T 1129/07 (Procédé de préparation d'un sirop de polyols/Roquette Frères) of 21.1.2009

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2009:T112907.20090121
Date de la décision : 21 Janvier 2009
Numéro de l'affaire : T 1129/07
Numéro de la demande : 00402952.6
Classe de la CIB : C07C 31/26
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Procédé de préparation d'un sirop de polyols non cristallisable
Nom du demandeur : Roquette Frères
Nom de l'opposant : Cerestar Holding B.V.
Chambre : 3.3.10
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Modifications allant au-delà de la demande telle que déposée (non)
Modifications fondées sur la description (oui)
Activité inventive (oui) - solution non évidente
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0009/91
T 0301/87
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le requérant (propriétaire du brevet) a introduit un recours le 3 juillet 2007 contre la décision de la division d'opposition de révocation du brevet européen nº1095925 signifiée par voie postale le 7 mai 2007.

II. Une opposition avait été formée par l'intimé (opposant) en vue d'obtenir la révocation du brevet dans sa totalité en invoquant le motif de défaut d'activité inventive (Article 100(a) CBE) et de suffisance d'exposé de l'invention dans le brevet (Article 100(b) CBE), se fondant entre autres sur le document :

(1) US-A-5 773 604.

III. la Division d'Opposition avait considéré que l'objet des revendications du brevet délivré était suffisamment exposée dans le brevet pour qu'un homme du métier pût l'exécuter, mais qu'il était évident au vu du document (1).

L'homme du métier souhaitant reproduire l'invention n'avait qu'à choisir une température de travail située entre la limite supérieure de 30ºC requise par l'invention et une limite inférieure compatible avec un passage convenable du sirop sur la résine cationique qu'il pouvait déterminer à l'aide de ses connaissances techniques sans que cela représentât une charge de travail excessive. L'objection à l'encontre de l'objet de la revendication 7 représentait plutôt une objection de clarté. La revendication 7 étant dépendante de la revendication 1, le sirop y décrit était celui résultant d'un procédé remplissant les condition énoncées à l'Article 83 CBE.

Le document (1) constituait l'art antérieur le plus proche. Le problème technique était celui d'améliorer les performances du procédé de préparation des compositions de polyols non cristallisables y divulgué. Il était connu du document (1) que la coloration d'un sirop de polyols en milieu alcalin était liée à la présence de sucres réducteurs résiduels, l'amélioration de sa stabilité passait donc par l'élimination de ces sucres réducteurs. La solution proposée caractérisée par un passage sur résine cationique forte à une température inférieure à 30ºC était évidente car il était connu des documents cités dans la procédure d'opposition que l'hydrolyse glycosidique se produisant lors du passage sur des résines cationiques et aboutissant à un accroissement de sucre réducteur augmentait avec la température.

IV. Pendant la procédure orale tenue devant la chambre le 21 janvier 2009, le requérant a défendu son brevet sur le fondement d'une nouvelle requête principale soumise lors de ladite procédure orale remplaçant toutes requêtes précédentes.

La revendication 1 de la requête principale s'énonce comme suit :

"1. Procédé de préparation d'un sirop de polyols non cristallisable, stable à la chaleur et en milieu alcalin, mettant en oeuvre une étape d'hydrogénation d'un sirop de sucres et une étape de caramélisation du sirop de sucres hydrogéné, caractérisé par le fait que le sirop de sucres hydrogéné et caramélisé subit une purification sur résines échangeuses d'ions, ladite purification comprenant au moins un passage sur résine cationique forte à une température inférieure à 30 ºC, ladite température étant choisie en fonction du taux de sucres réducteurs recherché dans le sirop de polyols non cristallisable et par le fait que la caramélisation est conduite dans le réacteur d'hydrogénation, sous hydrogène et sans séparation du catalyseur, par introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation, sans ajout de tampon, lorsque la teneur en sucres réducteurs résiduels est inférieure à 0,2%."

V. Selon le requérant, les amendements dans la revendication étaient supportés par les passages de la page 8, lignes 5 à 8 (premier paragraphe) et ligne 11 (deuxième paragraphe), et de la page 9, lignes 18 à 20 de la demande telle que déposée. Le mode de réalisation décrit dans le deuxième paragraphe de la page 8 de la demande originale divulguant la caractéristique "sans ajout de tampon" à la ligne 11 était directement relié à celui du paragraphe précédent en raison de l'expression "en effet". Par ailleurs, le mode de réalisation du premier paragraphe divulguait déjà cette caractéristique à la ligne 8.

Le moment d'introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation était défini de façon générale dans le premier paragraphe de la page 8 en faisant référence à la stabilité du pH. Le moment indiquant quand cette stabilité de pH était atteinte était précisément défini à la page 9, lignes 18 à 20 en fonction de la teneur en sucres réducteurs résiduels. Cette caractéristique a donc été introduite dans la revendication, la stabilité du pH faisant le lien entre les deux passages. L'agent alcalin dont il était question dans ce passage ne devait pas être interprété restrictivement comme signifiant la soude, cette dernière ne constituant qu'un mode préféré de réalisation comme mentionné à la page 8, lignes 16 à 18.

Le document (1) représentait l'art antérieur le plus proche. Le problème technique à résoudre partant de ce document (1) était celui de la mise à disposition d'un procédé plus rapide de fabrication d'un sirop de polyols non cristallisable, engendrant moins de rejets et aboutissant à une meilleure qualité de produit caractérisée par une stabilité constante. Le procédé revendiqué ne découlait pas de l'état de la technique même si le problème à résoudre n'était que celui de la mise à disposition d'un procédé alternatif de préparation d'un sirop de polyols non cristallisable, stable à la chaleur et aux alcalis. Le document

(16) JP-A-41-12212, sous forme de sa traduction en anglais,

auquel s'est référé l'intimé (opposant) pendant la procédure de recours, divulguait un procédé de préparation de sorbitol pur, donc cristallisable. De plus le sorbitol étant dérivé d'un monosaccaride sans liaison glucosidique, il n'y avait aucun risque de son hydrolyse pendant l'étape de purification sur une résine cationique forte à température élevée. L'homme du métier ne se serait donc pas tourné vers ce document dans le but de mettre à disposition un procédé alternatif d'un sirop de polyols non cristallisable et, quand bien même, la combinaison de l'enseignement du document (1) avec celui du document (16) n'aurait pas abouti au procédé revendiqué car le document (16) n'enseignait ni une température de passage sur une résine cationique forte inférieure à 30ºC, ni l'introduction de l'agent alcalin dans le réacteur d'hydrogénation lorsque la teneur en sucres résiduels était inférieure à 0,2%.

VI. Lors de la procédure orale devant la chambre, l'intimé (opposant) n'a pas maintenu son objection d'insuffisance d'exposé de l'invention.

La revendication a été limitée au mode de réalisation divulgué dans le premier paragraphe de la page 8, mais sans la caractéristique du moment où le pH était susceptible d'être stable. L'omission de cette caractéristique essentielle enfreignait aussi bien les dispositions de l'Article 123(2) CBE que celle du fondement sur la description de l'Article 84 CBE, l'homme du métier ne sachant quand la stabilité du pH était atteinte.

Le mode de réalisation sans ajout de tampon décrit à la page 8, ligne 11 n'a pas été divulgué expressément en association avec le mode de réalisation décrit dans le paragraphe précédant des lignes 5 à 8 divulguant la caramélisation dans le réacteur d'hydrogénation sous hydrogène et sans séparation du catalyseur. La caractéristique relatant de la teneur en sucres réducteurs résiduels inférieure à 0,2% divulguée à la page 9, lignes 18 à 20 n'était pas divulguée en combinaison avec le mode de réalisation de la caramélisation dans le réacteur d'hydrogène divulgué dans le premier paragraphe de la page 8. L'introduction de ces caractéristiques en combinaison dans la revendication 1 allait par conséquent au-delà de la divulgation initiale.

L'introduction de l'agent alcalin lorsque la teneur en sucres réducteurs résiduels était inférieure à 0,2%, telle que divulguée aux lignes 18 à 20 de la page 9 de la demande initiale, concernait exclusivement la soude comme agent alcalin puisque la ligne 11 de la même page se référait spécifiquement au critère d'introduction de la soude. De plus, l'exemple 1, le seul exemple divulguant la caramélisation dans le réacteur d'hydrogénation, ainsi que la revendication 2 qui concernait ce mode de réalisation, étaient restreints à l'utilisation de la soude. L'amendement dans la revendication 1 visant à généraliser la soude en tant qu'agent alcalin manquait donc de divulgation dans la demande initiale. Par conséquent, la revendication avait non seulement été amendée en enfreignant les dispositions de l'Article 123(2) CBE, mais encore, ne se fondait pas sur la description, contrairement aux exigences de l'Article 84 CBE.

Le document (1) était l'art antérieur le plus proche car divulguant toutes les caractéristiques du procédé revendiqué sauf la température du passage sur la résine cationique et la mise en oeuvre de l'étape de caramélisation dans le réacteur d'hydrogène. La teneur en sucres réducteurs résiduels des sirops de polyols soumis à la caramélisation était divulguée dans le paragraphe reliant les colonnes 5 et 6 et donc ne constituait pas une caractéristique distinctive du procédé revendiqué.

Le document (16) cité dans le brevet litigieux divulguait un procédé de préparation d'un sirop de glucose hydrogéné qui n'était pas cristallisable car le glucose de départ était de faible pureté. Ce document décrivait un mode de réalisation où la caramélisation était conduite dans le réacteur d'hydrogénation sous hydrogène et sans séparation du catalyseur. Le procédé revendiqué était donc la combinaison évidente des enseignement du document (1) et document (16). D'autre part, l'exemple 1 du document (16) divulguait une teneur en sucres réducteurs résiduels du sirop de polyols soumis à la caramélisation de 0,15%.

VII. Le requérant a demandé l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur le fondement de la requête principale déposée pendant la procédure orale devant la Chambre.

L'intimé a demandé le rejet du recours.

VIII. La Chambre a rendu sa décision à la fin de la procédure orale.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

Requête principale

2. Recevabilité

Cette requête soumise pendant la procédure orale tenue devant la Chambre, est donc tardive, et se pose par conséquent la question de son admission dans la procédure à tel stade.

Cette requête correspond principalement à la requête auxiliaire soumise par écrit en temps utile et n'en diffère que par l'introduction de la caractéristique "sans ajout de tampon" suite à une objection de l'intimé constatant que cette caractéristique devait être incorporée dans la revendication 1 de la requête auxiliaire alors pendante sous peine d'enfreindre l'Article 123(2) CBE. Ainsi, la revendication 1 de la nouvelle requête principale constitue une réponse à une objection formelle, suggérée de surcroît par l'intimé, et ne saurait créer une situation inattendue ou surprendre l'intimé, lequel n'a d'ailleurs pas émis d'objection quant à sa recevabilité.

En ce qui concerne la revendication 2, suite à une remarque de la Chambre, la caractéristique qui avait été ajoutée à cette revendication a été supprimée, la revendication 2 de la requête principale restant finalement identique à celle du brevet délivré.

En conséquence, la requête principale est admise dans la procédure.

3. Amendements (Article 123 (2), (3) CBE)

La revendication 1 a été modifiée par rapport à la

revendication 1 du brevet délivré en ce que la caramélisation est conduite dans le réacteur d'hydrogénation, sous hydrogène et sans séparation du catalyseur, par introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation, sans ajout de tampon, lorsque la teneur en sucres réducteurs résiduels est inférieure à 0,2% selon les passages de la page 8, lignes 5 à 8 et de la page 9, lignes 18 à 20 de la demande telle que déposée. La revendication 1 modifiée ne s'étend donc pas au-delà du contenu de la demande telle que déposée.

3.1 L'intimé objecte à l'omission dans la revendication 1 de la caractéristique ayant trait au moment où la stabilité du pH est atteinte, le mode de réalisation dans lequel la caramélisation est conduite dans le réacteur d'hydrogénation, sous hydrogène et sans séparation du catalyseur n'étant en effet décrit dans la demande initiale qu'en association avec une introduction de l'agent alcalin à un moment où le pH est stable.

Cependant cette caractéristique n'a pas été supprimée dans la revendication 1 mais a été précisée d'après le troisième paragraphe de la page 9 de la demande initiale qui traite précisément de l'instabilité du pH causée par l'introduction de l'agent alcalin. Le moment où le pH est susceptible d'être stable y est déterminé en fonction de la teneur en sucres réducteurs, c'est-à-dire lorsque la teneur en sucres réducteurs résiduels est inférieur à 0.2% (voir page 9, lignes 18 à 20), ce qui a été introduit dans la revendication 1.

3.2 L'intimé est d'avis que la caractéristique "sans ajout de tampon" dans la nouvelle revendication 1 n'est pas supportée par la demande telle que déposée car cette caractéristique mentionnée à la page 8, ligne 11 n'a pas été divulguée expressément en association avec le mode de réalisation décrit dans le paragraphe précédant des lignes 5 à 8 divulguant la caramélisation dans le réacteur d'hydrogénation et repris dans la revendication.

La Chambre constate une contradiction notable dans l'argumentation de l'intimé qui, dans la lettre du 1**(er)février 2008, avait objecté l'absence de cette caractéristique dans la requête auxiliaire alors pendante (voir page 6, paragraphes 3 à 5), argumentant entre autres que le passage de la page 8, lignes 9 à 13 divulguait uniquement une caramélisation dans le même réacteur "sans ajout de tampon", et qui dès l'introduction de cette caractéristique "sans ajout de tampon" dans la revendication par le requérant répondant ainsi à son objection, émet néanmoins une objection dans le sens opposé en argumentant que cette caractéristique n'est pas spécifiquement divulguée dans le passage de la page 8, lignes 11 pour un mode de réalisation où la caramélisation est effectuée dans le même réacteur.

Le passage de la page 8, lignes 5 à 8 divulgue le mode de réalisation de la caramélisation dans le même réacteur, sous hydrogène, sans séparation du catalyseur et sans ajout de tampon, ce qui est reconnu par l'intimé (paragraphe 3 de la lettre du 1**(er)février 2008). Etant donné que ce paragraphe suffit à lui seul comme support à l'amendement, l'objection de l'intimé basée sur l'absence de divulgation dans un autre passage n'est pas pertinente.

3.3 L'intimé a de plus contesté que les caractéristiques du paragraphe de la page 9 et de celui de la page 8 fussent divulguées en combinaison et donc fait valoir que l'introduction des caractéristiques de ces deux passages en combinaison dans la revendication 1 irait au-delà de la divulgation initiale.

Cependant ces deux passages de la description sont liés par le moment d'introduction de l'agent alcalin. Le passage de la page 8 défini ce moment en fonction de la stabilité de pH qui est définie aux lignes 18 à 20 de la page 9 en fonction d'une teneur en sucres réducteurs résiduels inférieure à 0,2% (voir point 2.1 dessus).

3.4 L'intimé a de plus argumenté que le troisième paragraphe de la page 9 concernait uniquement l'utilisation de soude. Donc le moment d'introduction de l'agent alcalin lorsque la teneur en sucres réducteurs est inférieure à 0,2% était divulgué uniquement si l'agent alcalin était la soude.

Cependant, il y a une divulgation explicite à cette page aux lignes 18 à 20 de l'introduction d'un agent alcalin lorsque la teneur en sucres réducteur résiduels est inférieure à 0,2%. Cette divulgation ne saurait donner lieu à une interprétation restrictive de l'agent alcalin. L'intimé cite la ligne 11 afin de justifier cette interprétation restrictive. Cependant la ligne 13 de la page 9 se réfère à un agent alcalin en général, la soude ne constituant qu'un agent alcalin préféré à la page 8, lignes 16 à 18. Par conséquent, l'argument de l'intimé d'une interprétation restrictive de l'agent alcalin doit être écartée.

3.5 Les modifications apportées à la revendication 1 limitent également la protection conférée par le brevet tel que délivré, satisfaisant ainsi aux exigences de l'Article 123(3) CBE.

3.6 Les revendications dépendantes 2 à 7 sont identiques aux revendications correspondantes délivrées, basées sur les revendications 2 à 7 originales.

3.7 Par conséquent, le jeu de revendications 1 à 7

satisfait aux exigences de forme de l'Article 123(2) et

(3) CBE.

4. Fondement sur la description (Article 84 CBE)

4.1 Bien que le fondement sur la description des revendications ne constitue pas un motif d'opposition au titre de l'Article 100 CBE, l'Article 101(3) (b) CBE stipule que le brevet litigieux doit être révoqué si compte tenu des modifications apportées à ce dernier au cours de la procédure d'opposition (et de recours), le brevet et l'invention qui en fait l'objet ne satisfont pas aux exigences de la CBE. Ainsi, selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours, la Chambre a le pouvoir d'examiner une objection sur le fondement de l'Article 84 CBE, dans la mesure où l'objection porte sur les modifications introduites dans le brevet tel que délivré (voir les décisions G 9/91, JO OEB 1993, 408, point 19 des raisons ; T 301/87, JO OEB 1990, 335, point 3.8 des raisons). Par conséquent, la Chambre doit examiner si les modifications de la revendication 1 remplissent les conditions de fondement sur la description énoncées à l'Article 84 CBE.

4.2 L'intimé reprend les objections de manque de support dans la demande initiale soulevées au titre de l'Article 123(2) CBE au compte du manque de fondement sur la description selon l'article 84 CBE.

Le moment d'introduction de l'agent alcalin lorsque le pH est stable requis dans le mode de réalisation de la page 8, paragraphe 2, est indiqué sans ambigüité à la page 9, lignes 18 à 20, c'est-à-dire lorsque la teneur en sucres réducteurs résiduels est inférieure à 0.2% en poids. Ce lien causal entre la stabilité du pH et de la teneur en sucre réducteurs résiduels se trouve également dans l'exemple 1 où il est indiqué que le pH est stable en raison d'une teneur en sucres réducteurs résiduel inférieure à 0.4% en poids.

Quant au manque de support d'un agent alcalin pour effectuer la caramélisation, qui est une dégradation alcaline, la description du brevet indique clairement que les bases fortes ou faibles conviennent à cet effet et que l'utilisation de la soude n'est qu'un mode préféré de réalisation (voir paragraphe [0036] du brevet).

4.3 La revendication 1 modifiée est donc fondée sur la description.

5. Suffisance d'exposé de l'invention

Bien que l'insuffisance d'exposé soit un motif d'opposition, l'intimé n'a pas maintenu l'objection, la division d'opposition ayant rejeté ce motif. La Chambre n'a aucune raison de prendre une autre position sur ce point. Ainsi, il n'est pas nécessaire de donner plus de raisons détaillées pour lesquelles l'exigence de suffisance d'exposé de l'invention est satisfaite.

6. Activité inventive

En suivant l'approche problème/solution appliquée de manière constante par les Chambres de recours en vue d'apprécier l'activité inventive sur une base objective, il est nécessaire de procéder en premier lieu à l'identification de l'art antérieur le plus proche qui permettra ensuite de déterminer le problème technique pouvant être considéré comme résolu vis-à-vis de cet art antérieur le plus proche et finalement d'apprécier l'évidence de la solution proposée, reflétée par les caractéristiques techniques de la revendication, à la lumière de l'état de la technique.

Le brevet contesté concerne un procédé de préparation d'un sirop de polyols non cristallisable, stable à la chaleur et aux alcalis (voir paragraphe [0001] du brevet en litige).

6.1 Art antérieur le plus proche

6.1.1 Le document (1) divulgue un procédé de préparation de compositions de polyols formant des sirops incristallisables présentant une très grande stabilité thermique et une très grande stabilité chimique en milieu alcalins (colonne 1, lignes 4 à 7 et 28 à 32). Ce procédé comprend une étape d'hydrogénation catalytique en présence d'hydrogène de sucres réducteurs, une étape de stabilisation telle qu'une caramélisation, et une étape de purification du sirop de polyols stabilisé (colonne 5, lignes 45 à 56). L'étape de stabilisation est préférentiellement mise en oeuvre sur un sirop hydrogéné déminéralisé afin d'enlever toutes traces de catalyseur d'hydrogénation (colonne 5, lignes 62 à 64). L'étape de purification du sirop stabilisé par caramélisation est effectuée par passage sur une résine (colonne 7, lignes 46 à 47), par exemple sur une résine cationique forte (exemple 1, colonne 8, ligne 57 à 60).

6.1.2 L'intimé est d'avis que le document (1) divulgue également la caractéristique de la revendication 1 du brevet contesté ayant trait à la teneur en sucres résiduels inférieure à 0,2% du sirop de polyols soumis à la caramélisation et se réfère au paragraphe du document (1) reliant les colonnes 5 et 6.

Cependant, bien que ces deux valeurs se référant à une teneur en sucres résiduels inférieure à 0,2% soient identiques, elles n'ont pas la même signification. En effet cette valeur détermine dans le document (1) la teneur en sucres résiduels du sirop de polyols obtenu après l'étape d'hydrogénation, le catalyseur d'hydrogénation ayant été préférentiellement retiré (colonne 5, lignes 62 à 64) alors que dans le procédé revendiqué elle détermine la teneur en sucres résiduels du sirop de polyols lorsque l'agent alcalin est ajouté en fin, donc au cours, de la réaction d'hydrogénation.

Il en résulte que la caractéristique de l'introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation lorsque la teneur en sucres résiduels est inférieure à 0,2% n'est pas divulguée dans le document (1) et constitue ainsi une caractéristique distinctive du procédé revendiqué.

6.1.3 En accord avec les parties, la chambre considère que ce document constitue l'état de la technique le plus proche et donc le point de départ pour l'analyse de l'activité inventive. La Chambre constate par ailleurs que le document (1) a été également considéré par la Division d'Opposition comme étant l'art antérieur le plus proche.

7. Le requérant a fait valoir que le problème technique à résoudre partant du document (1) serait celui de la mise à disposition d'un procédé plus rapide de fabrication d'un sirop de polyols non cristallisable, engendrant moins de rejets et aboutissant à une meilleure qualité de produit caractérisé par une stabilité constante.

Sans avoir égard aux améliorations d'effets techniques alléguées dessus, le problème technique est donc, au moins, celui de la mise à disposition d'un procédé alternatif de préparation d'un sirop de polyols non cristallisable.

8. La solution proposée par le brevet en litige est le procédé de la revendication 1 caractérisé par

- une température de passage sur la résine cationique forte inférieur à 30ºC,

- une mise en oeuvre de la caramélisation dans le réacteur d'hydrogénation, sous hydrogène et sans séparation du catalyseur et

- une introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation lorsque la teneur en sucres résiduels est inférieure à 0,2%.

9. L'intimé n'a pas contesté que le procédé revendiqué soit une solution du problème technique réduit à la simple mise à disposition d'un procédé alternatif et la Chambre pour sa part n'a pas de raison de douter que ce problème technique peu ambitieux ne soit pas résolu.

10. Il reste donc à déterminer si la solution proposée par le brevet litigieux pour résoudre au moins le problème réduit au procédé alternatif découle de façon évidente de l'état de la technique disponible.

10.1 L'intimé a prétendu que la solution proposée était évidente au vu du document (16).

Le document (16) divulgue un procédé de préparation de sorbitol (polyol) par hydrogénation catalytique du glucose sous haute pression d'hydrogène en présence de nickel de Raney dans lequel l'agent alcalin est ajouté dans la solution immédiatement avant que la réduction soit complète, puis la réaction d'hydrogénation est poursuivie, le sorbitol étant purifié par la suite sur une résine échangeuse d'ions (voir revendication 1).

Le document (16) divulgue donc une mise en oeuvre d'une caramélisation du sorbitol dans le réacteur d'hydrogénation, sous hydrogène et sans séparation du catalyseur. Cependant, la description générale du document en restant très vague n'indique pas le moment précis où l'agent alcalin est ajouté (voir page 2, dernier paragraphe : "alkali is added to the solution immediatly before the reduction is complete … and then reduction is carried out for a little longer").

L'enseignement générale du document (16) n'étant pas clair au sujet du moment de l'ajout de l'agent alcalin doit donc être interprété à la lumière de ses modes de réalisation concrets, donc de son exemple 2 qui est le seul exemple du document mettant en oeuvre l'étape de caramélisation dans le réacteur d'hydrogénation. Dans cet exemple, il est décrit que la réaction d'hydrogénation est effectuée pendant une heure avant l'ajout de l'agent alcalin, puis est poursuivie sous haute pression pendant une autre heure. Il y a donc divulgation de l'introduction de l'agent alcalin au milieu de la réaction d'hydrogénation et non en fin de réaction comme dans le procédé revendiqué.

En conséquences, le document (16) ne décrivant pas l'introduction d'un agent alcalin en fin de réaction d'hydrogénation lorsque la teneur en sucres résiduels est inférieure à 0,2% ne saurait suggérer la solution proposée. Par conséquent, la combinaison du document (1) avec le document (16) n'aboutit pas au procédé de la revendication 1. Ainsi, l'objet revendiqué ne saurait découler d'une manière évidente de l'état de la technique.

10.2 L'intimé a argumenté que le document (16) dans l'exemple 1 divulgue un seuil de 0,15% en sucres réducteurs résiduels dans la solution avant l'étape de caramélisation. Cependant, l'exemple 1 concerne le mode de réalisation où la caramélisation est initiée après la réaction d'hydrogénation et séparation du catalyseur d'hydrogénation et ne serait donc pas pris en compte par l'homme du métier en ce qui concerne l'alternative d'une caramélisation au cours de la réaction d'hydrogénation sous hydrogène et sans séparation du catalyseur.

10.3 L'intimé n'a fourni aucun autre document dans la procédure de recours, la Chambre quant à elle n'en connaissant point, qui vînt suggérer la solution proposée, ni présenté aucun argument établissant que la solution proposée au problème de la mise à disposition d'un procédé alternatif de préparation d'un polyol découlerait de manière évidente de l'état de la technique.

10.4 L'objet revendiqué étant déjà une solution non-évidente au problème de la mise à disposition d'un procédé alternatif, il serait a fortiori inventif pour un problème technique plus ambitieux. Par conséquent, il n'est pas besoin de statuer sur l'évidence de la solution proposée au problème plus ambitieux avancé par le requérant (voir point 6).

10.5 Ainsi, la Chambre arrive à la conclusion que l'objet de la revendication 1 et, pour les mêmes raisons, celui des revendications dépendantes 2 à 7 impliquent une activité inventive (Article 56 CBE).

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin qu'elle maintienne le brevet sur le fondement des revendications 1 à 7 de la requête principale déposée lors de la procédure orale tenue devant la Chambre de recours et d'une description restant à y adapter.

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