur la propriété industrielle (voir par exemple J 14/00, JO OEB 2002, 432, point 1.3.2 des motifs).
3.1.8 Le système d´extension offre aux demandeurs de brevets européens un moyen simple et économique d´obtenir une protection par brevet dans les Etats pour lesquels un accord d'extension conclu avec l'Organisation européenne des brevets est entré en vigueur (Etats autorisant l'extension) (voir par exemple "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1994, 746, deuxième paragraphe et "Extension des effets des brevets européens à la Slovénie", JO OEB 1993, 574, troisième paragraphe, et JO OEB 1994, 75, I. Fondements, deuxième paragraphe). Sur requête du demandeur et moyennant le paiement de la taxe prescrite, les effets des demandes de brevet européen (demandes directes et euro-PCT) et des brevets européens s'étendent à l'Etat autorisant l'extension, lequel n'est toutefois pas partie à la CBE. Ces effets y sont les mêmes que ceux des demandes nationales et des brevets nationaux (voir par exemple "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, points 8 et 9, et les articles 4 et 5(1) du décret d'extension roumain; "Extension des effets des brevets européens à la Slovénie", JO OEB 1994, 75, I. Fondements, deuxième paragraphe, et l'article 1er du décret d'extension du gouvernement slovène, JO OEB 1994, 80).
Comme l'a souligné l'intimée, le système d´extension peut être considéré comme une étape intermédiaire pour un Etat avant son adhésion à la Convention. Cela découle également du préambule de l'accord de coopération roumain, qui énonce que la Roumanie souhaitant accéder à la Convention sur le brevet européen, souhaite, comme étape intermédiaire, avoir un système admettant que les effets du brevet européen puissent être étendus à son territoire (système d'extension).
3.1.9 Bien que la procédure d'extension corresponde pour l´essentiel au système prévu par la CBE, qui est applicable aux Etats parties à la Convention, la validité du système d´extension repose non pas sur l´application directe de la CBE, mais exclusivement sur le droit national inspiré de la CBE (voir par exemple "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, point 15; "Extension des effets des brevets européens à la Slovénie", JO OEB 1994, 75, I. Fondements, deuxième paragraphe; J 14/00, loc. cit., point 1.2.2 des motifs de la décision; J 9/04, point 1.2.2 des motifs de la décision; J 2/05, point 1.2.2 des motifs de la décision; Singer/Stauder, Europäisches Patentübereinkommen, cinquième édition en allemand, 2010, article 2, point 9). Par conséquent, le droit national de l'Etat autorisant l'extension régit la procédure d'extension et les effets juridiques de l'extension. En fait, les dispositions régissant le système d´extension en Roumanie, y compris toutes les conditions et tous les effets juridiques de l'extension, figurent dans le décret d'extension roumain "Monitorul Oficial al Românei, Anul VIII, nº 195, 21 août 1996, 2, 4", c'est-à-dire dans un décret du gouvernement de l'Etat autorisant l'extension (voir "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, deuxième paragraphe).
3.1.10 En ce qui concerne l'applicabilité de la CBE, les dispositions de la Convention, de son règlement d´exécution et du règlement relatif aux taxes de l´OEB ne s´appliquent que dans la mesure où les dispositions nationales y font référence (voir par exemple l'article 10 du décret d´extension roumain et l'article 10 du décret d´extension slovène (loc. cit.); "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, point 15 ; Singer/Stauder, Europäisches Patentübereinkommen, cinquième édition en allemand, 2010, article 79, point 40). Il ressort donc tout à fait clairement du texte du décret d'extension roumain que les références du décret d´extension roumain aux dispositions de la Convention sont exhaustives (voir aussi au sujet du décret d´extension slovène la décision J 14/00, loc. cit., point 1.3.1 des motifs). Conformément aux dispositions roumaines, il n'est fait référence aux dispositions de la CBE qu'en ce qui concerne les délais et les modalités de paiement de la taxe d´extension (voir article 3 du décret d´extension roumain et "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, point 15).
3.1.11 Il résulte de ce qui précède que le brevet européen en cause s'étend au territoire de la Roumanie exclusivement sur la base du droit national de la Roumanie et que, conformément à l'article 5(1) du décret d'extension, il produit les mêmes effets qu'un brevet national (voir aussi "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, point 9).
Toutefois, comme l'a expliqué la société SC, le brevet européen en cause dont les effets s'étendent à la Roumanie n'est pas un brevet national délivré par l'office national de Roumanie. Cette appréciation juridique découle du texte de certaines dispositions du décret d'extension, telles que par exemple les articles 5(1), 8 et 9, selon lesquels il est distingué entre un brevet européen dont les effets sont étendus à la Roumanie et un brevet national (voir aussi "Extension des effets des brevets européens à la Roumanie", JO OEB 1996, 601, points 9, 12 et 14). En l'espèce, les faits diffèrent donc de ceux à la base de la décision T 446/95, si bien que celle-ci n'est à cet égard pas pertinente pour la présente affaire.
3.1.12 Le brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973 est, quant à lui, délivré en vertu de la Convention par l'OEB pour chacun des Etats contractants désignés conformément à l'article 79 CBE 1973. Une fois délivré, un brevet européen a dans chacun des Etats contractants désignés les mêmes effets qu'un brevet national délivré dans cet Etat (articles 2(2) et 64(1) CBE 1973). Il en résulte que le système du brevet européen, y compris les effets d'un brevet européen dans les Etats contractants, repose exclusivement sur l'application directe de la CBE.
3.1.13 Bien qu'il existe certains parallèles entre le système d´extension et le système du brevet européen, ces deux systèmes présentent néanmoins des différences fondamentales. Le système d´extension, y compris toutes les conditions et tous les effets juridiques de l'extension, repose exclusivement sur l'application du droit national, à moins qu'il ne soit expressément fait référence à la CBE. Par ailleurs, le système du brevet européen et les effets d'un brevet européen dans les Etats contractants reposent exclusivement sur l´application directe de la CBE, étant entendu que certaines dispositions de la CBE renvoient au droit national. Il résulte donc de l'extension des effets d'un brevet européen en vertu du droit national de l'Etat autorisant l'extension que le brevet européen a les effets d'un brevet national, alors que la désignation effectuée en application de l'article 79 CBE 1973 a pour conséquence que le brevet européen est délivré par l'OEB sur la base de la Convention et avec effet pour l'Etat contractant désigné (voir Singer/Stauder, Europäisches Patentübereinkommen, cinquième édition en allemand, 2010, article 79, point 40). Eu égard à cette situation juridique différente, la Chambre conclut qu'un brevet étendu au territoire d'un Etat autorisant l'extension n'est pas un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973. Il se peut certes que le brevet roumain résultant de l'extension trouve son origine dans une demande de brevet européen puis dans le brevet européen délivré sur la base de cette demande en vertu de la Convention. Toutefois, même si on admettait cela, ainsi qu'il ressort de la situation juridique exposée ci-dessus, l'extension et les conséquences juridiques en découlant reposent exclusivement sur le droit national, si bien que le brevet résultant de l'extension n'a pas la nature juridique d'un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973.
3.1.14 Selon la Chambre, il en résulte pour l'affaire en instance que le brevet roumain RO/EP 1108424 qui a été obtenu par l'extension à la Roumanie du brevet européen en cause et qui fait l'objet de l'action en contrefaçon devant le tribunal roumain n'est pas un brevet national délivré en Roumanie. La Chambre conclut également que le brevet roumain repose exclusivement sur le droit national, c'est-à-dire sur le droit roumain, et non pas sur la Convention. Autrement dit, le brevet roumain n'est pas un brevet qui a été délivré par l'OEB pour la Roumanie en vertu de la Convention. C'est pourquoi la Chambre considère que le brevet roumain n'est pas un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973. Dès lors, le brevet roumain RO/EP 1108424 ne correspond pas au brevet européen EP 1108424, qui fait l'objet de la présente procédure de recours sur opposition. Il s'ensuit que l'intervention ne remplit pas une des conditions requises à l'article 105(1)a) CBE pour être jugée recevable (voir point 3.1.3 ci-dessus).
3.1.15 En outre, les dispositions du décret d'extension roumain ne se réfèrent pas aux dispositions de l'article 105 CBE. Les références du décret d´extension roumain aux dispositions de la Convention étant exhaustives (voir point 3.1.10 ci-dessus), la question de l'application par analogie de l'article 105 CBE ne se pose même pas.
3.1.16 La société SC invoque le Traité de l'Union européenne (TUE) et l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Accord sur les ADPIC) et demande que les articles 23 et 49 TUE, ainsi que les articles 41(2) et 49 de l'Accord sur les ADPIC soient pris en considération aux fins d'interpréter l'applicabilité de l'article 105 CBE.
La Convention est un droit commun aux Etats parties à la CBE en matière de délivrance de brevets d'invention (article 1er CBE 1973). Elle constitue un arrangement particulier au sens de l'article 19 de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle et un traité de brevet régional au sens de l´article 45(1) PCT (voir le troisième paragraphe du préambule de la Convention). La Convention ne relève pas du droit communautaire (voir Europäisches Patentübereinkommen, Münchner Gemeinschaftskommentar, 1998, article 1er, III, 1.a))
L'Organisation européenne des brevets n'est pas partie à l'Accord sur les ADPIC (voir G 1/97, JO OEB 2000, 322, point 5a) des motifs de la décision). Toutefois, les dispositions de cet accord sont, à l'instar des décisions des Cours européenne et internationale de justice et des décisions nationales, des éléments à prendre en considération par les chambres de recours, mais qui ne lient pas ces dernières (G 2/02 et G 3/02, JO OEB 2004, 483, point 8.6 des motifs de la décision; T 1173/97, JO OEB 1999, 609, point 2.2 des motifs de la décision). Cependant, la Grande Chambre de recours a aussi déclaré: "S'il est légitime que les chambres de recours fassent appel à l'Accord sur les ADPIC pour interpréter des dispositions de la CBE qui prêtent à différentes interprétations, des dispositions particulières de l'Accord sur les ADPIC ne sauraient justifier que l'on méconnaisse des dispositions expresses et non ambiguës de la CBE. Cette façon de procéder reviendrait en effet à usurper le rôle du législateur. (G 2/02 et G 3/02, loc. cit., point 8.6 des motifs de la décision). La Chambre estime que ces considérations valent également pour le TUE.
La Chambre a expliqué (voir points 3.1.1 à 3.1.15 ci-dessus) que les dispositions en vigueur de la Convention, et notamment de son article 105, ainsi que les dispositions nationales du décret d'extension roumain excluent clairement la possibilité d'intervenir dans la procédure sur la base d'une action en contrefaçon ayant pour objet un brevet roumain résultant de l'extension d'un brevet européen à la Roumanie. Il n'est donc pas possible de retenir une interprétation différente fondée sur les dispositions du TUE ou de l'Accord sur l'ADPIC. Il appartient au contraire au législateur compétent de prévoir la possibilité d'une intervention dans un tel cas de figure.
3.1.17 Pour son intervention, la société SC a également fait valoir qu'elle justifiait d'un intérêt pour agir à l'encontre du brevet roumain résultant de l'extension, en raison de la procédure en instance devant le tribunal roumain, et en particulier de la suspension de la procédure de nullité jusqu'à l'issue de la présente procédure de recours. La Chambre admet certes qu'un tel intérêt pour agir peut exister. Toutefois, compte tenu de la situation juridique décrite plus haut en ce qui concerne l'intervention au titre de l'article 105(1)a) CBE, la société SC doit s'adresser à la justice roumaine nationale.
3.1.18 En conséquence, l'intervention sur la base de l'action en contrefaçon devant le tribunal roumain fondée sur le brevet roumain RO/EP 1108424 résultant de l'extension du brevet européen en cause à la Roumanie par la société SC est irrecevable au motif qu'elle n'est pas conforme à l'article 105(1)a) CBE.
3.2 L'article 115, première phrase CBE dispose qu'après la publication de la demande de brevet européen, tout tiers peut présenter des observations sur la brevetabilité de l'invention objet du brevet. Les documents déposés par la société SC au sujet de la brevetabilité de l'invention objet du brevet en cause sont considérés comme des observations de tiers au titre de l'article 115, première phrase CBE. Toutefois, en application de l'article 115, deuxième phrase CBE, la Chambre souligne que la société SC n'a pas acquis la qualité de partie à la présente procédure. En ce qui concerne le fond, les lettres datées du 24 février 2009, du 15 décembre 2009 et du 27 octobre 2010, qui sont considérées comme des observations de tiers suivant l'article 115 CBE, ne contiennent pas d'éléments qui n'étaient pas déjà mentionnés par la requérante.
4. Saisine de la Grande Chambre de recours
4.1 La société SC a requis la saisine de la Grande Chambre de recours au cas où la Chambre déciderait que l'accord d'extension vise à générer des brevets nationaux. Selon la société SC la question de la nature juridique d'un brevet européen étendu à la Roumanie et la question connexe de la recevabilité d'une intervention au titre de l'article 105 CBE constituent des questions de droit d'importance fondamentale.
4.2 Conformément à l'article 112(1)a) CBE 1973, la chambre de recours, soit d'office, soit à la requête de l'une des parties, saisit en cours d'instance la Grande Chambre de recours lorsqu'elle estime qu'une décision est nécessaire.
"Une question de droit d'importance fondamentale" au sens de l'article 112(1)a) CBE 1973 se pose si une telle question est déterminante pour statuer sur un grand nombre d'affaires similaires et si elle est donc d'un grand intérêt tant pour les parties à la présente procédure de recours que pour le public (voir par exemple la décision T 271/85, JO OEB 1988, 341). Toutefois, une question considérée comme une question de droit d'importance fondamentale ne doit pas nécessairement être soumise à la Grande Chambre de recours si la Chambre peut elle-même y répondre de manière certaine (voir par exemple J 5/81, JO OEB 1982, 155 et T 198/88, JO OEB 1991, 254; J 22/95, JO OEB 1998, 569; La jurisprudence des chambres de recours, 6ème édition 2010, VII.E.14.2, qui contient d'autres références). La Chambre a expliqué en détail (voir points 3.1.7 - 3.1.14 ci-dessus) pourquoi le brevet roumain RO/EP 1108424 qui a été obtenu par l'extension du brevet européen en cause à la Roumanie et qui est l'objet de l'action en contrefaçon devant le tribunal roumain n'est pas un brevet national délivré en Roumanie, mais un brevet reposant exclusivement sur le droit national, c'est-à-dire sur le droit roumain, et non pas sur la Convention. La Chambre a aussi expliqué pourquoi le brevet roumain RO/EP 1108424 n'est pas un brevet européen au sens de l'article 2(1) CBE 1973 et pourquoi l'intervention selon l'article 105(1)a) CBE n'est dès lors pas recevable en l'espèce.
4.3 Comme énoncé supra (voir points 3.1.1 à 3.1.18 ci-dessus), la présente Chambre ne doute pas qu'en l'espèce, l'intervention n'est pas recevable parce que le brevet roumain RO/EP 1108424 ne correspond pas au brevet européen EP 1108424, objet de la présente procédure de recours sur opposition. Par conséquent, l'une des conditions prévues à l'article 105(1)a) CBE n'est pas remplie. Il ne se pose donc aucune question de droit d'importance fondamentale qui devrait être clarifiée par la Grande Chambre de recours.
4.4 Pour ces raisons la Chambre juge qu'il n'est pas nécessaire de soumettre les questions de la société SC à la Grande Chambre de recours.
5. L'objection au titre de la règle 106 CBE
L'objection soulevée au titre de la règle 106 CBE doit être rejetée pour les raisons suivantes :
L'article 113(1) CBE 1973 prévoit que les décisions de l'OEB ne peuvent être fondées que sur des motifs au sujet desquels les parties ont pu prendre position. Le droit d'être entendu au sens de l'article 113(1) CBE 1973 s'applique à toutes les procédures devant l'OEB et vaut pour toutes les parties à la procédure (Singer/Stauder, Europäisches Patentübereinkommen, cinquième édition en allemand, 2010, article 113, 2). Les tiers qui, conformément à l'article 115, deuxième phrase CBE, ne sont pas parties à la procédure ne peuvent invoquer le droit d'être entendu (G 4/88, JO OEB 1989, 480, point 2 des motifs). Ni l'Organisation européenne des brevets ni l'Etat de Roumanie ne sont parties à la présente procédure de recours selon l'article 107 CBE 1973. Par conséquent, en l'espèce, le fait que la Chambre ne donne pas à l'Organisation européenne des brevets et à l'Etat de Roumanie la possibilité de présenter leurs observations ne porte pas atteinte au droit d'être entendu.
6. Recevabilité de la requête principale et des requêtes subsidiaires 1 à 4:
Conformément aux dispositions de l'article 13 du Règlement de Procédure de la Chambre de Recours de l'OEB (RPCR), l'admission des requêtes produites après le dépôt du mémoire du recours ou de sa réponse est laissée à l'appréciation de la Chambre. La Chambre exerce son pouvoir d'appréciation en tenant compte, entre autres, de la complexité du nouvel objet, de l'état de la procédure et du principe d'économie de la procédure.
6.1 Requête principale:
Comme il ressort du point XIV ci-dessus, la requête principale, déposée lors de la procédure orale devant la Chambre, a déjà été produite en tant que requête subsidiaire 1 avec la réponse au mémoire de recours du 20 mai 2009. Par conséquent, la Chambre l'a admise dans la procédure (article 13(1) RPCR).
6.2 Requêtes subsidiaires 1 et 3:
Les requêtes subsidiaires 1 et 3, produites lors de la procédure orale devant la Chambre, correspondent aux requêtes subsidiaires 4 et 5, respectivement, qui ont été déposées avec la réponse au mémoire de recours du 20 mai 2009, à cette seule différence qu'au préambule de la revendication 1 des deux requêtes la caractéristique "Trimétazidine ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptable" est remplacée par "Trimétazidine sous forme de dichlorhydrate pharmaceutiquement acceptable". Cette modification a été effectuée pour répondre à une objection d'absence de clarté soulevée par la Chambre, concernant une contradiction entre le préambule et la partie caractérisante, dans laquelle la forme chimique de la trimétazidine est restreinte au dichlorhydrate. Vu que cette objection n'était soulevée pour la première fois qu'au cours de la procédure orale devant la Chambre et que cette modification était prévisible, la Chambre a décidé d'admettre les requêtes subsidiaires 1 et 3 dans la procédure (article 13(1) RPCR).
6.3 Requête subsidiaire 2:
La requête subsidiaire 2 a été modifiée à plusieurs reprises au cours de la procédure de recours. La première version a été remise en tant que requête subsidiaire 3 avec la réponse au mémoire de recours du 20 mai 2009. Au début de la procédure orale devant la Chambre, l'intimée a changé l'ordre des requêtes de telle façon que ladite requête subsidiaire 3 est devenue la requête subsidiaire 2. Ensuite, pour répondre aux objections concernant l'absence de clarté des revendications 1 et 2 soulevées par la Chambre, l'intimée a produit une nouvelle requête subsidiaire 2 (version finale), dans laquelle les objections concernant la revendication 1 ont été levées. Cependant, la modification effectuée dans la revendication 2 ne pouvait pas surmonter les objections concernant l'absence de clarté. Par conséquent, vu que l'intimée a produit un nombre considérable de requêtes subsidiaires et qu'elle avait eu la possibilité de répondre à toutes les objections de clarté formulées lors de la procédure orale devant la Chambre, celle-ci a décidé de ne pas admettre la requête subsidiaire 2 dans la procédure de recours (article 13(1) RPCR).
7. Requête principale:
7.1 Aspects formels:
7.1.1 Article 123(2) et (3) CBE:
La revendication 1 de la requête principale se distingue de la revendication 1 du brevet tel que délivré en ce que le comprimé matriciel est maintenant constitué d?une matière hydrophile et que la méthylcellulose a été supprimée de la liste des polymères dérivés de cellulose. La caractéristique "constitué d?une matière hydrophile" est divulguée à la page 2, ligne 14 de la demande telle que déposée initialement. En outre, la suppression de la méthylcellulose et le raccourcissement de la liste des polymères dérivés de cellulose qui résulte de cette suppression ne conduisent pas à la formation de nouvelles combinaisons spécifiques de caractéristiques. Par conséquent, les conditions de l?article 123(2) CBE sont remplies.
Vu que les modifications de la revendication 1 décrites ci-dessus conduisent à une restriction de l'objet revendiqué, les conditions de l'article 123(3) CBE sont également remplies.
7.1.2 Article 84 CBE 1973:
Vu que l'homme du métier sait parfaitement ce que signifie le terme "matière hydrophile", notamment dans le contexte des matrices constitués par les dérivés de cellulose figurant dans la revendication 1, l'objet revendiqué remplit les conditions de l'article 84 CBE 1973.
7.2 Exposé de l'invention - Article 100 b) CBE 1973:
L'invention telle que définie dans les revendications de la requête principale a trait à un comprimé matriciel, dans lequel la libération du principe actif, à savoir la trimétazidine, est contrôlée par un polymère dérivé de cellulose spécifique.
Tout d'abord, il est à noter que le terme "comprimé matriciel" est parfaitement connu de l'homme du métier. Ainsi, il ressort du document (14a), qui concerne les connaissances de base de l'homme du métier, que les comprimés matriciels sont fabriqués par compression d'un mélange comprenant le principe actif hydrosoluble sous forme granulée et la matière plastique, qui peut être constituée par un dérivé de cellulose. Ladite compression génère la formation d'une matrice cohérente à partir de la matière plastique, dans laquelle le principe actif est uniformément suspendu. Cette portion du principe actif qui est localisée à la surface de la matrice est libérée instantanément, tandis que la libération de la fraction à l'intérieur est retardée (voir le paragraphe "Matrixtabletten" à la page 651 du document (14a)).
Le procédé mentionné ci-dessus, comprenant la granulation du principe actif, puis la compression d'un mélange comprenant le principe actif granulé et un dérivé de cellulose pour former une matrice, est décrit dans le brevet attaqué de façon détaillée (voir la paragraphe [0025]. Par conséquent, l'homme du métier, sachant par ses connaissances de base que la matière plastique, soit en l'occurrence un dérivé de cellulose spécifique, n'est pas simplement dispersée ou suspendue mais forme la structure de la matrice, et que la libération du principe actif localisé à l'intérieur de la matrice est retardé, ce qui dans ce contexte précis est synonyme de contrôlé, il n'a pas besoin d'informations supplémentaires pour exécuter l'invention revendiquée dans son intégralité et n'est pas obligé de faire un effort excessif pour y arriver. Par conséquent, la condition de la suffisance de l'exposé de l'invention est remplie.
7.3 Nouveauté:
7.3.1 Document (1):
Le document (1) a trait à une préparation pharmaceutique à libération retardée comprenant un éther de cellulose non anionique, un copolymère méthoxyéthylène/anhydride maléique et un principe actif (voir revendication 1 et page 1, lignes 3 à 8). L'éther de cellulose non anionique est choisi parmi l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxypropylméthyl-cellulose, la méthylcellulose et l'éthylcellulose, l'hydroxypropylcellulose et l'hydroxypropylméthyl-cellulose étant préférées (voir page 3, lignes 29 à 34). Les formes galéniques utilisées pour l'administration de ladite préparation pharmaceutique comprennent des comprimés, des granules, des grains, des poudres, des cônes dentaires, des films et des gélules dures (voir page 7, lignes 31 à 34). Les principes actifs du document (1) sont cités aux pages 5 à 7, qui mentionnent 17 familles différentes, y compris la famille des vasodilatateurs. Chaque famille comprend une liste de composés spécifiques. Les 17 principes actifs constituant la liste des vasodilatateurs comprennent l'hydrochlorure de trimétazidine ainsi que la nifédipine (voir page 5, lignes 18 à 26). Pour arriver aux comprimés matriciels revendiqués dans la requête principale, il faut d'abord choisir la trimétazidine ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables à partir de la liste des principes actifs figurant aux pages 5 à 7. Il est à noter que la sélection du principe actif ne constitue pas un double choix comprenant d'abord la sélection de la famille des vasodilatateurs et ensuite celle de la trimétazidine à partir des vasodilatateurs comme l'a affirmé l'intimée. La Chambre estime plutôt que le choix du principe actif ne constitue qu'une seule sélection, effectuée à partir d'une seule liste longue comprenant tous les composés figurant aux pages 5 à 7 du document (1). La subdivision en 17 familles ne constitue qu'une mesure rédactionnelle pour rendre la longue liste de principes actifs plus claire. Elle ne nécessite cependant pas une étape supplémentaire de sélection. Au vu de cette conclusion, une discussion des décisions T 454/01 et T 999/01, citées par la requérante au soutien du son argument selon lequel la sélection de la trimétazidine n'implique qu'un seul choix n'est pas nécessaire. Ensuite, il faut cependant choisir les comprimés à partir de la liste des formes galéniques à la page 7, lignes 32 à 34, en tant que sélection supplémentaire.
S'agissant de l'argument de la requérante selon lequel la famille des vasodilatateurs est préférée dans le document (1) du fait que la plupart des exemples concerne des compositions comprenant le vasodilatateur nifédipine, la Chambre note que quatre des treize exemples (les exemples 1, 2, 7 et 8) ont trait aux compositions comprenant la nifédipine en tant que principe actif. Or, cinq autres exemples, à savoir les exemples 3, 4, 9, 10 et 13 concernent des comprimés comprenant en tant que principe actif soit l'indométacine soit l'acide 5-amino-salicylique, qui sont compris dans la famille (1) des agents antipyrétiques, analgésiques ou antiphlogistiques (voir page 5, lignes 3 à 8). Il s'ensuit que la famille des vasodilatateurs fait partie des familles préférées mais ne constitue pas la famille la plus préférée du document (1). En outre, même si on identifie les vasodilatateurs en tant que famille la plus préférée, l'homme du métier est toujours contraint de faire une double sélection; à savoir à partir de la liste des formes galéniques en ce qui concerne les comprimés à partir d'une liste comprenant 17 vasodilatateurs spécifiques en ce qui concerne la trimétazidine. Par conséquent, cette divulgation du document (1) n'est pas destructrice de la nouveauté de l'objet revendiqué dans la requête principale.
Selon la requérante, l'homme du métier pouvait modifier les exemples 1, 2, 7 ou 8 du document (1) en remplaçant la nifédipine par la trimétazidine, qui constitue un autre composé de la famille préférée des vasodilatateurs, pour arriver à l'objet revendiqué. Cette modification spécifique desdits exemples n'est cependant pas divulguée dans le document (1). En effet, les exemples représentent des modes de réalisation concrets de l'invention et ne divulguent que des caractéristiques particulières en combinaison. Par conséquent, la modification desdits exemples sur laquelle se fonde la requérante ne peut être que le fruit d'une interprétation ex post facto du contenu du document (1), à savoir une interprétation faite en ayant connaissance de l'invention et tendant à reconstruire à dessein, à la lecture de ce document, les compositions selon la revendication 1 en litige. Une telle interprétation n'est donc pas admissible.
Dans la décision T 990/96, citée par la requérante à cet égard, la Chambre avait conclu que dans certaines circonstances, l'enseignement technique d'un exemple pouvait être combiné avec l'enseignement technique général divulgué par ailleurs dans le même document (voir point 9.2 des motifs de la décision). Cette combinaison concernait un exemple décrivant la préparation d'un composé stéréospécifique avec un enseignement général selon lequel le produit de chacune des réactions divulguées, y compris du composé préparé dans ledit exemple, pouvait être purifié par des techniques classiques. Dans l'affaire T 990/96, il était donc enseigné clairement et sans équivoque que les méthodes de préparation décrites dans les exemples peuvent être supplémentées par des étapes de purification. Dans le document (1) de la présente espèce, cependant, un tel enseignement n'existe pas. La combinaison d'un des exemples 1, 2, 7 ou 8 avec la divulgation à la page 5, lignes 21 à 22 entraînerait le remplacement de la nifédipine par l'hydrochloride de trimétazidine et donc la création d'une nouvelle composition, ce qui n'est pas permis pour l'évaluation de la nouveauté.
En conclusion, le document (1) ne divulgue pas de façon directe et non équivoque les compositions selon la revendication 1.
7.3.2 Document (21):
Le document (21) a trait aux comprimés matriciels à libération retardée comprenant l'hydroxypropylméthyl-cellulose en tant que constituant de la matrice (voir page 1005, 2**(ème) paragraphe) et un principe actif défini par les paramètres suivants (voir page 1003):
poids moléculaire 266,33 (base)
solubilité dans l'eau >50% (w/v)
pH d'une solution aqueuse de 1% 3,15
pKa 4 et 9
coefficient de distribution d'une
solution (150ng/ml) dans l'eau environ 0,25
dont le pH est 7,1
demi-vie dans le plasma humain < 6 heures.
La trimétazidine ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables ne sont pas mentionnés dans ce document.
Tout document de l'état de la technique détruit la nouveauté de l'objet revendiqué lorsque celui-ci découle directement et sans équivoque de ce document, y compris les caractéristiques implicites pour l'homme du métier d'après ce qui est expressément mentionné dans le document. En l'espèce, il est à noter que plusieurs desdits paramètres, sont définis soit par des gammes (solubilité dans l'eau; demi-vie dans le plasma) soit par des valeurs peu précises (coefficient de distribution), et qu'ils sont donc vagues. La Chambre estime que l'objet défini par l'ensemble des paramètres énumérés ci-dessus n'est pas forcément restreint à la trimétazidine mais pourrait comprendre d'autres composés, ce qui est suffisant pour conclure que le document (21) ne divulgue pas directement et sans équivoque la trimétazidine ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables.
Il s'ensuit que l'objet de la requête principale est nouveau (Article 54(1) CBE 1973).
7.4 Activité inventive:
7.4.1 L'invention définie par l'objet revendiqué dans la requête principale concerne la mise au point d'un comprimé matriciel permettant la libération prolongée de la trimétazidine ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables après administration par voie orale (voir paragraphe [0001] du brevet attaqué).
7.4.2 Au cours de la procédure de recours, quatre documents, à savoir les documents (1), (2), (13) et (21), ont été proposés par les parties en tant qu'état de la technique le plus proche. La Chambre estime qu'au vu de l'enseignement technique du brevet attaqué, décrit au paragraphe précédent, l'état de la technique le plus proche devrait aussi concerner la libération prolongée d'un principe actif à partir d'un comprimé matriciel. Par conséquent, le document (2), qui concerne une composition pharmaceutique dans laquelle la libération contrôlée de la trimétazidine est assurée par un système réservoir comprenant un film constitué d'un mélange contenant un polymère tel que l'éthylcellulose et un plastifiant qui enrobe des comprimés ou des minigranules contenant la trimétazidine ou l'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables (voir revendications 1, 2 et 6), ne peut être considéré comme constituant l'état de la technique le plus proche. Bien que des polymères identiques et le même principe actif soient utilisés, l'homme du métier ne transférerait pas un effet technique obtenu avec un système de réservoir au système très différent des comprimés matriciels.
7.4.3 Le document (13) a pour objet des comprimés matriciels à libération prolongée contenant un principe actif choisi parmi l'hydrochloride de diltiazème, de trimétazidine ou de dilazep, un polymère entérique choisi parmi le phtalate d'hydroxypropylméthylcellulose, le phtalate d'acétate de cellulose ou la carboxyméthylcellulose, et une huile durcie comme agent de modification de l'élution (voir page 2, lignes 5 à 27). Les dérivés de cellulose figurant dans la présente revendication 1 n'y sont pas mentionnés. La requérante a fait référence à l'exemple 2(a) et à l'exemple comparatif (1) du document (13), qui décrivent tous les deux des comprimés comprenant le diltiazème, le phtalate d'hydroxypropylméthylcellulose, une huile durcie, du lactose, du stéarate de magnésium et, en tant que polymère supplémentaire, l'hydroxypropylcellulose (voir le tableau aux pages 6 et 7). L'exemple 5 dudit document (13) a pour objet des comprimés contenant l'hydrochloride de trimétazidine, le phtalate d'hydroxypropylméthylcellulose, une huile durcie, du lactose et du stéarate de magnésium (voir page 7, lignes 17 à 28). Des comprimés contenant et la trimétazidine et des dérivés de cellulose tels que revendiqués dans la présente requête principale ne sont pas divulgués dans le document (13). En outre, le document (13) ne contient aucune information en ce qui concerne la fonction de l'hydroxypropylméthylcellulose utilisée dans l'exemple 1(a) et l'exemple comparatif (1). Il n'y a notamment aucun enseignement qui associerait l'hydroxypropyl-méthylcellulose à la libération contrôlée de l'hydrochloride de diltiazème. Par conséquent, le document (13) ne constitue pas non plus l'état de la technique le plus proche.
7.4.4 Le document (21) a pour objet une étude sur trois formes galéniques à libération contrôlée différentes, à savoir des comprimés comprenant une matrice hydrophile, des gélules comprenant une matrice lipophile et des comprimés caractérisés par un système de type réservoir (voir page 1005). Les polymères formant la matrice hydrophile comprennent des dérivés de cellulose tels que l'hydroxypropylcellulose ou l'hydroxyéthylcellulose ainsi que la polyvinylpyrrolidone (voir page 1006, 2**(ème) paragraphe). L'exemple spécifique exposé à la page 1007 a trait à un comprimé à matrice hydrophile, caractérisé en ce qu'il comprend entre autres 80 mg (= 26,7%) de principe actif et 112,0 mg (= 37,3%) d'un dérivé de cellulose choisi parmi l'hydroxypropyl-cellulose et l'hydroxyéthylcellulose. Comme il ressort du 7.3.2 ci-dessus, le document (21) ne mentionne ni des agents spécifiques ni des classes de principes actifs ni des maladies ou inconvénients susceptibles d'être traités par les principes actifs. Les seules indications concernant le principe actif se trouvent dans le tableau 1 (voir page 1003), qui définit le principe actif par les paramètres énumérés au point 7.3.2 ci-dessus. Cependant, lesdits paramètres ne révèlent aucun effet thérapeutique. La Chambre estime que l'homme du métier qui essaye de mettre au point un comprimé matriciel permettant la libération prolongée de trimétazidine partirait d'un état de la technique ayant aussi trait à la trimétazidine ou au moins à un principe actif ayant des effets pharmacologiques similaires. Dans ce contexte, il y a lieu de noter que la Chambre n'est pas d'avis que le fait que l'auteur du document (21) est identique à l'inventeur indiqué dans le brevet attaqué suggérait à l'homme du métier que lesdits paramètres du document (21) ne peuvent définir que la trimétazidine comme l'a affirmé la requérante. Le document (21) inclut tous les principes actifs répondant à la définition donnée par lesdits paramètres du tableau 1. Par conséquent, il ne constitue pas non plus l'état de la technique le plus proche.
7.4.5 Comme il ressort du 7.3.1 ci-dessus, le document (1) a pour objet la mise au point d'une préparation pharmaceutique à libération retardée comprenant un éther de cellulose non anionique, tel que l'hydroxypropylcellulose ou l'hydroxypropylméthyl-cellulose en tant que polymères préférés, un copolymère méthoxyéthylène/anhydride maléique et un principe actif. Bien que les formes galéniques qui assurent ladite libération retardée ne soient pas restreintes aux comprimés matriciels, mais comprennent d'autres formes telles que les granules, les grains, les poudres, les cônes dentaires, les films et les gélules dures (voir page 7, lignes 31 à 34), les comprimés constituent une forme galénique préférée, vu que tous les exemples s'y réfèrent. En outre, la préparation des comprimés, qui comprend l'étape de compression d'un mélange comprenant les polymères mentionnés ci-dessus, le principe actif et un agent glissant, indique clairement et sans équivoque qu'il s'agit des comprimés matriciels (voir exemple 1). En ce qui concerne le principe actif, il est à noter qu'aucun des exemples du document (1) ne divulgue la trimétazidine. Pourtant, comme indiqué au point 7.3.1 ci-dessus, l'hydrochloride de trimétazidine est mentionné à la page 5, lignes 21 à 22 dans une longue liste de principes actifs. La Chambre considère que le document (1) constitue le meilleur point de départ pour apprécier l'activité inventive de l'objet revendiqué.
7.4.6 Au sujet de la définition du problème à résoudre par rapport à l'état de la technique le plus proche, l'intimée a affirmé qu'il consistait à mettre au point une formulation solide qui permet de maintenir une protection myocardique efficace du sujet malade pendant le nycthémère et en particulier au petit matin. Cette protection myocardique serait assurée par un profil de libération spécifique, caractérisée par un taux plasmatique élevé entre deux prises et un taux plasmatique élevé dès l'administration.
Selon la jurisprudence constante des chambres de recours, l'approche problème-solution comprend l'étape consistant à examiner si le problème défini par rapport à l'état de la technique le plus proche a bien été résolu par l'objet revendiqué. Si tel n'est pas le cas, le problème doit être reformulé. Dans le cas d'espèce, il est à noter que la revendication 1 de la requête principale ne contient aucune limitation en ce qui concerne les pourcentages pour le dérivé de cellulose et le principe actif utilisés dans le comprimé matriciel. La Chambre estime que la réalisation des profils de libération spécifiques tels qu'indiqués ci-dessus, exige une définition plus précise de l'objet revendiqué, ce qui est confirmé dans la description du brevet attaqué, qui enseigne que le pourcentage de polymère dérivé de cellulose est compris entre 25 et 50% de la masse totale du comprimé et que le pourcentage de dichlorhydrate de trimétazidine est compris entre 15 et 30 % de la masse totale du comprimé (voir paragraphes [0012] et [0017]). La Chambre en conclut que l'objet de la revendication 1 de la requête principale ne résout pas le problème défini ci-dessus dans son intégralité. Par conséquent, le problème à résoudre ne peut être défini que comme la mise à disposition d'autres comprimés matriciels qui permettent la libération contrôlée de la trimétazidine. Au vu des exemples figurant dans le brevet attaqué, il est plausible que le problème ait bien été résolu par les comprimés matriciels objet de la revendication 1 de la requête principale.
La question qui se pose à présent est donc de savoir si cette solution découlait à l'évidence de l'état de la technique disponible pour l'homme du métier. A ce sujet, les exemples du document (1) démontrent précisément que des comprimés matriciels comprenant soit l'hydroxy-propylcellulose (voir exemples 1-3, 5-8 et 10-12) soit l'hydroxypropylméthylcellulose (voir exemples 4, 9 et 13) sont capables d'effectuer une libération contrôlée du principe actif. En outre, le document (1) (voir page 4, ligne 33 à page 5, ligne 2) enseigne que cet effet de libération contrôlée qui, dans lesdits exemples, est démontré par la nifédipine (voir exemples 1-2 et 7-8), l'indométacine (voir exemples 3-4 et 9-10), l'hydrochloride de propranolol (voir exemples 5 et 11), la triamcinolone (voir exemples 6 et 12) et l'acide 5-aminosalicylique (voir exemple 13), est susceptible d'être obtenu avec tous les principes actifs figurant aux pages 5 à 7 du même document. Dans ces circonstances, la Chambre est convaincue que l'homme du métier à la recherche d'une solution au problème tel que défini ci-dessus aurait abouti aux comprimés matriciels selon la revendication 1 de la requête principale au vu de l'enseignement du document (1). Par conséquent, les conditions de l'article 56 CBE 1973 ne sont pas remplies.
Il n'y a donc pas lieu d'examiner la revendication indépendante 16 de la requête principale.
8. Requête subsidiaire 1:
La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 diffère de celle de la requête principale en ce que le principe actif est maintenant restreint au dichlorhydrate de trimétazidine et en ce que le dichlorhydrate de trimétazidine est présent dans un pourcentage compris entre 15 et 30% de la masse totale du comprimé.
8.1 Aspects formels:
Les caractéristiques mentionnées au point 8 ci-dessus sont divulguées à la page 3, lignes 17 à 20 de la demande telle que déposée initialement. Par conséquent, les conditions de l?article 123(2) CBE sont remplies. Vu que les modifications de la revendication 1 décrites ci-dessus conduisent à une restriction de l'objet revendiqué, les conditions de l'article 123(3) CBE sont également remplies.
8.2 En ce qui concerne l'exposé de l'invention et la nouveauté, le raisonnement exposé aux points 7.2 et 7.3 ci-dessus s?applique par analogie à l'objet de la requête subsidiaire 1.
8.3 Activité inventive:
La Chambre note que l'intimée a précisé l'objet revendiqué en ce qui concerne le principe actif et sa concentration dans le comprimé matriciel. La revendication 1 de la requête subsidiaire 1, cependant, ne contient aucune limitation concernant la concentration du dérivé de cellulose, bien que dans la description, un pourcentage compris entre 25 et 50% soit défini en tant que caractéristique essentielle (voir paragraphe [0012] du brevet attaqué). Il s'ensuit que le problème à résoudre par rapport au document (1), qui constitue toujours l'état de la technique le plus proche, reste inchangé: c'est toujours la mise à disposition d'autres comprimés matriciels qui permettent la libération contrôlée de la trimétazidine. En ce qui concerne la question de savoir si la solution dudit problème découle à l'évidence de l'état de la technique, il est fait référence au raisonnement indiqué au point 7.4.6 ci-dessus, qui s?applique par analogie à la revendication 1 de la requête subsidiaire 1. Dans ce contexte, il y a lieu de noter que le choix d'un pourcentage compris entre 15 et 30% pour le dichlorhydrate de trimétazidine, qui n'est pas divulgué dans le document (1), ne permet pas d'établir une activité inventive en l'absence d'un effet imprévisible. Or, le brevet attaqué ne contient aucun indice quant à l'existence d'un tel effet. Il apparaît qu'une telle gamme est usuelle, de sorte que l'homme du métier essayant de mettre en oeuvre l'invention du document (1) choisirait pour le dichlorhydrate de trimétazidine un pourcentage compris entre ces limites. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 1 ne remplit pas les conditions de l'article 56 CBE 1973.
Il n'y a donc pas lieu d'examiner la revendication indépendante 14 de la requête subsidiaire 1.
9. Requête subsidiaire 3:
La revendication 1 de la requête subsidiaire 3 diffère de celle de la requête subsidiaire 1 en ce que le pourcentage du dérivé de cellulose est maintenant compris entre 25 et 50% de la masse totale du comprimé.
9.1 Aspects formels:
9.1.1 Article 123(2) CBE:
Ledit pourcentage du dérivé de cellulose est divulgué à la page 3, lignes 1 à 3 de la demande telle que déposée initialement. En ce qui concerne la suppression de la méthylcellulose et le raccourcissement de la liste des polymères dérivés de cellulose ainsi que l'introduction d'un pourcentage compris entre 15 et 30% pour le dichlorhydrate de trimétazidine, voir le raisonnement exposé aux points 7.1.1 et 8.1, respectivement, qui s?applique par analogie à l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 3.
En outre, la requérante a fait valoir que les comprimés définis par la présente revendication 1 étaient le résultat de plusieurs sélections, créant de nouvelles combinaisons spécifiques, ce qui, selon elle, est contraire à l'article 123(2) CBE. Lesdites sélections concernaient le choix:
a) de l'hydroxypropylcellulose, l'hydroxyéthylcellulose, l'hydroxyméthylcellulose et l'hydroxypropylméthyl-cellulose à partir de la liste des dérivés de cellulose
b) d'un pourcentage compris entre 25 à 50% pour lesdits dérivés de cellulose
c) du dichlorhydrate de trimétazidine à partir des sels pharmacologiquement acceptables
d) d'un pourcentage compris entre 15 à 30% pour ledit dichlorhydrate de trimétazidine.
La Chambre ne partage pas cet avis pour les raisons suivantes: en ce qui concerne le pourcentage pour le dérivé de cellulose (caractéristique b) ci-dessus), il est à noter que la divulgation dans la description de la demande initiale (voir page 3, lignes 1 à 3) est d'un caractère général, c.-à-d. qu'elle s'applique à tous les dérivés de cellulose, y compris les quatre composés cités dans la présente revendication 1. Concernant le choix du dichlorhydrate (caractéristique c) ci-dessus), il est souligné que ce composé constitue le sel préféré de la trimétazidine. Finalement, il y a lieu de noter que le pourcentage compris entre 15 à 30% (caractéristique d) ci-dessus) n'est pas divulgué en combinaison avec un sel quelconque de trimétazidine, mais se réfère spécifiquement au dichlorhydrate (voir page 3, lignes 19-20). Il s'ensuit que l'objet de la requête subsidiaire 3 remplit les conditions de l'article 123(2) CBE.
9.1.2 Article 123(3) CBE:
La Chambre ne peut pas accueillir le raisonnement de la requérante selon lequel la combinaison des caractéristiques mentionnée au point 9.1.1 ci-dessus a pour effet la création d'un nouvel objet qui n'est pas couvert par les revendications du brevet tel que délivré (aliud) et qu'ainsi la protection conférée par le brevet tel que délivré s'en trouverait élargie, contrairement aux exigences de l'article 123(3) CBE. Vu que toutes les modifications de la revendication 1 décrites ci-dessus conduisent à une restriction de l?objet revendiqué, l'objet revendiqué dans la requête subsidiaire 3 est nécessairement compris dans l'objet des revendications du brevet tel que délivré. Par conséquent, les conditions de l?article 123(3) CBE sont également remplies.
9.1.3 Article 84 CBE 1973:
En ce qui concerne la requête subsidiaire 3, la requérante n'a soulevé aucune objection au titre de l'article 84 CBE 1973. La Chambre estime que les conditions de l'article 84 CBE 1973 sont remplies.
9.2 Exposé de l'invention et nouveauté:
Il est fait référence au raisonnement exposé aux points 7.2 et 7.3 ci-dessus, qui s'applique par analogie à l'objet revendiqué dans la requête subsidiaire 3.
9.3 Activité inventive:
Vu les modifications effectuées dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 3, le problème à résoudre à partir du document (1), qui constitue l'état de la technique le plus proche, peut être défini comme la mise au point d'un comprimé matriciel qui permet de maintenir une protection myocardique efficace du sujet malade pendant le nycthémère et en particulier au petit matin. La solution proposée à ce problème concerne un comprimé matriciel comme défini dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 3, qui est caractérisé par une gamme de concentration restreinte d'un sel spécifique de trimétazidine, à savoir le dichlorhydrate, et d'une gamme de concentration restreinte de quatre polymères dérivés de cellulose. Les exemples du brevet attaqué, et notamment l'exemple 4, montrent que des comprimés matriciels comprenant cette combinaison de caractéristiques spécifiques donnent un profil de libération du principe actif, qui est caractérisé par un pic plasmatique important juste après l'administration et un deuxième taux élevé entre deux prises. Il est fait référence à la figure 1 du brevet attaqué, qui montre pour l'échantillon F3 un premier pic après 74 heures (= 2 heures après la prise du comprimé) et un deuxième pic après 76 heures (= 4 heures après la prise du comprimé). Un tel profil de libération assure la protection myocardique recherchée. La Chambre a bien noté que tous les exemples du brevet attaqué concernent des comprimés matriciels comprenant l'hydroxypropyl-méthylcellulose en tant que polymère dérivé de cellulose. Elle estime cependant que l'hydroxypropylméthylcellulose est représentatif des polymères dérivés de cellulose figurant dans la revendication 1, qui sont tous très proches en ce qui concerne leur structure et leurs propriétés. Il est à noter que la requérante n'a pas produit de preuves qui démontreraient le contraire. Sur la base du document (22) pour montrer que l'objet revendiqué ne résout pas le problème technique, la requérante allègue que les comprimés matriciels divulgués dans ce document donnent des profils de libération différents bien qu'ils soient identiques aux comprimés matriciels tels que revendiqués dans la présente requête subsidiaire 3. Certes, le profil de libération de la figure 2 du document (22) est différent de celui montré dans la figure 1 du brevet attaqué en ce qui concerne la durée d'un cycle d'administration. La figure 2 du document (22) concerne une étude in vitro, dans laquelle on a mesuré la libération du principe actif pendant 24 heures, tandis que la figure (1) du brevet attaqué a trait à un essai in vivo, où l'administration du principe actif est répétée toutes les 12 heures. Cependant, malgré cette différence concernant le rythme d'administration, le profil de libération de la figure 2 du document (22) comprend des caractéristiques très importantes pour la solution du problème technique défini ci-dessus, à savoir un premier pic après 3 heures, qui est suivi par un deuxième pic plus important après 6 heures. Il s'ensuit qu'au lieu de prouver que le problème technique n'est pas résolu par l'objet de la présente revendication 1 dans son intégralité, comme allégué par la requérante, le document (22) confirme l'enseignement du brevet attaqué. Par conséquent, la Chambre estime que le problème a bien été résolu par les comprimés matriciels objet de la présente revendication 1.
La question qui se pose maintenant est donc de savoir si cette solution découlait à l'évidence de l'état de la technique disponible pour l'homme du métier. Comme il ressort du point 7.4.6 ci-dessus, les exemples du document (1) démontrent que des comprimés matriciels comprenant soit l'hydroxypropylcellulose soit l'hydroxy-propylméthylcellulose sont capables d'effectuer une libération contrôlée du principe actif, qui est différent du dichlorhydrate de trimétazidine. Cependant, le document (1) ne contient aucune information en ce qui concerne le profil de libération à partir des comprimés matriciels. Par conséquent, l'homme du métier qui se fonde sur les exemples du document (1) ne dispose d'aucune incitation à remplacer la nifédipine ou l'indométhacine par le dichlorhydrate de trimétazidine dans un pourcentage compris entre 15 et 30% de la masse totale du comprimé pour obtenir un profil de libération caractérisé par un pic plasmatique initial, qui est suivi par un deuxième pic plus important, assurant ainsi une protection myocardique efficace. Vu que les documents (2), (13) et (21) ne sont pas pertinents pour l'évaluation de l'activité inventive pour les raisons indiquées aux points 7.4.2 à 7.4.4 ci-dessus, la combinaison de l'enseignement du document (1) avec celui de l'un quelconque desdits documents (2), (13) et (21) ne pourrait pas non plus rendre évident l'objet de la présente revendication 1. Par conséquent, l'objet de la revendication 1 de la requête subsidiaire 3 implique une activité inventive.
Il en est de même pour la revendication indépendante 13, qui a trait à un procédé de préparation desdits comprimés matriciels.
Les conditions de l'article 56 CBE 1973 sont donc remplies.
9.4 Il s'ensuit que, compte tenu des modifications apportées par l'intimée conformément à la requête subsidiaire 3, les revendications de la requête subsidiaire 3 satisfont aux exigences de la CBE. Par conséquent, l'affaire doit être renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sous forme modifiée conformément à l'article 101(3)a) CBE, pour autant qu'une description soit adaptée et que les conditions prévues par le règlement d'exécution soient remplies.
10. Dans ces circonstances, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête subsidiaire 4.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
1. L'objection soulevée par la société SC Gedeon Richter Romania SA selon la règle 106 CBE est rejetée.
2. La requête en saisine de la Grande Chambre de recours est rejetée.
3. L'intervention est irrecevable.
4. Les écrits soumis au dossier par la société SC Gedeon Richter Romania SA sont considérés comme des observations présentées au titre de l'article 115 CBE.
5. La décision attaquée est annulée.
6. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sous forme modifiée avec les revendications suivantes et une description qui y doit être adaptée:
Revendications Nº 1 à 13 produites comme requête subsidiaire 3 à la procédure orale.