T 0081/05 () of 16.10.2007

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2007:T008105.20071016
Date de la décision : 16 Octobre 2007
Numéro de l'affaire : T 0081/05
Numéro de la demande : 97952068.1
Classe de la CIB : C07C 15/08
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Procédé de séparation de paraxylène comprenant une adsorption avec injection d'eau et une cristallisation
Nom du demandeur : Institut Français du Pétrole
Nom de l'opposant : UOP LLC
Chambre : 3.3.10
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 84
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 10a(1)
Rules of procedure of the Boards of Appeal Art 10a(2)
Mot-clé : Requêtes principale et subsidiaires 1 à 3 : tardives - non clairement admissibles - manque de clarté - non admises dans la procédure
Requête subsidiaire 4 : nouveauté (oui) ; activité inventive (oui) - amélioration liée à un choix ciblé de conditions opératoires
Exergue :

-

Décisions citées :
G 0009/91
T 0153/85
T 0301/87
T 0951/91
T 0840/93
T 0427/99
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La mention de la délivrance du brevet européen nº 946471 basé sur la demande de brevet internationale PCT/FR97/02309, déposée le 16 décembre 1997 a été publiée le 20 mars 2002.

II. L'opposante (intimée) a formé une opposition en vue d'obtenir l'entière révocation du brevet pour insuffisance de description de l'invention et absence de nouveauté et d'activité inventive (article 100 (a) et (b) CBE) en se basant, entre autres, sur les documents suivants :

(1) US-A-5 284 992,

(2) US-A-5 107 062, et

(3) US-A-4 442 222.

Par la décision signifiée par voie postale le 5 novembre 2004, la division d'opposition a révoqué le brevet.

Selon la division d'opposition le problème technique que se proposait de résoudre l'invention n'avait pas été résolu sur toute l'étendue des revendications de la requête principale et de la requête subsidiaire 2 alors pendantes. L'objet de ces requêtes n'impliquait donc pas d'activité inventive. Les modifications apportées à la revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 alors pendante résultaient de la généralisation de l'enseignement d'un exemple de la demande telle que déposée. Une telle généralisation n'était cependant pas admissible au vu des exigences de l'article 123(2) CBE.

III. La propriétaire du brevet litigieux (requérante) a introduit un recours contre cette décision. Lors de la procédure orale tenue devant la Chambre le 16 octobre 2007 la requérante a déposé cinq jeux de revendications à titre de requête principale et de requêtes subsidiaires 1 à 4.

La revendication 1 selon la requête principale s'énonce comme suit :

"1. Procédé de séparation de paraxylène à partir d'une charge comprenant un mélange d'isomères en C8 aromatiques en contenant, comportant une étape d'adsorption et de désorption des isomères du mélange, l'étape d'adsorption étant effectuée en lit mobile simulé, sur au moins une colonne contenant une zéolithe, l'étape d'adsorption et de désorption délivrant dans des conditions adéquates au moyen d'un désorbant, une fraction riche en paraxylène et une fraction pauvre en paraxylène, le procédé comprenant en outre au moins une étape de cristallisation de la fraction riche en paraxylène qui délivre du paraxylène pur, le procédé étant caractérisé en ce qu'on introduit un débit d'eau dans la charge, dans le désorbant et/ou dans un courant de recyclage d'un flux dans la colonne par injection d'eau continue réalisée dans les courants qui alimentent la ou les colonnes d'adsorption, tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau mesurée dans la fraction riche en paraxylène et dans la fraction pauvre en paraxylène étant comprise entre 3 et 120 ppm (parties par million) et en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes, le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption est compris entre 0,8 et 1,5."

La revendication 1 de la requête subsidiaire 1 comporte aussi l'expression "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes".

La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 comporte l'expression "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, pour baisser la demande en désorbant à pureté et productivité constantes".

La revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 se distingue de celle selon la requête principale par la suppression de l'expression "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes" et par l'addition de l'expression "et en ce que l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 140 à 160 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ladite moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 3 et 6 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,15 et 1,35; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ladite moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 6 et 12 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,10 et 1,35; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 140 à 160 ºC, sur une zéolithe X échangée au baryum, ladite moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 45 et 70 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1 et 1,25; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe X échangée au baryum, ladite moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 90 et 110 ppm et le rapport S/F étant compris entre 0,95 et 1,2; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 110 à 130 ºC sur une zéolithe X échangée au baryum, ladite moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 20 et 30 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,2 et 1,4."

La revendication 1 selon la requête subsidiaire 4 s'énonce comme suit :

"1. Procédé de séparation de paraxylène à partir d'une charge comprenant un mélange d'isomères en C8 aromatiques en contenant, comportant une étape d'adsorption et de désorption des isomères du mélange, l'étape d'adsorption étant en lit mobile simulé, sur au moins une colonne contenant une zéolithe, l'étape d'adsorption et de désorption délivrant dans des conditions adéquates au moyen d'un désorbant choisi parmi le toluène et le paradiéthylbenzène (PDEB) une fraction riche en paraxylène et une fraction pauvre en paraxylène, le procédé comprenant en outre au moins une étape de cristallisation de la fraction riche en paraxylène qui délivre du paraxylène pur, le procédé étant caractérisé en ce qu'on introduit un débit d'eau dans la charge, dans le désorbant et/ou dans un courant de recyclage d'un flux dans la colonne par injection d'eau continue réalisée dans les courants qui alimentent la ou les colonnes d'adsorption et en ce que

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 140 à 160 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau mesurée dans la fraction riche en paraxylène et dans la fraction pauvre en paraxylène est comprise entre 3 et 6 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 1,15 et 1,35; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau mesurée dans la fraction riche en paraxylène et dans la fraction pauvre en paraxylène est comprise entre 6 et 12 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 1,10 et 1,35; ou

l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe X échangée au baryum, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau mesurée dans la fraction riche en paraxylène et dans la fraction pauvre en paraxylène est comprise entre 90 et 110 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 0,95 et 1,2."

Les revendications 2 à 6 de la requête subsidiaire 4 sont dépendantes de la revendication 1.

IV. Selon la requérante le terme "optimisé" introduit dans la revendication 1 de la requête principale et des requêtes subsidiaires 1 et 2 signifiait que la quantité d'eau injectée devait permettre une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constante. L'expression "quantité appropriée" se rapportait à la quantité d'eau ainsi optimisée. Les domaines larges du rapport S/F et de la moyenne pondérée dans la revendication 1 de la requête subsidiaire 3 n'étaient pas en contradiction avec les domaines restreints introduits dans ladite revendication pour définir les mêmes paramètres. Les modifications de la revendication 1 selon la requête principale et les requêtes subsidiaires 1 et 3 n'entrainaient donc aucun manque de clarté. Le procédé défini par la revendication 1 de la requête subsidiaire 4 se différenciait du procédé selon l'état de la technique le plus proche représenté par le document (1) par le fait que de l'eau était intentionnellement injectée de façon continue et contrôlée dans le système de séparation et par des combinaisons particulières de température, de teneur en eau et de rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge. Le problème technique que se proposait de résoudre l'invention était l'obtention de paraxylène dans des conditions d'opération du procédé améliorées tout en maintenant l'indice de performance du procédé constant. Les exemples 1 et 2 du brevet litigieux ainsi que les résultats des essais comparatifs soumis avec la lettre du 14 mars 2005 démontraient que ce problème technique avait bien été résolu puisque ces conditions particulières permettait une diminution de la demande en désorbant. L'homme du métier ne pouvait déduire de l'état de la technique que l'injection d'eau et les combinaisons particulières de température, de teneurs en eau et de rapport S/F spécifiées dans la revendication 1 permettaient une telle amélioration. Le procédé revendiqué impliquait donc une activité inventive.

V. Selon l'intimée les expressions "optimisée" et "permettant une réduction de la demande de désorbant" ou "pour baisser la demande de désorbant" introduites dans la revendication 1 de la requête principale et des requêtes subsidiaires 1 et 2 n'étaient pas claires. La modification de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 3 engendrait une contradiction quant aux valeurs des teneurs en eau et du rapport S/F. Ces requêtes déposées à un stade tardif de la procédure n'étaient pas clairement admissibles et devaient donc être rejetées. Plusieurs documents de l'état de la technique enseignaient l'importance du contrôle de la quantité d'eau pour améliorer la séparation du paraxylène. Il était déjà connu, en particulier des documents (2) et (3), que ce contrôle pouvait être réalisé par une injection continue d'eau dans le système de séparation. Par conséquent, le procédé revendiqué n'impliquait pas d'activité inventive.

VI. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur le fondement de sa requête principale ou de l'une de ses requêtes subsidiaire 1 à 4, toutes soumises pendant la procédure orale devant la Chambre.

L'intimée demande le rejet du recours.

VII. La Chambre a rendu sa décision à la fin de la procédure orale.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

Question de procédure

2. La requête principale et les requêtes subsidiaires 1 à 4 n'ont été soumises par la requérante qu'au cours de la procédure orale devant la Chambre et n'avaient jamais été déposées auparavant. Il est donc incontestable que ces requêtes n'ont pas été présentées en temps utile et sont par conséquent tardives.

L'intimée a émis des objections quant à la recevabilité de ces requêtes au vu de leur dépôt tardif et du fait qu'elles ne rempliraient pas clairement, entres autres, les exigences de l'article 84 CBE.

Dans ces circonstances il se pose la question de la recevabilité de chacune de ces requêtes.

Dans sa décision G 9/91 (JO OEB 1993, 408, point 18 de l'exposé des motifs), la Grande Chambre de recours a déclaré que la finalité de la procédure de recours inter partes était principalement d'offrir à la partie déboutée la possibilité de contester le bien-fondé de la décision de la division d'opposition. Un titulaire de brevet débouté devant la division d'opposition a donc le droit de demander à la chambre de recours de réexaminer les requêtes qui ont été rejetées ou d'en présenter de nouvelles en temps utile dans la procédure de recours, à savoir notamment avec son mémoire de recours ou avec la réponse au mémoire de recours (Article 10 bis (1) et (2) Règlement de Procédure des Chambres de Recours (RPCR)).

Si, toutefois, le titulaire du brevet veut que d'autres requêtes soient examinées, leur admission dans la procédure est laissée à la discrétion de la chambre de recours ; il ne s'agit pas là d'un droit absolu de la propriétaire/requérante (voir la décision T 840/93, JO OEB 1996, 335, point 3.1).

Dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire laissé à la chambre d'admettre ou non des requêtes qui n'avaient pas été présentées en temps utile, les critères établis par la jurisprudence constante des Chambres de Recours imposent que telles requêtes soient clairement admissibles, que leur dépôt ne constitue pas un abus processuel tactique et que les revendications modifiées selon ces requêtes n'engendrent pas quand à l'appréciation de la brevetabilité, une situation si nouvelle qu'il ne puisse raisonnablement être présumé que l'autre partie l'ait pue prendre en considération sans que la procédure soit rallongée de façon indue (voir décisions T 153/85 JO OEB 1988, 1 ; T 951/91 JO OEB 1995, 202 ; T 427/99, point 3.1 des raisons, non publiée au JO OEB).

Requête principale et requêtes subsidiaires 1 et 2

3. Recevabilité

3.1 La revendication 1 de la requête principale et de la requête subsidiaire 1 a été modifiée, entre autres, par l'introduction de l'expression "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes". La revendication 1 de la requête subsidiaire 2 à quant à elle été modifiée, entre autres, par l'introduction de l'expression "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, pour baisser la demande en désorbant à pureté et productivité constantes". Selon, l'intimée ces modification entrainait un manque de clarté, en particulier parce que le point de référence pour la baisse ou la réduction de la demande en désorbant n'était pas défini.

3.2 Bien que le manque de clarté ne constitue pas un motif d'opposition au titre de l'Article 100 CBE, l'Article 102(3) CBE stipule que le brevet litigieux peut être maintenu si compte tenu des modifications apportées à ce dernier au cours de la procédure d'opposition (de recours) le brevet et l'invention qui ont fait l'objet satisfont aux conditions de la CBE. Ainsi, selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours, la Chambre a le pouvoir d'examiner une objection sur le fondement de l'Article 84 CBE, dans la mesure où l'objection porte sur les modifications introduites dans le brevet tel que délivré (voir les décisions G 9/91, JO OEB 1993, 408, point 19 des raisons ; T 301/87, JO OEB 1990, 335, point 3.8 des raisons). Par conséquent, la Chambre doit examiner si les modifications de la revendication 1 remplissent les conditions de clarté énoncées à l'Article 84 CBE.

3.3 Selon la revendication 1 modifiée de la requête principale et de la requête subsidiaires 1, l'eau est injectée dans le système "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes". Selon la revendication 1 de la requête subsidiaire 2 l'eau est injectée dans le système "en quantité appropriée, qui a été optimisée dans les effluents hydrocarbonés en fonction de la nature de la zéolithe adsorbante et des cations de compensation et en fonction de la température, pour baisser la demande en désorbant à pureté et productivité constantes". Ainsi la quantité d'eau est définie dans la revendication 1 de ces requêtes, entre autres, par la caractéristique fonctionnelle relative "permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes" ou "pour baisser la demande en désorbant à pureté et productivité constantes". La revendication ne définit cependant pas de point de référence pour la réduction ou la baisse de la demande en désorbant puisqu'il n'est pas indiqué par rapport à quel type de procédé ou par rapport à quelles conditions opératoires une réduction de la demande en désorbant doit être obtenue. En l'absence d'un tel point de référence il ne peut être établit avec certitude si une quantité d'eau injectée répond ou non à la caractéristique fonctionnelle "permettant une réduction de la demande en désorbant à pureté et productivité constantes" ou "pour baisser la demande en désorbant à pureté et productivité constantes", laissant ainsi subsister un doute quant à la portée de la revendication 1 modifiée, ce qui est contraire à l'exigence de clarté des revendications (article 84 CBE).

3.4 Par conséquent, la revendication 1 selon la requête principale et selon les requêtes subsidiaires 1 et 2, toutes déposées tardivement, n'est pas clairement admissible. La Chambre décide donc en vertu du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose de ne pas admettre ces requêtes dans la procédure (voir le point 2 dessus).

Requête subsidiaire 3

4. Recevabilité

4.1 La revendication 1 de la requête subsidiaire 3 est caractérisée, entre autres, en ce que la moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 3 et 120 ppm et que le rapport S/F est compris entre 0,8 et 1,5 et, par la modification qui y a été apportée, en ce que la dite moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 3 et 6 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,15 et 1,35 ; ou ladite moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 6 et 12 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,10 et 1,35 ; ou la moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 45 et 70 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1 et 1,25 ; ou la moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 90 et 110 ppm et le rapport S/F étant compris entre 0,95 et 1,2 ; ou la moyenne pondérée des teneurs en eau étant comprise entre 20 et 30 ppm et le rapport S/F étant compris entre 1,2 et 1,4.

Par la modification qui y a été apportée, la revendication 1 contient donc deux définitions pour le rapport S/F et la moyenne des teneurs en eau, notamment une première définition large, à savoir que la moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 3 et 120 ppm et que le rapport S/F est compris entre 0,8 et 1,5, et une seconde définition restreinte à des plages de valeurs plus étroites telles que définies par chacune des cinq variantes de conditions opératoires ajoutées à la revendication.

La coexistence de deux définitions distinctes pour la valeur de la teneur en eau et de deux définitions distinctes pour la valeur du rapport S/F crée un manque de clarté dans la mesure où il ne peut être établi sans ambiguïté si l'une ou l'autre, ou encore les deux définitions à la fois, s'appliquent lorsqu'il s'agit de déterminer si un procédé donnée tombe ou non sous l'intitulé de la revendication, laissant ainsi subsister un doute quant à la portée de la revendication 1 modifiée, ce qui est contraire à l'exigence de clarté des revendications (article 84 CBE).

Par conséquent, cette requête déposée tardivement n'est pas clairement admissible. La Chambre décide donc en vertu du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose de ne pas l'admettre dans la procédure (voir le point 2 dessus).

Requête subsidiaire 4.

5. Recevabilité

En réponse aux objections soulevées lors de la procédure orale devant la Chambre, la requérante a soumis un nouveau jeu de revendications à titre de requête subsidiaire 4 ne contenant plus les caractéristiques objectées plus haut au titre de l'article 84 CBE. Les modifications apportées à ce jeu de revendications sont donc nécessaires et appropriées. En outre, le dépôt de ce nouveau jeu de revendication n'a pas gêné l'intimée dans son argumentation concernant son objection d'absence d'activité inventive puisque les trois variantes de conditions opératoires incorporées dans la revendication proviennent des revendications dépendantes 2, 3 et 5 telles que délivrées. Les modifications n'engendrent donc pas quand à l'appréciation de la brevetabilité, une situation si nouvelle qu'il ne puisse raisonnablement être présumé que l'intimée l'ait pue prendre en considération lors de la procédure orale.

La Chambre décide donc en vertu du pouvoir discrétionnaire dont elle dispose d'admettre la requête subsidiaire 4 dans la procédure (voir le point 2 dessus).

6. Modifications (article 123 (2) et (3) CBE)

La revendication 1 selon la requête subsidiaire 4 précise que l'étape d'adsoption est effectuée "en lit mobile simulé". Cette modification trouve un support à la page 3, ligne 22 de la demande de brevet telle que déposée. En accord avec cette même demande de brevet, page 6, ligne 19 en combinaison avec la page 14, lignes 9 et 16, la revendication à été restreinte en précisant que le désorbant est choisi parmi le "toluène et le paradiéthylbenzène". La caractéristique "par injection d'eau continue réalisée dans les courants qui alimentent la ou les colonnes d'adsorption" trouve un support à la page 3, lignes 24 et 25 de la demande telle que déposée. Les trois combinaisons définissant la nature de la zéolithe, la température, la teneur en eau et le rapport S/F correspondent aux combinaisons divulguées dans les revendications 2, 3 et 5 de la demande telle que déposée. Les plages générales pour les valeurs de teneur en eau et de rapport S/F ont été supprimées au vu de l'introduction dans la revendication 1 de plages de valeurs restreintes pour ces caractéristiques.

Ces modifications limitent également la protection conférée par le brevet tel que délivré, satisfaisant ainsi aux exigences de l'article 123 (2) et (3) CBE.

Les revendications dépendantes 2 à 6 correspondent respectivement aux revendications 9 à 13 de la demande telle que déposée.

7. Exposé de l'invention et nouveauté

La Chambre est arrivée à la conclusion que l'invention est suffisamment décrite dans le brevet litigieux et que le procédé revendiqué se distingue de ceux divulguées dans les documents de l'art antérieur opposés par l'intimée (articles 54 et 83 CBE). Ceci avait été reconnu par l'instance du premier degré dans la décision contestée en relation avec un procédé plus large que celui objet de la présente requête. L'intimée n'a quant à elle formulé aucune objection sur ces deux fondements. Dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire d'entrer plus dans les détails de l'évaluation de la nouveauté et de la suffisance de l'exposé de l'invention.

8. Activité inventive

Selon la jurisprudence constante des Chambres de Recours de l'OEB, l'activité inventive s'apprécie de façon objective en utilisant l'approche problème-solution. Cette approche consiste à identifier d'abord l'état de la technique le plus proche, puis partant de cet état de la technique à identifier le problème technique que l'invention se propose de résoudre, à examiner ensuite si ce problème a bien été résolu par la solution revendiquée, sinon, à reformuler un problème technique moins ambitieux et, enfin, à examiner si la solution revendiquée s'imposait à l'évidence à l'homme du métier au vu de l'état de la technique pertinent.

8.1 Le brevet litigieux concerne un procédé de séparation de paraxylène à partir d'une charge comprenant un mélange d'isomères en C8 aromatiques comportant une étape d'adsorption et de désorption ainsi qu'une étape de cristallisation. En accord avec les parties et la division d'opposition, la Chambre considère que le document (1) représente l'état de la technique le plus proche de l'invention pour l'appréciation de l'activité inventive. Ce document divulgue un procédé de séparation de paraxylène à partir d'une charge comprenant des hydrocarbures aromatiques en C8, comportant une étape d'adsorption en lit mobile simulé sur une zéolithe en présence d'un solvant de désorption délivrant une fraction riche en paraxylène (colonne 2, ligne 65 à colonne 3, ligne 12). Le procédé comprend également une étape de cristallisation du paraxylène délivrant du paraxylène avec un degré de pureté très élevé (colonne 3, lignes 23 à 32). Le toluène et le paradiéthylbenzène sont décrits comme solvants de désorption (colonne 5, lignes 16, 17 et 28)et parmi les zéolithes pouvant être utilisées comme adsorbant, le document (1) décrit les zéolithes X et Y échangées par du baryum et du potassium (colonne 7, lignes 24 et 25). L'exemple 3 décrit un procédé de séparation à 150 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium et réalisé avec un rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge de 1,35 (solvant:10,35/charge:7,65) (colonne 12).

8.2 Selon la requérante le problème technique à résoudre par l'invention par rapport à cet état de la technique est l'obtention de paraxylène dans des conditions d'opération du procédé améliorées tout en maintenant l'indice de performance du procédé (IP) constant.

8.3 La solution proposée à ce problème est le procédé de séparation de paraxylène selon la revendication 1, caractérisée en ce que :

on introduit un débit d'eau dans la charge, dans le désorbant et/ou dans un courant de recyclage d'un flux dans la colonne par injection d'eau continue réalisée dans les courants qui alimentent la ou les colonnes d'adsorption et, en ce que l'étape d'adsorption et de désorption est réalisée selon l'une des trois variantes suivantes :

(a) à une température de 140 à 160 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau mesurée dans la fraction riche en paraxylène et dans la fraction pauvre en paraxylène est comprise entre 3 et 6 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 1,15 et 1,35 ; ou

(b) à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe Y échangée par du baryum et du potassium, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 6 et 12 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 1,10 et 1,35 ; ou

(c) à une température de 165 à 185 ºC sur une zéolithe X échangée au baryum, ledit débit d'eau étant tel que la moyenne pondérée des teneurs en eau est comprise entre 90 et 110 ppm et le rapport S/F du débit de désorbant sur celui de la charge lors de l'étape d'adsorption et de désorption étant compris entre 0,95 et 1,2.

Dans la solution revendiquée, comme l'a concédé la requérante, les teneurs en eau définies par les plages résultent, non seulement de l'eau injectée dans le système, mais incluent également l'eau relâchée par la zéolithe et recyclée.

8.4 Pour démontrer que les améliorations alléguées vis-à-vis du procédé selon le document (1) sont effectivement obtenues en mettant en oeuvre le procédé selon la revendication 1, la requérante a fait référence, pour les variantes (a) et (b) ci-dessus, respectivement aux exemples 1 et 2 du brevet litigieux et, pour la variante (c) ci-dessus, aux résultats des essais comparatifs A1 et B1 soumis avec la lettre du 14 mars 2005.

8.4.1 L'exemple 1 du brevet litigieux met en oeuvre le procédé revendiqué sur une zéolithe Y échangée par du potassium et du baryum (page 5, ligne 14), à une température de 150ºC (page 5, lignes 16 et 17), tel que requis par la variante (a). Le procédé est conduit de telle manière à maintenir à peu près constants la pureté et le rendement en paraxylène (page 6, ligne 51) donc l'indice de performance IP du procédé (voir page 7, ligne 31). Les résultats observés montrent que lorsque la moyenne pondérée des teneurs en eau se situe dans la gamme requise par la variante (a) selon la revendication 1, donc entre 3 et 6 ppm, le rapport S/F est plus faible et en se situant à environ 1,30 est bien inférieur à la valeur de 1,45 observée en l'absence d'eau (figure 3, page 12). Le rapport S/F traduisant la demande en désorbant (s) par rapport à la charge (f) introduite dans le procédé, cet exemple montre que lorsque le procédé revendiqué est réalisé dans les conditions requises par la variante (a) de la revendication 1, la demande en désorbant est la plus faible ce qui traduit une amélioration des conditions d'opération du procédé.

De la même manière, l'exemple 2 du brevet litigieux montre que lorsque le procédé est opéré en respectant la combinaison des conditions opératoires requise par la variante (b) selon la revendication 1, à savoir une zéolithe Y échangée par du potassium et du baryum, à 175ºC et une teneur en eau de 10 ppm, le rapport S/F traduisant la demande en désorbant est plus faible et en se situant à environ 1,30 est bien inférieur à la valeur de 1,42 observée en l'absence d'eau (figure 4, page 12).

L'exemple A1 dans les essais comparatifs soumis par la requérante avec la lettre datée du 14 mars 2005 a été réalisé dans les conditions opératoires selon la variante (c) de la revendication 1, à savoir avec une injection continue d'eau, en présence d'une zéolithe X échangée par du baryum, la température étant de 175ºC et la teneur en eau de 90 ppm. Un indice de performance IP stable de 93 est obtenu pour un rapport S/F de 1,18. A titre de comparaison, l'exemple B1 a été réalisé dans les mêmes conditions mais sans ajout d'eau. Dans ces conditions l'indice de performance n'est que de 90 au début de la réaction puis décroit jusqu'à la valeur 78. Même en augmentant le rapport S/F à 1,6 ce qui traduit une augmentation de la demande en désorbant, l'indice de performance n'est que de 90 et donc la valeur de 93 mesurée dans l'exemple A1 conforme à l'invention revendiquée ne peut pas être atteinte.

8.4.2 Ces essais démontrent donc de façon convaincante que l'injection d'eau en continue combinée aux conditions requises par les trois variantes (a), (b) et (c) de la revendication 1 permet de diminuer la valeur du rapport S/F et donc la demande en désorbant, à indice de performance au moins constant, si ce n'est amélioré. Une diminution de la demande en désorbant améliorant les conditions d'opération du procédé, la Chambre arrive à la conclusion que le problème technique tel que défini ci-dessus (point 8.2) a effectivement été résolu par le procédé faisant l'objet de la revendication 1.

8.5 Par conséquent, la seule question en suspens est de savoir si la solution proposée par le brevet litigieux pour résoudre le problème posé découlait de façon évidente de l'état de la technique disponible, en d'autres termes s'il était évident pour l'homme du métier de modifier le procédé décrit dans le document (1) par une injection d'eau en continue, combinée aux conditions selon les trois variantes (a), (b) et (c), pour améliorer les conditions d'opération du procédé.

8.5.1 Le document (1) ne suggère nullement une injection d'eau dans le procédé, ni ne mentionne un quelconque effet lié à la présence d'eau et ne peut donc de ce fait conduire l'homme du métier à la solution revendiquée.

8.5.2 Le document (2) indique que la teneur en eau de l'adsorbant est un facteur important pour optimiser les capacités de séparation de l'adsorbant lorsque des dérivés spécifiques de la tétraline sont utilisés comme désorbant (colonne 3, lignes 28 à 32). La teneur en eau peut être régulée en ajoutant de l'eau à la charge (colonne 7, lignes 36 à 41). Ainsi le document (2), tout en mentionnant l'importance de la teneur en eau dans l'adsorbant confine cet enseignement à des désorbants particuliers dérivés de la tétraline. Ce document n'enseigne cependant pas que la teneur en eau puisse jouer un rôle avec d'autres désorbants, tels que le toluène et le paradiéthylbenzène requis par le procédé revendiqué, ni induit l'homme du métier à choisir les conditions opératoires selon les variantes (a) à (c) revendiquées.

8.5.3 Selon le document (3) il faut maintenir la teneur en eau de la zéolithe pour obtenir des conditions de séparation optimales (colonne 8, ligne 58 à 60). Pour maintenir une teneur en eau élevée, de l'eau peut être injectée en continu à l'entrée de la colonne (colonne 9, lignes 4 à 8). Cependant le document (3) ne mentionne pas les combinaisons spécifiques de conditions opératoires définies par les trois variantes (a), (b) et (c) requises par la revendication 1 en litige. Or chacune de ces trois variantes concerne une combinaison de conditions opératoires particulières résultant en une amélioration de la demande en désorbant (point 8.4). Ces variantes résultent ainsi d'un choix ciblé de conditions opératoires particulières qui est nullement suggéré par le document (3).

8.5.4 Par conséquent, l'homme du métier ne peut déduire des documents opposés par l'intimée que l'injection d'eau dans les conditions ciblées telles que définies par les trois variantes (a), (b) et (c) selon la revendication 1 en litige permet de résoudre le problème à la base du brevet contesté, à savoir celui d'améliorer les conditions d'opération du procédé de séparation du paraxylène.

8.6 Par conséquent, l'objet de la revendication 1 selon la requête subsidiaire 4, et pour les mêmes raisons celui des revendications dépendantes 2 à 6, impliquent une activité inventive (Article 56 CBE).

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision contestée est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à l'instance du premier degré afin de maintenir le brevet sur la base des revendications 1 à 6 selon la requête subsidiaire 4 soumise pendant la procédure orale devant la Chambre et une description qui doit encore y être adaptée.

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