T 0164/00 () of 23.1.2001

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2001:T016400.20010123
Date de la décision : 23 Janvier 2001
Numéro de l'affaire : T 0164/00
Numéro de la demande : 92402324.5
Classe de la CIB : B60R 22/02
B60R 22/24
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Dispositif de retenue pour un passager occupant la place centrale arrière d'un véhicule automobile
Nom du demandeur : AUTOMOBILES PEUGEOT, et al
Nom de l'opposant : Mazda Motor Corportation
Chambre : 3.2.01
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive (non)
Exergue :

-

Décisions citées :
T 0069/83
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. L'intimée est titulaire du brevet européen n 0 532 378 (n de dépôt européen : 92 402 324.5).

La revendication 1 du brevet se lit comme suit :

"Dispositif de retenue pour un passager occupant la place centrale arrière d'un véhicule automobile, du type comprenant deux pédoncules (14A, 14B) à organes de verrouillage ou de déverrouillage (16A, 16B) disposés de part et d'autre dudit passager central et une ceinture de sécurité (5) à trois points d'ancrage dont un muni d'un enrouleur (6), ladite ceinture étant munie de deux pênes pouvant être verrouillés respectivement aux deux organes de verrouillage ou de déverrouillage des deux pédoncules et dont un pêne est monté coulissant sur ladite ceinture, définissant ainsi en position bouclée un brin thoracique (5a) et un brin ventral (5b), caractérisé en ce que ladite ceinture est munie d'un pêne fixé en bout et comporte un seul brin thoracique qui passe sur une épaule du passager central et part ensuite vers l'arrière du véhicule de façon sensiblement horizontale et obliquement par rapport à l'axe longitudinal (X-X') du véhicule jusqu'à l'enrouleur fixé à la structure arrière d'un côté du véhicule correspondant à l'épaule de ce passager."

II. La requérante a fait opposition et requis la révocation complète du brevet européen en cause.

Pour en contester la brevetabilité, elle a notamment opposé les documents :

D3 : JP-A-6 422 559, accompagné d'une traduction en anglais, D4 : JP-A-63 130 450, accompagné d'une traduction en anglais.

III. Par décision remise à la poste le 1er décembre 1999, la Division d'opposition a rejeté l'opposition.

Dans sa décision, elle a estimé que l'objet de la revendication 1 présentait la nouveauté et l'activité inventive requises par rapport aux documents opposés D4 et D3.

IV. Par lettre en date du 24 janvier 2000, la requérante (opposante) a formé un recours contre cette décision et réglé simultanément la taxe correspondante.

Le mémoire dûment motivé a été déposé le 30 mars 2000.

V. Une audience s'est tenue devant la Chambre le 23. janvier 2001.

La requérante demande l'annulation de la décision contestée et le révocation complète du brevet européen en cause.

L'intimée (titulaire du brevet) sollicite le rejet du recours et, à titre auxiliaire, le maintien du brevet européen sur la base de la première requête subsidiaire déposée au cours de la procédure orale.

Les revendications de la requête subsidiaire sont identiques à celles du brevet européen, à cette différence près que les deux revendications dépendantes 3 et 4 telles que délivrées, ont été fusionnées, les revendications dépendantes suivantes ayant été renumérotées en conséquence.

VI. Au soutien de son action, la requérante expose que le dispositif de retenue selon la revendication 1 n'est pas nouveau par rapport au document D4 et si, contre toute attente, la nouveauté était reconnue, l'objet de cette revendication résulterait de toute façon, à l'évidence de l'enseignement des antériorités D4 et D3, prises isolément ou en combinaison.

VII. L'intimée (titulaire du brevet) a contesté l'argumentation de la requérante et exposé de façon détaillée pourquoi, selon elle, l'objet de la revendication 1 du brevet européen était brevetable par rapport à l'état de la technique opposé.

En effet, le document D4 concerne une ceinture de sécurité qui est exclusivement destinée à un siège avant de véhicule automobile, pour le conducteur ou le passager avant. Ainsi qu'il ressort de la description de ce document de brevet, la ceinture de sécurité est destinée à équiper un véhicule sans pied central ; l'absence de pied central ne soulève de difficultés que pour la fixation de ceintures de sécurité destinées à des sièges avant. Au surplus, la solution préconisée dans ce document consiste à loger l'enrouleur de ceinture à l'intérieur d'un accoudoir disposé sur un côté latéral du véhicule automobile, ce qui suppose bien entendu que derrière le siège équipé de la ceinture de sécurité se trouve un autre siège équipé de l'accoudoir en question. La ceinture de sécurité faisant l'objet du document D4 ne saurait donc détruire la nouveauté de l'invention revendiquée puisqu'elle n'est pas conçue pour un passager occupant la place centrale arrière d'un véhicule automobile.

Dans le document D3, l'enrouleur de ceinture est fixé derrière le dossier de la banquette arrière. Ce document ne saurait également détruire la nouveauté du dispositif revendiqué dont l'enrouleur est fixé à la structure arrière sur l'un des côtés de la caisse du véhicule.

Dans le document D3, la fixation de l'enrouleur de ceinture derrière le dossier du siège arrière présente un double inconvénient : en premier lieu, l'enrouleur constitue une gêne une fois que le dossier du siège arrière est rabattu afin d'augmenter le volume du coffre puisque l'enrouleur forme alors une saillie sur le plancher du coffre agrandi et, en second lieu, le risque existe que le passager central arrière subisse une lésion au niveau du cou en cas de choc transversal particulièrement violent.

Les caractéristiques définies dans la revendication 1 permettent de remédier à l'un au moins des deux inconvénients susmentionnés ou autrement dit de résoudre au moins l'un de ces deux problèmes partiels.

L'homme du métier n'est nullement tenté de s'inspirer du document D4 voire même de combiner les deux documents D4 et D3 : D4 enseigne en effet de disposer l'enrouleur d'une ceinture équipant un siège avant dans un accoudoir si la caisse de véhicule est dépourvue de pied central. Cette antériorité ne contient rien qui puisse inciter l'homme du métier à transposer l'enseignement donné à un siège central arrière. En revanche, le document D3 enseigne de disposer l'enrouleur d'une ceinture équipant le siège central arrière sur le dossier dudit siège arrière.

Au surplus, aucun de ces deux documents ne résout le problème lié au risque de lésion au niveau du cou du passager en cas de choc transversal particulièrement violent. Même si, contre toute attente, l'homme du métier était amené à combiner les enseignements de ces deux antériorités, il ne saurait parvenir, sans faire preuve d'activité inventive, à l'invention revendiquée puisque dans chacune de ces antériorités, il est prévu un brin de ceinture passant au-dessus de l'épaule du passager qui soit aussi court que possible. Les enseignements de ces deux documents vont par conséquent à l'encontre de l'invention revendiquée où il est prévu un brin correspondant, forcément long reliant le siège central arrière à l'arrière d'un côté du véhicule.

Dans un mode préféré de réalisation faisant l'objet de la revendication 3 de la requête subsidiaire, il est certes prévu un guide fixé à la partie supérieure du dossier mais celui-ci est en un matériau frangible se rompant lors d'un choc transversal relativement violent. Par conséquent, le problème partiel tenant au risque de blessure est également résolu en prévoyant un guide à paroi frangible ne s'opposant pas à un débattement latéral important en cas de choc transversal particulièrement violent.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. Nouveauté

Le document D4 décrit pour l'essentiel deux emplacements possibles pour l'enrouleur de la ceinture de sécurité : ou bien l'enrouleur est disposé dans le pied central de la caisse de véhicule, ou bien, en l'absence de pied central, il est logé dans l'extrémité de l'accoudoir se trouvant juste derrière le dossier du siège avant équipé de la ceinture, c'est-à-dire sensiblement au milieu de l'habitacle ; il ne se trouve donc pas logé, comme dans le dispositif revendiqué, derrière le dossier de la banquette arrière du véhicule et sur un côté de celui-ci.

Force est donc de constater que le dispositif revendiqué ne se retrouve pas tout entier dans le document D4 et présente par suite la nouveauté requise.

Dans le document D3, l'enrouleur est fixé sur le dossier du siège central arrière du véhicule automobile, au-dessus du dossier et à l'arrière de celui-ci. Cette antériorité ne divulgue nullement la disposition revendiquée de l'enrouleur, à savoir sa fixation sur la structure arrière du véhicule, sur un côté de la caisse. Il s'ensuit que le dispositif de retenue revendiqué est également nouveau par rapport au document D3.

3. Activité inventive

3.1. Il est manifeste que c'est le document D3 qui constitue l'état de la technique le plus proche puisque cette antériorité concerne également un dispositif de retenue à ceinture de sécurité pour un passager occupant la place centrale arrière d'un véhicule automobile. Ainsi que l'a fait valoir à juste titre l'intimée (titulaire du brevet), l'agencement de l'enrouleur sur la face arrière du dossier du siège arrière central pose un double problème : en effet, le siège arrière est généralement réglable longitudinalement et son dossier peut être rabattu afin d'augmenter le volume du coffre. En position rabattue, l'emplacement de l'enrouleur sur la face arrière du dossier constitue une gêne puisqu'il forme une saillie sur le plancher du coffre agrandi. Au surplus, lors d'un choc transversal violent, le brin de la ceinture passant au-dessus de l'épaule du passager central ne peut quasiment pas se déplacer transversalement, d'où un risque de traumatisme au niveau du cou du passager.

3.2. Par conséquent, en partant de cet état de la technique le plus proche, le problème posé est celui de proposer un dispositif de retenue à ceinture de sécurité destiné à équiper la place centrale arrière d'un véhicule automobile, qui permette de remédier au double inconvénient susvisé lié à l'emplacement de l'enrouleur.

Ce problème est résolu par les caractéristiques énoncées dans la revendication 1. En effet, étant donné que l'enrouleur est placé sur un côté du véhicule à l'arrière de la caisse, et non pas sur la face arrière du dossier de la banquette arrière, il ne constitue aucune gêne, lorsque le dossier de la banquette arrière est rabattu afin d'augmenter le volume du coffre. Au surplus, il est dit dans la revendication que le brin de la ceinture passe sur une épaule du passager central pour partir ensuite vers l'arrière du véhicule de façon sensiblement horizontale et obliquement jusqu'à l'enrouleur fixé à la structure arrière d'un côté du véhicule. Ceci implique nécessairement la présence d'un brin long formé par la ceinture qui autorise un déplacement relativement important du passager assis sur le siège central lors d'un choc latéral.

3.3. Sur la question de savoir si la solution revendiquée résulte à l'évidence des documents D4 ou D3, il y a lieu d'observer ce qui suit :

3.3.1. Le document D4 concerne une ceinture de sécurité du type revendiqué à trois points d'ancrage enroulée sur un enrouleur fixe et comportant un pêne pouvant coulisser sur la ceinture. Lorsque la ceinture est bouclée, le passager ou le conducteur est retenu par un brin thoracique et un brin ventral de la ceinture.

L'auteur de ce document part d'un état de la technique dans lequel l'enrouleur et l'organe de renvoi sont logés dans le pied central de la carrosserie d'un véhicule automobile. Toutefois, il existe des véhicules, en particulier des coupés "hard top" ou des voitures décapotables qui ne comportent pas de pied central. L'auteur mentionne à cet égard un état de la technique où le renvoi ou point d'ancrage intermédiaire est fixé au plafond du véhicule, ce qui a pour inconvénient de rendre bien visible la ceinture de sécurité. L'auteur de ce document vise donc à trouver un emplacement pour l'enrouleur de ceinture et son renvoi associé qui ne soit d'aucune gêne pour les occupants d'un véhicule dépourvu de pied central. En particulier, si le renvoi et l'enrouleur de ceinture doivent être logés en-dessous des vitres latérales du véhicule, il se pose alors un problème de place car la paroi latérale, en particulier la porte arrière qui est destinée à les recevoir comporte déjà un dispositif de fermeture et un mécanisme de lève-glace. Pour résoudre ce problème, l'auteur de ce document prévoit de placer l'enrouleur dans un accoudoir latéral situé derrière le siège équipé de la ceinture.

Ce document enseigne de façon générale que, pour réduire la gêne causée par un enrouleur de ceinture, il convient de le placer sur un côté latéral de la caisse derrière le siège équipé de la ceinture. Si le siège en question est un siège avant, il convient alors de placer l'enrouleur et le renvoi dans le pied central de la caisse et, s'il n'existe pas de pied central, il y a lieu alors de les placer sur un côté de la caisse en-dessous des vitres de façon à ne pas gêner la visibilité. L'homme du métier comprendra aisément que, dans le cas où une ceinture de sécurité de ce genre équipe un siège central arrière, l'enrouleur et son renvoi associé peuvent être disposés sur le côté du véhicule derrière le siège en question, c'est-à-dire, dans ce cas, sur le panneau latéral de la carrosserie à hauteur de la roue arrière, sans que le renvoi ou l'enrouleur ne puisse gêner la visibilité.

L'homme du métier est incité à utiliser la ceinture de sécurité du document D4 pour équiper le siège central arrière puisque ce document vise aussi à résoudre le problème de la gêne causée par l'enrouleur de ceinture. L'homme du métier, en mettant en oeuvre cet enseignement, aboutit nécessairement au dispositif revendiqué : si la ceinture de sécurité du document D4 est mise sur la place centrale arrière d'un véhicule automobile, elle définit également en position verrouillée ou bouclée un brin thoracique et un brin ventral ; le brin thoracique passe alors sur une épaule du passager central et part ensuite vers l'arrière du véhicule de façon sensiblement horizontale et obliquement jusqu'à l'enrouleur qui serait fixé à l'arrière sur le côté de la caisse du véhicule.

Il est vrai que dans le mode de réalisation décrit dans le document D4, le brin de ceinture passant au-dessus de l'épaule du passager qui s'étend obliquement et de façon sensiblement horizontale est relativement court. Toutefois, dans le cas d'un siège central arrière, ce brin est forcément long puisqu'il passerait sur une épaule du passager central pour partir ensuite vers l'arrière du véhicule de façon sensiblement horizontale et obliquement jusqu'à l'enrouleur fixé à la structure arrière d'un côté du véhicule.

3.3.2. Ainsi que le fait ressortir justement l'intimée, le dispositif de retenue décrit dans le document D4 est prévu pour un siège avant de véhicule automobile, pour le conducteur ou le passager avant. La Chambre estime toutefois que l'on est en droit d'attendre d'un homme du métier, confronté au problème de la gêne causée par la présence d'un enrouleur de ceinture et de son renvoi qu'il examine également des documents concernant le même domaine des ceintures de sécurité, même si les ceintures qui en font l'objet sont plus particulièrement prévues pour équiper des sièges avant de véhicules automobiles.

3.3.3. Ainsi qu'il a déjà été exposé, l'homme du métier en s'inspirant de l'enseignement du document D4, c'est-à-dire en disposant l'enrouleur sur un côté de la caisse derrière le siège central arrière du véhicule afin que l'enrouleur soit le moins gênant possible et ne soit pas visible de l'extérieur parvient forcément au dispositif de retenue revendiqué, notamment à la présence d'un brin long passant au-dessus de l'épaule du passager et qui s'étend horizontalement et obliquement jusqu'à la partie arrière d'un côté latéral du véhicule où est fixé l'enrouleur. Dans ce cas, le brin long en question permet au passager central de ne pas être bloqué transversalement par la ceinture, ce qui lui permet de se déplacer lors d'un choc transversal violent sans subir de traumatisme au niveau du cou.

Autrement dit, l'homme du métier en appliquant l'enseignement du document D4 à une ceinture de sécurité pour siège central arrière aboutit à une solution qui lui permet de résoudre simultanément le second problème partiel, à savoir celui d'empêcher que le passager central arrière ne subisse une lésion au niveau du cou en cas de choc transversal particulièrement violent. Toutefois, selon la jurisprudence des chambres de recours ce n'est pas parce qu'une solution, suggérée par l'enseignement d'une antériorité, permet de résoudre simultanément et de façon inattendue un problème partiel, dans le cas d'espèce, le risque de lésion au niveau du cou du passager en cas de choc transversal, que la solution en question est nécessairement inventive. En effet, l'homme du métier en cherchant à résoudre l'autre problème partiel majeur, à savoir un emplacement pour l'enrouleur de ceinture qui soit le moins gênant possible et qui ne soit pas visible, parvient forcément, en s'inspirant de l'enseignement du document D4, à la solution revendiquée et il importe peu dès lors que cette solution permette également de remédier à un inconvénient dont ne faisait nullement mention le document D4.

Il est fait référence notamment à la décision T 69/83 (JO OEB 1984, 357), où il est dit que si l'état de la technique contraint l'homme du métier en raison d'une partie essentielle du problème technique existant, à choisir une solution déterminée, le fait que cette solution puisse résoudre simultanément et de façon inattendue un problème partiel ne la rend pour autant inventive.

3.4. Pour les motifs ci-dessus exposés, l'objet de la revendication 1 telle que délivrée découle de manière évidente de l'état de la technique opposé et ne présente pas par conséquent l'activité inventive requise (article 56 CBE). Il y a donc lieu de rejeter la requête principale visant au maintien du brevet tel que délivré.

4. La revendication 1 selon la requête subsidiaire étant en tout point identique à la revendication 1 telle que délivrée, il y a donc lieu de rejeter également la requête subsidiaire.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision entreprise est annulée.

2. Le brevet européen n 0 532 378 est révoqué.

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