European Case Law Identifier: | ECLI:EP:BA:2010:R002109.20100319 | ||||||||
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Date de la décision : | 19 Mars 2010 | ||||||||
Numéro de l'affaire : | R 0021/09 | ||||||||
Requête en révision de : | T 1753/06 | ||||||||
Numéro de la demande : | 01954058.2 | ||||||||
Classe de la CIB : | C07D 209/42 | ||||||||
Langue de la procédure : | FR | ||||||||
Distribution : | B | ||||||||
Téléchargement et informations complémentaires : |
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Titre de la demande : | Forme cristalline alpha du sel de tert-butylamine du perindopril | ||||||||
Nom du demandeur : | Les Laboratoires Servier Autres Parties : Quimica Sintetica. S.A. NORTON HEALTHCARE LTD Glenmark Pharmaceuticals Ltd POLPHARMA MIESZKOWSKA, Agnieszka, AMCA Consulting Hetero Drugs Limited Ratiopharm GmbH |
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Nom de l'opposant : | - | ||||||||
Chambre : | EBA | ||||||||
Sommaire : | - | ||||||||
Dispositions juridiques pertinentes : |
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Mot-clé : | Violation fondamentale de procédure: non respect du droit de se défendre - Art. 113 CBE [non] Requête en révision - manifestement non fondée |
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Exergue : |
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Décisions citées : |
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Décisions dans lesquelles la présente décision est citée : |
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Exposé des faits et conclusions
I. La société Les Laboratoires Servier a déposé une requête en révision datée du 30 novembre 2009 et reçue le 1er décembre 2009, contre la décision T 1753/06 de la chambre de recours 3301. Cette décision, prononcée à l'issue de la procédure orale tenue les 5 et 6 mai 2009, a été notifiée par voie postale le 21 septembre 2009.
La décision objet de la requête en révision a révoqué pour défaut de nouveauté, le brevet nº 1 296 947 ayant pour titre "Forme cristalline alpha du sel de tert-butylamine du perindopril", que la division d'opposition avait maintenu dans une forme modifiée.
II. La requérante est la titulaire du brevet et intimée lors de la procédure de recours. Elle fonde sa requête en révision sur l'article 112 bis(2)c) CBE, pour violation fondamentale de son droit d'être entendu (article 113 CBE).
III. Les faits de l'espèce utiles à l'examen de la présente requête peuvent être ainsi résumés.
i) Le recours contre la décision de la division d'opposition de maintenir le brevet dans sa forme modifiée a été formé par sept des opposantes. La division d'opposition avait reconnu la nouveauté de la revendication 1 du brevet opposé notamment au regard de D1 en estimant que l'exemple 3D de D1 ne divulguait pas la structure cristalline alpha de la revendication 1 du brevet opposé.
ii) Lors de la procédure de recours, toutes les requérantes ont maintenu l'objection de défaut de nouveauté vis à vis de l'exemple 3D de D1.
iii) La "High Court of Justice - Chancery Division - Patents Court" siégeant à Londres, a rendu le 6 juillet 2007, en première instance, une décision révoquant la partie britannique du brevet européen objet de la présente procédure dans l'action en contrefaçon et validité du brevet, opposant Les Laboratoires Servier à APOTEX.
iv) Norton Healthcare Ltd (O3) a versé cette décision aux débats le 3 septembre 2007 et, le 12 août 2008, la décision rendue le 9 mai 2008 par la "Supreme Court of Judicature - Court of Appeal", confirmant cette décision.
v) APOTEX défendeur dans l'instance en contrefaçon et validité du brevet en cause devant la juridiction anglaise a déposé des observations (article 115 CBE) en qualité de tiers le 5 mars 2009. APOTEX a adressé deux séries de documents. La première série de documents est un commentaire de la décision anglaise avec des extraits des témoignages alors recueillis par le juge anglais et la seconde est intitulée "Defendant's notice of Experiments".
vi) La titulaire du brevet a répondu dans ses écritures datées du 24 mars 2009, entre autres, aux observations d'APOTEX. Elle s'est étonnée de leur tardiveté et a contesté les résultats qui lui étaient opposés.
vii) Lors de la procédure orale du 5/6 mai 2009 la requérante a sollicité le renvoi de la procédure orale à une date ultérieure pour lui permettre de prendre connaissance des dossiers des décisions anglaises et pour garantir son droit d'être entendu. Il a été aussi fait allusion, tout au long de la procédure orale devant la chambre de recours ainsi que dans le résumé des faits et conclusions à une décision néerlandaise. Cette décision n'a joué aucun rôle dans la décision objet de la requête en révision, il n'en sera pas davantage fait état.
La requérante a également requis que la Grande Chambre soit saisie de la question suivante :" Dans les procédures devant l'OEB et en application des dispositions de l'article 1 de la CBE, la question de la brevetabilité peut elle être tranchée en se fondant sur une partie des faits et preuves retenus et appréciés dans une décision d'une juridiction nationale sans que l'instance de l'OEB concernée ne procède de façon indépendante à l'examen de l'ensemble des faits et preuves soumis devant la juridiction nationale"
IV. Le 13 janvier 2010 la Grande Chambre de recours a adressé une communication à la requérante en annexe à la convocation à la procédure orale.
V. La requérante a déposé le 22 février 2010 (date de la télécopie) des observations écrites en réponse à l'analyse préliminaire faite dans la communication de la Grande Chambre de recours.
VI. La procédure orale a eu lieu le 19 mars 2010.
VII. Au soutien de la violation alléguée de son droit d'être entendu la requérante présente deux séries de moyens qu'elle a développés dans ses écritures en réponse à la communication et lors de l'audience.
D'une part la chambre de recours a délégué son pouvoir de jugement. Elle n'a pas procédé à un examen des moyens de preuve, en l'espèce les essais produits et discutés devant la juridiction anglaise, mais s'est reposée sur l'analyse de ces moyens de preuve faite par les juridictions anglaises. Or, ces décisions sont fondées sur une sélection de faits et preuves effectuée par le juge anglais. La chambre en suivant cette sélection s'est nécessairement alignée sur le raisonnement de ces juridictions, ce qui va à l'encontre des articles 1 et 2 de la CBE instituant un droit commun indépendant des droits nationaux. La titulaire du brevet a été privée de la possibilité de se défendre puisque les faits et preuves ne figuraient pas in extenso dans les jugements, que le report de la procédure orale lui a été refusé et que le brevet a été révoqué sans lui donner la possibilité de s'expliquer sur l'ensemble des faits et preuves présentés devant les juridictions anglaises.
D'autre part elle fait valoir qu'à six reprises la chambre de recours s'en est remise à l'appréciation des juges britanniques sans tenir compte de ses objections critiques à l'encontre des essais sur lesquels les décisions sont fondées. Seul un accès à l'intégralité des ces essais aurait permis de répondre correctement à ces objections étant observé que ces essais ont été diligentés par APOTEX tiers à la présente procédure. Il y a eu une entrave à son droit de défense, tombant sous le coup de l'article 113 EPC.
La requérante a également ajouté qu'un document clé et déterminant pour la décision doit être signalé aux parties à l'avance. Or, la chambre de recours n'avait même pas mentionné dans la liste des documents importants figurant dans sa communication adressée en vue de préparer la procédure orale les décisions en cause.
VIII. La requérante sollicite de la Grande Chambre l'annulation de la décision de la décision T 1753/06 et la réouverture de la procédure de recours devant la chambre de recours.
Motifs de la décision
1. Recevabilité
1.1 Les conditions tenant au délai et au paiement de la taxe, ainsi que les conditions prévues par la règle 107 CBE sont satisfaites.
1.2 Règle 106 CBE :
Le procès-verbal de la procédure orale comporte deux annexes (A) et (B). L'annexe (A) est le propre compte rendu de la procédure orale par l'intimée ; elle y relate ses objections soulevées et rejetées par la chambre; l'annexe (B) est une question à déférer à la Grande Chambre (article 112 CBE). L'on peut lire dans l'annexe du procès-verbal (A) que:
- "l'intimée a considéré que le fait de ne pas avoir connaissance du dossier complet de la procédure, en particulier de la description des essais soumis lors de ces procédures...ne lui permettait pas de répondre aux questions soulevées durant la procédure orale. L'intimée a indiqué de ce fait que son droit d'être entendu n'a pas été respecté."
- "en ce qui concerne la requête de l'intimée soumise pour les mêmes motifs, c'est à dire non respect du droit d'être entendu, lors de la discussion de la seconde requête subsidiaire, de ne pas considérer la décision du tribunal néerlandais en date du 11 juin 2008, la chambre rejette cette requête car ce jugement est dans la procédure".
1.3 Le procès verbal de la chambre de recours, de son côté, mentionne la demande de renvoi à une date ultérieure de la procédure orale pour la garantie du droit d'être entendu et renvoie à l'annexe (A).
1.4 Le recoupement de ces informations avec celles figurant en page 10 de la décision fait apparaitre clairement que la requérante a sans ambiguïté soulevé l'existence d'une violation de son droit d'être entendu si la chambre ne faisait pas droit au report de l'audience pour lui permettre de préparer sa défense face aux décisions anglaises, lorsque la chambre a décidé de considérer en détail ces décisions.
1.5 Il est vrai que l'intimée n'a pas alors mentionné la règle 106 CBE. Elle a toutefois, caractérisé une objection de nature à justifier l'application de l'article 112 bis CBE. Et sa requête en vue du report de la procédure orale fondée sur cette objection a été rejetée par la chambre de recours.
1.6 Il est vrai aussi que l'annexe (B) du procès-verbal est un élément de confusion. Il s'agit d'une demande de saisine de la Grande Chambre sur le fondement de l'article 112 CBE provoqué par le même incident de procédure mais formulée comme une question de fond.
1.7 Toutefois, à ce stade de la procédure en révision, la Grande Chambre estime que l'objection clairement soulevée et notée au procès verbal de la chambre de recours, portant sur un vice de procédure précis, suivie d'un refus de la chambre de recours, ne permet pas de conclure que le recours en révision est manifestement irrecevable conformément à la règle 109(2)a) CBE.
Le fait que l'objection n'ait été soulevée qu'après la discussion de la requête principale et de deux requêtes subsidiaires n'a aucune incidence sur la recevabilité en l'espèce, puisque l'objection a été faite pendant les débats.
2. Le bien-fondé
2.1 La requérante distingue entre l'atteinte à son droit d'être entendu et l'atteinte au principe de l'indépendance du droit de la CBE par rapport au droit national, principe dont découle le droit pour une partie à une procédure de recours devant les chambres de recours à avoir une instance indépendante.
Sous le grief de violation du droit d'être entendu, il est reproché à la chambre de recours de n'avoir pas permis un nouveau débat sur l'ensemble des documents soumis aux juridictions anglaises. Le second point de la requête en révision considère dans les détails en quoi la chambre aurait ainsi adopté la position du juge anglais sans considérer elle même directement les moyens de preuve.
La Grande Chambre estime que chacune de ces deux atteintes, en réalité, concerne le droit d'être entendu: la requérante a été privée de son droit à présenter une défense complète, parce que la décision a pris en considération des éléments partiels, à savoir ceux tirés des décisions anglaises, sans permettre un débat sur l'ensemble des moyens de preuve qui avaient été soumis à ces juridictions.
2.2 Le point central de la décision objet du recours était de savoir si l'exemple 3D du document D1 anticipait la revendication 1 du brevet en cause et plus précisément si la forme cristalline alpha était un résultat direct implicite et inévitable de cet exemple. La chambre de recours est parvenue à la conclusion que cette forme cristalline alpha était bien générée lorsque l'exemple 3D de D1 était reproduit. Les éléments de preuve sur lesquels elle s'appuie font l'objet de la critique de la requérante.
2.3 S'agissant des principes la Grande Chambre ne peut qu'abonder dans le sens de la requérante. Les procédures devant les chambres de recours sont autonomes et les décisions des juridictions nationales n'ont pas d'autorité en droit. Ce principe a été rapidement affirmé dans la jurisprudence des chambres de recours - voir en ce sens T 452/91 du 5 juillet 1995, non publiée au JO de l'OEB (point 5.4). Il s'ensuit que les parties doivent s'attendre à jouir devant les chambres de recours de droits intacts quant à l'organisation de leur défense.
Toute entorse à ce principe affecterait non seulement l'intégrité des droits des parties mais serait aussi incompatible avec le principe de l'indépendance des membres des chambres de recours affirmée à l'article 23(3) CBE qui ne doivent se conformer qu'aux seules dispositions de la convention et ne sont liés par aucune instruction.
2.4 Ce principe n'exclut pas, toutefois, notamment dans le souci de l'élaboration d'une jurisprudence européenne harmonieuse, une certaine interaction entre les systèmes judiciaires nationaux et le système européen (voir par exemple la décision rendue par la High Court of Justice, Court of Appeal (Civil Division) dans l'affaire nº A3/2009/0675 Actavis UK Limited contre Novartis AG, où le juge anglais analyse l'approche problème solution pratiquée par l'OEB et conclut au paragraphe 63 que la décision sur l'évidence de la solution du brevet litigieux à laquelle il est parvenu aurait été la même si l'approche problème solution avait été utilisée).
2.5 Ce principe n'a pas été perçu comme un obstacle par la chambre de recours dans la décision T 665/95 , non publiée au JO de l'OEB, citée dans la décision objet de la requête en révision, quand elle a refusé une nouvelle mesure d'instruction en s'appuyant sur des témoignages recueillis dans une décision hollandaise. Si en effet, rien ne s'oppose à ce que des décisions nationales ou des pièces produites lors d'une action en justice nationale soient également versées par les parties lors d'une procédure devant les chambres de recours de l'OEB, la plus grande vigilance doit accompagner le traitement par les chambres de recours de ces éléments de fait et de preuve un peu différents des pièces ordinaires, afin que la liberté d'esprit dans l'appréciation de ces pièces reste intacte pour permettre à la chambre de recours de se forger une conviction propre.
2.6 En tout état de cause la production des pièces déjà soumises à des juridictions nationales, ou des décisions de ces juridictions obéit à la règle générale selon laquelle il appartient à chacune des parties de communiquer les pièces qu'elle entend utiliser dans chaque instance, dans le respect des droits de la défense ou du droit d'être entendu. En effet, même s'il y a identité de parties la procédure de recours est une procédure distincte de la procédure nationale et autonome.
2.7 Ces principes étant rappelés, le grief articulé en l'espèce contre la décision n'est pas d'avoir tenu compte de documents non mis aux débats, mais de n'avoir pas donné la possibilité à la requérante de discuter les documents communiqués, incomplets selon elle, dans le contexte général dont ils avaient été extraits.
2.8 Il convient par conséquent, de rechercher si les circonstances de la production des décisions anglaises ont privé la requérante de la possibilité du droit de se défendre (article 113 CBE). Cela suppose de vérifier que la requérante a eu le temps de se préparer à débattre de ces décisions et des éléments autour de ces décisions, en fonction de ce qu'elle devait s'attendre à voir discuter lors de la procédure orale .
2.9 La chambre de recours pour conclure que la forme cristalline alpha était inévitablement présente dans l'exemple 3D du document D1 s'est fondée à la fois sur des essais produits par les requérantes/opposantes lors de la procédure d'opposition (D24, D42, D46 et D47) et sur les déclarations des experts devant le tribunal anglais (points 4.9.2 ; 4.9.3 : 4.9, 4 ; 4.10 et 12.5 de la décision de la chambre de recours).
2.10 La Grande Chambre avait déjà remarqué dans sa communication préalable que les éléments puisés dans la décision du juge anglais de première instance surtout, n'étaient pas le seul fondement de la révocation du brevet et que, par conséquent, il n'y avait pas de lien de causalité entre le vice de procédure allégué et la décision de révocation.
La requérante a alors fait une distinction entre les effets prouvés à l'échelle laboratoire et à l'échelle industrielle, la chambre de recours dans le second cas s'en étant entièrement remis à l'appréciation du juge anglais, selon elle.
2.11 Sans entrer dans la discussion des éléments de preuve retenus par la chambre de recours, qui relève d'un réexamen au fond exclu de la procédure de révision, la Grande Chambre parvient à la conclusion qu'il n'est pas vrai que la requérante a été privée du droit de se défendre sur la totalité des éléments pris en compte par la chambre de recours, y compris ceux soumis à la juridiction anglaise, pour les motifs suivants.
2.12 La Grande Chambre ne trouve pas trace dans les écritures déposées par la requérante lors de la procédure de recours ou dans le procès-verbal de la procédure orale devant la chambre de recours ou dans sa décision, de l'argument soulevé après la communication en annexe de la procédure orale devant la Grande Chambre, selon lequel les tests adressés deux mois avant la procédure orale à titre d'observations de tiers par APOTEX ne correspondaient pas à ceux produits devant la juridiction anglaise.
Ces tests avaient été présentés par APOTEX comme ceux produits devant la juridiction anglaise. En page 2 de ses écritures, sous le point 1.1 dernier paragraphe, APOTEX déclare avoir conduit quatre essais pour les besoins de l'action en justice au Royaume Uni et explique les garanties du déroulement des expériences conduites; il est aussi indiqué que le compte rendu des essais et le diagramme de diffraction X du produit sont annexés comme Annexe 1 et Annexe 2 ("the notice of experiments and the resulting Powder X-ray Diffraction(PXRD)patterns from the Notice of Experiments and the Repeats are attached to this third party observations as Annex 1 and Annex 2 respectively").
2.13 Dans ses écritures en réponse à ces observations, la titulaire du brevet s'est étonnée en page 3 de ses écritures du 24 mars 2009 que APOTEX "se décide environ 2 ans après les avoir produits dans la procédure anglaise...". Puis elle a critiqué ces résultats sur le fond mais n'a pas prétendu qu'il s'agissait d'autres essais que ceux présentés au juge anglais.
2.14 Les explications de la requérante devant la Grande Chambre pour démontrer qu'il ne s'agissait pas des essais produits devant la juridiction anglaise, recoupent ses arguments de fond devant la chambre de recours et n'apportent rien de nouveau quant à la caractérisation de la violation de son droit d'être entendu: notamment, et sans pour cela cautionner sa thèse sur la nature des essais utilisés par la chambre de recours, la requérante n'a pas établi qu'elle avait été dans l'impossibilité de se procurer les essais produits devant la juridiction anglaise pour des raisons de confidentialité comme elle l'a mentionné oralement en réponse aux questions de la Grande Chambre.
2.15 En conclusion, il ressort de façon constante de l'examen qui précède, que la requérante, partie à l'instance devant la juridiction anglaise en qualité de titulaire du brevet, savait deux mois avant la procédure orale devant la chambre de recours, que APOTEX, son adversaire dans l'action en contrefaçon, adressait des essais présentés comme ceux produits devant le juge anglais. Elle n'a pas fait valoir, à ce moment là, que ces essais étaient différents et qu'elle se voyait opposer un refus pour obtenir ceux ou, l'intégralité de ceux, utilisés par le juge anglais, au contraire elle a fait référence à leur production devant le juge anglais. Elle a en revanche discuté ces tests sur le fond.
Par ailleurs la première décision anglaise avait été aussi versée au dossier dès le 3 septembre 2007.
2.16 Dans de telles circonstances, il n'est pas déraisonnable d'attendre de la titulaire du brevet qu'elle utilise tous les moyens à sa disposition pour défendre son brevet, sans les compartimenter entre les différentes instances qui ont à connaitre de la validité du titre. L'attention de la titulaire du brevet a été attirée sur des essais potentiellement dangereux pour le maintien du brevet, puisqu'ils ont été déterminants pour la révocation du brevet par le juge anglais. Il s'agissait d'observations de tiers certes, mais ce tiers, APOTEX était aussi son adversaire dans une action en justice terminée par la révocation de son brevet. A partir de ce moment là il était prévisible que les éléments mis aux débats par APOTEX et présentés comme ceux déjà soumis au juge anglais avec le succès qui était connu, pouvaient être utilisés par les opposantes/requérantes dans la procédure de recours, de même que les décisions qui se sont fondées sur ceux-ci. Cela a été le choix de la requérante de ne pas compléter le dossier de recours avec d'autres pièces examinées par le juge anglais qui, selon elle, pouvaient faire échec aux documents versés par les adversaires en donnant une vision globale des essais partiellement retenus.
2.17 Le fait que la chambre de recours n'ait pas fait état des décisions et des essais dans sa communication préalable ne suffit pas à caractériser une violation du droit d'être entendu. D'une part, comme l'article 17(2) du Règlement de Procédure des Chambres de recours le précise la communication ne saurait lier la chambre. Il s'agit d'une opinion provisoire forgée à un moment donné sur laquelle la chambre peut revenir si les arguments développés, notamment en réponse à cette communication, ont fait évoluer le débat. En l'espèce il ne s'agissait que d'une liste de documents numérotés, envoyée avant le dépôt des observations d'APOTEX, pour faciliter la préparation de la procédure orale sans précision aucune de l'orientation de pensée de la chambre.
2.18 Enfin, s'agissant d'une procédure inter partes, il est clair que le cadre du débat est également défini par les écritures des parties. Dès lors que les essais avaient été mis aux débats par le tiers ils présentaient un danger potentiel pour la titulaire du brevet; il devenait normalement prévisible qu'ils pouvaient être utilisés contre elle, la décision anglaise figurant déjà au dossier.
2.19 Il suit de ce qui précède que les critiques s'adressent en réalité à l'appréciation par la chambre de recours de ce qu'elle a estimé être des éléments de preuve. En effet sous couvert d'une violation du droit d'être entendu, il est requis de la Grande Chambre d'exercer un contrôle au fond de la décision, en recherchant si les éléments de preuve qu'elle a retenus étaient de nature à être retenus comme tels, et s'ils étaient ou non suffisants, alors que le choix entre les moyens de preuve soumis, et l'appréciation de leur force probante relèvent de l'appréciation souveraine de la chambre de recours: ceci est clairement hors champ de l'action en révision.
3. En conséquence de tout ce qui précède, la requête en révision doit être rejetée comme manifestement non fondée.
DISPOSITIF
Par ces motifs, il est statué comme suit :
La requête en révision est rejetée comme manifestement non fondée.