T 0307/99 (Restauration osseuse/IMPLANT INNOVATIONS,INC.) of 20.3.2003

European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2003:T030799.20030320
Date de la décision : 20 Mars 2003
Numéro de l'affaire : T 0307/99
Numéro de la demande : 90420194.4
Classe de la CIB : A61L 27/00
Langue de la procédure : FR
Distribution : C
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Versions : Unpublished
Titre de la demande : Matériau et procédé de restauration d' un défaut osseux par comblement par du tissu osseux
Nom du demandeur : IMPLANT INNOVATIONS,INC.
Nom de l'opposant : U.S. BIOMATERIALS CORPORATION
Chambre : 3.3.02
Sommaire : -
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 56
Mot-clé : Activité inventive - oui : propriété inattendue et non évidente dans la coupe granulométrique sélectionnée
Exergue :

-

Décisions citées :
-
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
-

Exposé des faits et conclusions

I. Le brevet européen n° 0 394 152 a été délivré le 22. juin 1994 sur la base de la demande européenne n° 90 420 194.4.

Le brevet a été délivré avec 6 revendications.

Le libellé de la revendication indépendante 1 s'énonçait :

"1. Matériau bioréactif mis en oeuvre dans le traitement de régénération de tissus osseux pour combler un défaut osseux, se présentant sous forme de granulé mis en place dans le défaut osseux caractérisé en ce que les particules constitutives dudit granulé ont en combinaison la composition suivante (en % poids) :

SiO2 compris entre 40 et 55 %

Na2O compris entre 10 et 32 %

P2O5 compris entre 0 et 12 %

CaO compris entre 10 et 32 %

une granulométrie telle qu'au moins 95 % d'entre elles sont situées dans une coupe granulométrique comprise entre 280-425 µm, des arêtes vives, un profil irrégulier et des microdéfauts de surfaces ou microfissures, et que le granulé provoque une ostéogénèse par ostéostimulation , lesdites particules étant désintégrées de l'intérieur pour opérer une différenciation de cellules précurseurs en ostéoblastes, puis être dissoutes et remplacées rapidement par du tissu osseux."

II. La requérante-opposante a fait opposition à la délivrance de ce brevet européen, demandant sa révocation en application de l'Article 100 a) de la CBE en invoquant l'absence d'activité inventive.

Entre autres, les documents suivants ont été cités au cours des procédures d'opposition et de recours :

(1) EP-A-206726

(15) J. of Oral Réhabilitation (1997), 24, pages 171 à 181

(16A) J. Biomed. Mater. Res. (1998), pages 527 à 533.

III. Par sa décision à l'issue de la procédure orale en date du 17 novembre 1998, la division d'opposition a maintenu le brevet européen sous forme amendée sur la base de la requête auxiliaire correspondant à un jeu de revendications de deuxième utilisation médicale.

Concernant le jeu de revendication de la requête principale, à savoir le jeu de revendications tel que délivré, la division d'opposition était de l'avis que, au vu des résultats de l'étude comparative du document (16A), aucun effet particulier pour la régénération osseuse en général ne pouvait être reconnu pour l'objet revendiqué par rapport au document le plus proche, à savoir la demande européenne (1). Or, l'objet de ce jeux de revendications représentant une sélection par rapport au document (1), la démonstration d'un effet technique inattendu était indispensable pour établir l'existence d'une activité inventive.

Compte tenu des résultats de l'étude comparative publiée dans le document (15) l'objet de la requête auxiliaire, restreinte au comblement de tissu osseux de la mâchoire, a été considéré comme étant inventif.

En effet, cette étude a mis en évidence une formation plus rapide de tissu osseux dans la mâchoire avec les produits selon le brevet attaqué comparée aux résultats obtenus avec un produit selon le document (1).

IV. La requérante-opposante ainsi que la requérante-titulaire ont introduit un recours contre cette décision.

V. Par son courrier en date du 20 février 2003, la requérante-opposante a informé la Chambre du retrait de sa requête de procédure orale et de son intention de ne pas participer à la présente procédure orale.

VI. Une procédure orale devant la Chambre de recours s'est tenue le 20 mars 2003. Au cours de la procédure orale, la requérante-titulaire a produit un jeu unique de trois revendications à titre de requête principale.

Le libellé de la revendication indépendante de ce jeu de revendications est le suivant :

"1. Utilisation de granulés constitués de particules ayant, en combinaison, la composition suivante (en % poids) :

SiO2 compris entre 40 et 55 %

Na2O compris entre 10 et 32 %

P2O5 compris entre 0 et 12 %

CaO compris entre 10 et 32 %,

caractérisée en ce qu'au moins 90% des particules ont une coupe granulométrique comprise entre 300 et 360 µm, comme déterminée par tamisage, avec des arêtes vives, un profil irrégulier et des microdéfauts de surfaces ou microfissures pour formuler un matériau bioréactif adapté à combler un défaut osseux, les granulés provoquant une ostéogenèse par ostéostimulation, les particules constituantes étant désintégrées de l'intérieur pour opérer une différenciation de cellules précurseurs issues des ostéoblastes, puis être dissoutes et remplacées rapidement par du tissu osseux."

VII. La requérante-titulaire a fait valoir par écrit que l'objet revendiqué constituait une invention de sélection par rapport au document (1).

Elle a considéré que l'effet de stimulation osseuse préférentielle observé spécifiquement dans la coupe granulométrique étroite selon la revendication 1 du jeu de revendication de la présente requête par rapport à la large coupe granulométrique divulguée dans le document (1) démontrait que l'objet du brevet en cause impliquait une activité inventive.

VIII. La requérante-opposante a réfuté l'argumentation de la requérante-titulaire.

Elle a soulevé une objection au titre de l'article 123(2) de la CBE à l'encontre de la caractéristique "comme déterminée par tamisage" introduite dans les nouveaux jeux de revendications.

Elle a également considéré que l'objet du brevet contesté n'était pas inventif essentiellement car aucun effet technique particulier n'était obtenu par rapport au document (1) comme cela ressortait des comparaisons entre l'objet du brevet contesté et le produit commercial PerioGlas®, qui, selon la requérante-opposante, correspond au produit selon le document (1).

IX. La requérante-titulaire demande l'annulation de la décision contestée et le maintien du brevet sur la base de l'unique requête présentée pendant la procédure orale.

La requérante-opposante demande l'annulation de la décision attaquée et la révocation du brevet.

Motifs de la décision

1. Les recours sont recevables.

2. Recevabilité de la requête

La Chambre note que cette requête correspond à la traduction française déposée le 20 janvier 2003 du jeu de revendications de la première requête auxiliaire fournie avec le mémoire de recours de la requérante-titulaire le 26 mai 1999.

La seule modification par rapport à ce jeu de revendications consiste, en outre, à avoir introduit l'objet de la revendication dépendante 2 dans la revendication dépendante 1.

De surcroît, cette restriction à une coupe granulométrique comprise entre 300 et 360 µm pour au moins 90% des particules (au lieu des 2/3) a été apportée en réponse à l'objection d'activité inventive soulevée par la requérante-opposante et discutée pendant la procédure orale devant la Chambre de recours.

Dans ces circonstances, la Chambre conclut que cette requête présentée en procédure orale est admissible malgré l'absence de la requérante-opposante car cette dernière connaissait l'objet de la revendication 2 depuis le dépôt du mémoire de recours et pouvait également prévoir la restriction de l'objet des revendications à des revendications dépendantes en réponse à ses objections concernant l'activité inventive.

3. Article 123 CBE

La seule objection soulevée par la requérante-opposante concerne une objection au titre de l'article 123(2) de la CBE à l'encontre de la caractéristique "comme déterminée par tamisage" introduite dans les revendications.

A ce sujet, la Chambre note que la divulgation suivante à la page 5, lignes 2 à 7 de la demande telle que déposée :

"... grâce à la granulométrie des particules très étroite la taille devant être comprise entre 280 et 425 µm, c'est-à-dire que 95 % de la poudre doivent être retenus sur un tamis dont le vide de maille est égal à la limite inférieure préconisée et 95 % de la même poudre doivent passer à travers un tamis dont le vide de maille est égal à la limite supérieure préconisée."

La Chambre conclut de ce passage que la technique de tamisage introduite dans le jeu de revendications considéré comme moyen d'établir la granulométrie est bien divulguée dans la demande telle que déposée et que les exigences de l'article 123(2) CBE sont de ce fait respectées.

Cette modification consistant en outre à restreindre l'objet revendiqué, les conditions de l'article 123(3) de la CBE sont également remplies.

Aucune autre objection au titre de l'article 123(2) et (3) n'a été soulevée et la Chambre ne voit pas de raison d'en soulever.

4. Activité inventive

4.1. Le brevet selon l'unique requête concerne un matériau sous forme de granulé pour procéder au comblement rapide et combler un défaut osseux par formation de tissus osseux (page 2, lignes 3 et 4).

Selon la description du brevet attaqué, l'invention consiste à utiliser des granulés constitués de particules ayant en combinaison la composition suivante (en % poids) :

SiO2 compris entre 40 et 55 %

Na2O compris entre 10 et 32 %

P2O5 compris entre 0 et 12 %

CaO compris entre 10 et 32 %,

caractérisée en ce qu'au moins 90% des particules ont une coupe granulométrique comprise entre 300 et 360 µm, comme déterminée par tamisage, avec des arêtes vives, un profil irrégulier et des microdéfauts de surfaces ou microfissures pour formuler un matériau bioréactif adapté à combler un défaut osseux, les granulés provoquant une ostéogenèse par ostéostimulation, les particules constituantes étant désintégrées de l'intérieur pour opérer une différenciation de cellules précurseurs issues des ostéoblastes, puis être dissoutes et remplacées rapidement par du tissu osseux (page 3, lignes 4 à 15 et 46 à 48, page 5, lignes 2 à 7).

Comme cela a été admis par les parties, le seul exemple du document (1) décrit précisément la même utilisation pour un matériau de même constitution chimique mais ayant une coupe granulométrique plus large, à savoir 90 à 710 µm (page 10, lignes 25 à 29; page 11, table 3, ligne 7; page 13, lignes 25 et 26; page 14, ligne 35 - page 15, ligne 24).

La Chambre considère donc que ce document représente l'état de la technique le plus proche. Cet avis a été partagé par les parties.

4.2. Au vu de cet état de la technique, la requérante-titulaire a maintenu que le problème à résoudre consistait à obtenir un matériau bioréactif utilisable pour le comblement d'un défaut osseux permettant une formation plus rapide de tissus osseux comparée aux résultats obtenus avec un produit selon le document (1).

La requérante-opposante, quant à elle, a soutenu que le problème à résoudre par rapport au document (1) ne consistait pas à produire une amélioration mais simplement à fournir une alternative.

A ce sujet, elle a fait valoir que la description du brevet en cause ne comportait aucun élément montrant une amélioration quelconque de la stimulation osseuse obtenue par l'utilisation selon le brevet contesté par rapport au document (1).

De plus, elle a fourni des études comparant l'efficacité d'un produit selon le brevet contesté avec le produit commercial PerioGlas®, qui d'après elle correspond à un matériau selon (1), à savoir un granulé constitué de particules ayant une coupe granulométrique comprise entre 90 et 710 µm.

En réponse à ces considérations, la requérante-titulaire s'est référé aux essais comparatifs du document (15) fournis au cours de la procédure d'opposition.

Il ressort de ce document qu'il existe, en effet, une stimulation osseuse préférentielle observée dans le cas d'un matériau ayant une coupe granulométrique déterminée par tamisage comprise entre 300 et 355 µm (ie un matériau selon le brevet en cause) comparée à un matériau ayant une coupe granulométrique déterminée par tamisage comprise entre 100 et 710 µm (ie un matériau selon le document (1)) ((15) page 174, colonne de droite, paragraphe 2; page 180, conclusion).

Concernant les essais fournis par la requérante-opposante, la chambre note que cette dernière n'a pas fourni la preuve que le produit PerioGlas® correspond bien à un granulé selon le document (1), c'est à dire un granulé constitué de particules ayant une coupe granulométrique comprise entre 90 et 710 µm comme déterminée par tamisage.

En effet, comme cela a été maintes fois mentionné par la requérante-titulaire, si le document (16A) qui se réfère à ce produit indique bien une coupe granulométrique comprise entre 90 et 710 µm pour le matériau PerioGlas®, il apparaît à la lecture de ce document que cette coupe à été déterminée non pas par tamisage mais par microscopie optique (page 527, résumé, colonne de gauche, lignes 5 et 6). Or, ce même document fait apparaître qu'il existe des écarts de mesure considérables entre les déterminations par microscopie optique et par tamisage. Ainsi, selon ce même document, une coupe granulométrique comprise entre 300 et 360 µm déterminée par tamisage correspond en fait à une coupe granulométrique comprise entre 457,9 et 1312,5 µm (page 531, colonne de gauche, paragraphe 2).

Dans ces circonstances, en l'absence d'élément permettant d'établir sans ambiguïté que le produit PerioGlas® représente bien un matériau selon l'état de la technique le plus proche (1), les essais produits par la requérante-opposante ne peuvent être retenus pour décider de la présence ou de l'absence d'un effet technique particulier à l'intérieur de la coupe particulière revendiquée par le brevet en cause.

En conséquence, au vu des essais fournis par la requérante-titulaire dans le document (15), le problème à résoudre par rapport au document (1) consistait bien à obtenir un matériau bioréactif utilisable pour le comblement d'un défaut osseux permettant une formation plus rapide de tissus osseux comparée aux résultats obtenus avec un produit selon le document (1).

Il est, en outre, plausible, au vu de ces essais, que le problème a été résolu par l'objet de la revendication 1, à savoir par le choix particulier de la coupe granulométrique comprise entre 300 et 360 µm.

4.3. La question qui se pose à présent est donc de savoir si cette solution qui consiste à utiliser un matériau bioréactif présentant une coupe granulométrique étroite comprise entre 300 et 360 µm découlait à l'évidence de l'état de la technique disponible pour l'homme du métier.

L'état de la technique selon le document (1), compare précisément l'efficacité de diverses coupes granulométriques à savoir 90-355 µm, 355-500 µm, 500-710 µm et 90-710 µm.

Il ressort de cette étude que c'est la coupe la large c'est à dire la coupe granulométrique 90-710 µm qui s'avère être la plus efficace et la plus facile d'emploi (page 8, lignes 24 à 32; page 13, lignes 24 à 28; page 14, ligne 35 - page 15, ligne 4).

Il s'ensuit que le choix d'une coupe granulométrique étroite ne saurait être considérée comme évidente puisqu'elle va précisément à l'encontre de l'enseignement de l'état de la technique le plus proche.

La Chambre considère donc qu'il s'agit bien en l'espèce d'une sélection non évidente et que les exigences de l'article 56 de la CBE sont ainsi remplies.

4.4. La requérante-opposante a fait remarquer que l'étude comparative du document (15) était de nature qualitative, qu'elle était basée sur deux sections histologiques et qu'elle ne comportait pas d'analyse statistique.

A ce sujet, la Chambre observe que la requérante-opposante n'a cependant pas contesté l'exactitude des résultats présentés dans cette étude. En outre, c'était à elle qu'appartenait d'apporter des expériences supplémentaires dans le cadre de cette étude afin d'étayer ses doutes éventuels ou de répéter l'étude afin d'en démontrer l'inexactitude.

A propos des considérations de la requérante-opposante en relation avec l'étroitesse de la coupe granulométrique sélectionnée par rapport à la coupe divulguée dans le document (1) et en relation avec la distance de la coupe revendiquée par rapport aux modes de réalisation du document (1), la Chambre fait remarquer que, dans le cadre de l'évaluation de la brevetabilité d'une invention de sélection, ces deux aspects concernent l'appréciation de la nouveauté de l'objet choisi dans l'état de la technique et non l'appréciation de l'activité inventive. Or, la nouveauté n'a jamais été mise en question, ni pendant la phase d'opposition, ni en recours et la Chambre n'a donc pas de raison de développer ce point.

En conséquence de ce qui précède et en l'absence d'autres arguments de la part de la requérante-opposante, la Chambre conclut que l'homme du métier qui se serait proposé de résoudre le problème tel que défini dans l'avant-dernier paragraphe du point 4.2, n'aurait pas pu choisir la coupe granulométrique étroite particulière entre 300 et 360 µm au vu de l'état de la technique disponible.

L'objet de la revendication 1 du jeu de revendications de la requête principale et de ses revendications dépendantes 2 et 3 satisfait donc aux exigences de l'article 56 de la CBE.

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision de la division d'opposition est annulée.

2. Le brevet est maintenu sur la base de l'unique requête présentée pendant la procédure orale.

3. L'affaire est renvoyée à la première instance pour en adapter la description.

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