T 0429/00 () of 8.10.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T042900.20031008
Date de la décision : 08 Octobre 2003
Numéro de l'affaire : T 0429/00
Numéro de la demande : 94402428.0
Classe de la CIB : B01D 3/00
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Distributeur de liquide pour dispositif d'échange de chaleur et de matière, colonne de distillation comprenant un tel distributeur, et utilisation d'une telle colonne pour la distillation de l'air
Nom du demandeur : L'air Liquide, S.A.
Nom de l'opposant : Praxair Technology, Inc.
LINDE AKTIENGESELLSCHAFT, Wiesbaden
Chambre : 3.3.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 52
European Patent Convention 1973 Art 54
European Patent Convention 1973 Art 56
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 Art 123(2)
European Patent Convention 1973 Art 123(3)
European Patent Convention 1973 Art 111(1)
Mot-clé : Requête principale : caractéristique(s) implicite(s) - non
Nouveauté - non
Requête subsidiaire : nouveauté - oui
Renvoi du dossier pour poursuite de la procédure
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Ce recours a été formé par la titulaire du brevet contre la décision de la Division d'opposition révoquant le brevet européen suite à deux oppositions basées sur l'article 100a), b) et c) CBE.

II. Parmi les 11 documents de l'état de la technique cités en procédure d'opposition, référence est faite aux documents suivants dans la présente décision :

D1 : D. Perry et al, AIChE National Meeting, 2-6 avril 1989

D3 : F. Moore et al, 36th Canadian Chemical Engineering Conference, 5-8 octobre 1986

D11 : Chemical Engineering Progress, mars 1993, pages 47- 61.

III. La décision contestée est basée sur les revendications 1 à 13. telles que délivrées (requête principale) et sur les revendications modifiées 1 à 13 selon la requête subsidiaire jointe à la lettre du 11 janvier 2000.

IV. La Division d'opposition a estimé que l'objet de la revendication 1, tant de la requête principale que de la requête subsidiaire, manque de nouveauté vis-à-vis de la divulgation du document D3.

V. Au cours de la procédure orale devant la Chambre de recours qui eut lieu le 8 octobre 2003, la requérante a déposé un nouveau jeu de revendications 1 à 13 (requête principale) et un nouveau jeu de revendications 1 à 10 (requête subsidiaire) en remplacement des jeux de revendications préalablement déposés au cours de la procédure de recours.

VI. Le libellé de la revendication 1 de la requête principale est comme suit :

"Distributeur de liquide pour dispositif d'échange de chaleur et de matière (3) ayant une interface supérieure constituant une aire d'arrosage, comprenant des passages de gaz (5 ; 50) et une pluralité de passages de liquide (4,4',4''), les passages de liquide étant définis par des orifices calibrés (4,4',4'') répartis suivant un motif de points d'arrosage au moins partiellement irrégulier, les orifices (4,4',4'') ayant une section choisie dans un groupe de n sections différentes prédéterminées, n n'excédant pas 4, chaque orifice étant disposé au centre de gravité d'une zone surfacique de l'aire d'arrosage (6,6',6'') ayant une aire correspondant à la section de l'orifice associé, les zones surfaciques étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage."

VII. Le libellé de la revendication 1 de la requête subsidiaire est comme suit :

"Distributeur de liquide pour dispositif d'échange de chaleur et de matière (3) ayant une interface supérieure constituant une aire d'arrosage, comprenant des passages de gaz (5 ; 50) et une pluralité de passages de liquide (4,4'), les passages de liquide étant définis par des orifices calibrés (4,4') répartis suivant un motif de points d'arrosage au moins partiellement irrégulier, les orifices (4,4') ayant une section sensiblement constante correspondant à une section de passage d'un orifice circulaire de diamètre compris entre 3 et 5 mm, chaque orifice étant disposé au centre de gravité d'une zone surfacique de l'aire d'arrosage (6,6') ayant une aire correspondant à la section de l'orifice associé, les zones surfaciques comportant des zones de formes régulières (6) et des zones de formes irrégulières (6') et étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage."

VIII. Les arguments de la requérante (titulaire) se résument comme suit :

- La stipulation dans la revendication 1 de zones surfaciques ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage doit être interprétée d'une façon restreinte.

- Par suite, le distributeur revendiqué se distingue de l'art antérieur par le fait que les zones surfaciques sont jointives et couvrent uniquement la totalité de l'aire d'arrosage sans débords hors de celle-ci.

- Le distributeur selon la revendication 1 de la requête subsidiaire inclut en outre les limitations concernant les sections d'orifices et des formes irrégulières des zones surfaciques.

- Les expressions "sensiblement constante" et "formes irrégulières" sont claires pour l'homme du métier. De plus, la caractéristique concernant les formes irrégulières a un support dans la demande initiale, y compris les figures 6 et 7.

- L'ensemble des caractéristiques de la revendication 1 selon la requête principale, et a fortiori selon la requête subsidiaire, n'est ni compris dans l'état de la technique ni ne découle d'une manière évidente de ce dernier pour l'homme du métier.

IX. Les arguments des intimées (opposantes 1 et 2) sont essentiellement les suivants :

- L'interprétation que donne la requérante à l'objet de la revendication 1 n'est pas supportée par la demande telle que déposée. Dès lors, l'objet de la revendication 1 de la requête principale manque de nouveauté au vu du document D3.

- La combinaison, dans la revendication 1 selon la requête subsidiaire, d'orifices ayant une section sensiblement constante avec des zones surfaciques de formes irrégulières n'a pas de support dans la demande telle que déposée.

- La revendication 1 manque de clarté à cause de l'emploi des termes "sensiblement constante" et "formes irrégulières".

- Le distributeur selon la revendication 1 de la requête subsidiaire manque de nouveauté au vu du document D11, en particulier de la figure 8.

X. La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de la requête principale déposée à la procédure orale ou, subsidiairement, sur la base de la requête subsidiaire déposée à la procédure orale sous réserve du renvoi à la première instance pour l'examen de l'activité inventive.

Les intimées demandent le rejet du recours.

Motifs de la décision

Requête principale

1. Comme il ressort clairement des arguments échangés par les parties, la question de manque de nouveauté de l'objet revendiqué dépend de l'interprétation qui est donnée à la caractéristique "les zones surfaciques étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage". Dès lors, il appartient à la Chambre de trancher sur ce point avant d'aborder la question de nouveauté. Plus précisément, la question se pose de savoir si les termes "ajustées les unes aux autres" et "sur l'aire d'arrosage" impliquent des restrictions particulières.

1.1. La requérante a argué que l'ajustement les unes aux autres des zones surfaciques signifie sans ambiguïté que ces zones sont jointives, ce qui exclurait aussi bien des recouvrements de ces surfaces que des espaces entre celles-ci. De plus, la stipulation que ces zones surfaciques sont "sur l'aire d'arrosage" impliquerait clairement que ces zones couvrent la totalité de l'aire d'arrosage sans débordement au-delà de la périphérie de cette aire. À l'appui de son interprétation, la requérante a cité le passage de la description du brevet qui indique la manière dont les zones surfaciques sont définies. Ainsi, dans le mode réalisation de la figure 6, "pour une aire totale d'arrosage déterminée, en fonction du diamètre de la colonne, et pour un diamètre nominal d'orifice 4,4' prédéterminé, typiquement compris entre 3 et 5 mm, on définit un nombre total d'orifices identiques 4 et 4' et donc une aire correspondante de surface individuelle, les formes des surfaces individuelles périphériques 6 et 6'' étant déterminées par calcul de surfaces pas à pas sur l'aire résiduelle d'arrosage autour de l'aire centrale à surfaces régulières 6" (colonne 4, lignes 18 à 28). Un calcul de surfaces pas à pas se fait de façon similaire pour le mode de réalisation de la figure 7 (colonne 4, ligne 48 à colonne 5, ligne 2). La requérante conclut du fait qu'on calcule les zones surfaciques à partir d'une aire totale d'arrosage déterminée et procède pas à pas sur l'aire résiduelle, que ces zones surfaciques sont "jointivement ajustées" les unes sur les autres et couvrent la totalité de l'aire d'arrosage, sans débords hors de celle-ci. La Chambre ne peut cependant retenir les arguments de la requérante pour les raisons suivantes.

1.2. Comme il est déjà indiqué dans la décision contestée, la stipulation que les surfaces sont ajustées les unes aux autres n'implique pas que ces surfaces individuelles soient nécessairement jointives. La Division d'opposition a cité comme exemple les carreaux de carrelage qui sont ajustés les uns aux autres sur une surface prédéterminée, sans toutefois être jointifs (voir décision contestée, point II.2, page 8, premier paragraphe). Les intimées ont aussi fait référence aux tuiles d'un toit, qui sont indiscutablement ajustées les unes aux autres tout en se recouvrant partiellement. Le libellé de la revendication 1 n'exclut pas ces possibilités. Ces exemples ne concernent certes pas le domaine technique considéré, ils illustrent cependant le caractère non restrictif des termes zones surfaciques "ajustées les unes aux autres" et le libellé de la revendication 1 ne permet pas de conclure qu'ils devraient être interprétés de façon beaucoup plus restrictive dans le cas d'un distributeur de liquide pour un dispositif d'échange de chaleur et de matière.

La définition donnée dans le dictionnaire Larousse (1979) pour le terme "ajuster", à savoir "adapter avec soin et exactement", appliqué au contexte technique du brevet n'implique pas non plus que les zones surfaciques sont nécessairement jointives, c'est-à-dire qu'elles n'ont que des frontières communes sur l'ensemble de la surface considérée. En outre l'expression "sur l'aire d'arrosage" utilisée dans la revendication 1 ne peut être considéré comme signifiant que les zones surfaciques couvrent la totalité de l'aire d'arrosage, c'est-à-dire sans "zones sèches" et sans "zones amputées" (sans débords), en l'absence d'une formulation correspondante de la revendication. Comme l'ont indiqué les intimées, la méthode de calcul à laquelle la requérante fait référence est un procédé pour calculer pas à pas les zones surfaciques sans que cette méthode se reflète dans la formulation de la revendication qui vise un distributeur de liquide. Le distributeur revendiqué n'est donc pas restreint par des caractéristiques de ladite méthode. Il est à noter que la phrase "zones surfaciques étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage" est une caractéristique additionnelle introduite dans la revendication 1 suite aux oppositions et que, dans ces circonstances, il appartient à la requérante de la définir de façon plus restrictive dans la revendication 1 si elle désire limiter l'étendue de cette dernière.

1.3. La Chambre a cependant pris en considération la description et examiné si les caractéristiques considérées comme implicites par la requérante ressortent effectivement du brevet. La description indique certes de façon très générale comment déterminer les formes de surfaces individuelles par le calcul (colonne 4, lignes 18 à 27). Cependant, en l'absence de plus amples informations concernant ce calcul, il ne découle pas implicitement de la méthode décrite que tout espace libre entre les zones surfaciques ou des recouvrements partiels de celles-ci sont exclus. De plus, comme observé par la Division d'opposition et non réfuté par la requérante, il paraît difficilement concevable que les surfaces individuelles n'aient que des frontières communes lorsque l'on prend en considération les cheminées (5) ou les espaces (50) pour le passage de gaz, représentés sur les figures 1 et 2 du brevet (voir décision en cause, page 8, avant-dernier paragraphe).

Cette absence d'information plus précise quant à la méthode de calcul ne permet pas non plus de conclure avec certitude que l'expression "sur l'aire d'arrosage" doit être interprétée comme impliquant nécessairement l'aire totale d'arrosage, c'est-à-dire une aire excluant toute "zone sèche" (zone dépourvue d'un orifice de déversement) et tout débord. Comme souligné par les intimées, la figure 7 du brevet montre au contraire la présence de telles "zones sèches". Ceci n'est pas contesté par la requérante qui a fait valoir que les dessins ne sont que des schémas approximatifs. La Chambre considère cependant que lorsqu'il s'agit d'examiner si une caractéristique non mentionnée dans la revendication découle implicitement du brevet, l'ensemble de celui-ci, c'est-à-dire description et dessins, est à prendre en considération.

1.4. La requérante a aussi fait référence au problème technique indiqué dans le brevet. Le fait que ce problème est de proposer un distributeur permettant d'augmenter la régularité du débit de liquide déversé en réduisant les risques de bouchage ne parait exclure ni un faible recouvrement de quelques surfaces individuelles, ni l'absence totale de "zones sèches" ou de "zones amputées" (absence totale de débords) dans la solution proposée. En effet, il apparaît qu'une amélioration puisse être par exemple déjà obtenue par rapport au distributeur classique de la figure 5 du brevet en supprimant la majeure partie des "zones sèches" ou des "zones amputées", l'absence de toute "zone sèche" ou de toute "zone amputée" représentant un mode de réalisation préféré.

1.5. En conséquence, la Chambre considère que, même si l'on accepte en faveur de la requérante de prendre la description en considération pour interpréter la phrase "les zones surfaciques étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage" de la revendication 1, les informations contenues dans le brevet en cause ne permettent pas d'interpréter cette phrase comme contenant implicitement les caractéristiques additionnelles indiquées par la requérante, à savoir que les zones surfaciques sont nécessairement jointives et que la présence de "zones sèches" et de débords au-delà de la périphérie de l'aire d'arrosage est exclue.

2. Nouveauté, article 54 CBE

2.1. Revendication 1

Le distributeur de liquide selon la revendication 1 est essentiellement défini par :

a) une aire d'arrosage comprenant des passages de gaz et

b) des passages de liquide, ces derniers étant définis par des orifices calibrés répartis suivant un motif de points d'arrosage au moins partiellement irrégulier ;

c) les orifices ayant une section choisie dans un groupe de n sections différentes prédéterminées, n n'excédant pas 4 ;

d) chaque orifice étant disposé au centre de gravité d'une zone surfacique de l'aire d'arrosage ayant une aire correspondant à la section de l'orifice associé,

e) les zones surfaciques étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage.

2.2. État de la technique

Les intimées ont argué que D3 divulgue sur la figure 1 un distributeur de liquide qui détruit la nouveauté du distributeur revendiqué.

La requérante n'a pas contesté le fait que le distributeur représenté à la figure 1 de D3 présente les caractéristiques a) à d) mentionnées ci-dessus (voir point 2.1). Elle a cependant allégué que D3 enseigne qu'un cercle est associé à chaque orifice et que ces cercles ne peuvent donc être ajustés comme le stipule la revendication 1. De plus, certains des cercles débordant du distributeur à la périphérie, la caractéristique e) de la revendication 1 ne serait donc pas observée.

Comme souligné par les parties, les caractéristiques a) à d) sont en effet connues de D3 (titre, points 1.d) et 1.e), pages 4 et 5 et figure 1). De plus, les zones surfaciques définies dans la revendication 1, au centre de gravité desquelles se situent les orifices, sont des zones fictives. Donc, elles ne peuvent représenter en soi une caractéristique technique apte à distinguer le distributeur revendiqué de ceux de l'état de la technique. La Chambre suit donc le point de vue des intimées et considère qu'il importe peu que ces zones soient dessinées dans l'art antérieur ; il suffit que de telles zones puissent être imaginées pour le distributeur connu. En fait, dans le cas présent, les cercles sont déjà dessinés sur la figure 1 de D3 de telle façon que leurs intersections forment des hexagones. Il importe peu qu'il s'agisse de cercles se recouvrant légèrement à leur périphérie ou d'hexagones puisque la revendication 1 ne contient aucune limitation à ce sujet, toujours est-il que les surfaces individuelles correspondantes montrées sur cette figure sont ajustées les unes aux autres. Certes, sur la même figure, certains des cercles représentés à la périphérie débordent légèrement de la circonférence qui représente l'aire d'arrosage. Cependant, comme on l'a vu plus haut, ceci n'est pas exclu de la définition de l'objet revendiqué (voir point 1.5 ci-dessus). Le distributeur représenté à la figure 1 de D3 présente ainsi également la caractéristique e) de la revendication 1 (voir point 2.1).

En conséquence, la Chambre considère que le distributeur revendiqué manque de nouveauté au vu de D3.

Requête subsidiaire

3. Modifications

3.1. La revendication 1 de la requête subsidiaire a été essentiellement modifiée par rapport à la revendication 1 telle que déposée par l'incorporation des caractéristiques suivantes :

a) "des orifices (4,4') ayant une section sensiblement constante correspondant à une section de passage d'un orifice circulaire de diamètre compris entre 3 et 5 mm",

b) "chaque orifice étant disposé au centre de gravité d'une zone surfacique de l'aire d'arrosage (6,6') ayant une aire correspondant à la section de l'orifice associé",

c) et "les zones surfaciques comportant des zones de formes régulières (6) et des zones de formes irrégulières (6') et étant ajustées les unes aux autres sur l'aire d'arrosage".

3.2. Les intimées n'ont pas soulevé d'objections en ce qui concerne les caractéristiques a) et b) indiquées ci-dessus. En effet, la Chambre constate que ces caractéristiques ont leur support dans la description de la demande telle que déposée (page 3, lignes 10 à 13 ; page 4, lignes 22 à 33 et page 5, lignes 1 à 8).

Cependant, les intimées ont fait valoir que les distributeurs représentés aux figures 6 et 7, qui comportent des zones surfaciques de formes régulières et irrégulières, présentent en addition aux orifices 4 et 4' de même section des orifices 4'' à section réduite par rapport à celle des orifices 4 et 4'. La caractéristique c) en combinaison avec la caractéristique a) n'aurait donc pas de support dans la demande initiale.

Comme il est déjà indiqué plus haut, la caractéristique a) est divulguée de façon générale dans la demande d'origine. Pour le distributeur illustré sur la figure 6, il y est décrit que "selon un aspect de l'invention, le motif central d'orifices 4 avec un maillage de zones surfaciques régulières 6 est complété, à sa périphérie, par un motif désordonné d'orifices 4' disposés au centre de gravité de zones surfaciques 6' ayant, dans le mode de réalisation représenté, majoritairement sensiblement la même surface que les zones régulières 6, mais de formes irrégulières, les orifices 4' ayant ici majoritairement la même section que les orifices 4 du motif régulier". (description initiale, page 4, lignes 27 à 33 ; caractères gras ajoutés par la Chambre). Les intimées n'ont pas contesté que la description du distributeur selon la figure 6 est, jusqu'à ce point, conforme à la revendication 1 de la présente requête.

Il est vrai que la figure 6 présente aussi des orifices de section différente. Cependant, cette caractéristique additionnelle est introduite dans la description par la phrase "on a toutefois représenté, sur la gauche de la figure 6, deux orifices 4'' de même section, inférieure à celle des orifices 4 et 4'" (page 4, lignes 33 à 35 ; caractères gras ajoutés par la Chambre). Un peu plus loin, il est indiqué que "d'autres orifices (non représentés) présentant des sections supérieures à celles des orifices 4, 4' ou inférieures à celles des orifices 4'' peuvent être prévus localement" (page 5, lignes 8 à 10 ; caractères gras ajoutés par la Chambre). En outre, la comparaison de la figure 5 avec les figures 6 et 7 et la discussion des inconvénients apparaissant dans le cas de distributeurs selon la figure 5 (page 2, lignes 3 à 15) montrent qu'une des différences essentielles est la présence de zones surfaciques irrégulières en plus des zones surfaciques régulières. Il découle directement et de façon non- ambiguë de cette discussion et du contexte de la demande que lesdites zones irrégulières doivent être présentes même lorsque les orifices ont une section sensiblement constante (n=1), c'est-à-dire même en l'absence des orifices 4'' et des surfaces individuelles 6''. Dès lors, la Chambre considère que les expressions "on a toutefois" et "peuvent être prévus" lues dans ce contexte impliquent clairement que les orifices ayant des sections différentes constituent des options que peut présenter le distributeur selon la figure 6. La même conclusion peut être tirée des formulations similaires concernant le distributeur selon la figure 7 (voir description initiale, page 5, ligne 16 : "selon un aspect de l'invention" et page 5, lignes 32 à 34 : "Ici aussi on a représenté des orifices 4'' à section réduite par rapport à celle des orifices 4, 4'"). La Chambre considère donc que l'objet de la revendication 1 de la présente requête comprenant la caractéristique c) en combinaison avec la caractéristique a) est divulguée dans la demande telle que déposée initialement. Les modifications apportées à la revendication 1 restreignent manifestement la protection par rapport à la revendication 1 délivrée. Cela n'a pas été contesté par les parties. La revendication 1 modifiée est donc conforme aux exigences de l'article 123(2) et (3) CBE.

Les revendications 2 à 7, 9 et 10 correspondent essentiellement aux revendications 5 à 10, 12 et 13 telles que déposées et délivrées, respectivement.

4. Clarté, article 84 CBE

4.1. Selon les intimées, le terme "sensiblement" est vague et la caractéristique des orifices "ayant une section sensiblement constante" dans la revendication 1 manque donc de clarté.

D'après la requérante, il n'est pas toujours praticable de produire des orifices de diamètre entre 3 et 5 mm au micron près, bien que le but soit d'utiliser des orifices de même taille. La Chambre accepte cette explication qui lui paraît plausible compte tenu du fait que l'utilisation envisagée pour les orifices concernés est un déversement de liquide, ce qui ne devrait pas nécessiter un diamètre exact au micron près de ces orifices. La Chambre considère ainsi que la caractéristique "ayant une section sensiblement constante" associée aux données complémentaires de 3 à 5 mm est suffisamment claire pour être comprise par l'homme du métier.

4.2. Les intimées ont aussi observé que la caractéristique "des zones de formes irrégulières" manque de clarté. Selon la requérante, l'expression "zones de formes irrégulières" n'est pas à considérer en tant que telle mais par opposition aux "zones de formes régulières" dont elles se distinguent par des contours variables. La Chambre note que cette explication est supportée par la description du brevet en cause (colonne 4, lignes 6 à 12 et lignes 50 à 57) et illustrée sur les figures 6 et 7 et elle ne voit aucune raison de ne pas accepter cette explication.

5. Nouveauté, article 54 CBE

L'intimée 02 a avancé que le distributeur représenté à la figure 8 (page 54) de D11 correspondrait au distributeur de liquide représenté à la figure 1 de D3. De plus, D11 recommanderait des orifices avec un diamètre d'environ 3,17 mm (page 56, colonne de droite). Par suite, ce distributeur connu de D11 détruirait la nouveauté du distributeur selon la présente revendication 1.

L'intimée 02 a cependant concédé que D11 ne fait aucune référence au document D3 en ce qui concerne la description du distributeur selon la figure 8. Elle a aussi admis que l'on ne voit pas les détails du distributeur représenté à la figure 8 du document D11. La Chambre constate en outre que la figure 8 n'est pratiquement pas décrite dans D11. Il est essentiellement indiqué qu'un distributeur devrait normalement présenter 10% des orifices sur les 10% de la surface au voisinage de son contour périphérique. De plus, la distribution des orifices additionnels indispensables à la réalisation de ce but devrait être aussi homogène que possible. Or, il n'est pas toujours possible de placer les orifices à la périphérie du distributeur avec un pas égal à la moitié du pas moyen, ce qui empêche automatiquement une distribution homogène de ces orifices. Ainsi, il est proposé d'ajouter un orifice au voisinage du contour périphérique du distributeur seulement au cas où la distance entre le centre du dernier orifice et le contour périphérique est supérieure à la moitié du pas moyen (page 54, colonne de gauche, troisième paragraphe et colonne de droite, premier paragraphe). Dans les passages cités, D11 discute donc l'emplacement des orifices supplémentaires à la périphérie du distributeur selon la figure 8. Cependant, il ne découle pas directement et sans ambiguïté de la figure 8 et des passages se référant à cette figure, que ces orifices ont la même section que le reste des orifices. D11 recommande à la page 58 un diamètre minimum d'orifice de 3,17 mm (1/8 in) pour un distributeur en acier inoxydable afin d'éviter les problèmes de bouchage dans le cas de faibles débits de liquide (colonne de droite, deuxième paragraphe). Cependant, les considérations à la page 58 de D11 ne contiennent aucune référence au distributeur particulier représenté sur la figure 8 à la page 54. Dans ces circonstances, la Chambre n'est pas convaincue que D11 divulgue un distributeur comprenant la combinaison des caractéristiques selon la revendication 1.

Aucun des autres documents cités au cours de la procédure ne détruit la nouveauté de l'objet revendiqué. Cela n'a pas été contesté par les intimées. En conséquence, la revendication 1 est conforme aux exigences de l'article 54 CBE.

6. Activité inventive, article 56 CBE

6.1. La requérante a demandé le renvoi du dossier à la Division d'opposition pour l'examen d'activité inventive, dans le cas où la Chambre arriverait à la conclusion que l'objet de la revendication 1 est nouveau.

6.2. Comme il ressort du procès-verbal de la procédure orale en première instance, la révocation du brevet européen ayant été faite pour défaut de nouveauté, la question d'activité inventive n'a pas été discutée lors de la procédure orale devant la Division d'opposition. De plus, le texte de la revendication 1 de la requête subsidiaire a été soumis dans cette forme pour la première fois en appel. Les intimées ne se sont pas prononcées en faveur du renvoi du dossier à la Division d'opposition, cependant elles n'ont pas motivé leur désaccord. En exerçant son pouvoir d'appréciation conformément à l'article 111(1) CBE, la Chambre accepte dans ces circonstances la requête de la requérante et décide de renvoyer l'affaire à la Division d'opposition pour poursuite de la procédure. L'attention de la Division d'opposition est attirée sur l'expression "colonne de distribution" utilisée probablement par erreur dans la revendication 8 au lieu de "colonne de distillation".

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision dont appel est annulée.

2. L'affaire est renvoyée à la première instance pour poursuite de la procédure sur la base de la requête subsidiaire déposée à la procédure orale.

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