T 0929/99 (Email/ST-GOBAIN) of 19.1.2001

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2001:T092999.20010119
Date de la décision : 19 Janvier 2001
Numéro de l'affaire : T 0929/99
Numéro de la demande : 95402024.4
Classe de la CIB : C03C 8/22
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Titre de la demande : Composition d'émail pour substrat en verre
Nom du demandeur : SAINT-GOBAIN GLASS FRANCE
Nom de l'opposant : -
Chambre : 3.3.05
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 84
Mot-clé : Manque de clarté d'une caractéristique essentielle de la revendication 1 - Méthode de mesure non divulguée dans la demande
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. La demande de brevet européen n 95 402 024.4 (n de publication 0 700 878) a été rejetée par décision de la Division d'examen pour manque de clarté. Cette décision était basée sur les revendications modifiées déposées le 25. juillet 1997. La revendication 1 a le libellé suivant :

"1. Composition d'émail pour substrat en verre comprenant au moins une fritte de base et une fritte additionnelle caractérisée en ce que la fritte additionnelle présente un point de fusion supérieur à 750 C et une densité inférieure à celle de la fritte de base."

II. Dans sa décision la Division d'examen a considéré que la revendication 1 ne satisfaisait pas aux dispositions de l'article 84 CBE car l'expression "point de fusion" utilisée pour une fritte de verre manquait de clarté. Le document D3, Porcelain Enamels, Andrew I. Andrews, 2ième édition, 1961, pages 414-415, mentionnait des plages de températures de fusion très larges mais ne fournissait pas la définition recherchée du point de fusion.

III. La requérante a formé un recours contre cette décision. Elle a soumis deux déclarations du professeur Boch le 27. août 1999 et le 31 mai 2000 (ci-après D4 et D5 respectivement) ainsi que des revendications modifiées, à titre de requête subsidiaire. Dans une notification la requérante a été informée de l'opinion provisoire de la Chambre au sujet de la clarté de l'expression "point de fusion" et a été priée de fournir des informations complémentaires concernant la méthode utilisée pour déterminer le point de fusion des frittes de verre. Le 11. janvier 2001 la requérante a soumis trois nouveaux jeux de revendications modifiées en remplacement de tous les jeux de revendications antérieurs. La revendication 1 selon la requête principale diffère de la revendication 1 du 25 juillet 1997 par l'incorporation du membre de phrase "pour vitrage automobile ou bâtiment, destiné à être bombé et/ou trempé et/ou feuilleté," entre les mots "verre" et "comprenant" dans le préambule de la revendication.

La revendication 1 selon la requête subsidiaire 1 diffère de la revendication 1 selon la requête principale par l'addition de la caractéristique "et comprenant SiO2 comme principal oxyde formateur et PbO, Bi2O3 ou ZnO comme principal oxyde intermédiaire" à la fin de la revendication.

La revendication 1 selon la requête subsidiaire 2 a le libellé suivant :

"1. Procédé d'émaillage de substrats en verre pour vitrage automobile ou bâtiment, destiné à être bombé et/ou trempé et/ou feuilleté, dans lequel on applique sur ledit substrat une composition d'émail comprenant au moins une fritte de base et une fritte additionnelle présentant un point de fusion supérieur à 750 C, une densité inférieure à celle de la fritte de base et comprenant SiO2 comme principal oxyde formateur et PbO, Bi2O3 ou ZnO comme principal oxyde intermédiaire, et à cuire l'émail."

Une procédure orale a eu lieu le 19 janvier 2001. Pendant la procédure orale la requérante s'est appuyée sur les documents suivants pour étayer son argumentation :

D6 : Déclaration de Monsieur Dagès du 16.01.2001

A1 : "Les verres et l'état vitreux", J. Zarzycki, 1982, page 219

A2 : Norme NF, B 30-010, novembre 1967

A3 : Méthode de détermination de la porosité d'un émail à l'aide d'un feutre

A4 : Méthode de détermination de la porosité d'un émail par colorimétrie

D7 : FR-A-2 618 387

D8 : US-A-5 141 798

D9 : EP-A-0 598 199

D10 : US-A-4 407 847

La Chambre a fait référence aux méthodes de détermination du point de fusion d'un émail indiquées aux pages 455 à 467 de l'ouvrage D3 : ci-après D3a.

IV. La requérante a fait valoir par écrit que l'expression "point de fusion" était couramment employée et comprise sans ambiguïté par les hommes du métier dans le domaine des émaux, comme le prouvait la déclaration D4. A la lecture de D4 il apparaissait que le point de fusion pouvait être déterminé de façon simple et précise à l'aide d'un stylo à encre que l'on passait à la surface de l'émail refroidi, la température de fusion étant la température à laquelle on observait la disparition des effets de capillarité. Ce test simple était couramment utilisé dans le domaine des émaux et faisait partie des connaissances de l'homme du métier. Ce dernier pouvait toujours déterminer le point de fusion de la fritte en mesurant la température de ramollissement et en y ajoutant 100 C comme prévu dans la description. Selon la requérante, il n'existait pas de différence entre la définition du point de fusion indiquée dans les déclarations D4/D5 et celle indiquée à la page 4 de la description.

V. Lors de la procédure orale la requérante a présenté les arguments suivants :

La température de fusion de la fritte était sa température de cuisson et celle-ci était identique au point de ramollissement du verre aussi appelé point de Littleton, ou en anglais "softening point", comme il ressortait de la déclaration D6. Le comblement de la porosité ouverte à cette température correspondait à un nappage de l'émail sur le substrat en verre et à l'accrochage véritable audit substrat. Dans le cas des frittes de verre pour émaux la température de ramollissement se situait environ 100 C au-dessus de la température de ramollissement dilatométrique (voir A1 et A2). Il découlait de D7 que la température de début d'accrochage correspondait au comblement de la porosité ouverte. D8 confirmait que le point de fusion était identique à la température de ramollissement et D9 montrait que la fusion de la fritte équivalait à l'adhérence de l'émail à la surface du verre. D10 établissait le lien entre la température de fusion, l'adhérence au support et l'absence de porosité ouverte. La définition indiquée à la page 4 de la description était erronée. Il était implicite pour l'homme du métier que la température de fusion était supérieure de plus de 100 C à la température de ramollissement dilatométrique et non à la température de ramollissement.

A3 et A4 précisaient les méthodes utilisables pour déterminer la température de fusion d'une fritte de verre. Ces méthodes étaient bien connues de l'homme du métier et couramment utilisés dans le domaine des émaux pour vitrage. Dans l'exemple 1 de la demande la température de fusion de 850 C avait été déterminée par la méthode décrite dans A3 en utilisant un substrat en verre float et une épaisseur d'émail d'environ 30 µm, ou en tout cas comprise entre 10 et 50 µm, et le substrat revêtu avait été observé après 3 minutes de cuisson puis refroidissement. En réponse à une remarque de la Chambre concernant la viscosité d'un verre float à une température de 850 C, la requérante a souligné que dans le cas d'une fritte additionnelle ayant un point de fusion de 850 C un verre float n'était pas utilisé comme substrat dans le test mais un verre réfractaire à point de ramollissement plus élevé. La différence de composition n'avait pas d'influence sur l'accrochage puisque l'accrochage correspondait à la perte de porosité ouverte et ce phénomène physique était indépendant du substrat. Le test selon A3 conduisait à une température identique à celle du point de ramollissement dont la détermination était exposée dans la norme C338-93 (ci-après D11) fournie avec la lettre du 31 mai 2000. Cette identité n'avait pas été vérifiée expérimentalement. Une durée de cuisson de 3 minutes était suffisante pour obtenir la viscosité du point de ramollissement compte tenu des faibles épaisseurs d'émail sur le substrat. Cette durée était aussi celle utilisée industriellement pour le bombage ou la transformation du vitrage et serait donc utilisée systématiquement par les hommes du métier. Les méthodes de détermination du point de fusion divulguées dans D3a conduisaient certes à des températures de fusion très variables pour le même verre, mais D3a était un ouvrage relativement ancien et les méthodes décrites ne correspondaient pas aux tests usuels utilisés dans la technologie plus récente de dépôt d'émail sur verre. L'épaisseur d'émail utilisée dans le dernier test ("Trial Firing Test") était probablement importante. Il ne pouvait y avoir une telle différence de température dans le cas des émaux sur substrat en verre si on utilisait une épaisseur de 20 ou 30 µm et un temps de cuisson de 2 à 4 minutes. Les épaisseurs et les temps de cuisson utilisés industriellement variaient dans des domaines très restreints compte tenu des normes imposées par les constructeurs d'automobiles. Il en était de même dans le cas des tests pour la détermination des points de fusion. Les conditions utilisées dans les tests selon A3 ou A4 faisaient partie des connaissances générales de l'homme du métier.

Même si la Chambre n'acceptait pas le fait que le point de fusion était identique à la température de ramollissement, il n'y aurait cependant pas manque de clarté. En effet, l'homme du métier savait déterminer la température de disparition de la porosité par des méthodes usuelles et pouvait reconnaître que celle-ci était équivalente à la définition indiquée à la page 4 de la description au vu de D7 et sur la base de considérations physiques simples, comme le prouvait la déclaration D6.

VI. La requérante a requis l'annulation de la décision de la Division d'examen et la délivrance d'un brevet sur la base du jeu de revendications selon la requête principale déposée le 11 janvier 2001, et, à titre subsidiaire, sur la base de l'un des jeux de revendications selon les requêtes subsidiaires 1 et 2 soumises à la même date.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2. La revendication 1 de toutes les requêtes contient la caractéristique essentielle selon laquelle la fritte additionnelle présente un point de fusion supérieur à 750 C. Cette fritte additionnelle étant un verre, elle n'a pas un "point de fusion" bien défini mais passe de l'état solide à l'état liquide par un processus de transformation couvrant un domaine relativement large de températures. La question se pose donc de savoir si cette caractéristique essentielle satisfait à la condition de clarté requise par l'article 84 CBE.

2.1. La définition suivante est indiquée à la page 4, lignes 24-27, de la description : "Par "point de fusion", on entend la température à partir de laquelle la fritte commence véritablement à accrocher au verre, cette température étant très supérieure à la température de ramollissement de la fritte, généralement supérieure de plus de 100 C à la température de ramollissement de la fritte". La Chambre observe que cette définition est elle-même formulée à l'aide de notions vagues qui nécessiteraient elles-même une définition. Les termes "commence véritablement à accrocher" au verre ont un caractère vague en l'absence de données sur la méthode ou les moyens permettant de déterminer sans ambiguïté quand la fritte "commence véritablement à accrocher au verre". La description ne contient aucune information à ce sujet.

2.2. A1 divulgue un certain nombre de points fixes sur la courbe de variation de la viscosité d'un verre en fonction de la température, en particulier la "température de fusion" pour une viscosité d'environ 102 poises. Cette viscosité correspond à celle d'un verre liquide au cours des opérations de fusion et d'affinage. D'après la requérante le "point de fusion" tel que défini dans la demande n'est pas la température correspondant à ladite viscosité mais a une signification différente dans le domaine technique des émaux.

Au cours de la procédure d'examen la requérante s'est référé à D3 pour la définition du point de fusion d'un émail. Dans le chapitre concernant la cuisson des émaux, les termes anglais "firing temperature" et "fusion temperature" sont employés indifféremment pour désigner un traitement de cuisson de l'émail déposé sur le substrat, ledit traitement étant destiné à fondre l'émail pour former une couche de verre continue et lisse (voir page 414, lignes 1-11). D'après les déclarations D4 et D5, qui ont été établies par un expert externe et fournies au cours de la procédure de recours, les notions de "point de fusion" ou de "fusibilité", ou de "point de cuisson" sont synonymes, en langage courant, du traitement thermique visant à produire un émail exempt de porosité ouverte, donc étanche et bien recouvrant. Le point de fusion de la fritte additionnelle est donc d'après D4/D5 la température à laquelle il convient de la porter ou de la "cuire" aux fins d'obtenir un dépôt exempt de porosité ouverte et bien recouvrant. La Chambre constate que les définitions indiquées dans D4 et D5 sont en accord avec les informations données dans D3 ; cependant la question se pose de savoir, d'une part, si cette définition est équivalente à celle indiquée dans la description et, d'autre part, par quelle méthode le point de fusion de l'émail a été déterminé dans la demande.

2.3. A la procédure orale, la requérante a fait valoir (i) que la température de fusion ou cuisson de la fritte, c'est-à-dire la température permettant le comblement de la porosité ouverte selon D4/D5, correspondait à la température à partir de laquelle la fritte "commence véritablement à accrocher" au verre et (ii) que cette température était identique à la température de ramollissement du verre aussi dénommée température ou point de Littleton. Elle s'est appuyée sur D6, A1, A2 et D7 à D10.

2.4. La Chambre ne peut accepter l'argument selon lequel la température de fusion serait identique à la température de ramollissement pour les raisons suivantes :

L'argument selon lequel le "point de fusion" de la fritte additionnelle serait la température de ramollissement, c'est-à-dire un point fixe bien connu correspondant à une viscosité de 107,6 pour des verres ayant une masse volumique voisine de 2,5 g/cm3 (voir A1 et A2, page 3), est non seulement en totale contradiction avec les arguments présentés par un premier mandataire dans la lettre du 25 juillet 1997 en réponse à la notification de la Division d'examen, mais également en contradiction avec les arguments présentés environ 3 ans plus tard par un second mandataire (lettre du 31 mai 2000) en réponse à la notification de la Chambre. Cet argument est également en contradiction avec la définition indiquée dans la description, page 4, lignes 24-27, où il est précisé que la température à partir de laquelle la fritte commence véritablement à accrocher au verre est "très supérieure à la température de ramollissement de la fritte, généralement supérieure de plus de 100 C à la température de ramollissement de la fritte". La requérante a indiqué que la description était erronée et qu'il ne s'agissait pas aux lignes 26 et 27 de la température de ramollissement mais de la "température de ramollissement dilatométrique". Ce point fixe indiqué sur la courbe viscosité/température de A1 est dénommé "température de déformation" dans A2. Cette température correspond, d'après A2, à une viscosité de 1011 à 1012 poises et est déterminée par le tracé de la courbe dilatométrique. Cependant la Chambre n'est pas persuadée que l'homme du métier considérerait à la lecture de la description que la définition indiquée à la page 4 est erronée. En effet, la requérante a elle-même basé toute son argumentation écrite devant la Division d'examen et la Chambre de recours sur cette définition qu'elle a considérée comme correcte. La demande de brevet ne contient aucune information suggérant que la définition de la page 4 est incorrecte. Les deux exemples de la demande indiquent un point de fusion de la fritte additionnelle de 850 C, cependant étant donné qu'ils n'indiquent ni la composition complète de la fritte additionnelle (les oxydes intermédiaires ou modificateurs présents en quantité de 31% en poids ne sont pas définis), ni la méthode de mesure du point de fusion, il n'est pas possible sur la base de ces données de vérifier si la définition donnée à la page 4 est entachée d'erreur ou non.

L'argument de la requérante est non seulement en désaccord avec ses arguments écrits antérieurs et avec la description mais, de plus, il n'est reflété ni dans des documents représentant les connaissances générales de l'homme du métier, ni dans les deux déclarations D4 et D5 de l'expert externe à la société requérante, ni dans les autres publications soumises à la procédure orale.

Dans les documents D7, D9 et D10 qui concernent des émaux pour vitrages, il est question soit de la température de fusion de l'émail (D7, page 8 ; D10, col. 5, ligne 64 à col. 6, ligne 11) soit de la cuisson de l'émail à une certaine température jusqu'à sa fusion (D9, page 2, lignes 14 et 43-47, revendication 6). Il n'est toutefois pas indiqué que cette température est identique à la température de ramollissement du verre de l'émail. Le brevet D8, lui aussi relatif à des émaux pour vitrages, contient la phrase suivante dans l'exemple 1 : "The enamel exhibits a linear coefficient of thermal expansion of 88×10-7 C-1 and a fusion [softening] point of 480 C. The stoving temperature should be between 630 and 680 C". Comme souligné par la requérante l'expression anglaise "softening point" correspond en français à la température de ramollissement ou, en langue allemande, à "Erweichungspunkt" ou "Littletonpunkt" (voir également A2, page 3). Cependant, le seul fait que le terme "softening" apparaisse entre crochets à coté du mot "fusion" dans l'exemple 1 ne suffit pas pour conclure que le point de fusion d'un émail est systématiquement identique à la température de ramollissement. Dans ce contexte il doit être pris en considération que ce brevet américain a comme priorité une demande de brevet européen en allemand et qu'il n'est pas exclu que les mots "fusion" et "[softening] point" aient été proposés comme possible traduction d'un même mot allemand. La Chambre observe d'ailleurs que, dans la demande de brevet européen mentionnée comme priorité, il n'existe aucune ambiguïté puisque la température de 480 C est la température de ramollissement de l'émail et l'intervalle 630-680 C la température de cuisson. La Chambre note aussi que l'exemple 1 de D8 donne la composition complète de la fritte et que la requérante aurait donc pu apporter la preuve de l'identité de températures en mesurant, d'une part, la température de ramollissement par la norme connue (D11) et, d'autre part, la température de fusion de cette fritte par le test selon A3. Aucune preuve n'a cependant été fournie.

La déclaration D6 issue d'un employé de la requérante et présentée seulement lors de la procédure orale, suggère par l'intermédiaire d'une notion elle-même peu précise, à savoir le "nappage" du substrat, que la température de fusion de l'émail serait sensiblement la température de ramollissement. Selon D6 "le comblement de la porosité correspond également à un nappage de l'émail sur le substrat en verre et à l'accrochage véritable au substrat en verre" et "le nappage s'effectue sensiblement à la température correspondant au point de Littleton". Ni la signification du terme "sensiblement" ni le phénomène de "nappage" ne sont définis dans D6. En outre, d'après D6, le point de cuisson ou fusion d'une fritte d'émail est mesuré par détermination de la perte de porosité par observation de la couche émaillée. La température de ramollissement d'un verre est cependant déterminé par un test standardisé dans lequel on mesure l'allongement d'un fil de verre sous son propre poids sous des conditions spécifiques de montée en température : voir la norme NF B 30-102 citée à la page 3 de A2 ou la norme D11. Ces deux méthodes de mesure effectuées l'une sur un substrat recouvert par une couche de fritte, l'autre sur un fil de verre sont donc très différentes. La requérante a reconnu à la procédure orale ne pas avoir mesuré le point de ramollissement du verre des frittes additionnelles par la méthode standardisée ni avoir vérifié expérimentalement si les deux méthodes conduisent à la même température. Compte tenu que les méthodes connues de détermination du point de fusion d'un émail indiquées dans D3a conduisent à des valeurs très différentes variant dans un domaine très large de températures pour la même composition de verre, la Chambre a de considérables doutes, en l'absence de preuves, que les deux méthodes indiquées ci-dessus conduisent aux mêmes résultats pour un verre donné. De plus, s'il faisait partie des connaissances générales de l'homme du métier que le point de fusion ou cuisson d'un émail est identique à la température de ramollissement du verre, il serait alors surprenant que les déclarations D4 et D5 de l'expert externe ne fassent aucune référence à cette température de ramollissement qui est un point fixe, bien connu de l'homme du métier. Pour les raisons indiquées précédemment, la Chambre n'est pas convaincue au vu de l'ensemble des justificatifs et arguments présentés par la requérante que la température de fusion de l'émail ou de la fritte est identique à la température de ramollissement.

2.5. En ce qui concerne l'argument (i) de la requérante (voir point 2.3), la Chambre observe que le passage de D9 cité par la requérante (page 2, lignes 13-14) divulgue que le verre est cuit pour volatiliser le médium, fondre la fritte et lier l'émail à la surface du verre. Cette phrase n'établit pas l'équivalence entre la température de fusion de la fritte et le commencement d'accrochage au verre puisque la volatilisation du médium et la fusion de la fritte se produisent par exemple à des températures différentes. D'après D7, lorsque la température de fusion de la couche colorée 32a est atteinte, cette couche est suffisamment fondue pour assurer l'adhérence au verre et la fritte s'écoule dans les pores de la couche 32b (voir page 8). Il ressort de D10 que lors de la fusion de la fritte, il y a formation d'une bande opaque qui adhère fortement à la surface du verre (col. 6, 1er paragraphe). Même s'il était considéré en faveur de la requérante que D7 et D10 montrent qu'au cours de l'opération de cuisson ou fusion, l'émail adhère au substrat en verre et la porosité ouverte disparaît, ceci n'établirait pas que la définition de la température de fusion indiquée dans la demande est identique à celle donnée dans D4/D5. En effet, selon la description la température de fusion est celle à partir de laquelle la fritte "commence véritablement à accrocher" au verre. Cette définition fait appel à la notion de commencement d'accrochage qui n'est mentionnée ni dans D6, ni dans D7, D9 et D10. Il n'est également pas fait mention de cette notion imprécise dans les déclarations D4 et D5. L'emploi de ces termes suggère cependant qu'une différence existe entre la température à partir de laquelle l'émail commence à accrocher au verre et celle où l'accrochage est complet. Il n'a pas été contesté par la requérante qu'un dépôt d'émail puisse commencer à adhérer au verre sans être pour cela exempt de porosité ouverte et recouvrant. De plus, l'opération de cuisson ou fusion de l'émail et les phénomènes ayant lieu durant cette opération dépendent non seulement de la température mais aussi de la durée de cuisson comme il ressort de D3 (page 414, avant-dernier paragraphe) ou D3a (voir page 466 ; page 467, fig. 136). D3a montre que, dans le test visant à déterminer la température et le temps de cuisson appropriés d'un émail donné sur un substrat métallique, des températures de cuisson allant de 815 C à 871 C conduisent à des résultats satisfaisants lorsque la durée de cuisson est choisie entre 30 secondes et 3. minutes, les durées les plus courtes s'appliquant aux températures les plus élevées. La température de cuisson ou de fusion peut donc en fait varier dans une certaine plage de températures en fonction du temps de cuisson. Il n'a pas été contesté que cette dépendance existait également dans le cas d'un émail sur vitrage. Dans ces circonstances, en l'absence de données plus précises dans la description, notamment sur la méthode utilisée pour déterminer le point de fusion, la Chambre n'est pas convaincue que la température à partir de laquelle la fritte commence véritablement à accrocher au verre est identique à la température à laquelle le dépôt est exempt de porosité ouverte et bien recouvrant.

2.6. Selon la requérante, il était bien connu de l'homme du métier de mesurer la température de fusion d'un émail sur vitrage par détermination de la perte de porosité par observation de la couche émaillée, par exemple à l'aide d'un feutre ou par colorimétrie comme indiqué dans A3 et A4. Cependant la requérante n'a pu cité aucune publication faisant référence à l'utilisation de ce test dans le domaine des émaux. Elle n'a également apporté aucune preuve montrant que les conditions du test étaient bien définies, ne variaient ni en fonction du produit à fabriquer ni d'un fabricant de vitrages à l'autre, et étaient bien connues de l'homme du métier. En réponse à une question de la Chambre sur les conditions précises du test utilisé dans les exemples pour mesurer le point de fusion de 850 C de la fritte additionnelle, la requérante a indiqué à la procédure orale qu'une couche d'émail ayant une épaisseur d'environ 30 µm, et en tout cas comprise entre 10 µm et 50. µm, était déposée sur un substrat en verre float, et que l'émail était cuit pendant 3 minutes. Cette durée de cuisson de 3 minutes étant, d'après la requérante, celle utilisée industriellement pour le bombage ou la transformation du vitrage, elle était systématiquement utilisée par l'homme du métier. Toutefois, après que la Chambre ait mentionné le point de ramollissement d'un verre float commercial, la requérante a indiqué que dans le cas d'une température de fusion de 850 C le substrat était un verre réfractaire à point de ramollissement plus élevé mais que la composition différente du verre n'avait aucune influence sur les résultats du test. Il ressort toutefois du dernier paragraphe de D6 qu'un verre silico-sodo-calcique obtenu par le procédé float et n'ayant pas subi de traitement particulier est utilisé pour le test. Par conséquent les arguments de la requérante sont discordants sur ce point. Après une remarque de la Chambre concernant le temps de cuisson de 2-20 minutes indiqué dans D8 (voir col. 2, lignes 46-48), la requérante a avancé que le temps de cuisson de 3 minutes indiqué dans A3 pouvait en fait varier de 2 à 4 minutes. Au cours de la procédure orale elle a fait aussi valoir que les épaisseurs de couche d'émail et les temps de cuisson utilisés industriellement variaient dans des domaines très restreints compte tenu des normes imposées par les constructeurs d'automobiles et qu'il en était de même des tests pour la détermination des points de cuisson. La Chambre observe cependant que la revendication 1 n'est pas limitée aux vitrages pour automobiles, et que les caractéristiques des vitrages peuvent être très différentes suivant qu'il s'agit de vitrages pour le bâtiment ou de vitrages pour l'industrie automobile. En ce qui concerne les temps de cuisson ou épaisseurs de couche d'émail utilisés pour les émaux sur vitrage, il est à noter que D8 divulgue des épaisseurs de 10 à 20 µm avant cuisson et une durée de cuisson de 2 à 20 minutes à une température de 580 C à 750 C, et précise que les conditions de cuisson dépendent du type et de l'épaisseur du substrat en verre, cette dernière pouvant varier de 2 à 8 mm (voir col. 2, lignes 38-48). Dans D9, le temps de cuisson de l'émail peut varier de 1 à 20 minutes, le domaine le plus préféré étant de 3 à 7 minutes (voir page 3, lignes 17-21). Quant à D7 qui concerne également un émail pour vitrage automobile, il divulgue un temps de cuisson de 10 minutes pour une plaque de verre de 3 mm d'épaisseur (voir page 9, lignes 3 à 5). Il apparaît donc que les temps de cuisson utilisés pour la fabrication de vitrages revêtus d'émail peuvent considérablement varier en fonction du vitrage final désiré. Dans ces circonstances, il apparaît peu vraisemblable que le temps de cuisson indiqué par la requérante pour ledit test était systématiquement et couramment utilisé par les hommes du métier indépendamment du type de vitrage automobile ou bâtiment à fabriquer. De plus, il n'a pas été prouvé que les temps de cuisson de 3 minutes ou 2-4 minutes indiqués par la requérante conduisent, pour une même fritte, à la même température de fusion quelque soit l'épaisseur et le type de verre du substrat. Or, comme déjà mentionné ci-dessus, la température et la durée de cuisson d'un émail sur vitrage dépendent du type et de l'épaisseur du substrat en verre (voir D8, col. 2, lignes 38-48). Pour les raisons indiquées précédemment la Chambre n'est pas convaincue, d'une part, que les tests utilisant un temps de cuisson de 3 minutes (ou 2-4 minutes) conduisent, pour un émail donné, à la même température de fusion quelque soit le type de verre du substrat et l'épaisseur du substrat et, d'autre part, que les conditions indiquées pour ce test étaient bien connues et couramment utilisées par les producteurs de vitrage quelque soit le vitrage final désiré, c'est-à-dire pour tous les types de vitrages destinés soit à l'industrie automobile soit au bâtiment.

2.7. D3a divulgue cinq autres tests pour déterminer le point de fusion d'un émail et compare les résultats obtenus par ces différents tests pour une même composition de fritte. Les cinq tests conduisent à des résultats très différents s'échelonnant entre environ 490 C et 750 C pour un premier émail, entre environ 520 C et 780 C pour un second émail et entre environ 530 C et 820 C pour une troisième composition d'émail. Il est conclu que chacun de ces tests ne peut être utilisé que pour obtenir des valeurs relatives (voir page 457 ; page 465, dernier paragraphe ; pages 466 et 467). La température de fusion obtenue par l'un de ces tests ne pourrait donc avoir de signification qu'en combinaison avec l'indication du test utilisé et des conditions exactes de ce test. Etant donné que ni la revendication 1 ni la demande n'indiquent le test utilisé pour déterminer le point de fusion et, de plus, que les exemples ne divulguent pas la composition complète de la fritte additionnelle, même la prise en considération de ces tests faisant partie des connaissances générales de l'homme du métier ne permettrait pas d'aboutir à la conclusion que la caractéristique essentielle de la revendication 1 est clairement définie.

2.8. Il résulte des considérations précédentes que la revendication 1 selon la requête principale ne satisfait pas à la condition de clarté de l'article 84 CBE.

3. La revendication 1 de chacune des requêtes subsidiaires 1 et 2 contient la même caractéristique essentielle concernant le point de fusion de la fritte additionnelle. Les raisons indiquées précédemment s'appliquent donc de la même façon à ces requêtes. Le fait que les revendications des requêtes subsidiaires précisent le principal oxyde formateur et le principal oxyde intermédiaire de la fritte additionnelle ou que la revendication 1 de la requête subsidiaire 2 concerne un procédé d'émaillage n'a aucune influence sur les considérations précédentes. Par conséquent les requêtes subsidiaires 1 et 2 sont également refusées pour non-conformité de la revendication 1 aux dispositions de l'article 84 CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

Le recours est rejeté.

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